Temple Antoiniste d'Écaussinnes (Ecaussinnes d'antan)
À droite du temple, le domicile de frère Émile Duret, fils de Louis Duret, premier desservant du temple
Temple Antoiniste d'Écaussinnes (avant 1922)
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Marguerite Leysens (1905-1971)
et son époux Fernand Druet (1903-1971)
la maison du desservant est au numéro 8, à droite du temple
Libération du quartier Belle-Tête (Écaussinnes)
Libération du quartier Belle-Tête (Écaussinnes)
en 1945 (avec le temple en arrière-plan)
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Une religion étrange née du spiritisme (Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 19 mars 1928)(numerique.banq.qc.ca)
UNE RELIGION ETRANGE QUI EST NEE
D'UNE EXPERIENCE DE SPIRITISME
L'Antoinisme serait le résultat d'une révélation faite à
un mineur, "le père Antoine", sur la réincarnation de son fils.
NOMBREUX ADEPTES
On n'a pas encore proclamé, par voie de concours, le paysage le plus triste au monde. Il parait qu'on pourrait choisir la pointe du Raz au temps de l'équinoxe, ou bien Whitechapel un jour de brume, ou certaines landes de notre plateau de Millevaches... Moi, je voterais pour un coin de la banlieue de Liège, où se trouve Jemeppe-sur-Meuse, la petite Rome de la religion "antoiniste".
Les lieux où souffle l'Esprit ne sont pas, d'habitude, les lieux gais, mais celui-ci, qu'une révélation a, dit-on, favorisé, semble tout à fait en deuil. La boue y est à peine plus noire que les maisons basses, dont les briques ont le ton de la suie, et où les boutiques cachent leurs étalages dans de pauvres fenêtres bornes. Le ciel pèse sur des amas de fumées à peine plus opaques que lui. Toutes les enseignes de la ville sont en blanc et noir, funéraires... et la première qu'on lit au sortir de la petite gare offre ces mots : "Meubles et cercueils en tout genre..."
Jemeppe-sur-Meuse n'est qu'un alvéole dans la grande ruche du pays noire dans la grande ruche du minier. Les amateurs d'artificiel peuvent s'y plaire, car ici l'homme a tout fabriqué, jusqu'aux montagnes. En d'autres pays de plaine, les côtes de détritus, issus du charbonnage, ne font guère plus d'illusion que des taupinières. Ici, ils imitent à merveille une chaîne de volcans. La pluie a raviné ces "crassiers", la géologie les a tassés et modelés selon ses lois ; on y voit des failles, des strates, des couloirs d'avalanches. Une herbe jaunâtre les colore, quelques arbres ont poussé dessus, et une erreur de perspective les unit à quelques collines véritables qui se trouvent là sur la rive droite de la Meuse, pour en former un système gigantesque.
Sept collines, peut-être ? En tout cas voici un faubourg dans ce faubourg, un hameau dans ce grand village, le quartier Bois-de-Mont. Tous les indigènes vous indiqueront le temple antoiniste, avec sympathie ou avec fierté. On ne le trouverait pas tout seul dans ces petites rues désertes, où quelques épiciers arborent simplement des cartes postales aux effigies sacrées.
Pas de boutiques de plein vent, aucun attirail de pèlerinage : l'antoinisme est une religion austère. Mais le vagabond en casquette, aux yeux pâles, qui traine sur le trottoir, vous dis "La Mère : elle habite ici devant !"
C'est une petite communauté, à un coin de rues, cernant une chapelle modeste à deux entrées. On pourrait croire à un couvent si le clocher portait une croix, mais il n'y a plus de croix, à peine une girouette.
