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gustave gony

Gustave Gony, spirite et socialiste d'abord

Publié le par antoiniste

    Gustave Gony est spirite et socialiste. Il habite selon Robert Vivier (p.157) à Seraing. En tant qu'ami de Louis Antoine, il l'initia, avec son ami Célestin Macot, aux idées d'Allan Kardec, en l'invitant notamment chez Mr. Ghaye, à Tilleur.
    Il fut à l'origine de la première tentative en 1884-86 de la société spirite avec Debroux et Antoine (p.168) et de la nouvelle tentative (p.173) qui se trouvera fructueuse en 1893-95.
   Le Flambeau, ayant comme rédacteur en chef un militant socialiste, G. Gony, qui avait fondé avec Antoine le groupe des "Vignerons", répandait les enseignements spirites dans la région de Seraing.
Pierre Debouxhtay, Antoine le Guérisseur et l'Antoinisme, p.65

    L'écrivain Louis Piérard participera en écrivant des articles pour ce journal.

    L'enterrement de Mme veuve Gony est le deuxième selon le rite spirite dans la région, le 13 janvier 1892 (Pierre Debouxhtay, p.28). C'est Gustave Gony qui fit un discours à l'enterrement spirite de Ferdinand Delcroix, père de Fernand Delcroix.
    On sait quelle société fut en charge de cette enterrement (l'Union spiritualiste de Liège).

    Un Alfred Gony, menuisier âgé de 34 ans en 1893 et domicilié à Jemeppe, est témoin sur l'acte de décès du fils des Antoine.

les Gony, spirite(s), socialiste(s)

signature d'Alfred Gony
(Acte de décès du fils Antoine(search.arch.be))
 

    Jacques Cécius, dans son opuscule (non publié, disponible chez l'auteur) dit : "Gustave Gony, militant socialiste, fondateur d'un journal prônant le suffrage universel. Un ancien directeur d'école nous dit un jour que les vieux de Seraing racontaient que Gony et son frère étaient à ce point pauvres que, lorsqu'il y avait l'une ou l'autre réunion politique, l'un des deux devait rester à la maison, car ils ne possédaient qu'un seul pantalon en bon état !
    "Gony, pratiquant convaincu du spiritisme, réussit à entraîner un dimanche son ami Louis à une séance à Tilleur, commune voisine. Ces séances d'évocation se déroulent dans l'arrière-salle du café Ghaye. Les filles du tavernier sont les médiums attitrés."

les Gony, spirite(s), socialiste(s)

signature de Gustave Gony
sur son acte de mariage (12 septembre 1900)(search.arch.be))

    Un petite rue de Seraing porte le nom de Gustave Gony (ainsi qu'une Résidence et une École maternelle), vers le Bois de la Marchandise d'Arras.

    On trouve une fiche généalogique au nom de Gustave Jean Joseph Gony, naissance le 5 Juin 1870 à Jemeppe-sur-Meuse, décès le 19 août 1913 à Seraing. Chef de bureau, Secrétaire communal. Marriage avec Marie Catherine Guillemine PLUMIER à Seraing, le 12 septembre 1900. Le Fraterniste écrit une petite nécrologie pour Gustave Gony.

    Reste à découvrir le lien, s'il y en a un, entre cet Alfred et ce Gustave. Jacques Cécius semble indiquait qu'ils sont frères. Mais la fiche généalogique n'indique d'un frère (sans date de décès), un certain Alphonse qui réside à Huy en 1900 et qui sera témoin du mariage de Gustave (acte de mariage avec Marie Plumier).

Gustave Gony, spirite d'abord

Signature de Alphonse Gony sur l'acte de mariage de Gustave Gony (12 septembre 1900)

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Tombe des époux Gony au cimetière des Biens communaux de Seraing

Publié le par antoiniste

Tombe des époux Gony au cimetière des Biens communaux de Seraing

Vue d'ensemble

La plaque devant porte l'inscription : À notre mère regrettée Madame Gustave Gony-Plumier 1868-1967 (il s'agit de l'épouse du politique).
Le médaillon dans la couronne doit représenté la mère de Gustave Gony (enterrement avec funérailles spirites).
La plaque à droite est en souvenir de leur fille Andrée (1901-1985) avec son mari Nestor Dohogne (1898-1968)

Tombe des époux Gony au cimetière des Biens communaux de SeraingTombe des époux Gony au cimetière des Biens communaux de SeraingMédaillon représentant une photo de Gustave Gony

La plaque porte l'inscription : À notre époux et père regretté, Gustave Gony 1870 - 1913

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Nécrologie Mme veuve Gony (Le Messager, 1er février 1892)

Publié le par antoiniste

Nécrologie Mme veuve Gony #1 (Le Messager, 1er février 1892)

Nécrologie Mme veuve Gony #2 (Le Messager, 1er février 1892)

Nécrologie

    Mercredi, 13 janvier, a eu lieu, à 3 heures, à Jemeppe, l'enterrement civil de Mme veuve Gony, avec le concours de la Fédération spirite régionale de Liége.
    Une foule d'amis et connaissances de la famille lui ont témoigné leurs sympathies en assistant aux funérailles.
    Au cimetière, deux discours spirites ont été prononcés, l'un par M. Houart, l'autre par M. Paulsen.
    Voici le discours de M. Houart :

