Simone de Beauvoir - Les hommes ne seront jamais comblés
- Je ne crois pas à l'avenir.
- Il y aura un avenir.
- Mais vous en parlez tous comme d'un paradis. Il n'y aura pas de paradis.
- Bien sûr.
Il m'examinait. Il semblait chercher sur mon visages les mots qu'il devait me dire.
- Ce que nous décrivons comme un paradis, c'est le moment où les rêves que nous formons aujourd'hui seront réalisés. Nous savons bien qu'à partir de là d'autres hommes auront des exigences neuves...
- Comment pouvez-vous désirer quoi que ce soit, sachant que les hommes ne seront jamais comblés?
Il y eut un de ses durs sourires :
- Ne savez-vous pas ce que c'est qu'un désir ?
- Oui. J'ai eu des désirs, dis-je. Je sais.
J'hésitai.
Mais ce n'est pas simplement de désir qu'il s'agit : vous luttez pour les autres, vous voulez leur bonheur...
- Nous luttons ensemble, pour nous, dit-il.
Simone de Beauvoir, Tous les hommes sont mortels
Folio n°533, Paris, 1992 (p.502)
Pierre Debouxhtay, Antoine le guérisseur et l'Antoinisme (critique du livre Revue des lectures)
Pierre DEBOUXHTAY, Antoine le Guérisseur et l'antoinisme d'après des documents inédits, in-12 de 330 p., illustré, F. Gothier, 11, place du Vingt-Août, Liège, 1934, 20 fr.
Ce volume doit être suivi d'un second, qui sera consacré aux doctrines de l'antoinisme. Il se limite à l'histoire du mouvement lui-même.
Conçu avec la rigueur d'une thèse historique, il s'appuie uniquement sur des faits contrôlés et des documents ; par suite, il représente un travail vraiment définitif.
D'ailleurs, son objectivité ne fait nullement tort, à l'esprit qui l'a dicte, puisqu'un papillon joint au volume porte l'imprimatur de l'Ordinaire de Liège.
Il est impossible de résumer ici un pareil travail, tout entier fait de détails et de précisions.
On y peut suivre la vie d'Antoine dans tous ses détails, depuis sa naissance, en 1846, au hameau de Mons, près Liège, jusqu'à sa « désincarnation » et son enterrement en 1912, et le développement de la nouvelle religion jusqn'à la date d'aujourd'hui.
Répandu surtout en Belgique, ou il fut reconnu, en 1914, comme établissement d'utilité publique, le culte antoiniste compte aussi des adeptes en France, et même au Nouveau Monde et au Congo.
L'auteur estime à environ 40.000 le nombre de ses adeptes, en tout cas sensiblement inférieur à 100.000, sous la houlette de la « mère Antoine », le veuve du fondateur, actuellement âgée de 83 ans.
D'abord entraîné dans le mouvement spirite, Antoine fut entraîné par lui au rôle de guérisseur, puis, après avoir été condamné pour exercice illégal de la médecine (1901), il renonça aux médicaments et au spiritisme, pour fonder une nouvelle religion, destinée, pensait-il, à remplacer le catholicisme.
C'est le pendant belge de la « Christian science » américaine et la méthode Coué transformé en mysticisme et en culte. Mais il est vraisemblable que le déclin n'est pas éloigné.
Revue des lectures, 15-03-1934
source : gallica
Léon Hollaenderski, Les Israélites de Pologne - les Chassides
Tout Israélite (comme ils l'affirment) a deux âmes, l'une mauvaise, renfermée dans un vaisseau à gauche du coeur, et l'autre bonne, qui habite le cerveau ; ces âmes luttent entre elles avec acharnement, l'homme prie pour que la bonne âme ait toujours la supériorité sur la mauvaise et quand cela arrive, il peut s'offrir àDieu. L'une des Zadikes (disent-ils) a si bien su perfectionner son âme qu'elle fut transportée dans le ciel, eut un entretien avec le Messie, elle lui demanda le temps dé sa descente sur la terre et eut pour réponse que cela arrivera lorsque tout le monde aura aussi bien suivi la cabale qu'elle l'a fait (1).
