Eklablog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

roman

Henri Anger - Monte-Carlo Blues (1989)

Publié le par antoiniste

Henri Anger - Monte-Carlo Blues (1989)

Auteur : Henri Anger (1907-1989)
Titre : Monte-Carlo Blues
Éditions : François Bourin (Julliard), Paris, 1989 (241 p.)

    Henri Anger est un journaliste et écrivain français qui entre dans le métier à l'âge de 16 ans, au Populaire de Nantes, après son expérience à La Gazette de Monaco qu'il raconte dans ce roman.

    Il évoque le temple antoiniste de Monaco dans le chapitre "La polovtsienne et l’intouchable".

    Alors que son ami Cyrille, le cocher de fiacre ukrainien disparaît sans raison avec son cheval Coquette, et que la saison des ballets russes de Diaghilev est finie, emportant au loin son dernier amour (la danseuse “polovtsienne” Tatiana), le jeune journaliste Alain Le Du, employé de fraîche date à La Gazette de Monaco, rencontre par hasard un antoiniste qui l’emmène au temple du boulevard de l'Observatoire. C’est là qu’il rencontre l’“intouchable”, une servante indienne de nom de Hamsa, enfuie ( ou chassée) de la maison de son employeur située à Roquebrune. Voici l’extrait (pp.178-179) :

    Comme il passait dans une de ces rues étroites proches de Sainte-Dévote, rues de boutiques obscures et de misérables maisons de rapport, il vit venir à lui un petit homme maigre, habillé de noir (redingote ou lévite) et coiffé d'un chapeau haut de forme dont le fond était beaucoup plus large que la base. Ce couvre-chef inhabituel est appelé tromblon par les spécialistes. La surprise qu'il lut dans les yeux d'Alain amusa ce personnage qui semblait familier aux habitants du quartier, rassemblés devant les portes en attendant la sortie de la grand-messe. L'homme au chapeau-tromblon prit Alain par la main en lui disant : « Viens. » L'absence prolongée de Cyrille avait créé une sorte de vide en lui, sans qu'il sût pourquoi. Cyrille et Coquette s'étaient sans doute absentés pour une longue course imprévue. Il suivit l'homme sans se demander où il allait le conduire. Il s'arrêta devant la porte entrouverte d'un bâtiment qui ressemblait à un hangar, porte sur laquelle on pouvait lire cette simple inscription en lettres noires sculptées dans le bois : « Culte antoiniste. Le dimanche à 13 heures. Entrée libre. »
    Des draperies noires étaient tendues le long des murs. Sur une estrade faite de planches assemblées et clouées sur d'autres à la verticale, une vieille femme flasque assise ou plutôt blottie dans un vieux fauteuil Voltaire lisait d'une voix faible, avec un accent tudesque très prononcé, un texte que tenait devant elle un vieillard coiffé comme tous les assistants d'un chapeau-tromblon. Les fidèles en lévite portaient tous le même costume archaïque. Les femmes vêtues de noir elles aussi, mais se distinguant par un bonnet blanc à ruches comme ceux des duègnes du répertoire, semblaient moins figées que les hommes et se saluaient l'une l'autre en inclinant la tête. Quelques-unes priaient à voix basse ou chantonnaient.
    Un sacristain ou quelque diacre désigna à Alain une place dans le coin le plus sombre du hangar et fort éloigné de la desservante. Il lui remit une brochure d'une dizaine de pages. « Lisez-la, dit-il, vous saurez tout ! La mère Antoine est aujourd'hui parmi nous. Quand la célébration du culte sera terminée, vous pourrez lui poser des questions. »
    Hélas, le texte de l'opuscule remis à Alain était illisible faute d'une lumière suffisante. Il le lut un peu plus tard. Pour ceux qui ne sauraient rien du culte antoiniste, religion qui s'est peut-être perdue, voici ce qu'en disait ce texte, sinon ce qu'on en sait.
    Un mineur de fond qui se nommait Antoine – il était belge et habitait Jemmapes – découvre au milieu de son âge (il est né en 1846) qu'un fluide mystérieux l'habite. Ce fluide guérit les maux. Bientôt il est connu de certains de ses compagnons mineurs sous le nom d'Antoine-le-guérisseur. Encore n'est-ce pas assez de guérir et de prêcher, il faut être saint. Il le devient. Cela ne lui suffit pas. Il entend sourdre en lui la voix d'un prophète. Il annonce tant de catastrophes, il soulage tant de misères qu'il rassemble en Belgique et notamment dans la région de Charleroi des milliers de fidèles qui bâtissent avec lui une première chapelle. Quand il meurt en 1912 (car il meurt) le culte antoiniste a débordé les frontières nationales.
    La preuve en était cette modeste chapelle de Monaco où se rassemblaient tous les dimanches des boutiquiers, des boutiquières, des manœuvres, des maçons et leurs épouses, plus quelques rêveurs, persuadés que l'influx libérateur que la mère Antoine avait hérité guérissait les écrouelles et plus généralement tous les maux réels ou imaginaires. La foi de ceux et de celles dont l'état de santé ne s'améliorait pas avait tout simplement manqué de vigueur... Qu'ils ne désespèrent pas, disait l'opuscule, et se pénètrent des principes divins révélés au père Antoine. Suivaient, pour finir, les dix principes en question. Aucun n'est à retenir.
    Près d'Alain, une jeune femme qui, d'après ses vêtements, n'appartenait pas à la communauté demeurait silencieuse, le visage dans les mains. Elle oscillait parfois comme un jeune arbre sous le vent. Elle portait un sari de toile écrue. On reconnaissait en elle, à ses pieds nus, à sa chevelure noire nouée sur la nuque, son fin profil d'Apsara, à son odeur d'ambre, une Indienne, comme on en rencontrait souvent sur les terrasses du Casino à distance respectueuse d'une bégum. Sans doute, se dit Alain, avait-elle été attirée dans ce hangar obscur par la curiosité que professent les gens de sa race à l'égard des thaumaturges. C'était une erreur. Elle était entrée là pour demander assistance et personne ne l'avait encore remarquée. Se soutenant à peine, elle plia soudain les genoux et, si Alain ne l'avait pas retenue, elle se serait affaissée. Son instinct l'avertit qu'elle souffrait de deux maux qu'il n'ignorait pas tout à fait : la faim et la fatigue. Il l'entraîna dans la rue, espérant que le grand air, une tasse de thé, des croissants la ranimeraient plus vite que toute prière à un dieu inconnu. Personne dans ce temple où l'on apprenait que la foi suffit à tout n'avait bronché quand le couple était sorti. Alain guida les pas de l'Indienne jusqu'à la terrasse d'un café où il l'installa à l'ombre. Quand il avait saisi par le bras cette jeune fille ou femme pour l'empêcher de tomber, le grain serré, la fraîcheur satinée de sa peau l'avaient étonné comme une grande nouveauté.