             Mesdames, Messieurs,
   
Au nom des amis de la famille de Mme Gony, je viens rendre ici un légitime hommage à la mémoire d'une bonne et courageuse mère de famille, d'une femme de cœur et d'esprit que chacun de nous regrette.
    Mme Gony est morte en libre-penseuse, bien qu'ayant été élevée dans les mystères de la foi romaine ; elle s'est éteinte sans vouloir user des prétendus secours de la religion, parce qu'elle avait cessé de subordonner sa raison à des enseignements qui en sont la négation, parce que son intelligence et sa conscience, affranchies de ces enseignements dogmatiques, s'élevaient au-dessus de cette foi aveugle qui paralyse le jugement à ce point que les victimes de cette foi, c'est à dire les pauvres fanatiques, en arrivent à perdre l'exacte notion du bien et du mal; Mme Gony a su s'élever au-dessus de cette foi misérable qui atrophie l'intelligence et stérilise les sentiments ; cette femme de bon sens a compris sans doute qu'il n'appartient à personne, qu'il n'est au pouvoir d'aucun, fut-il pape ou roi, de s'interposer entre Dieu et les hommes, que le plus digne entre tous est le plus vertueux et que l'élévation morale seule est la marque de dignité qui rapproche de la Divinité.
    Mme Gony était également une femme de cœur ; elle a été une épouse vertueuse et dévouée, une mère affectionnant les siens avec toute la tendresse désirable.
    Et de cette intelligence émancipée, de ce grand cœur, de cette affection tendre, il ne resterait rien, selon le théories matérialistes, rien que le souvenir ? Après une vie d'épreuves, de tribulations, de misères de tous genres, il n'y aurait que le néant, où chacun viendrait échouer, les bons comme les mauvais, et où viendraient se confondre le bien et le mal ? Franchement, s'il en était ainsi, ce ne serait guère la peine de naître pour la plupart et, pour beaucoup d'autres, il serait assurément préférable de ne pas venir. Mais heureusement il est une philosophie nouvelle, le spiritualisme expérimental, qui nous apprend la raison d'être de toute chose et qui, en révélant notre origine, nous explique le but de l'existence, nous indique l'avenir, la destinée heureuse pour laquelle nous sommes créés. C'est la consolation des malheureux, l'appui des faibles, le soutien des affligés ; c'est l'espérance apportant les forces et le courage nécessaires pour surmonter les difficultés de la vie et supporter patiemment les épreuves qu'elle rencontre ; c'est enfin la science occulte démontrant les progrès et les destinées de l'âme, par la pluralité des existences et sa vie heureuse en des mondes où le mal a complètement disparu des mœurs de leurs habitants.
    Ce sont là d'ailleurs les seules données conformes à la raison, les seules qui apportent quelques lumières à l'humanité égarée, perdue dans l'obscurité des erreurs, et qui donnent une solution rationnelle au problème de l'existence.
    Pour nous, spirites, Mme Gony n'est pas entièrement anéantie : son corps matériel nous est ravi, il rentre dans l'élément universel, mais son âme est là, immortelle, aussi sensible aux marques d'affection qu'auparavant, entourant ceux qui lui sont chers de ses effluves bienfaisantes.
    Nous dirons donc un éternel adieu à son corps, mais à son âme nous disons : au revoir dans un monde meilleur.

Le Messager, 1er février 1892

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Nécrologie Marie-Charlotte Piron (Le Messager, 15 mai 1891)

Publié le par antoiniste

Nécrologie Marie-Charlotte Piron (Le Messager, 15 mai 1891)

Nécrologie.

    Le mardi 28 avril dernier a eu lieu, à Jemeppe, l'enterrement spirite de Mme Marie-Charlotte Piron.
    Le cortège, nombreux et imposant, était précédé de la musique et du drapeau de l'Union spirite de Seraing, dont la défunte était membre. A la maison mortuaire, Mlle Guillemine Gaye a prononcé un discours de condoléance.
    Au bord de la tombe, devant l'assistance silencieuse et attentive, M. Gustave Gony a rendu hommage aux convictions et qualités de la défunte.

Le Messager, 15 mai 1891

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Nécrologie, Louis Antoine fils (Le Messager, Liège, 1er Mai 1893)(iapsop.com)

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Nécrologie, Louis Antoine fils (Le Messager, Liège, 1er Mai 1893)(iapsop.com)

Nécrologie du fils de Louis et Catherine Antoine

    Une famille spirite très dévouée de Jemeppe-sur-Meuse, vient d'être éprouvée cruellement par la mort de M. Louis Antoine, employé au chemin de fer du Nord, décédé le 23 avril 1893 à l'âge de 20 ans.
    L'Union Spirite, de Seraing, a procédé aux funérailles civiles le surlendemain à 5 heures du soir. Elles ont été imposantes dans leur simplicité.
    A la levée du corps, le cercueil fut recouvert d'un beau drap mortuaire appartenant à la Société Spirite. Un discours d'une émotion communicative, que nous reproduisons plus loin, fut prononcé par M. Houart et la prière des morts dite par M. Engel. Précédé du magnifique drapeau de l'Union, un long cortège composé de parents, d'amis et de spirites, s'est dirigé vers le cimetière où deux discours ont aussi été prononcés : l’un par M. Engel, l'autre par M. Gony, tous deux écoutés avec l'attention et le recueillement le plus religieux.
    La populeuse et intelligente commune de Jemeppe, qui compte près de 10.000 habitants, sait toujours rendre hommage à ses enfants, aux esprits éclairés surtout que n'aveuglent plus les préjugés d'antan. Beaucoup de personnes y connaissent, du reste, la sublime et consolante philosophie spirite qui réhabilite devant l'Esprit humain l'Être Suprême défiguré par les religions intéressées. Qu'il nous soit permis de constater, une fois de plus, combien l'esprit de tolérance s'affirme en ces milieux livrés jadis aux influences d'un clergé fanatique et ignorant. Voici le discours prononcé par M. Houart :

