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religion

Le Culte Antoiniste est-il une secte

Publié le par antoiniste

Enquête parlementaire visant à élaborer une politique en vue de lutter contre les pratiques illégales des sectes et le danger qu'elles représentent pour la société et pour les personnes, particulièrement les mineurs d'âge (1996)

RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION D'ENQUETE (1)
PAR MM. Duquesne et Willems (Partie I)

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Deuxième partie: Auditions de temoins
II. Résumé des auditions publiques
D. Représentants de services administratifs et d'organismes relevant des autorités fédérales ou communautaires
E. Représentants des milieux académiques
6. Audition de M. L. Nefontaine, collaborateur scientifique à l'ULB

M. Nefontaine précise que la notion de "secte" est difficile à définir.

Les quatre indices de nuisance mentionnés par le ministre de la Justice (Doc. no 313/5-95/96, p. 6) ne lui paraissent pas bien choisis, parce qu'ils peuvent s'appliquer à d'autres communautés liées à une des religions traditionnelles.

L'intervenant ne croit pas qu'il faille élaborer une législation spécifique pour les sectes. L'établissement d'un répertoire des mouvements sectaires (cf. le rapport de la commission d'enquête française) lui paraît dangereux, parce que cela donnerait également une mauvaise image d'organisations tout à fait honorables (par exemple l'Ecole de la Rose-Croix d'or, l'antoinisme, les Hommes d'affaires du plein évangile). Par ailleurs, le fait que des gens tout à fait normaux réfléchissent et agissent au sein de groupes minoritaires suscite en effet souvent la réprobation ou pour le moins la méfiance.

L'établissement d'une telle liste de sectes comporte aussi un risque de confusion entre les vraies sectes et les fausses sectes. Ainsi, il y a, par exemple, toute une série d'associations qui utilisent le terme " Rose-Croix " dans leur dénomination. Le fait que le nom d'une de ces associations figure, à juste titre ou non, sur une liste de sectes peut toutes les rendre suspectes. La même chose pourrait se produire pour "la Grande Loge souveraine internationale magique et théurgique de rite égyptien — Cagliostro", qui peut facilement être confondue par le grand public avec le rite de Memphis Misraïm.

Enfin, les sectes changent aussi souvent de dénomination, ce qui rend l'établissement d'une telle liste inutile.

L'intervenant met aussi en doute les propos que M. Gest a tenus devant la commission :

"Le président Gest attire également l'attention sur le danger des manipulations qui peuvent se manifester. Il relate ainsi que peu avant le débat à l'Assemblée nationale sur le rapport de la commission d'enquête, des articles émanant de chercheurs du CNRS et de scientifiques ont paru dans les plus grands journaux. L'analyse a montré que les auteurs de ces articles avaient des liens assez profonds avec les sectes les plus importantes." (Doc. Chambre n° 315/5-95/96, pp. 23-24).

Cette affirmation sans aucun fondement (qui jette la suspicion sur toute étude scientifique concernant l'une ou l'autre secte) s'inscrit, selon l'orateur, dans une véritable psychose antisecte. Le rapport Gest-Guyard présente également ce travers.

Selon lui, l'établissement d'une liste de "sectes" aurait un effet pervers: il isolerait des groupes inoffensifs, ce qui ne ferait que renforcer la tendance sectaire.

Les médias (et, en particulier, la télévision) devraient, eux aussi, donner une image plus nuancée des sectes qu'elles ne le font actuellement. Les témoignages d'anciens adeptes, si précieux soient-ils, doivent être traités avec circonspection.

M. Nefontaine estime que si la première partie du rapport Gest-Guyard peut prêter le flanc à la critique, les deuxième et troisième parties dudit rapport (notamment en ce qui concerne les critères permettant de reconnaître les sectes dangereuses) sont toutefois très pertinentes.

Certains sociologues français estiment que d'importantes associations qui luttent contre les sectes (en particulier l'ADFI et le "Centre Roger Ikor") présentent des tendances sectaires.

Selon une étude récente de MM. Baffoy, Delestre et Sauzet, il existe également, au sein du catholicisme, des sectes dont certaines sont considérées comme dangereuses.

[suit une courte description du fonctionnement de l'Opus Dei]

 Au sein du judaïsme, il y a aussi, selon l'intervenant, certaines déviances sectaires.