Les Chassides pensent que la réunion avec Dieu est le principe de leur religion, ils croient que l'âme est un écoulement de la divinité, c'est pour cela qu'ils supposent que l'homme doit faire son possible pour s'unir avec la haute intelligence par la concentration de l'homme avec son âme ; ils appellent cela l'aspect de Dieu par la croyance, et croient ensuite que le seul but de l'homme et sa plus grande félicité est de se mettre tellement en contemplation avec Dieu que tout ce qui se passe autour de lui disparaisse, et qu'il ne sente rien autre chose que le goût de la joie céleste (2).
Mais comme l'homme n'est pas toujours disposé à ces contemplations, les Chassides y destinent le temps de la prière, ils ont dans ce but quelques paroles cabalistiques qui renferment les noms de Dieu ou des anges (3), ils les disent avant chaque prière et les appellent kavouath.
La réunion de l'homme avec Dieu ne peut avoir lieu que par la joie et la gaîté. Or, si la mélancolie ou la tristesse s'empare d'un Chasside, il doit la chasser.
Le troisième principe des Chassides consiste à s'armer de courage, d'avoir de la résolution et de l'effronterie Azèth.
Les Chassides tiennent aux cérémonies du Talmud tant qu'elles s'accordent avec la cabale et l'ordre du Zadik; les Juifs orthodoxes, au contraire, ne tiennent point aux cérémonies cabalistiques qui contredisent le Talmud.
Les Chassides ne se servent point du livre de prières du rite allemand et polonais, mais de celui des Orientaux sephardim dans lequel se trouvent beaucoup de prières qui ont rapport à la cabale.
Les Chassides ne vont jamais à la synagogue ; ils ont dans chaque endroit, où se trouvent dix Chassides, une maison de prière à part qu'ils nomment klosel (clause) ou maisonnette des Chassides. Ces klosels ne leur servent pas seulement pour la prière, mais encore de club où chacun se rend aussitôt que ses affaires le lui permettent pour s'y entretenir (raconter des nouvelles ou des merveilles du Zadik), on y boit, mange et fume du tabac pour chasser les mauvais esprits. Ce clausel sert souvent de chambre à coucher pour le Zadik.
Adonnés uniquement à la spéculation, les Zadiks s'habillent en blanc, proclament le devoir de la perfection supérieure de quelques âmes et de la plus grande confiance en Dieu. Ils feignent de pouvoir guérir miraculeusement les malades (4), se réservent le droit de bénir toute entreprise commerciale des Chassides, ce qui fait qu'aucun des sectaires n'oserait jamais sans consulter ou sans voir son Zadik former un établissement quelconque. Beaucoup de femmes appartiennent à cette secte (5). Les Zadiks entre eux, les Chassides d'un Zadik avec les Chassides d'un autre Zadik, et tous ensemble avec les Juifs communs rabbinistes vivent en mésintelligence et se querellent sans cesse.
A coup sûr, les Israélites doivent craindre que cette crédule et dangereuse secte n'entrave pas là civilisation parmi eux, car il est défendu sévèrement de développer les facultés intellectuelles ; au contraire, il est enjoint de les entraver et de les anéantir.
Les Chassides disent que plus un pécheur est coupable, plus il ressemble à la divinité, que les supérieurs ont le droit non seulement d'absoudre, mais de décerner à certaines conditions des récompenses aux pécheurs (6).
Aussi tous les rabbinistes éclairés parlent-ils de la secte des Chassides avec le plus profond mépris. Il est à souhaiter que les gouvernements se hâtent de prendre des mesures efficaces pour empêcher la ramification de cette secte si dangereuse, qui se propage dans les masses inertes avec beaucoup de succès, et dont presque toutes les synagogues de Pologne sont déjà empoisonnées (7).
(1) Voyez Zemer Orizim, p.65.
(2) Ils appuient ces paroles à ce que dit le Talmud (Traité sanhedrin), la récompense après la mort ne consiste ni dans le boire ni dans le manger, mais seulement dans le plaisir de contempler la majesté de Dieu.