                              Mesdames, messieurs,
    Au nom des amis de M. Louis Antoine, je remplis le pénible devoir de dire ici quelques mots d'adieu au jeune homme qui descend si prématurément dans la tombe.
    Je dis : devoir pénible, parce que, père de famille également éprouvé dans mes affections par la mort d'êtres chéris, j'apprécie mieux toute la portée du malheur qui accable en ce moment la famille Antoine.
    Ah ! je renonce à sonder la profondeur de son légitime chagrin, car l'étendue de sa peine est d'autant plus grande qu'elle ne possédait que cet enfant, ce fils si justement aimé, si bien doué des qualités du cœur et de l'intelligence.
    Pauvre ami Louis qui disparaît au printemps de la vie à l'âge des rêves dorés où tout dans la nature sourit aux aspirations intimes de l'âme comblée d'espérance !
    Il a lutté pourtant, il voulait vivre. Miné depuis trois ans par la terrible maladie qui l'a emporté, il a souffert courageusement sans trop se plaindre, combattant les progrès du mal avec une constance admirable, une force de volonté telle qu'il se faisait allusion sur sa situation.
    Mais à bout de force, il avait atteint il y a quelques jours ce degré de faiblesse qui ne supporte plus la lutte et c'est à ce moment suprême qu'il comprit qu'il était irrémédiablement perdu. Appelant près de lui son brave et digne père, il l'embrassa une dernière fois, le serrant de ses bras mourants sur sa poitrine expirante.
    Malheureux père ! votre douleur est immense, nous la comprenons.....
    Et vous, infortunée mère, votre affliction est-elle moins profonde, votre chagrin moins cuisant ? Non, certes ! le cœur d'une mère est infini et quand il est atteint dans ce qu'il y a de plus cher au monde, de quel déchirement ne subit-il pas l'étreinte douloureuse ! Vous voilà seule maintenant, seule avec le souvenir de l'absent, de l'objet de votre tendresse, vous voilà privée de la vue de l'être aimé, de sa compagnie assidue et agréable. Vous seriez à plaindre davantage s'il ne vous restait une grande et précieuse consolation, celle de savoir que l'Esprit de votre fils est là, dégagé de ses liens terrestres et qu'il pourra bientôt venir vous confirmer les nobles et précieux enseignements d'outre-tombe dont il aimait à s'entretenir.
    Résignez-vous aux décrets divins, parents désolés : puisez dans les témoignages de sympathie et d'estime que cet évènement pénible vous procure, la force nécessaire pour supporter courageusement l'épreuve qui vous afflige en ce moment.
    A toi, jeune ami Louis, je dis au nom de ta famille éplorée, au nom de tes amis et de l'assistance si nombreuse qui nous entoure : adieu et au revoir dans un monde meilleur.

Le Messager, Liège, 1er Mai 1893 (source : iapsop.com)

    Louis Martin Joseph, dit Martin, est né le 23 septembre 1873 et décédé le 23 avril 1893, à même pas 20 ans, donc.

    Octave Houart était membre des Vignerons du Seigneur d’après Robert Vivier. Mais il était également membre de l’Union spirite de Seraing. Il participa aux Congrès spiritualistes de Liège en 1875 et en 1905, et en fut président du comité du Congrès National de 1920.
    On sait que François Tinlot, architectes de plusieurs temples antoinistes, est également l’auteur de la Manufacture de caoutchouc Octave Houart, à Sclessin (14, Quai de l'Industrie, mtn quai François Timmermans).

    Pierre Engel fera le discours funèbre pour le père du Frère Delcroix.

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Nécrologie, Ferdinand Delcroix (père de Fernand)(Le Messager, Liège, 1er Août 1891)(iapsop.com)

Publié le par antoiniste

Nécrologie, Ferdinand Delcroix (Le Messager, Liège, 1er Août 1891)(iapsop.com)

Nécrologie

    Le 14 juillet dernier ont eu lieu à Ougrée les funérailles spirites de M. Ferdinand Delcroix.
    A la maison mortuaire, M. Engel a dit la prière de circonstance et le cortège composé de plus de 2000 personnes s'est ensuite dirigé vers le cimetière communal, précédé de la section musicale et du drapeau de l'Union Spirite de Seraing.
    On remarquait dans cet imposant cortège des dames et des demoiselles au nombre d'environ 500, marchant immédiatement après les membres de la famille, ce qui a laissé la meilleure impression. La foule énorme formant le convoi funèbre témoignait de l'estime profonde dont jouissait M. Delcroix qui avait su par une vie laborieuse, une nature honnête et un caractère loyal gagner les sympathies de ses concitoyens.
    Au cimetière, devant la foule profondément attentive, M. Engel a retracé longuement la vie du défunt et défini les croyances spirites que le frère Delcroix sut toujours défendre avec ardeur.
    Ensuite M. Gustave Gony, au nom de la Fédération Spirite de la région de Liége a rendu aussi en excellents termes l'hommage fraternel et mérité que nous devons tous aux hommes de cœur qui se font les apôtres des idées larges et généreuses. Le Réveil de Seraing a inséré dans son n° du 19 juillet l'excellent discours prononcé par notre ami M. Gony. L'espace nous manque pour reproduire ces deux discours très étendus.

Le Messager, Liège, 1er Août 1891 (source : iapsop.com)

    Je n'ai malheureusement pas pu retrouver son acte de décès en ligne. Il s'agit très certainement du père du professeur Fernand Delcroix, car ce dernier raconte que sa famille était spirite.