 

    Après l’avoir hébergé deux nuits, il l’a raccompagne à Roquebrune, chez son employeur-maître, le poète Rabindranath Tagore. On apprendra dans le chapitre suivant ce qui arriva à son ami cocher Cyrille (p.192) :

    Les délices du printemps et de l'été à Monte-Carlo, Alain allait les goûter avec d'autant plus de plaisir que La Gazette de Monaco s'était transformée en hebdomadaire. Un seul journal par semaine, c'est un programme idéal dans un pays où il fait bon vivre. L'ardeur du soleil l'avait changé en Africain. A le voir si brun, ses amis de rencontre se demandaient s'il n'était pas algérien, tunisien ou marocain. Non, c'était l'effet des bains de soleil au bord de l'eau.
    Hélas les sorties en mer avaient cessé et ne reprendraient que s'il avait la chance de découvrir un nouvel équipier. Cyrille était parti. Cet antoiniste, coiffé d'un tromblon, qui avait conduit Alain par la main dans ce temple étriqué où il avait rencontré Hamsa, avait été un messager du destin. Il annonçait un malheur. Sur l'esplanade du port une maudite limousine automobile, longue comme un « huit barré » et sans doute conduite par un ivrogne ou un aveugle, avait renversé Coquette, lui brisant les deux jambes avant. Sans se soucier de Cyrille qui sous le choc était tombé de son siège, les employés des premiers secours avaient abattu sur place la pauvre bête, alors qu'on transportait son maître à l'hôpital. Il était sans connaissance et souffrait d'un choc au sommet du crâne mais atténué par l'épaisseur de sa chevelure.

Voir les commentaires

Catherine Gris - Les ombres chuchotent (1962)

Publié le par antoiniste

Catherine Gris - Les ombres chuchotent (1962)

Auteur : Catherine Gris
Titre : Les ombres chuchotent
Éditions : Le Courrier du livre, Paris, 1962 (217 pages)
In-8 Broché. Avec quelques illustrations en noir et blanc hors texte.

Extrait de la Préface de Claude Barbat :
    Mais plus qu'une évocation envoûtante des réalités de la vraie vie et de la vraie mort, Catherine Gris élève pour nous une lumière sur ces réalités. Ce témoignage sur la mort est paradoxalement à la genèse d'un véritable art de connaître, ou plutôt, de reconnaître, les ressources de la vie.
    L'active confidente des « Cœurs Malheureux » se plaît aussi à dire « que ce sont justement les morts qui lui ont rendu intelligibles les vivants ». On le croira d'autant plus volontiers lorsqu'on saura que, comme une musique beethovénienne, ces pages ont conquis leur humour, leur sérénité et leur joie sur des pleurs et le sang de l'âme, sur des fatigues et des épreuves à la limite des forces d'un être exceptionnellement doué de résistance morale.