De manière plus générale, M. Nefontaine ne croit pas qu'une secte ait déjà infiltré les institutions publiques en Belgique. Ce qui lui parait plus dangereux, c'est, par exemple, que chez les Témoins de Jéhovah, les membres soient isolés de leur famille.

Il ne partage pas le point de vue d'Anne Morelli selon lequel il n'y aurait aucune différence entre l'Eglise et les sectes. L'Eglise est en effet publiquement présente (bien qu'on ne puisse parler de transparence absolue) dans la société.

Contrairement à l'Opus Dei, la secte Moon et les Témoins de Jéhovah sont, à ses yeux, des organisations bien plus dangereuses.

Il ne tient pas à se prononcer sur l'antoinisme, faute de données. Il a cependant entendu personnellement des témoignages positifs sur cette secte, notamment de personnes qui auraient été guéries tout à fait gratuitement. Peut-être la presse se fait-elle trop souvent l'écho des témoignages négatifs concernant cette organisation.

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Deuxième partie: Auditions de temoins
II. Résumé des auditions publiques
G. Représentants d'associations de défense des victimes
a. En Belgique
4. Audition de M. Ch. Berliner, docteur en médecine et représentant de l'Association des victimes des pratiques illégales de la médecine

Le témoin cite plusieurs exemples de pratiques médicales inacceptables:
[...]
— les vocations guérisseuses par la prière et l'imposition des mains (cf. la secte antoiniste, le père Tardif dans le cadre du renouveau charismatique et le père Samuel à Gosselies);
[...]

source : http://users.skynet.be/wihogora/r-sectes.htm

note : il n'a plus aucune impositions des mains (il n'y avait que le Père qui faisait cela) et il est bien insisté que c'est une guérison de l'âme qui est proposée au adeptes.

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L'écueil des spirites ambitieux

Publié le par antoiniste

 image : Original First Spiritual Temple - Dedicated and consecrated on Sept. 26th, 27th and 28th, 1885 (www.fst.org)

Revue Spirite - Novembre 1882

    Avis aux Spirites qui, dénaturant la portée de notre philosophie, fille du libre arbitre et de la raison, veulent être pontifes en créant un culte.
    Chez le Spirite, l'ambition est de mauvais aloi lorsqu'elle est personnelle, et pour arriver à se satisfaire, rien n'est sacré pour lui.
   Exemple. Aux Etats-Unis, le berceau du Spiritisme moderne, nous avons eu cette preuve que l'ambition et la vanité personnelle peuvent déconsidérer un homme de la valeur d'Andrew jackson Davis, et beaucoup d'autres, tous remarquables par leur talent et les services qu'ils ont rendus à la cause ; ces ambitieux ont tenté de changer le courant des idées, en proposant aux Spirites qu'ils fussent considérés comme des guides infaillibles ; ces ambitieux qui devaient diriger le spiritualisme moderne vers ses destinées, étant reconnus officiellement, comme étant les seuls capables de comprendre la haute portée de l'enseignement des Esprits, devaient avec leur expérience pontificale, mener la barque à bon port.
    En un mot, ils voulaient créer une secte religieuse, une église spirite en faisant passer cette prétention d'abord avec timidité, sournoisement, avec les plus minutieuses précautions.
    Les Spirites yankees flairèrent une anguille sous roche et démasquèrent l'ennemi, qui pouvait, par ses agissements, devenir un danger pour la cause et être son mortel ennemi.
    Andrew Jackson Davis, un des médiums les plus remarquables, avait donné des oeuvres considérables et étonnantes, lues par tous les hommes qui ont quelque valeur intellectuelle ; de plus, ses travaux, comme orateur et organisateur avaient été si importants, si utiles à la cause, qu'on fut, à juste droit étonné de le voir entrer dans la voie pleine de pièges des infaillibilistes et des grands-prêtres.
    Des ambitieux le poussaient en avant ; la plupart de ces novateurs ambitieux étaient des conférenciers de premier ordre, sortis presque tous du ministère de différentes églises protestantes, dont ils avaient pris les habitudes et le ton du commandement et de l'autorité ; ils désiraient être des prélats du pape en perspective et s'assurer une existence large et commode.
   Cet échafaudage croula sous les critiques, amères et plaisantes tout à la fois, des organes qui s'occupèrent de cette "sensations". [...]
    On proposait d'organiser, d'enrégimenter les médiums, surtout ceux qui produisaient des matérialisations, de façon à les mettre sous le contrôle disciplinaire de ces bons messieurs et de ces dames, qui prétendaient être les seuls capables de posséder le pouvoir, et avaient le droit d'établir des règlements et des conditions contre la fraude. [...]
    La seconde tentative de Jackson Davis est avortée, et il en sera de même pour toutes les tendances méprisables qui veulent recréer les dogmes, les cultes et les hommes tonsurés qui en vivent.
          Henri Lacroix