(3) Les trois mots du Psaume, 148, 16, (ouvre ta main) forment de leurs lettres finales le mot chatlach; c'est, disent les cabalistes, le nom de l'ange employé à la nourriture , et disent-ils, on doit penser aux lettres finales en récitant ce verset; car celui qui les prononce avec attention est sûr de ne jamais manquer de nourriture.
(4) Les femmes des chassides, particulièrement, font le voyage de plusieurs dizaines de milles pour voir le Zadik surtout quand elles sont stériles. Le Zadik, après être payé des deniers appelés pidion, bénit la pénitente, et lui assigne des règles à suivre, en cas de non réussite. Il l'appelle de nouveau et lui fait des reproches de n'avoir pas accompli quelques prescriptions imaginaires, et il la bénit de nouveau parce qu'elle le paie.
(5) La riche Juive nommée Berksonawa de Praga (faub. de Varsovie), appartenant à cette secte a obtenu la permission de tolérance de la part du gouvernement lors de sa querelle avec les Juifs rabbinistes.
(6) Voyez Sulamith, 1, ch. II, p. 508.
(7) Il n'y a rien d'étonnant dans cette secte des Juifs polonais à moitié barbares, si nous considérons qu'ici, dans l'exil, parmi les Polonais chrétiens éclairés, et jouissant de tous les bienfaits de la civilisation, il se trouve des gens qui adhèrent à une pareille secte au sein de la chrétienté. Ceux qui ont entendu parler des prophéties de Towianski et de leurs déplorables suites, sauront bien ce que nous voulons dire.
Léon Hollaenderski, Les Israélites de Pologne, p.293-96
source : gallica
Tracts sur l'antoinisme
(TRACT SUR L'ANTOINISME). — Je vous serais très reconnaissant de vouloir bien m'indiquer quelques brochures, dont je pourrais me servir pour étudier et combattre l'antoinisme.
Cette secte vient d'établir un temple dans notire ville et bien des âmes faibles ne savent que répondre aux commis-voyageurs qui leur parlent de cette nouvelle superstition.
Je crois avoir lu, peut-être dans la Revue des lectures, qu'il existe un tract sur ce sujet. Pourriez-vous m'en indiquer l'éditeur ou mieux, si je ne suis pus indiscret, m'envoyer une centaine d'exemplaires ? D'avance, je vous remercie au nom des âmes à qui je pourrai ainsi rendre service.
R. — Nous avons fait expédier le tract. On le trouve à la librairie de la « Croix du Nord », 1, rue des Sept-Agaches, à Lille (Nord).
Revue des lectures, 1928
source : gallica
André Towianski et le towianisme

Venu en 1841 s'entretenir avec Adam Mickiewicz, il avait aussitôt rend la raison à sa femme, atteinte de démence. Le poète avait vu entrer dans sa chambre "un homme de haute taille, à l'aspect militaire, vêtu d'une redingote boutonnée jusqu'au cou, muni de grandes lunettes rondes qui laissaient voir des yeux profonds, sous un large front dégarni, avec une expression à la fois imposante et douce."
Un Messie sous Louis-Philippe (L'Echo du Merveilleux 15-02-1913)(gallica)
Inféodé à la secte de Vintras dont il se sépara par la suite pour se déclarer une réincarnation de Napoléon et prêcher une série d’erreurs qui se rapprochent de celles professées par les Vaudois et par Swedenborg, avait fondé à Paris une association religieuse et politique, sous le nom des « bons frères ».
Les partisans de Towianski croient à l'immortalité de l'âme et à son action continue. Chaque homme a reçu une mission de l'Être Suprême. Si cette mission n'est pas remplie, l'âme est dans une continuelle souffrance, elle entre dans le corps d'un enfant nouveau-né et poursuit sa tâche de génération en génération.