Introduction :
    Le « moi » est haïssable. Que l'on veuille bien me pardonner de transgresser la bienséance littéraire qui veut qu'un auteur use du « nous » moins présomptueusement subjectif.
    Mon vœu sera comblé si le lecteur, acceptant cette connivence, veut bien me suivre dans ce « reportage » autour des vivants et des morts, tout comme il accorde préalablement créance à qui rapporte des impressions de voyage en des lieux ignorés ou mal connus.
    De nombreuses personnalités disparues, ou bien heureusement en vie, sont évoquées dans ces pages, non point à titre figuratif, mais parce que chacune d'elles s'est trouvée une seconde ou à jamais dans un monde de sensations surprenantes et inexplicables.
    Le témoignage offert aujourd'hui, après 17 ans de maturation, n'est pas la narration romancée d'événements personnels. Mon dessein est autre : prêter ma voix aux Ombres en d'authentiques conciliabules, faire entendre celles des vivants, sortis du doute et de la peur, avant d'aborder à la rive, entrevue par Rilke de « ce peu profond ruisseau décrié, la Mort ».
 
    Catherine Gris est également l'auteure de Les Secrets dévoilés de la géomancie : Une science vieille comme la terre... (1960) et de quelques épisode de Jouons le jeu sur la chaîne parisienne de la RTF.
    Ici, l'auteure évoque une sœur antoiniste – Mme P. – notamment dans le chapitre II :

        « Et s'il ne trouvait pas tout de suite c'est qu'il devait y avoir
        des raisons – des raisons auxquelles les vivants ne
        comprennent rien, mais qui sont les raisons des morts. »
                                                (MONIQUE SAINT-HÉLIER : Le Cavalier de Paille).
    M'ouvrant sa porte, Mme P. m’accueillit en ces termes :
    – Vous nous avez fait une belle peur. Sans Roland vous passiez un mauvais quart d'heure. Votre horoscope est prêt. Parcourez-le en m'attendant, j'ai quelqu'un.
    Pour me remettre de ce préambule, je sortis une cigarette de mon sac. René, tout jubilant, m'avait fait cadeau d'un paquet venu à lui par des voies hasardeuses. Des Camel. Leur parfum s'étendit dans la petite pièce. Quand Mme P. m'y rejoignit, elle me dit dans un sourire :
    – Du rêve à la réalité. Je croyais que vous pouviez vous contenter de l'odeur, je vois que cela ne suffit pas.
    Cette réflexion m'ahurit autant que la précédente.
    Sans que je l'interroge, elle me raconta la scène du balcon, l'intrusion de ma petite ombre fidèle et attentive, du plaisir qu'il avait eu à fumer près de moi une cigarette américaine et de m'en laisser le sillage odorant.
    A personne, je le jure, je n'en avais fait part.
    J'eus en elle, de ce jour, une confiance aveugle, et si souvent encore, ma raison vigilante, mon rigoureux sens de la logique combattit ses présages, je doutais moins des évidences qui marquèrent dorénavant les jalons de ma montée vers l'Inconnaissable. Mais j'anticipe.
    Ce jour-là, nous discutâmes de mon horoscope. Il était à la fois exact, dans des faits contrôlables, obscur dans ses hypothèses. Au demeurant, très agréable à connaître pour qui serait imbu de soi. Elle m'y décrivait comme un être doté d'une personnalité magnétique, de qualités artistiques, sensible, passionné, charitable, rancunière et coquette. J'acquiesçai. Elle en vint à des remarques plus précises, à d'autres qui l'étaient moins, pour arriver enfin à une découverte surprenante : j'étais un métagnome en puissance. Traduction : un médium qui s'ignorait. Barbara allait triompher.
    Les questions se pressaient sur mes lèvres, en même temps que s'éveillait une humilité non feinte envers cette femme, qui dans son langage simple, son très particulier humour et la pureté de sa Foi, me sortait d'une gangue de croyances plus superstitieuses que spiritualistes. Pieuse, mais non dévote, elle amenait beaucoup de ses pratiques au culte du Père Antoine. Par elle, je suis devenue épisodiquement antoiniste, puis, de cœur, chrétienne.
    Je n'osais formuler une demande qui m'étouffait. Je n'eus point à le faire.
    – Donnez-moi sa photo. Je ne crains plus rien. Vous l'avez dégagé sept jours après son accident, il vous en est reconnaissant.
    Je restais coite. Pour la deuxième fois j'entendais ce mot. Une astrologue, saisissante, je l'avoue, par la justesse de ses attendus, mais affreusement antipathique, m'avait annoncé mon opération, et bien d'autres choses qui n'ont pas à être dévoilées ici. Quand j'étais allée la voir, sur la recommandation d'une vague camarade de théâtre, elle m'avait fraîchement reçue, tout occupée qu'elle était à « dégager » sa mère décédée d'une grippe infectieuse. Une seconde visite s'était soldée par du mépris pour ces sciences dites conjecturales. Compulsant des fiches où la mienne n'avait pas pris place, elle énonça au passage des noms que j'aurais préféré ignorer, me prédit les pires calamités, par pure vindicte, persuadée que je lui avais, la première fois, donné un faux nom. J'avais été assez bête pour lui livrer mon identité. J'ajoute que je n'eus jamais l'occasion de m'en repentir.
    « Dégager » un défunt c'est lui faciliter le passage dans l'Au-delà, dans cette sphère mal connue des vivants, ce tunnel, où il séjournera un temps plus ou moins long, qui s'éclaire selon son degré d'évolution, ou s'assombrit s'il y arrive sans préparation. C'est en somme l'éveiller à une seconde naissance, le réveiller.
    Écoutons Rilke :
    « Sans doute est-il étrange de n'habiter plus la terre de
    n’exercer plus des usages à peine appris,
    aux roses et à tant d'autres choses, précisément prometteuses,
    de n'accorder plus le sens de l'humain avenir ; Si bien qu'alors, dans l'espace effrayé,
    que jeune et presque dieu, il quittait pour toujours
    le vide, ébranlé, connut soudain la vibration
    qui nous devient extase, réconfort, secours. »