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Louis Piérard - En Wallonie (1911)

Publié le par antoiniste

Louis Piérard - En Wallonie (1911)

Auteur : Louis Piérard
Titre : En Wallonie
Éditeurs : Henri Lamertin, Bruxelles, 1911Louis Piérard - En Wallonie (1911)

    Louis Piérard est un homme politique belge et un militant wallon né à Frameries (dans le Borinage) le 7 février 1886 et mort à Paris le 3 novembre 1951, mais repose au cimetière de Frameries, au pied d'un des plus anciens charbonnages. Sur le tombeau érigé par la commune, on lit l'inscription Citoyen du monde. Son œuvre vient de passer dans le domaine public.
    Issu d'une famille modeste (ses deux grands-pères étaient mineurs), il vint très jeune au socialisme et lutta aux côtés de Jules Destrée et Émile Vandervelde pour le suffrage universel. Il fut maire de Bougnies, sur la frontière française, de 1933 à sa mort.
    Journaliste, il collabora au journal Le Soir puis au journal Le Peuple, organe de son parti, mais aussi pour Le Flambeau, le journal de Gustave Gony (il est donc possible qu'il fût spirite). Il accompagne François Crucy pour son article dans l'Humanité. Il écrivit de nombreuses critiques d'art (sur Van Gogh, Manet…) et Visages de la Wallonie (réédité par Labor, Bruxelles, 1980). Ce livre est de la même trempe que ce dernier, mais date de 1911, un des premiers titres de l’auteur.
    Il y consacre deux chapitres à ce qui nous intéresse : les Thaumaturges (pp. 47-49) et Antoine le Guérisseur (pp.50-56). Pour autant, l’auteur ne nous apprend rien, et fait un travail de journaliste qui rapporte des faits. Cependant je doute qu’il se soit rendu à Jemeppe. Jugez par vous-mêmes. Pourtant, il semble bien connaître le culte, car deux articles (L'Humanité donc, et Le Monde illustré) l'évoque. Et il a soutenu la reconnaissance du culte auprès du Parlement.
    On retrouve une sœur Alice Piérard en relation avec le temple de Verviers, sans savoir s'ils sont de la même famille.


                                 THAUMATURGES

    A tout seigneur, tout honneur. Que je vous parle d'abord de l'éphémère bon dieu Baguette qui opéra deux mois durant à Ressaix, près de Binche dont le carnaval est célèbre.
    Jemeppe-sur-Meuse avait déjà Antoine le Guérisseur. Nous connaissions aussi un brave paysan d'Erbisœul qui succéda à son beau-père dans les délicates fonctions de Tout-Puissant. Et cette trop neuve région du Centre où Baguette opéra, n'avait-elle eu déjà Louise Latteau, la fameuse stigmatisée de Bois-d'Haine ?
    Ce christ de Ressaix, après des semaines de gloire et de recettes abondantes (on vint le consulter Paris, de Lille et d'Arlon !) connut en quelques jours la plus lamentable des déchéances et le ressentiment de la foule. Il eut le tort grand de ne point se montrer assez supra-terrestre ; Il s'enivra, eut une maîtresse, fut appelé au Parquet de Charleroi. Aucun dieu ne peut résister à de telles épreuves.
    La révélation lui était venue au fond de la mine : plusieurs fois, devant ses camarades ahuris, puis bouleversés, ce jeune sclauneur jetant son pic s'était écrié « qu'il le voyait encore. » Sur la façade du cabaret paternel, on peignit à la chaux blanche : Au nouviau bon Dieu, Jules Buisseret, dit Baguette. Et malades, curieux, reporters, affluèrent de partout. « Qui eût cru, dit la mère Buisseret, que nos fieu s'rait dèv'nu bon Dieu ? »
    Moi aussi je fus le consulter. Le pays est hideux, presque effrayant : chemins noirs et boueux, maisons toutes pareilles, trop neuves et trop sales à la fois. On se prend à regretter avec douceur d'autres régions charbonnières, antiques celles-là, où une industrialisation féroce n'a pas encore souillé un paysage de vieux terrils verdissants et de collines douces.
    Aux murs du cabaret sordide, des béquilles, des crucifix ornés d'une cocarde en flanelle rouge, des vierges naïvement peinturlurés, voisinaient avec des chromos recommandant le chocolat des Boers ou l'élixir des colombophiles. Les visiteurs attendaient leur tour, assis devant une chope crasseuse. « Allons, à qui le tour ? » criait de temps en temps le Bon Dieu du fond de la cuisine. C'était un jeune homme maigre, aux joues blêmes, au regard fuyant. Une narquoise chanson populaire décrivait ainsi son accoutrement :
                     Il a n'ceinture de rouge coton,
                     Pou fé t'nir ses marronnes (son pantalon),
                     Il a planté dins des bouchons
                     Des s'pénes (épines) pou fé n'couronne.
    Ajoutez à cela un énorme crucifix en plomb attaché au gilet du bonhomme par une épingle de sûreté, et un sceptre grossier. Son remède consistait en peu de chose : dire des prières tous les jours, matin et soir, et après les repas : faire le signe de la croix de la main gauche et à l'envers. Penser à lui. Et voilà ! Cela valait dix sous, cinq francs, dix francs, selon la mine. Cocasse et poignant !

 