D'après cette croyance, il résulte que l'âme de Napoléon qui avait pour mission de régénérer le monde, d'établir l'unité sur la terre, souffre. C'est cette âme sans doute qui est entrée dans le corps de Towianski, pour continuer et accomplir sa tâche. Waterloo, il l'appelle Golgotha moderne, le portrait de Napoléon, fait d'après la pensée de Towianski représente un homme qui souffre après sa mort et qui contemple avec douleur son oeuvre inachevée.
D'après la conviction de ses disciples, Towianski guérit les malades, par l'attouchement, lit dans l'avenir et a prédit plusieurs faits qui se sont accomplis.
Le gouvernement Français lui donna l'ordre de quitter Paris. Il visita Rome et alla en Suisse. Ses disciples lui sont restés fidèles, quelques uns ont fait le voyage à pied pour le voir, pour l'entendre. Si nous sommes bien informiés, déux ont perdu la raison, et les disciples prétendent que c'est la punition de Dieu, parce qu'ils sont entrés dansle cercle le plus intime n'ayant pas la foi.
Ce qui nous intéresse le plus, c'est que la doctrine de Towianski embrasse dans la génération générale l'avenir des Israélites.
Ils ont déjà expié leurs péchés, Dieu leur a pardonné. »
« C'est un peuple aimé de Dieu, par suite des migrations des âmes, il y a sur le monde plus d'Israélites qu'on ne le croit,
« Le Messie sortira du pays Slave et si Towianski n'accomplit pas sa tache, il en prépare la voie à un autre plus heureux.
« Le monde commencera une nouvelle ère par le concours des trois grands peuples, des français, des slaves et des juifs
Ces doctrines ainsi que la cordiale fraternité qui règne parmi les disciples de Towianski ont séduit quelques Israélites. On voyait parmi les nobles, parmi les officiers de l'armée polonaise, quelques Juifs qu'on y recevait avec amour et fraternité.
Ces doctrines, mélange des idées chrétiennes et juives, des rêves de Swedenborg et des pensées de Fourrer, accompagnées de quelques guérisons à l'aide du magnétisme, ont fanatisé des disciples dévoués, et parmi tant d'autres, comme nous l'avons déjà dit, le poète, le professeur Mickiewicz. Charles Rozycki, colonel dans l'armée insurrectionnelle, homme de grands talents militaires est de leur nombre.
Nous ne nous permettons pas de juger les doctrines que nous ne connaissons que superficiellement. Si nous en avons donné une esquisse, c'est pour rpouver combien l'idée de salut par l'action d'un homme supérieur est accréditée en Russie, en Pologne, puisqu'un Messie Pris, peut grouper autour de lui des savants, des militaires et des disciples de toutes les croyance.
Jan Czyński, La Pologne catholique et la Pologne libérale, 1848, p.77-79
source : gallica
Pour Towianski, la France n’était toutefois pas uniquement le lieu de l’expiation, elle était également (comme d’ailleurs la Russie) censée jouer un rôle actif primordial dans la réalisation de sa mission. Les Polonais en pèlerinage, en tant que premiers appelés, constituaient le « canal » par lequel la révélation devait lui parvenir. Towianski envisageait la propagation de sa « science » par le biais de la « Loi d’harmonie » qui peut être résumée comme suit : l’homme doit vouloir sans cesse pousser son esprit vers Dieu, il doit vouloir briser les chaînes qui le tiennent à la « terre » et orienter son être vers la réalisation de la parole du Christ. Il doit pour cela réaliser le triple sacrifice : celui de l’esprit, celui du corps et celui de l’action. Lorsqu’il est disposé à ce sacrifice, l’homme élève son « ton » chrétien, il attire ainsi sur lui une « colonne lumineuse » composée d’esprits élevés (à tel point qu’ils ne peuvent plus exister dans une enveloppe corporelle) qui l’aide à garder l’élévation de son « ton », mais il attire également les esprits d’autres hommes, ceux de ses contemporains disposés au sacrifice. Si les hommes se groupent pour élever leur « ton », ils attireront un plus grand nombre d’esprits enclins à les imiter. La « Loi d’harmonie » est donc celle par laquelle un esprit (ou un groupe d’esprits) qui élève ou cultive son « ton » attire d’autres esprits qui acceptent le sacrifice. Les Polonais de la Grande Émigration devaient donc tous ensemble élever leur « ton » chrétien et convaincre ainsi d’autres nations de les imiter. Towianski pensait que certaines nations étaient élues par Dieu, il pensait aussi que, parmi celles-ci, la France jouait un rôle de premier plan car elle avait déjà été préparée.