    Par mes questions, mes reproches, mes retombées dans notre passé si proche, mes angoisses de le perdre, et mes espérances de le voir m'apparaître, j'avais « dégagé » Roland. Il avait tenté de se montrer, en rêve, à sa pauvre maman, et n'avait réussi qu'à l'épouvanter, sautant, dansant dans la chambre pour lui prouver qu'il était là, invisible mais présent, perceptible aux yeux de l'amour maternel. Elle m'avait confié sa terreur, persuadée que la démence l'emportait vers le néant où son fils avait fui.
    Je ne lui disais rien de mes recherches. Je les savais dangereuses pour qui ne reste pas lucide. Je guettais le moment opportun pour lui en glisser un mot. Il est venu tardivement, et si fugitivement que je n'ai jamais osé insister.
    Pour moi, je ne rêvais pas. Le sommeil m'a obstinément quittée durant sept mois. J'ai gardé, jour et nuit, les yeux largement ouverts, somnambule consciente, posant à tous les médecins, thérapeutes, masseurs, hypnotiseurs un problème qui se résolut tout seul quand je tins pour certaine la survie.
    J'avais cet air de statue en marche, apanage d'une héroïne d'un roman de Monique Saint-Hélier qui plaisait tant à Roland. Sa préférence allait au caractère de Carole, belle jeune fille, pleine des plus nobles vertus, mais il avait un faible pour la troublante Catherine, et me donna son prénom. Associé au nom de Gri (amputé de sa moitié) qui figure dans chacune de ses lettres, il est devenu totalement mien.
                                *
    Fermant les yeux, Mme P. s'imprégna des fluides de l'image. D'une voix toute changée, elle murmura :
    – C'est papa qui en fera une tête quand il me retrouvera. Pauvre papa. Laisse-moi tout de même en paix, Catherine. Ne m'appelle pas. Je suis toujours à tes côtés, et près de maman aussi puisque je puis être partout à la fois. Tu en auras bientôt la preuve formelle, mais il faut que j'apprenne, moi aussi, à me manifester. Nous sommes comme deux écoliers. Nos classes ne sont séparées que par une mince cloison. Sois patiente. Je t'ai promis de veiller sur toi. Vivant, je ne le pouvais. Esprit, j'aurai tous les pouvoirs. Poursuis tes promenades au Bois, je marche à tes côtés. Je ne m'arrête qu'à la porte du cimetière. C'est un endroit horrible. Bientôt, je t'enverrai un oiseau. Ne lui donne pas mon nom.
    C'était difficile, car je le nommai, lui, Zoizeau.
    Dans la rue du retour, je gambadais comme une petite folle, soutenue par un bras ferme dont je sentais l'étreinte sans pouvoir fixer son dessin.
    Nous étions convenus, quelques semaines plus tôt, de nous rendre ensemble à une représentation d'Antigone. on jouait à bureaux fermés.
    Je retins deux orchestres au Théâtre de l’Atelier tout fourmillant pour moi de souvenirs, n'en occupai, bien entendu, qu'un seul.
    Les spectateurs, faute de place, étaient assis par terre. Une dame s'étonna de cette vacance, parlementa avec moi qui, du geste, lui faisait signe de s'abstenir, puis, autorisée par une ouvreuse, s'assit enfin, se redressa avec un léger cri, comme mordue par un aspic. Durant les trois actes, malgré la gêne éprouvée par l'inconfort de la position, nul ne se risqua à occuper ce fauteuil. Mes doigts, sur une main invisible, se resserraient aux passages qui nous avaient, isolément, bouleversés, et je sanglotais sans retenue lorsque j'entendis Monelle Valentin dire à Le Gall (Hémon) : « On est tout seul, Hémon, le monde est nu. » Brusquement je redécouvrais qu'en vérité je l'étais, perdue moi aussi, affreusement, dans une salle de spectacle, fantôme de vivante, escortée par un fantôme de mort.