Vous voici dans le vestibule. Il est d'une propreté belge. On dirait d'un couloir d'école : des espèces de tableaux d'honneur, des préceptes et avis sous vitrine, la liste des temples antoinistes dispersés par le monde : il y en a plus de cent du Canada à Monaco. Justement, dans un coin, une petite maquette en carton : la réduction du second temple qu'on élève à Paris, rue du Pré-Saint-Gervais. L'adepte de service est un jeune homme discret, propret, moustache noire, soutanelle impeccable. Il parle à mi-voix, il joint les mains. Il vous introduit dans la chapelle bien cirée, où deux tribunes superposées attendent, l'une, le lecteur de l'enseignement du Père Antoine, l'autre, la Mère, quand, les mains chargées de fluides, elle procède à l'"opération"...
Deux icônes : l'emblème de l'antoinisme, un arbre en noir peinturluré sur verre dépoli : l'Arbre de la Science la Vue du Mal. Car l'essentiel de la doctrine enseigne que le mal ni la matière ne sont réels. Il suffit de s'en persuader pour être guéri des maux du corps et de l'esprit, et se lancer dans un cycle d'évolutions spirituelles, à la suite du Père, dont voici le portrait. Son image ne préside aux temples que depuis trois ans, bien qu'il ait été désincarné en 1912, le 25 juin, à l'âge de 65 ans, ce qui est jeune pour un guérisseur. Mistress Eddy, qui fonda en Amérique la "Christian Science", devint, elle, nonagénaire. Mais quoi, le Père Antoine, ancien mineur, ancien concierge aux tôleries, survit assez : il a la barbe et cheveu blanc comme feu le zouave Jacob, la prestance d'un moujik vénérable, l'œil flambant, le geste bénisseur. Son portrait est un agrandissement photographique au fusain, à vingt-quatre franc quatre-vingt- quinze, et dans un coin, l'artiste a signé de son paraphe superbe. A l'entrée de la chapelle, là où l'on attend bénitier, une vasque et un robinet de cuivre avec gobelet. L'inscription spécifie que la source n'est là que pour désaltérer les fidèles. Jemeppe n'est point Lourdes et l'eau miraculeuse a été abandonnée par l'antoinisme dès l'an 1901, époque où les médecins du lieu firent condamner M. Antoine pour usurpation de leur art, magnétisme incongru et concurrence fluidique.
L'antoinisme est une religion en train de s'épurer sans cesse. A l'origine, il était spirite. Un adepte m'a appris que tel saint Jean-Baptiste annonçant Jésus, Allan Kardec avait été l'avant-coureur du Père Antoine. Aujourd'hui, il suffit de croire aux fluides. Ils sont excellents, surtout pour guérir les aphtes de la bouche. La foi les attire seule, et à leur tour ils nourrissent la foi, telle la grâce suffisante des jansénistes. Il y a en Belgique 300,000 personnes accessibles aux fluides et qui ont signé une pétition pour faire reconnaitre l'antoinisme par l'Etat. A Paris, on compte quatre ou cinq lieux du culte ; et vous en trouverez dans toutes les villes où le travail est dur, où la maladie abonde, à Saint- Etienne ou à Vichy. A Tours aussi et à Lyon, parbleu, qu'on s'attendait à voir en cette affaire, car Lyon est la grande ville des hérésies et Tours la capitale française du spiritisme (le saviez-vous ?) Une dure hiérarchie et centralisation pèsent sur l'antoinisme. J'en ai vu les statuts, ils sont draconiens et tout adepte, gérant d'un temple, peut être remercié après un trimestre de préavis. La forme des églises, l'heure des offices obéissent à un règlement unique, pour que le fluide opère plus aisément. Comme en T. S. F, il faut de l'exactitude à émettre et à recevoir. Les rites, mariage, baptême, sont prévus à merveille. Meurt-on, on vous enterre sous un drap vert, à la fosse commune. Enfin le costume des antoinistes initiés a été ordonné par une révélation spéciale : les femmes, sortes de novices en deuil, ont droit à un bonnet ruche de 22 centimètres et des manches [mot illisible] de 70. Les hommes ont un chapeau noir, une "buse" solennelle, fort rare dans les magasins des gentils.