Jeremy Lambert, « Le towianisme en France. La France dans le towianisme. », in « Slavica
Bruxellensia », n°3, Université Libre de Bruxelles, juin 2009, pp. 61-73.
source : ulb.ac.be
Proverbe - Chassez le naturel, il revient au galop
2. Dispositions psycho-physiologiques dominantes qui déterminent la personnalité d'un individu. Synon. complexion, nature (v. ce mot II B), personnalité, tempérament. Avoir un bon naturel. Il lui échappait parfois des sourires qui trahissaient en elle un naturel rieur enseveli sous le maintien exigé par sa vie (Balzac, Lys, 1836, p.43). Ça partait d'un bon naturel... Seulement rien qu'à la pensée, il me remontait déjà du fiel (Céline, Mort à crédit, 1936, p.468). Faible, et d'un naturel craintif, Alphonsine, malgré sa bonne volonté, ne parvenait pas à donner à la maison cet accent de sécurité et de chaude joie (Guèvremont, Survenant, 1945, p.21):
8. Quel monstre! [Tolstoï] Sans cesse cabré, en révolte contre son naturel, forçant de douter sans cesse de sa sincérité, étant tour à tour tout et tous et jamais plus personnel que lorsqu'il cesse d'être lui-même...
Gide, Journal, 1941, p.96.
- Proverbe. Chassez le naturel, il revient au galop. [Exprime l'idée qu'une personnalité n'est pas modifiable] On a eu tort de dire «chassez le naturel, il revient au galop», car le naturel ne se laisse pas chasser. Il est toujours là (Bergson, Deux sources, 1932, p.289).
source : http://www.cnrtl.fr/definition/naturel
L’expression “chassez le naturel, il revient au galop”, trouve son origine française dans la littérature. Elle est, en effet, tirée de la pièce “Le Glorieux” (1732) de Philippe Néricault dit Destouches. Mais il faut noter que Destouches s’est inspiré de l’idée du poète latin Horace qui a vécu vers 50 avant J.-C.
“Naturam expelles furca, tamen usque recurret”
Horace, “Épîtres I”(Livre I, Épître X, v.24)
Ce vers, traduit en français et passé en proverbe, ne nécessite pas grandes explications: on imagine aisément une personne qui essaye de corriger ses défauts depuis longtemps et qui se retrouve sous leur emprise à la moindre occasion et sans préavis … ce qui fait dire à l’entourage, en général avec le sourire: “chassez le naturel, il revient au galop”.
source : http://www.mon-expression.info/chassez-le-naturel-il-revient-au-galop
Traductions et équivalents :
allemand : Ein Bauer bleibt immer ein Bauer (un paysan restera toujours un paysan)
Die Katze lässt das Mausen nicht (un chat ne laisse pas en paix la souris)
Man kann die Natur nicht ändern (on ne peut pas changer la nature)
néerlandais : Iemands ware aard verloochent zich niet (Personne ne peut renier sa nature)
anglais : The leopard can't change its spots (un léopard ne change pas les taches de sa fourrure)
What is bred in the bone will come out in the blood (ce qui se fait dans l'os, ne se fait pas dans le sang)
espagnol : Genio y figura hasta la sepultura (même caractère et même visage jusqu’à la tombe)
Pierde el pelo pero no las mañas (on perdrait les cheveux qu'on ne changerait pas de manière)
italien : Vizio per natura fino alla fossa dura (un vice de nature ne se change pas)
latin : Quod natura dedit, tollere nemo potest (ce que la nature veut, personne ne peut changer)
russe : Гони природу в дверь, она войдет в окно (chassez le naturel par la porte, il revient par la fenêtre)
Ø Bulletproof
J’avoue que, plus qu’un autre soir, Samedi, j’aurais aimé être à l’épreuve des Balles.