    Remarque. - Nos amis nous écrivent que les tentatives d'Andrew Jackson Davis, tendent à se renouveler en France et en Belgique.
    Chacun ayant son initiative, des vues que nous devons respecter, nous ne pouvons et nous ne devons, à la Revue Spirite, être des grands prêtres, et régler à chacun la dose de vérités qu'il doit enseigner ; l'opinion générale, seule, approuve ou improuve toutes tendances à créer une église, un dogme, des pasteurs.
    ce que nous savons bien, c'est que, soit en France, soit en Belgique, où pendant un mois nous avons étudié la vie des groupes ces tendances ne se sont pas fait jour ; à l'unanimité, à Jumet-Gohyssart,à Liège et aux environs, à Bruxelles, pendant la réunion des délégués des groupes belges, partout enfin, on a rejeté l'idée de fonder une église, d'avoir des pasteurs, une religion qui entraîne avec elle toute une série d'infractions au droit de penser, qui crée une oligarchie religieuse intolérante et infaillible. [...]

source : spiritisme.net

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    L'idée de Jackson Davis n'a pas totalement disparu, puisqu'on trouve une page sur wikipédia traitant du Spiritualisme moderne anglo-saxon.
    Le spiritualisme moderne anglo-saxon est aujourd'hui une religion fondée en partie sur les écrits du mystique suédois, Emmanuel Swedenborg (1688-1772) et sur diverses expériences médiumniques menées depuis le XIXème siècles. Le Spiritualisme moderne affirme sa croyance en Dieu, en la survivance des esprits des morts et en la possibilité de contacter ces esprits par le biais de médiums naturellement doués ou entraînés pour cela. Des esprits susceptibles de fournir un enseignement sur l'au-delà. [...]
    De nos jours diverses Églises spiritualistes sont durablement implantées sous diverses dénominations, aux États Unis et au Royaume-Uni. [...]
    Le spiritisme, est une branche du spiritualisme moderne développée par Allan Kardec et présente dans tous des pays latins. [...]
    La figure emblématique qui combina le mieux les travaux de Swedenborg et de Mesmer dans une synthèse typiquement américaine fut probablement Andrew Jackson Davis. Il baptisa son système de pensée « la philosophie harmoniale ». Davis pratiquait le mesmérisme à des fins de guérison ainsi que la clairvoyance à Poughkeepsie, dans l'état de New York. Son livre de 1847 : The Principles of Nature, Her Divine Revelations, and a Voice to Mankind, fut entièrement dicté à un ami par Davis, alors que ce dernier se trouvait en état de transe. Ce livre représenta une sorte de Bible de réference pour le mouvement spiritualiste bien que ses valeurs très individualistes excluent toute vision unique du monde. [...]
    Le Spiritualisme intéressa essentiellement les classes moyennes aisées et tout particulièrement les femmes. [...]
    Aujourd'hui, l'Eglise Spiritualiste (Spiritualist Church) reste la principale héritière de ce mouvement aux Etats-Unis. [...]
    Une des branches du Spiritualisme pris la forme d'une organisation structurée, fortement teintée de Christianisme, avec un credo et une liturgie spécifique et une formation encadrée des médiums. Aux États-Unis, les Églises Spiritualistes sont majoritairement affiliées à la « National Spiritualist Association of Churches », alors qu'au Royaume-Uni elles sont regroupées par la « Spiritualists' National Union », fondée en 1901. Un cathéchisme spiritualiste commença dès 1920. Il est enseigné aujourd'hui par l'Université Arthur Findlay de Stansted Hall. Quelques divergences d'opinions ont provoqué des schismes dans l'Eglise Spiritualiste. Le plus notable s'est produit en Angleterre en 1957 entre ceux qui considèrent le Spiritualisme comme une religions rattachée à aucune autre et ceux qui le perçoivent comme une extension du Christianisme. Le mode de fonctionnement du Spiritualisme ressemble actuellement à celui de toutes les autres religions et a abandonné toute forme de spectacle sensationnel. Les médiums sont formés à transmettre les messages reçus mentalement de la part des esprits et ne s'exercent plus à réaliser des matérialisations d'esprits comme au siècle dernier.