                                 ANTOINE LE GUÉRISSEUR

    Cent soixante mille Belges ont demandé dans une pétition au Parlement de leur pays, la reconnaissance d'une nouvelle religion : l'Antoinisme.
    Cent soixante mille signatures ! Ni le suffrage universel, ni l'instruction obligatoire, ni la limitation des heures de travail n'ont jusqu'ici, bénéficié d'un tel engouement. Dans une lettre qui accompagne la pétition, une propriétaire, un professeur de lycée, et un lieutenant d'infanterie exposent ce que demandent avec eux, ces 160.000 Belges : la reconnaissance légale d'un nouveau culte, le culte » antoiniste », du nom de son fondateur, Antoine le Guérisseur, un homme étrange qui, au pays de Liège, exerce depuis quelques années, un étonnant prestige.
    Si Antoine le Guérisseur et ses adeptes, dit la pétition, demandent la reconnaissance légale de leur culte, ce n'est pas pour obtenir des subsides. La religion antoiniste est fondée sur le désintéressement le plus complet : Antoine le Guérisseur et ses adeptes ne veulent recevoir ni subside ni rémunération, mais assurer l'existence légale de leurs temples.
    Ajoutons que les signataires joignent à leur pétition quelques certificats de guérison dont la lecture disent-ils, fera comprendre pourquoi ils considèrent Antoine le Guérisseur comme l'un des plus grands bienfaiteurs de l'humanité.
    Jemeppe-sur-Meuse, c'est, au noir pays du fer et du charbon, près de Liège, un gros village minier au bord de la Meuse. De l'autre côté du fleuve, au bout du pont de fer, c'est l'ancien palais des princes évêques de Liège, l'entrée des usines Cockerill, Seraing, qui impressionnait Victor Hugo si violemment en 1838, et qui est bien, aujourd'hui, l'un des grands temples de la beauté moderne. Un peu plus loin, en amont, sont les cristalleries du Val-Saint-Lambert.
    C'est dans ce décor que le thaumaturge Antoine opère depuis quelques années. On le vient voir de très loin, non seulement de toutes les provinces belges, mais encore du nord de la France et du grand-duché de Luxembourg. Louis-Antoine est né en 1816, Mons-Crotteux, un village de ce pays de Liège, où, à l'âge de douze ans, il descend dans la mine, avec son père et son frère. A l'âge de vingt-quatre ans, il quitte la Belgique pour l'Allemagne, où il travaille pendant cinq ans ; puis nous le retrouvons dans les environs de Varsovie, où il fait un nouveau séjour de cinq ans. Marié à une payse, il revient à Jemeppe, à la tête d'un petit pécule, qu'il a vite fait de partager en aumônes continuelles. Dès lors, après une grande crise mystique, Antoine commença sa carrière de guérisseur.
    Il fut longtemps un fervent disciple d'Allan Kardec et fonda à Jemeppe même, la société spirite des « Vignerons du Seigneur. » Les esprits, un jour, lui révélèrent sa mission actuelle et lui ordonnèrent de se consacrer tout entier à « l'art de guérir. » Et Antoine commença d'imposer les mains aux malades en leur disant simplement : « Pensez à moi, ayez la foi ».
    Plus tard, le nombre des visiteurs étant devenu trop considérable, Antoine adopta le système de la guérison en bloc, par paquets. A présent, il n'opère plus que les quatre premiers jours de la semaine. Vers dix heures, quand quelques centaines de visiteurs sont réunis dans le temple, le bonhomme paraît, monte dans une chaire et invite l'assemblée à se recueillir. Lui-même semble concentrer toute sa pensée sur un point et souffrir. Puis, sortant de sa torpeur, il recueille dans l'atmosphère, les fluides !!! S'ils sont mauvais, il demande aux assistants de prier pour purifier l'ambiance...
    Le « temple » de Jemeppe-sur-Meuse est bâti comme beaucoup de maisons en Wallonie, sur l'emplacement d'une exploitation charbonnière abandonnée : le grisou s'échappe, s'allume facilement à un petit trou que l'on a foré dans le plancher. De même autrefois, les pythonisses plaçaient leur trépied au-dessus d'une ouverture crachant des vapeurs infernales...
    Antoine est végétarien, travaille de ses mains continuellement, tâche de suffire à tous ses besoins.
    – Mais, allez-vous dire, c'est l'histoire de Tolstoï que vous nous racontez là !
    A la vérité, la similitude est frappante, surtout si l'on étudie leur enseignement moral à tous deux.
    Cependant, c'est à un simple, à un ouvrier peu instruit, ne l'oublions pas, que nous avons affaire ici.
    A vrai dire, c'est surtout un panseur de plaies morales ; mais j'ai trouvé dans cet homme une telle force de persuasion que je ne serais point étonné qu'il eût agi favorablement sur bien des malades. A un ami qui m'accompagnait il y a quelques années, quand je l'allai voir, et qui lui demandait une consultation, cet homme étrange répondit avec calme :
    – Vous n'avez point la foi : je lis bien dans vos yeux que vous me demandez cela par goguenardise ou poussé par une frivole curiosité. A quoi bon vous répondre ?...