    Mes amis, j'en avais beaucoup à l'époque, remarquaient à peine la modification de mon caractère et de toute ma personne. Si l'on veut bien se reporter à l'époque, on comprendra que chacun déchiré par ses propres deuils, dévoré d'espoir, pris dans la tornade des tourments sinon des soucis de révision civique, avait d'autres chats à fouetter. Ce que la guerre avait préservé fut détruit par la libération. D'éclatantes ruptures clôturaient des dîners bon-enfant, des réconciliations spectaculaires auguraient d'accords nouveaux. J'excepte mon ami René-M. Lefebvre, tellement au-dessus de la mêlée qu'il décourageait les moins ostracistes.
    Dignimont, que je fréquentais assidûment, me conta un jour sa visite à une voyante. Elle lui avait lu dans les mains. Nous courions tous ces antres plus ou moins cotés, plus ou moins clandestins, échangeant des adresses, d'où nous revenions ravis ou furards. Lucette, sa femme, présente à notre entretien, venait de s'entendre dire qu'elle pourrait bien être la victime d'une vilaine jalouse. J'examinai sa paume, et, forte de mes récentes études, sérieusement conduites, lui annonçai une blessure par arme à feu, ajoutant qu'elle ne toucherait pas son visage. Je doute qu'elle eût préféré être (hypothétiquement) défigurée par une rivale inconnue, ce qui eut eu plus de panache, du moins prit-elle légèrement mon avertissement.
    Vingt-quatre heures plus tard, alors que se déroulaient autour de Notre-Dame des combats de rues, elle reçut, par ricochet, une balle qui lui traversa la main, lui coupant un doigt. Elle était, je le précise, dans l'atelier de son mari, au troisième étage, et non à la fenêtre. Ma réputation s'établit sur ce fait, car on en parla beaucoup, et désormais l'on m'accorda un peu plus de considération.
    A intervalles réguliers, j'allais reprendre courage et crédibilité chez Mme P... Entre temps, les deux s'effondraient. Roland m'était apparu pour me signifier que je n'avais plus droit qu'à un quart d'heure de conversation quotidienne, amplement suffisant pour guider mes premiers pas vers une application de mes facultés. J'étais atterrée.
    L'oiseau promis brillait par son absence.
    Les battements de mon cœur scandaient mon ascension vers le logis. La courte attente à la porte me paraissait interminable. Introduite, je caressais distraitement les fourrures amoncelées, repoussées pour faire place à un étrange appareil : un oui-ja, sorte de plaquette de bois pourvue de roulettes, qu'elle dirigeait vers les lettres d'un alphabet. En bas du carton, un Oui et un Non. Véloce, sa main courait sur le clavier, formant des mots qu'elle énonçait, volubile interprète de visiteurs invisibles, impatients de se faire connaître. Mon sang se glaçait dans mes veines. Je sentais comme une bousculade où manquaient les vociférations pour la rendre effective. Ces phrases qui s'enfilaient les unes au bout des autres, sans ordre, ne me convainquaient guère de la véracité des messages. On n'y parlait pas de moi.
    Je fus ramenée à plus d'humilité.
    – Priez, me dit Mme P. Les esprits se plaignent de votre tiédeur. C'est le tout-venant qui se manifeste, et nous allons être envahies par les larves.
    Après plusieurs essais infructueux, j'en vins à user de cet instrument. Des picotements gagnaient le bout de mes doigts, et le oui-ja partait dans toutes les directions. Je sus qu'il n'y avait point de subterfuge. Une force incontrôlable s'emparait de moi.
    Je notai une phase ordurière, suivie d'un nom « Nénesse » et bornai là mes tentatives.
    – Vous êtes pourtant un médium écrivain, m'assura Mme P. Nous recommencerons l'expérience avec d'autres moyens. Ne soyez pas trop pressée.
    Je partis cependant sur une meilleure impression. Elle m'annonçait le programme de la semaine. Il se vérifia exact en tous points. Exact et terrible, car en permanent contact avec les défunts, je n'éprouvais plus qu'indifférence pour ceux qui profitaient largement de la vie. Le pauvre Raoul était de ceux-là. Il fallait que je fusse devenue bien cruelle pour lui en faire grief.