site : Worldwide directory of Spiritualist Churches
National Spiritualist Association of Churches
First Spiritual Temple

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La prédication rabbinique

Publié le par antoiniste

    Mais quel est le contenu du sermon rabbinique ? On peut distinguer, grosso modo, deux grandes orientations qui varient selon les rabbins et les synagogues : la lecture des péricopes bibliques hebdomadaires (tirées du Pentateuque et des prophètes) fait l'objet d'un commentaire, d'un "mise à portée" de l'auditoire, en se limitant à la pensée juive stricto sensu ou alors le rabbin s'en sert comme d'une base pour se livrer à des considérations plus actuelle. C'est ainsi que certains rabbins plus ouverts sur leur temps reprendront à l'occasion de la fête de Pessah des interprétations plus spirituelles de leurs lointains prédécesseurs : tout en insistant sur l'absolu respect des règles qui commandent l'éloignement du haméts (nourriture à base de levain ou d'ingrédients susceptibles de fermenter), ils rappellent qu'il convient de ne point oublier le haméts qui sommeille en nous et qu'il faut brûler : l'orgueil, le repli sur soi, l'arrogance, l'exclusion, etc. Ainsi, la sortie d'Egypte dont l'historicité est rappelée avec force est parfois assimilée à un processus d'alchimie de l'âme : chaque homme est invité à effectuer sa propre "sortie d'Egypte" en quittant le pays obscur des préjugés, de la haine, de l'égoïsme, de l'envie et des frustrations. Il arrive aussi que l'actualité dicte aux rabbins les plus éclairés le thème de leurs interventions, ce qui rend leurs sermons plus vivants et plus attachants. Mais la règle fondamentale n'est pas d'emboîter le pas à une actualité sans cesse changeante, mais d'édifier les orants aux plans religieux et moral.

Maurice-Ruben Hayoun et Dominique Jarrassé, Les Synagogues
Que sais-je ? n°3430, pp.116-117

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Zone commerciale sur la rue Nalewki dans le quartier juif de Varsovie - 1938

Publié le par antoiniste

 source : ushmm.org

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Zone commerciale sur la rue Nalewki dans le quartier juif de Varsovie - 1938

Publié le par antoiniste

 source : ushmm.org

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Officier Cosaque [portrait en pied]

Publié le par antoiniste

  [photographie de presse][Agence Rol]

 source : gallica2

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Hassidim - juif religieux

Publié le par antoiniste

source : jewishgen.org

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Robert Vivier - Délivrez-nous du mal - Praga

Publié le par antoiniste

    Il se rappela un spectacle bizarre, auquel il avait assisté un jour près de Praga. Une homme, une espèce de vagabond, s'était couché sur le ventre au milieu d'un cercle de paysans attentifs, et, tournant sa tête vers le haut, sans changer la position du corps, au prix d'un effort qui lui faisait saillir les veines du cou était resté immobile jusqu'à ce qu'il perdît connaissance. Des femmes se signaient et priaient à voix haute. Antoine avait voulu se précipiter vers cette homme pour le secourir, mais Dmitri, un Russe qui l'accompagnait, l'avait retenu : "Non, laisse-le, c'est un pèlerin. Ces gens disent que Dieu a créé l'âme et le diable le corps. Ils cherchent à perdre connaissance exprès, pour délivrer l'âme. Il y en a d'autres, comme cela, qui se font suspendre par les bras à des arbres, avec des courroies." Antoine se souvenait des veines bleues, du visage d'un rouge foncé, des yeux saillants, injectés, sans regard.

[...]

