• Bavardage (L'Aurore littéraire, artistique, sociale 22 août 1912)

    Bavardage (L'Aurore littéraire, artistique, sociale 22 août 1912) Bavardage 

        On vient de rendre la liberté à un excellent père de famille qui, la tête troublée par les stupidités mystiques de l’antoinisme, a tué son enfant en lui refusant tous soins médicaux et en mettant sa guérison entre les mains de Dieu.
        Qu’il soit fou, cela ne fait doute pour personne. Mais quand on déclare officiellement qu’il n’est pas dangereux et qu’on doit le rendre à la société, sans plus s’en préoccuper, j’estime que peut-être on va un peu loin dans la voie de l’optimisme.
        A beaucoup il paraitra que d’avoir déjà causé la mort d’un être humain n’est pas un gage parfait pour la sécurité d’autrui.
        Cet homme – qui est de très bonne foi, je n’en disconviens pas – tuera évidemment sa femme avec la même foi, il fera des prosélytes, il multipliera le nombre des antoinistes et répandra sa doctrine idiote et éminemment périlleuse.
        Je voudrais voir la tête de ses libérateurs quand il en sera à son second cadavre.
        En fait, le théoricien de la prière est plus dangereux qu’un véritable conseiller de meurtre ; et, s’il rôdait autour de quelque membre de ma famille, je m’en défierais comme de la peste. Car rien n’est plus contagieux que le mysticisme, gui détraque les cerveaux et obscurcit les consciences.
        Quelquefois l’on rencontre encore, dans les campagnes, des paysannes qui brûlent une pauvre fille comme sorcière. L’antoinisme est une école de superstition qui peut mener fort loin.
        Est-ce à dire qu’a fallait punir cet inconscient ? Non pas. Le mysticisme est une maladie qui peut se soigner et se guérir. Nous imitons un peu trop les antoinistes en laissant ces déments libres de faire le mal, et en comptant sur le hasard. Il fallait demander à la science délivrer ce cerveau de ses hallucinations morbides.
        On ne l’a pas fait, on a eu tort. On le verra bien.
                                                       JULES LERMINA.
     

    L’Aurore littéraire, artistique, sociale, 22 août 1912


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