Voir les commentaires

Olivier Maillart - Les dieux cachés (2019)

Publié le par antoiniste

Olivier Maillart - Les dieux cachés (2019)

Auteur : Olivier Maillart
Titre : Les dieux cachés
Éditions : du Rocher, Paris, 2019

4e de couverture :

    «Il fallait qu'on eût calomnié Henri R. car, lorsqu'il se réveilla le dimanche matin... »
    Dans une charmante ville côtière de la Manche, signes étranges et lettres mystérieuses se multiplient, plongeant malgré lui un honnête professeur de philosophie dans une bien ténébreuse affaire. Complots, enlèvements et sacrifices humains se succèdent à un rythme inquiétant. Avec l'aide de deux petits chiens astucieux, de quelques amis et de beaucoup d'alcool, Henri R. parviendra-t-il à résoudre les énigmes qui l'entourent, et à deviner quel drame obscur elles recouvrent ?Aux confins d'une France perdue, où chacun semble chercher sa secte, on a en effet tout à craindre du retour des dieux cachés...

 

Recension
    Écrire un roman en 2019 : il faut être courageux. Olivier Maillart relève le défi. Il y a du cartoonesque dans son roman, du Tintin parfois : on imagine bien les bulles et les dessins. C’est un roman fantaisiste, parfois surréaliste qui mélange Hergé, Agatha Christie, Flaubert et Barbey d’Aurevilly.
    Scène de la vie de province, le roman est également une étonnante tentative de réenchantement du monde. La satire et l’analyse de types psychologiques le font parfois pencher du côté du réalisme. Mais le véritable propos du livre serait plutôt celui du conte.
    Le régime esthétique du roman fait penser au « jeu sérieux » cher à la Renaissance. Ce n’est pas un roman à thèses, même si l’aspect ludique n’est pas le seul du roman. S’il fallait trouver un genre dans lequel classer ce roman, la catégorie la plus proche serait certainement celle de la sottie. Ce genre médiéval, réemployé par Gide dans Les caves du Vatican, utilise le paradoxe, le contraste comme élément comique afin de rire des ridicules de personnages-types.
    Scène de la vie de province, ce roman est également une peinture sarcastique du désordre spirituel qui règne en Europe occidentale. Il y aurait presque du Huysmans dans ce roman, tant notre début de siècle a étrangement une atmosphère fin de siècle, parcourue par cette « fin des grands récits » dont parlait Lyotard.
    Le catholicisme semble épargné dans le livre, tandis que la franc-maçonnerie, le néo-paganisme sont objets de satire. À la fin du roman, la fête de Noël semble apaiser les âmes contrairement au solstice d’hiver néo-païen présenté comme une parodie de sacré. Le propos du livre semble donc être un appel à l’humilité métaphysique, sans tomber dans le relativisme philosophique.
    Le ton du livre fait penser au début de La peau de chagrin, lorsqu’un personnage se moque des débats philosophiques sans fin et unilatéraux afin de savoir si le matérialisme ou l’idéalisme sont les conceptions les plus véridiques du monde. Le propos du roman n’est cependant jamais relativiste : le bocage parfois s’anime, tel paysage semble habité par une signification surnaturelle. Et puis les chiens parlent.
    Surtout, et c’est là certainement l’élément le plus essentiel et le plus émouvant du livre : son étonnant art du portrait. Henri R. et Henri G. renouvellent le topos du double et de la gémellité en littérature. Ni Bouvard et Pécuchet, ni Dupond et Dupont, les deux Henri forment un excellent portrait de l’amitié. Certaines pages sont bouleversantes d’empathie. Car c’est ce que semble nous dire le narrateur : plus important que les dieux cachés, il y a l’humain révélé.

source : https://skholeus.wordpress.com/2019/01/19/les-dieux-caches-olivier-maillart/

 

Olivier Maillart - Les dieux cachés (2019)

Ouest France, 1er février 2019

 

    Le livre évoque l'antoinisme :

    Bref, il pleuvait ce soir d'automne sur Hirocherbourg lorsqu'une Renault Clio bleu ciel se gara en face d'un bâtiment qui eût pu passer pour industriel, quoique deux ou trois efforts décoratifs en attestassent l'usage cultuel. Une femme d'une cinquantaine d'années en sortit, vêtue d'une large housse de la même couleur que son véhicule, la pluie battante ne permettant pas, de loin, de déceler s'il s'agissait d'une burqa ou d'un vêtement de pluie particulièrement couvrant.
    La porte du bâtiment étant malheureusement fermée de l'intérieur, on entendit la femme pester puis, alors qu'une voix lui réclamait le mot de passe, répéter à trois reprises, de plus en plus fort afin de couvrir les mugissements du vent, la formule « Ja ja so blau blau blau blüht der Enzian », avec l'entrain de Heino au temps de sa splendeur, au cours d'une fête de la saucisse particulièrement arrosée. On lui ouvrit enfin la porte, et la femme put se mettre à l'abri.
    Dans le vestibule où elle venait d'entrer s'affairait déjà une autre femme, d'une cinquantaine d'années elle aussi. Elles n'échangèrent pas un mot, se dévêtant de leur cape de pluie bleutée pour enfiler un nouveau vêtement, semblable aux aubes des prêtres catholiques, entièrement bleu. Les murs étaient nus, d'aspect vétuste avec leur peinture écaillée. Une pancarte au-dessus de la porte qui menait à la pièce principale du temple indiquait qu'il était interdit de parler de « choses matérielles » dans le vestibule. Chantal, puisque c'était elle, finit par passer dans une petite pièce mitoyenne pour y prendre un fort volume dont la couverture disait qu'il contenait les Saints écrits du père Antoine. Elle attendit un instant, le temps que soeur Bénédicte lance le disque, puis, alors qu'une musique planante à la Vangelis se répandait dans tout le bâtiment, elle entra d'un pas mesuré, plein d'une noble dignité, et remonta l'allée principale de la grande salle qui séparait deux rangées de bancs vides. Elle arriva au niveau de l'autel, se prosterna, puis monta à la chaire. Relevant les yeux, elle reconnut soeur Bénédicte, soeur Brigitte et soeur Estelle. Les autres, une fois de plus, n'étaient pas venus.