    Il se rappela Varsovie cette grande ville triste, comme il l'avait vue en arrivant, vers la fin de l'hiver. La neige n'était plus qu'un sorte de poudre brune et noire où glissaient les traîneaux, avec leurs cochers en manteau bleus à larges ceintures. Tout lui semblait étonnant, la figure des gens, leurs barbes, leurs pelisses et leurs bottes, leurs bonnets de fourrure. Une rue était pleine de juifs. Etranges, les juifs, avec leurs lévites noirs, ces longues boucles noires ou rousses encadrant leurs jours pâles. Ce qu'il en grouillait, de la vie, dans cette grande ville à la fin de l'hiver.Ce qu'il y avait de regards ! Comme tous ces regards appelaient... C'est là qu'il avait compris la première fois qu'il y a une chose qui manque aux hommes et que peut-être, tandis qu'ils la cherchaient partout, elle est cachée parmi eux. Mais comment trouver ? Il y avait de tout dans cette ville, Antoine se rappelait une place, aussi vaste qu'un champ de manoeuvres, où avaient galopé des Cosaques en longs manteaux, avec des lances comme celle de nos lanciers. Derrière eux la place était restée longtemps vide, et 'on voyait, tout au bout, une cathédrale au dôme d'or.
    Tout était embrouillé, par là. Catholiques, orthodoxes, juifs. Chacun croyait à quelque chose de différent, et tous avec la même foi. Comment comprendre cela ? Même ceux de ces gens qui étaient catholiques l'étaient d'une autre façon que nous. [...]
    Antoine le savait, lui qui avait voyagé. Les juifs, les orthodoxes, les catholiques, et aussi ces protestants d'Allemagne, tous ne désiraient qu'une chose : savoir comment vivre, pour faire leur salut. Les Allemands aussi, lorsqu'ils chantaient, et les Polonais lorsqu'ils jouaient sur leurs harmonicas : tout cela, c'étaient encore des espèces de prières.

Robert Vivier - Délivrez-nous du mal
Ed. Labor - Espace Nord, p.132 & p.135

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N.Tsakni - La Russie sectaire (1888), p.218

Publié le par antoiniste

 

 

 

Soutaïeff est un simple paysan russe, illettré, du gouvernement de Tver, situé au centre de la Russie. De même que la plupart des paysans de sa commune, il s'en allait à Pétersbourg gagner sa vie; maçon habile, il gagnait suffisamment d'argent dans un atelier considérable de maçonnerie.

Depuis son jeune âge, il manifestait une grande tendance à la rêverie, à la mélancolie, et un goût marqué pour les conversations religieuses. La vie environnante ne le satisfaisait pas. La misère, l'ivrognerie, l'immoralité et le mensonge qu'il rencontrait à chaque pas, choquaient sa nature droite et honnête, et, à l'égal de beaucoup d'autres chercheurs de vérité, il se mit à réfléchir sur la question de savoir comment il fallait s'y prendre pour arranger la vie selon la morale et la religion idéale.

Maintes fois il s'adressa aux prêtres, dont l'un, à Pétersbourg, lui conseilla de lire l'Évangile. C'était un problème impraticable pour Soutaïeff, qui ne savait pas lire. Mais la soif de la vérité l'emporta, et il se mit à étudier avec zèle. Il dut faire de grands efforts pour vaincre cette difficulté; mais une fois qu'il sut lire, il se plongea avec passion dans la lecture de l'Évangile.

« J'achetai l'Évangile, raconte-t-il, et je me mis à L'étudier, je tâchai de le comprendre autant que mon intelligence me le permettait... Et je finis par me persuader que le mensonge régnait dans L'Église, qu'il régnait autour de moi, chez les hommes, dans les institutions, en un mot, partout. Je me mis à chercher la vraie foi, et je la cherchai longtemps... »

A force de critiquer, de chercher la vérité, Soutaïeff en vint peu à peu à rejeter toutes les institutions des hommes, dans leurs formes actuelles. Un jour, il porta à l'église son fils, qui venait de mourir, pour le faire enterrer. Le pope lui demanda cinquante kopecks pour l'enterrement. Soutaïeff ne pouvait pas en donner plus de trente. On se mit à marchander devant le cadavre. Le père, indigné, déclara qu'un  enterrement dans ces conditions ne pouvait ouvrir à l'âme de l'enfant les portes du paradis; aussi emporta-t-il le cadavre chez Lui, et l'enterra-t-il dans sa cour. Une autre fois, le pope alla chez lui, pour baptiser un enfant qui venait de naître. Soutaïeff vint à sa rencontre, l'Évangile à la main, et chercha à lui prouver qu'on ne pouvait baptiser que les adultes, quand ils en exprimaient le désir, à l'exemple du Christ. Le prêtre, irrité, lui arracha le livre des mains, le jeta à terre. Le paysan fut terrifié de l'injure commise contre la parole du Seigneur; il détesta le prêtre à partir de ce jour, abandonna l'Église et ne fit plus baptiser ses enfants.