*
*   *

    Il y a, dans les boniments que répandent les fidèles d'Antoine, des choses bien amusantes. Tenez, je trouve à la fin d'une brochure intitulée : L'auréole de la conscience, révélation et biographie d'Antoine le Guérisseur, l'annonce suivante :
    Nous portons à la connaissance des personnes souffrantes que le GUERISSEUR ne reçoit plus en particulier. Il fait en tout quatre opérations générales par semaine : les lundi, mardi, mercredi et jeudi, à 10 heures.
    Pour les opérations particulières, une dame qui opère en son nom Le remplace. Les personnes qui ont foi en Lui, soit pour conseils, contrariétés ou maladies, recevront satisfaction aussi bien par l'intermédiaire de cette dame que par Lui-même.
    Mais voyons la doctrine de cet homme qui a plus du thaumaturge en lui que du vulgaire rebouteux.
    L'enseignement d'ANTOINE LE GUERISSEUR a pour base l'amour, il révèle la loi morale, la conscience de l'humanité : il rappelle à l'homme les devoirs qu'il a remplir envers ses semblables ; fût-il arriéré même jusqu'à ne pouvoir le comprendre, il pourra, au contact de ceux qui le répandent, se pénétrer de l'amour qui en découle : celui-ci lui inspirera de meilleures intentions et fera germer en lui des sentiments plus nobles.
    La vraie religion, dit LE GUERISSEUR, est l'expression de l'amour pur puisé au sein de Dieu, qui nous fait aimer tout le monde indistinctement.
    Il est plutôt médecin de l'âme que du corps. Non, non, nous ne pouvons pas faire d'ANTOINE LE GUÉRISSEUR un grand seigneur, nous faisons de Lui notre Sauveur. Il est plutôt notre Dieu, parce qu'Il ne veut dire que notre serviteur.
    Ce sont ses disciples qui parlent, mais sans doute vaut-il mieux que nous entendions parler ce dieu nouveau lui-même.
    Lisez les versets naïvement rimés qu'il met dans la bouche de Dieu :
                               Ne croyez pas en celui qui vous parle de moi
                               Dont l'intention serait de nous convertir.
                               Si vous respecter toute croyance
                               Et celui qui n'en a pas,
                               Vous savez, malgré votre ignorance
                               Plus qu'il ne pourrait vous dire.
    Et ceci :
                               Vous ne pouvez faire de la morale à personne
                               Ce serait prouver
                               Que vous ne faites pas bien,
                               Parce qu'elle ne s'enseigne pas par la parole
                               Mais par l'exemple
                               Et ne pour le mal en rien.
    Ce dernier vers vous a un petit parfum d'immoralisme nietzschéen. Il serait fort intéressant d'étudier, à propos de ce guérisseur, certaines sectes religieuses aux conceptions fort libres, qui se sont développées en Wallonie depuis quelques années, en marge du protestantisme et de la religion catholique. L'historien, le philosophe, le folkloriste – et le simple amoureux de pittoresque – y trouveraient sans doute leur compte.

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    Un peu plus loin, dans le chapitre consacré à Liège, l'auteur ajoute, p.160 :

    C'est ce peuple là, à la fois gouailleur et sentimental, frondeur avec Tchanchet et mystique avec Franck, qui vient de constituer un groupe des « adventistes du septième jour », qui rendit célèbre Antoine le guérisseur, le brave thaumaturge de Jemeppe-sur-Meuse, et qui enfanta le mineur Hubert Goffin, précurseur des Nény et des Prouvost de Courrières.

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La Mort de Gustave Gony, l'Enterrement (Le Peuple, 22 août 1913)

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La Mort de Gustave Gony, l'Enterrement (Le Peuple, 22 août 1913)La Mort de Gustave Gony

L'ENTERREMENT

    L'enterrement du regretté Gustave Gony, secrétaire communal de Seraing, ancien échevin de l'instruction publique et des beaux-arts et ancien vice-président du conseil provincial de Liége a eu lieu jeudi, à 11 heures du matin, au cimetière des Biens-Communaux.
    Simplement, sans presque aucun apparat, comme l'homme qui n'est plus, il s'est déroulé entre deux haies de personnes silencieuses et émues.
    Malgré le caractère tout à fait intime de la funèbre cérémonie et bien que l'heure de la levée du corps n'eût pas été publiée, ses camarades, ses amis, ses collègues sont venus en foule et c'est tout un cortège ému et éploré qui l'a conduit de sa maison au champ des morts.
    La bière avait été exposée dans une place du rez-de-chaussée et disparaissait sous les fleurs exhalant le parfum pénétrant du souvenir. Aucune autre décoration que des plantes vertes.
    Gony avait rêvé cette simplicité poignante pour son départ.
    Mais ses camarades n'ont pu s'incliner totalement sous sa volonté et c'est ce qui explique qu'il s'en est allé parmi les fleurs.
    Nous avons admiré de splendides gerbes de fleurs naturelles de l'administration communale de Seraing à son secrétaire, de la Fédération communale socialiste de Seraing à Gustave Gony et de la Fédération liégeoise du Parti ouvrier à son militant, une couronne rouge et blanche des fonctionnaires et employés communaux à leur dévoué secrétaire et des bouquets petits et grands émanant de l'amitié et des intimes.
    Le deuil était conduit par les deux frères du défunt.
    M. Putzeys, bourgmestre, et les citoyens Pirotte, Henry, Delvigne et Merlot, échevins, suivaient ceux-ci.
    Dans la foule, nous avons noté la présence des conseillers communaux au grand complet, du camarade François Van Belle, secrétaire fédéral, représentant le P. O., de MM. Gauthier, directeur des écoles, Biefnot, directeur des travaux, Génard, commissaire de police et de nombreux compagnons de lutte de Gust. Gony.
    Tout le personnel, employés et ouvriers de l'administration communale, des travaux publics, de la police et un grand nombre de membres du personnel enseignant étaient aussi présents.
    A la nécropole, le cercueil a été porté jusqu'au caveau familial par des employés communaux et des militants socialistes.
    Pendant qu'on descendait les restes de notre ami sous la froide pierre du tombeau la foule se rangea en éventail.
    L'oraison funèbre avait été prononcée la veille à la séance publique du conseil communal.
    Pas un mot ne fut dit là. Toutes les têtes découvertes étaient inclinées et l'on entendait les oiseaux chanter leur chanson mélancolique.
    Ce fut une minute d'émotion poignante où chacun se sentit pris d'un étouffement subit et nous ne savons rien de plus tragique que cet adieu muet et collectif s'étranglant dans les gorges et refoulé vers les cours meurtris.