Mais pour tout cela, il faut une volonté, une régente, nous y voici... La Mère, à qui son mari en mourant a transmis le don des fluides et l'autorité, vit à Jemeppe. Elle a soixante-dix-sept ans. C'est cette petite vieille vêtue de noir qui glisse dans le corridor et rejoint dans sa cuisine d'autres adeptes préposées au fricot. Sa figure maigre, ses yeux doux et puissants, on les retrouve sur toutes les cartes postales. Après elle, que deviendra l'antoinisme ? Il n'y a plus d'héritier direct. Les schismes, les querelles, les conciles, la théologie vont-ils diviser cette heureuse religion ?
Mais ne comptez pas qu'elle s'éteigne si vite. Le ciel pèse plus bas que jamais sur Jemeppe. Le soir tombe. Des coulées de hauts fourneaux flambent par instants sous les nuages et dans le silence accablé de ce faubourg lugubre, deux petites filles en haillons cabotent sur le trottoir : ce sont deux manœuvres de mine, la face barbouillée de charbon, une loque sur la tête et le dos courbé sous des sacs, comme porteuses de la misère humaine.
Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 19 mars 1928 (source : numerique.banq.qc.ca)
Tribulations d'une apprentie méditante
Si l’on me demandait quelle est ma religion, je serais bien embarrassée ! Je ne suis pas catholique (pas même baptisée), ni athée. J’ai été élevée par une mère antoiniste pratiquante (il s’agit d’un enseignement moral, révélé par le père Louis Antoine, ouvrier belge, et connaissant un rayonnement finalement peu étendu). Mais même si cet enseignement m’a beaucoup apporté, que j’ai été pratiquante et même porté la robe, je ne me définirais plus comme antoiniste aujourd’hui.
En réalité c’est l’enseignement d’Arnaud Desjardins qui nourrit mes interrogations et ma démarche spirituelle. [...]
Quand tout ce qui constituait le quotidien rassurant et indestructible semble s’être effondré, il ne reste plus que soi, et ce soi lui-même qu’est-il ? Donc il ne reste plus qu’à se laisser guider par ce qui se présente et dire « oui », y compris au fait qu’il n’y ait presque plus rien… « Oui » quand on pleure toutes les larmes de son cœur, « oui » à la peur, « oui » à la culpabilité ! Voyage initiatique s’il en est ! Mais en retour une énergie incroyable m’a été donnée, et des portes se sont peu à peu ouvertes les unes après les autres sans même que je les pousse (Dans l’enseignement antoiniste un des 10 principes, le neuvième, dit (c’est Dieu qui parle) : « cultivez vous, vous vous rappellerez le passé, vous aurez le souvenir qu’il vous a été dit « frappez, je vous ouvrirai, je suis dans le connais-toi. Tout ce qui vous est utile, pour le présent comme pour l’avenir, vous sera donné par surcroît ») C’est le sentiment que j’ai eu, je travaillais à dire oui, et certaines choses m’ont été donnée par surcroît.
Une anecdote pour illustrer cela : il me fallait trouver une chambre car mon petit salaire ne me permettait pas de louer un studio. Je suis donc allée passer une petite annonce dans une agence de journaux gratuits. Il y en a deux dans ma ville. Un jeune adulte souffrant d’un handicap mental est alors entré dans l’agence, a réclamé des bonbons que l’hôtesse lui a donnés : il avait visiblement ses habitudes dans les lieux. Quand je suis sortie, le jeune homme m’attendait sur le trottoir, un journal à la main. Je lui ai montré que j’en avais déjà un exemplaire, mais il m’a fait comprendre qu’il s’agissait de l’autre journal et que je devais le prendre. Ce jeune homme innocent sur fond de ciel bleu tout ensoleillé m’a donné une sorte de bouffée d’espoir et de confiance et j’ai eu le sentiment que ce journal allait m’apporter quelque chose. Je me suis empressée de lire les pages de location, et effectivement, une annonce offrait une chambre, destinée à une femme seule, dans mon propre village. C’était inespéré !! J’ai appelé tout de suite et obtenu la location, ce qui m’a vraiment aidée pendant deux mois (surtout, j’étais tout près de chez mes enfants). Mon annonce quant à elle, n’a jamais rien donné ! [...]