Une fois dans cette voie, Soutaïeff ne s'y arrêta pas. Il se mit à critiquer et à renier tout ce qui l'entourait. Il s'indignait contre les personnes qui amassaient de l'argent, en général; contre le commerce en particulier. En observant son patron, l'entrepreneur de maçonnerie, il ne tarda pas à s'apercevoir que ce dernier falsifiait la marchandise qu'il vendait; qu'il cherchait à prendre à l'acheteur le plus d'argent possible, à tromper l'ouvrier. « Il commet ce crime, et pourquoi ? pour amasser un capital, tandis qu'un vrai chrétien n'a besoin ni de capitaux ni d'intérêts. » Soutaïeff, indigné, abandonne son métier, et revient à la campagne s'adonner à la culture de la terre, le seul travail juste et pieux.

Pendant son séjour à Pétersbourg, à force de travail pénible, il avait fini par ramasser une somme assez considérable pour un paysan. Maintenant, cet argent lui pèse; il jette dans le fourneau les billets de banque, et distribue aux indigents les pièces en argent. Quant à lui, il n'a besoin que de ses mains, qui peuvent travailler. A la campagne, il trouve la même immoralité, le même mensonge, la même ivrognerie, en commençant par le pope, l'administrateur, et en finissant par le paysan. Soutaïeff se met alors à prêcher la morale par la parole et par l'exemple; il crée un nouvel Évangile, qui reçoit le nom d'Evangile de Soutaïeff.

 « Je ne veux pas créer une secte nouvelle, dit-il, je veux simplement apprendre aux hommes à être de vrais chrétiens. »

Le vrai christianisme consiste dans l'amour pour le prochain. Là où l'amour est présent, Dieu est présent aussi; là où il n'y a pas d'amour parmi les hommes, la grâce de Dieu ne peut pas y être.

Ces paroles seules expriment toute la morale, toutes lois. On dit qu'il existe sur la terre beaucoup de religions. Toul cela n'est que le résultat de la bêtise humaine; tous les hommes doivent se réunir et ne former qu'une seule religion : la religion de l'amour du prochain et de la miséricorde; ils doivent abandonner toutes les querelles au sujet des cérémonies religieuses et des formes extérieures du culte. C'est dans  cette religion-là que se trouvent la vérité et le salut.

— Qu'est-ce que la vérité? demanda à Soutaïeff l'un de ses auditeurs.
— La vérité, c'est l'amour dans la vie communale, répliqua avec conviction Soutaïeff.

Toutes les manifestations extérieures de la religion et du culte ne rendent pas l'homme meilleur. Soutaïeff rejette les cérémonies religieuses comme des choses inutiles, qui ne servent qu'à cacher l'hypocrisie. Le but de la religion, c'est le perfectionnement moral; les prêtres peuvent exister, mais seulement en qualité de prédicateurs de la vérité, de défenseurs de la justice, pour donner un bon exemple.

Nous avons déjà dit que Soutaïeff avait enterré lui-même un de ses enfants, qu'il avait refusé d'en baptiser un autre jusqu'à sa majorité; de même, lorsque le moment vint de marier sa fille, il fit venir le fiancé de Pétersbourg, et donna lui-même la bénédiction nuptiale, exhortant les jeunes époux à mener une vie morale et juste.

Soutaïeff et ses adeptes ne croient ni au diable ni aux anges; ils rejettent également tout mysticisme et toute superstition, ainsi que la foi dans l'invisible et le surnaturel.

Parmi les saints, ils ne respectent que ceux qui ont donné un exemple de bonté et de moralité. Soutaïeff n'a pas d'idée bien nette sur la vie future, pour laquelle il est très-indifférent, d'ailleurs.