    Il est difficile de faire comprendre ce qu'est une célébration antoiniste à qui n'a jamais assisté à l'une d'entre elles. L'Église antoiniste est une religion relativement récente, née dans la seconde moitié du xixe siècle. C'est la seule religion au monde, et cela mérite d'être relevé, qui soit jamais née en Belgique (pays d'apparition récente lui-même, il est vrai). Elle fut l'ouvre du père Antoine, un honnête homme ainsi qu'un être inspiré, si l'on en croit les antoinistes du moins, principale source d'information sur la question. Le père Antoine avait pour ambition de forger une religion syncrétique qui réconcilierait, au-delà des bornes du christianisme au sein duquel il était né, toutes les spiritualités du monde. Il plaçait une foi toute particulière dans ce qu'il appelait les « fluides ». Ceux-ci se trouvent un peu partout, dans les êtres et les éléments, passant par-ci, revenant par-là, à la manière des petits lapins des dunes chassés par Ippolit et Jean-Petit. Le père Antoine se livrait-il lui-même à la chasse au lapin lorsqu'il eut l'intuition de sa religion fluidique ? Il serait difficile de l'affirmer avec certitude, sans qu'on puisse pour autant rejeter catégoriquement cette hypothèse.
    Quoi qu'il en soit, le culte antoiniste, qui possède des antennes en Belgique, en région parisienne et en Normandie, se porte modestement. Dans ses temples, on croise des personnes vêtues de bleu qui peuvent parler à certains endroits, mais pas à d'autres. Chantal y avait le grade de chanoinesse et elle remplissait avec sérieux toutes les obligations attenantes à sa fonction. Seul le recrutement peinait un peu, malgré des efforts méritoires du côté de ses collègues de lycée.

    Une fois l'oraison finie, Chantal repartit en élevant devant elle les Saints écrits du père Antoine. Les autres soeurs avaient formé une procession derrière elle et, comme le disque n'était pas encore tout à fait fini et que la musique leur plaisait bien, elles avaient encore accompli plusieurs tours de la salle de prière avant de rejoindre le vestibule pour se changer. Une fois les aubes rangées, ces dames, toujours de bleu vêtues, s'étaient mises dans le seul coin du bâtiment où il était autorisé d'échanger des propos triviaux. On quittait les fluides pour retrouver les « choses matérielles ». Estelle avait une nouvelle recette de cake aux lardons dont elle voulait faire profiter les copines. Brigitte demandait à ce qu'on organise les trajets pour la réunion d'équipe.
    « Pour l'adresse, tout le monde sait, c'est bon, mais moi je ne veux pas me retrouver en carafe !
    - Oui, pas de problème, tu monteras avec Bénédicte. Par contre, il nous manque toujours une cinquième femme, et je vous rappelle qu'il nous faut une jeune fille pour le rite.
    - Oui, oui, on sait, mais comme tu sais aussi ce n'est pas si simple d'en attraper une, ici !
    - Oui, ce n'est pas faute d'avoir essayé. - Au Temple de Saint-Lô, il paraît qu'ils y sont arrivés...
    - Mais à Saint-Lô il y a quatre hommes, alors pour attraper des jeunes filles c'est plus facile !
    - Oui, mais en attendant, au-dessus (à ce moment-là, Brigitte fit mystérieusement un signe du doigt qui désignait le plafond et, bien au-delà, comme toutes le comprirent sur-le-champ, les hautes sphères du culte antoiniste), ils s'impatientent... Ils parlent de fermer notre temple si cette année on n'arrive pas à plus de résultat !
    - On sait, Brigitte, on sait. Écoutez, les filles, ne paniquons pas, on peut encore y arriver. Et si ça se trouve, ce soir même...
    - Ce soir même, tu as vraiment la foi, Chantal !
    - Bien sûr que j'ai la foi, sinon je ne serais pas ici. Allez les filles, aux voitures, et en route ! »

    Et tandis que les beaux oiseaux bleus du culte antoiniste s'égayaient par les rues hirocherbourgeoises en entonnant en choeur « Blau blau blau blüht der Enzian », dans une autre partie de la ville tout aussi battue par la pluie et les vents, Henri G. arrivait à l'entrée de l'Igloo pour le vernissage de l'exposition « La photographie new-yorkaise des années 2000, entre luttes post-urbaines et discriminations genrées ».