J’ai quitté cette boîte après ce tir sans sommation. Et j’ai mis un trajet Paris/Banlieue en bus de nuit à extraire la Balle. La Plaie s’est refermée aujourd’hui. Je n’ai pas envie de me demander pour combien de temps. Tout ce que je veux, c’est que les futures balles ne m’atteignent pas.
Plus qu’un gilet par balle, cette nuit, il m’a manqué mon Rêve. Mes écouteurs d’iphone. Une écharpe de trois kilomètres pour me protéger du froid et un petit ami qui ne soit pas sur une plage australienne pendant que je saigne sur Paris.
Je souhaite juste être à l’épreuve des balles pour pouvoir m’amuser avec mes amis sans avoir besoin de fermer les yeux.
Je souhaite juste être à l’épreuve des balles pour ne pas ressentir ces douleurs qui naissent de jalousies ou d’envies.
Je souhaite être invincible ou aimé.
source : http://www.beur-boy.fr/
Simone de Beauvoir - La couleur de l'indifférence
Je m'assis sous le tilleul, à sa place. Je regardai les ombres violentes, les blancs crus, je respirai l'odeur des magnolias ; mais les lumières et les parfums ne me parlaient pas ; cette journée n'était pas pour moi ; elle restait en suspens, elle réclamait d'être vécue par Marianne. Marianne ne la vivait pas et je ne pouvais pas me substituer à elle. En même temps que Marianne un monde avait sombré, un monde qui n'émergerait plus jamais à la lumière. Maintenant toutes les fleurs s'étaient mises à se ressembler, les nuances du ciel s'étaient confondues, et les journées n'auraient plus qu'une seule couleur : la couleur de l'indifférence.
Simone de Beauvoir, Tous les hommes sont mortels
Folio n°533, Paris, 1992 (p.439)
Le culte du Travail selon Godin dans le Familistère
Anticlérical virulent, Godin pratique cependant un déisme très personnel, évoquant un Être suprême bienveillant ; il croit de façon ardente que le Travail, toute activité ayant pour but de transformer la matière afin de vivre mieux, est la raison profonde de l'existence de l'Homme, et par conséquent d'atteindre l'essence humaine, une certaine part de divin. S'opposant aux principes mêmes du capitalisme, il estime que l'ouvrier devrait posséder le statut social le plus élevé, puisque c'est lui qui travaille, que c'est lui qui produit les richesses. Au-delà des aspects matériels de l'œuvre, le Familistère doit amener à une élévation morale et intellectuelle du travailleur, lui permettre de retrouver l'estime de soi et son indépendance vis-à-vis de la société bourgeoise.
L'éducation à l'économie sociale va dans ce sens, mais également l'architecture même des bâtiments : à l'intérieur des cours, les balcons qui donnent accès aux appartements sont créés pour être des lieux de rencontre permanents entre ouvriers, quelle que soit leur position dans l'usine, manœuvre, employé de bureau ou cadre, afin de donner naissance à une réelle fraternité entre Familistériens. Les fenêtres intérieures, la promiscuité, sont pensées comme des éléments d'émulation : la vue d'un intérieur bien tenu doit vous pousser à vous-même entretenir votre logement, d'autant plus que le regard de l'autre, et sa désapprobation, sont considérés comme la meilleure des sanctions. Cette architecture particulière, décrite par ses détracteurs comme « carcérale », est donc voulue, afin de permettre une auto-discipline et une responsabilisation des habitants qui rendent inutile toute forme de police.
Cette notion de responsabilisation n'est pas anecdotique : elle est à la base de l'œuvre de Godin, pour qui l'amélioration des conditions de vie n'est qu'une première étape. Il s'agit, à terme, de permettre aux ouvriers de se libérer de toute dépendance vis-à-vis du patronat, d'abolir le salariat et de lui substituer l'Association.
source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Familist%C3%A8re