Elevée entre une mère qui n’avais jamais vu de médecin jusqu’au jour de sa mort à la suite d’un cancer, et une grand-mère hypocondriaque qui voyait des microbes partout et me mettait en garde constamment, j’avais intégré de façon un peu « synthétique » qu’il valait mieux ne pas être malade, pour éviter d’avoir à rencontrer le médecin ! Même si ma mère était très tolérante et ne nous a jamais imposé ses choix, j’étais souvent angoissée (notamment avant les visites médicales scolaires !). Même adulte, ces angoisses perduraient ! [...]
Je me propose donc de noter au fils des méditations, plus ou moins réussies, mes remarques, en espérant peut-être avoir quelques commentaires, suggestions, expériences que vous voudriez partager. Sinon, le fait de m’exprimer restera une expérience agréable, que (selon les termes de Boileau) « j’énoncerai d’autant mieux que je la concevrai clairement » ! Alors j’espère que « les mots pour le dire me viendront aisément »…
source : https://vivreicietmaintenant.wordpress.com/
Tampon d'un cachet du Temple antoiniste d'Orange
Avis Mortuaires - Antoine Delrez (Journal de Verviers, 28 septembre 1940)(Belgicapress)
Avis Mortuaires - Antoine Delrez (Journal de Verviers, 28 septembre 1940)(source : Belgicapress)
Un certain Jean-Pierre Montulet a écrit un article sur l'installation de l'antoinisme à Spa. Impossible de dire s'il existe un lien de parenté entre ces personnes.
Stefan Zweig, Besuch bei Antoine le Guérisseur mit Albert Mockel
Auteur : Stefan Zweig
Titre : Emile Verhaeren
Éditions : S. Fischer Verlag, 2009 (330 pages)
Ce texte de Stefan Zweig a été traduit en français dans le recueil "Souvenirs et rencontres" (Grasset). Les souvenirs de l'auteur concernant Emile Verhaeren évoque sa visite en compagnie d'Albert Mockel à Antoine le Guérisseur.
Albert et Marie Mockel avaient perdu leur fils unique Robert à la fin de la guerre de 1914-1918. Adonnés au spiritisme, ils sont entrés en communication avec le mort.
Stefan Zweig, écrivain autrichien écrira "La guérison par l'esprit", trois biographies de figures historiques qui pratiquèrent le faith healing : le magnétiseur Anton Mesmer, Mary Baker-Eddy (fondatrice de la Science chrétienne) et Sigmund Freud, l'inventeur de la psychanalyse.
Dans le recueil "Emile Verhaeren", on peut donc lire :
Erinnerungen, Erinnerungen, ihr mächtig anströmenden, wie euch dämmen? Städte, wo seid ihr, ihr gemeinsam durchwanderten? Lüttich, heute eine erstürmte Festung und damals eine friedliche Stadt, als wir mit Albert Mockel und den Freunden den Fluß hinauffuhren an einem hellen Sommertag, um den wunderlichsten aller Heiligen, Saint Antoine le Guérisseur, zu besuchen! O Gelächter und Ehrfurcht und Gespräche in der kleinen Klause, Gefühl der Gesundheit inmitten der Pilgerschar der Kranken!
Traduction :
Souvenirs, souvenirs, comment endiguer votre flot puissant ? Villes que nous avons parcourues ensemble, où êtes-vous ? Liège, naguère paisible cité, lorsque nous remontions la Meuse en bateau par un clair jour d'été avec Albert Mockel et des amis pour aller voir le plus miraculeux de tous les saints, saint Antoine le Guérisseur ! Quelle dévotion dans l'étroite cellule, quel propos, quels rires aussi, quelle sensation de santé au milieu de la troupe des pèlerins malades !