                             AU CONSEIL COMMUNAL
    La cérémonie d'adieu a eu lieu, avons-nous dit, mercredi soir. Tous les conseillers communaux étaient présents, sauf le citoyen Hans retenu à l'étranger.
    M. PUTZEYS, bourgmestre, présidait et a prononcé le discours suivant :
            Messieurs,
    Conformément à l'article 110 de la loi communale, le collège, en sa séance convoquée d'urgence, par suite du décès inopiné de notre regretté secrétaire communal, M. Gustave Gony, a nommé, à titre de secrétaire provisoire, M. Constant Nassogne, chef du bureau des finances.
    En conséquence et en exécution de la susdite loi, M. Nassogne est tenu de prêter le serment prescrit par l'article 2 du décret du 20 juillet 1831 ainsi conçu :
    « Je jure fidélité au roi, obéissance à la Constitution et aux lois du peuple belge ».
    J'invite M. Nassogne à prêter le dit serment.
    M. NASSOGNE. – Je le jure.
    M. LE PRESIDENT. – Je donne acte à M. Nassogne de sa prestation de serment et le déclare installé dans ses fonctions de secrétaire communal provisoire.
    Messieurs, une pénible mission m'est dévolue aujourd'hui. J'ai le devoir de vous annoncer qu'une mort presque foudroyante vient d'emporter notre secrétaire communal, M. Gustave Gony.
    Je ne vous parlerai pas de l'homme politique. Je veux seulement dire en quel estime je tenais ce fonctionnaire.
    Pendant le peu de temps qu'il m'a été donné d'être en rapport constants avec lui, je n'ai eu qu'à me louer, je le dis sincèrement, des nombreux services qu'il m'a rendus, comme des avis éclairés qu'il n'a cessé de me prodiguer, n'ayant jamais en vue que le bien de la chose publique.
    Je tiens, en cette circonstance, à le remercier publiquement : c'est le meilleur hommage que je puisse rendre à sa mémoire.
    Je crois me faire l'interprète du conseil communal en vous proposant l'envoi à la famille, si douloureusement éprouvée, d'une adresse lui exprimant nos vifs regrets et l'assurance de nos sympathiques condoléances.