Voir les commentaires

Jean Delay - Homme sans nom (1948)

Publié le par antoiniste

Jean Delay - Homme sans nom (1948)

Auteur : Jean Delay
Titre : L'écarté de la grille
in Hommes sans nom, nouvelles,
Éditions : Gallimard, Paris, 1948

    Docteur en médecine, Jean Delay devint médecin des hôpitaux de Paris en 1938. Agrégé en 1939, il obtint le statut de professeur de clinique des maladies mentales et de l’encéphale en 1946. Son observation de la Salpêtrière, à la fois dans Hommes sans nom et Les Reposantes, rejoint celle d'André Baillon qui écrivit aussi sur l'univers de la Pépète dans Un homme si simple et Chalet 1.

    Cette nouvelle, dont le nom vient du jeu de cartes que les pensionnaires de la Salpêtrière jouaient prêt de la grille, évoque les Antoinistes de Paris aux pages 169-170 et 174.

    Recension :
Jean Delay, L'écarté de la Grille,
   Gallimard, 1988, 132 p.
    Publié en 1948 sous le pseudonyme de Jean Faure. L'écarté de la Grille faisait partie du livre intitulé Les hommes sans nom. Jean Delay médecin des hôpitaux psychiatriques retrace ici l'expérience qui sans doute fut la sienne au contact des « grands fous » de la Salpêtrière. Ce récit dédié à André Gide fait la part belle à l'imaginaire fantasque de l'abbé-a-la-jambe-de-bois dit l'abbé John. En cet après-midi du 14 juillet, derrière la Grille du quartier des hommes, les joueurs de cartes Loustan, Lalouette et Monsieur Jules assistent fascinés, abasourdis, rieurs comme ces enfants qu'enchantent le vol des papillons et les cris effarouchés des nourrices haletantes, aux paraboles métaphysiques, évangéliques et loufoques de l'abbé John, l'homme dont les recherches en bibliothèque et le physique trivial de bassesse les déconcertaient. Les impressionnaient aussi l'« expression bestiale du visage, le teint basané d'un mulâtre, le front démesuré dont les cheveux étaient mal plantés, des oreilles décollées et velues, des joues et des bajoues enluminées et chargées de graisse, des lèvres molles et épaisses, un menton fuyant, entourant un nez énorme largement épaté, de couleur aubergine ». Evidemment, ils avaient beaucoup de peine à l'imaginer disant la messe ou administrant les derniers sacrements. Et pourtant, leur curiosité est si grande, leur faim de savoir tellement tenace, leur appétit de vivre si farouche qu'ils interrompent leur partie d'écarté — où l'on écarte les cartes — pour l'écouter disserter sur les vastes étendues des terres africaines qui bourdonneront autour de ses oreilles de faune, ou se laisser aller à quelques confidences sur le désarroi qui le saisit, si justement, au moment où il s'apprêtait à se consacrer avec son grand-papa aux lépreux du monastère de Pernambuco. Le sacrifice fut fatal à l'abbé John : condamné au silence, « les épiscopes (lui) arrachaient sa raison de vivre. Adieu, flots mugissants qui emportaient les digues, adieu, fleurs capiteuses et rhéteuses de (ses) fécondes insomnies, adieu, ô (sa) sœur Hyperbole » !
    Né pour les soins de l'âme, l'abbé John dont la nature ardente ne trouvait plus d'exutoire dans l'éloquence évangélique succomba avec assiduité aux charmes de la Créature. « Aux charmes immanents de la Vénus carioque. » Il devint chamel de charité en charité.
    A sa virilité jaillissante, à l'incandescence de sa jeunesse, l'abbé-à-la-jambe-de-bois joint une exubérance volubile, un goût prononcé pour les citations érudites mais dépareillées. Il entraîne ses acolytes de la Grille « hors de la commune réalité » de leurs maux, « vers les plages fabuleuses où le vrai n'est peut-être pas le réel » ; où la parole libérée des contingences admises communément accède par-delà la misère à une fonction rare : celle de permettre à ceux qui l'écoutent de rêver à leur tour, non plus dans les limites obscures de leur nuit, mais au grand jour, là, au creux d'eux-mêmes où la fiction la plus audacieuse ressemble à s'y méprendre à la vérité. Phantasmes et fantaisie.
                                Shoshana Rappaport
Inaperçus, Lignes 1988/2 n°3, page 201, Éditions Hazan
https://www.cairn.info/revue-lignes0-1988-2-page-195.htm

Voir les commentaires