Le paradis doit se réaliser sur cette terre, lorsque la vérité et l'amour triompheront. Ce qui se passera là, dit-il en montrant le ciel, je ne puis le dire, n'y ayant jamais été; peut-être qu'il n'y a rien d'autre que des ténèbres éternelles.

Nous ne devons nous préoccuper que du bonheur et de la justice sur cette terre.

La question de la régénération morale de l'homme est étroitement liée à la question économique et sociale. Le péché principal, l'erreur de l'homme, c'est de vouloir faire de la terre une propriété particulière : de là l'inimitié, la haine, la jalousie, la misère. Pour délivrer les hommes «le toutes ces misères, de ce « péché », il esl indispensable d'établir la propriété commune d'abord pour la terre, comme étant la source de toute richesse; puis, pour tout le reste. La propriété privée est la source de tous les malheurs, de toutes les imperfections morales : le partage des biens est donc indispensable; il faut que les propriétaires rendent la terre dont ils se sont emparés d'une manière arbitraire, et qu'ils se mettent à travailler comme tout le monde, pour gagner leur vie. C'est alors seulement que régneront la paix, l'amour et la fraternité.

Mais comment réaliser tout cela? Soutaïeff rejette toute violence, toute lutte les armes à la main ; il est profondément convaincu de l'influence que l'on exerce en prêchant l'amour et l'équité, ainsi que de la conversion graduelle de tous les hommes.

Si on lui demande ce qu'il faut faire si les riches refusent de restituer la terre, Soutaïeff répond :

— On peut les convaincre; ils finiront par comprendre que leur vie n'est que mensonge et injustice, et par la renier eux-mêmes. Quant à ceux qui persisteront clans le mal, ils ne seront pas reçus dans la communauté des fidèles. La suppression de la propriété sur la terre, et l'organisation d'une vie communiste, amèneront nécessairement avec elles la suppression des capitaux personnels, des intérêts, du commerce et de l'argent.

La guerre et les soldats deviendront alors complètement inutiles; les hommes de toute nationalité, de toute religion, sont frères et les enfants du même père, le Créateur de l'univers; pourquoi se querelleraient-ils ? Personne ne nous attaquera si nous sommes pleins d'amour et de miséricorde.

[...]

Soutaïeff est particulièrement intéressant pour nous, parce qu'il représente le type du sectaire rationaliste avec ses croyances, son idéal de bien et de moral, son éternelle recherche de la vérité, ses transitions du doute maladif et douloureux à l'enthousiasme le plus fanatique.

Souvent après de longues discussions, raconte Prougavine, il était assis, plongé dans des réflexions profondes, les yeux fixés dans le lointain.

 « Si quelqu'un pouvait me dire, s'écriait-il tout à coup au milieu de ses réflexions, en quoi je me trompe, et où est la vérité, je lui donnerais toute ma vie, je deviendrais son esclave! »

Mais le doute disparaît, la foi dans l'homme qui est sorti pur des mains de son Créateur, la foi dans la régénération morale, dans la réorganisation d'une vie nouvelle fondée sur l'amour et la fraternité générale, — cette foi prend le dessus, et le sectaire s'adonne de nouveau à ses prédications fanatiques :

« Tu donneras ton âme pour ton prochain », a dit Jésus-Christ. « Allez, et prêchez la vérité, dit Soutaïeff. On nous persécutera, on nous jugera. — Qu'ai-je à craindre du tribunal ? On me mettra en prison, on m'exilera au Caucase, en Sibérie? Je trouverai partout des hommes prêts à écouter la parole de la vérité; je n'ai pas peur des souffrances corporelles, je n'ai même pas peur de la mort, pourvu que mon âme reste pure! — Qu'on me saisisse, que l'on m'enterre tout vivant, — je suis prêt, je veux souffrir pour la vérité, pour mes frères ! »

 

source : archive.org

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Molokans in Georgia

Publié le par antoiniste

 source : molokane.org

Les Molokanes (ou Moloques, de moloko, "lait" en russe) tirent leur nom d'une pratique consistant à boire du lait les jours de jeûne de la majorité orthodoxe. Ils font partis des vieux-croyants, la partie de la population russe qui refusa de suivre les réformes du patriarche de Moscou, Nikon ordonné par Pierre le Grand en 1652.

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