                             DISCOURS DU CITOYEN DELVIGNE
   
Le cit. DELVIGNE, échevin de l'instruction publique et des beaux-arts, a ensuite pris la parole en ces termes, au nom du groupe socialiste :
              Compagnons,
    Le groupe socialiste regrette, et les deux membres du conseil qui, sans être de notre parti, ont pu, depuis deux ans, approcher le secrétaire communal, regretteront comme nous, j'en suis sûr, que sa famille, se conformant du reste en cela aux désirs et au caractère simple et modeste du défunt, ait décidé de conserver un caractère strictement intime à son inhumation. Sans cela, nous eussions voulu que sa dépouille fut exposée à l'hôtel de ville qu'il a rempli de son activité et de sa pensée et l'administration communale lui eut fait des funérailles publiques comme au meilleur de ses enfants, car personne ne s'est plus dévoué pour elle.
    Nul, en effet, ne s'est plus intimement que lui incorporé les affaires de la cité. Il s'identifiait à elles et vivait pour elles.
    Dès avant, bien avant même son élection comme conseiller communal, le 17 novembre 1895, il s'en occupait. Il eut, avec Smeets et d'autres, l'honneur de s'attaquer à la ploutocratie qui régnait ici en maîtresse et il souffrit avec un stoïcisme digne des stoïciens antiques toutes les avanies imaginables sans se rebuter jamais. C'est qu'il était mû par une grande idée et une noble cause.
    Mais c'est surtout à partir de sa nomination d'échevin, le 30 décembre 1895, qu'il passa contrat, peut-on dire, avec l'administration communale.
    Jamais échevin de l'instruction public que et des beaux-arts et nous pouvons ajouter jamais aucun échevin de quelque département que ce soit ne se donna plus entièrement à sa tâche avec une érudition plus vaste, avec une habileté plus grande.
    Il s'assimila les choses administratives virtuosité incomparable en ce qui concerne les autres départements comme le sien propre et il prit sur toutes choses un si grand empire et les pénétra si intimement à la fois qu'il s'incarna en elles.
    C'est lui qui recréa le Cercle pédagogique auquel il donna une impulsion agissante et qui fut un jour expulsé « manu militari » d'un local d'école par une autorité hargneuse et courroucée.
    C'est lui aussi qui, le premier peut-être en Belgique, fit voter un barème nouveau pour le personnel enseignant consacrant l'égalité des sexes vis-à-vis des traitements.
    Quand, pour se dégager des entraves routinières et hostiles, il fallut donner au personnel une nouvelle direction, Gony entra ici, en qualité de chef des bureaux de l'administration communale, comme chez lui. Il s'imposa tout de suite et sans effort. Et quand il fut nommé, un an et demi après, le 6 février 1902, secrétaire communal, il l'était déjà en fait depuis bien longtemps.
    Il vivait déjà, il dirigeait déjà pratiquement tout le vaste organisme administratif, de telle sorte que, pendant vingt ans, malgré les régimes successifs si disparates et si opposés qui y ont vu le jour il a été l'âme vibrante et agissante de cette vieille maison.
    Tous les administrés qui l'ont approché ont proclamé à l'envi sa serviabilité et rien ne l'atteste mieux que l'étonnement que trahissaient les personnes qui l'avaient abordé, aux exagérations passionnées de la polémique dirigée contre lui lors des luttes intestines qui désolèrent le Parti ouvrier pendant plusieurs années. Il était accueillant et bon.
    Cet homme à la carrure d'athlète était tendre comme un agneau. Derrière le masque énergique où flambait un regard pénétrant et qu'illuminait un perpétuel sourire sardonique, s'abritait une âme encline à toutes les tendresses, à toutes les passions généreuses et fortes.
    Il eut la hantise de l'indépendance. Il avait appris, à l'étude de la grande révolution, l'amour des grandes causes et de la liberté. Il fut ce qu'il avait rêvé : un homme libre, sacrifiant tout ce qu'il possédait pour la cause qu'il avait embrassée et bravant tous les courroux et toutes les oppressions d'où qu'elles vinssent y compris les pires de toutes : celles de la faim et de la misère.
    Cet affamé de liberté resta jusqu'à la fin ce qu'il fut dans la jeunesse enthousiaste et fière : un indompté !
    Lorsque, devenu fonctionnaire, il se présenta devant les électeurs au conseil provincial comme aux polis socialistes, ce fut pour se rebeller contre l'infâme circulaire ministérielle interdisant aux fonctionnaires de se jeter dans la mêlée des partis.
    Là où la plupart s'étaient courbés devant l'ukase qui leur retranchait une partie de leurs droits et de leur liberté, lui, que des plumitifs sans vergogne, qui ne savent même pas s'incliner devant la noblesse des caractères, accusaient d'être devenu un satisfait, se redresse et s'arcbouta en posture de bataille contre le pouvoir. C'est ainsi qu'il fut doublement un exemple : comme fonctionnaire et comme homme.
    Il ne renia jamais, en aucune circonstance, ses idées socialistes. Il les arborait avec orgueil. Quand vint l'heure de la grève générale, le bouton du S. U. ornait sa boutonnière et le commandant du peloton d'installation du 11° régiment de ligne qui investissait notre cité, le 18 avril ne fut pas peu surpris de se trouver, lui et ses hommes, dans la séance du collège convoquée pour les recevoir, en présence de tous partisans de l'égalité politique y compris le secrétaire communal. Les deux états-majors, celui de l'armée et celui de la grève étaient face à face. Gony était l'homme de ces tête-à-tête avec l'ennemi.
    Aussi si l'administration communale de Seraing perd le meilleur de ses serviteurs, notre parti est-il douloureusement éprouvé.
    Gony ne fut pas seulement pour nous le secrétaire communal habile, plein de ressources et de dévouement, il restera surtout à nos yeux l'éclaireur, celui qui fit briller le flambeau de l'aurore socialiste dans le sépulcre des damnés de la terre dans notre bassin.
    Nous voudrions ici, où tout le monde se sent atteint par la perte irréparable d'un homme d'une incontestable valeur, n'affleurer la susceptibilité de personne, ne froisser aucun parti en égrenant nos souvenirs ; mais pouvons-nous mettre en lumière le lutteur sans évoquer l'arène et ses adversaires ?
    Le grand Gony, pour nous, celui dont la silhouette massive et impétueuse passe devant nos yeux, c'est celui qui se dressait jadis sur les tribunes improvisées aux carrefours, drapé dans la beauté de sa misère, et qui, nouveau Christ souffrant pour tous les hommes, appelait tous les damnés de l'enfer social aux espérances sublimes et aux pures lumières de l'idéal socialiste.
    C'est celui qui, pour défendre la cause que nous essayons de servir après lui, avec le même cœur sinon le même talent, était traqué comme une bête fauve et réduit au plus noir dénuement, c'est le Gony qui chaussait, tour à tour, avec Smeets, la paire de souliers légendaires et, bravant les représailles capitalistes et la prison gouvernementale, allait évangéliser les prolétaires ; c'est celui, enfin, qui, dans les meetings contradictoires, affrontait les maîtres du barreau accourus pour défendre la ploutocratie industrielle et clamait tout haut les révoltes et les colères que criaient tout bas dans les poitrines comprimées de nos pères ou de nos frères.
    Ce Gony-là est inséparable de cet autre, grand éveilleur des foules sacrifiées et assoupies : Alfred Smeets. Ils furent les frères siamois de l'idéal, de la souffrance et de la misère. Ils ont vécu la même période héroïque, les mêmes dénuements, les mêmes prisons, les mêmes joies et les mêmes espoirs.
    Si, par la suite, de malencontreuses dissidences ont pu les séparer et amener entre eux un nuage sombre, l'avenir les dissipera dans les mémoires ouvrières. De même que la postérité a réuni dans une même gloire Jean-Jacques Rousseau et Voltaire, la classe ouvrière réunira, dans un même souvenir, ceux qui sur un plan moins vaste, mais avec un courage et une abnégation insurpassables, ont lutté côte à côte et souffert pour elle. Les larmes qu'elle a versées pour l'un se mêleront aux larmes qu'elle verse aujourd'hui pour l'autre et il restera de ce mélange comme une rosée pure dont la parure jettera son éclat lumineux sur la pourpre endeuillée de notre drapeau.
    Nous voudrions terminer, là, cette évocation du souvenir fraternel et reconnaissant. Mais quelle que soit l'élévation du sentiment qui a dicté à la famille du cher disparu de broyer sa douleur dans l'intimité, il nous sera permis de soulever légèrement le voile du « home » et de dire que Gony, s'il fut un administrateur intègre, un militant socialiste ardent et convaincu, fut aussi le meilleur des pères et le modèle des époux.
    Une certaine presse s'est réservée le triste monopole de fouiller la vie privée des hommes publics et d'exposer à la curiosité malsaine et à la malignité les tares qu'elle inventait ou grossissait démesurément. Elle n'a rien trouvé chez Gony et pour cause. Celui que nous pleurons ne vivait que pour les siens. Il avait pour sa femme, qui l'aima alors qu'il était pauvre et calomnie, un véritable culte et pour ses enfants, une passion frisant l'idolâtrie. Ceux qui, parmi nous, furent ses intimes, peuvent seuls savoir les inépuisables trésors d'affection que renfermait le cœur de cet homme.
    Si notre parti perd l'un de ses meilleurs et plus héroïques lieutenants, les siens perdent un monde et nulle pire catastrophe ne pouvait les atteindre.
    Aussi nos condoléances, les condoléances de toute la population sérésienne et les regrets navrés du Parti socialiste ne peuvent-ils suffire même à attiédir leur douleur.
    La pensée de notre pauvre ami était inséparable de celle de ses enfants et de sa femme. Quand il s'occupait des affaires de la commune, il songeait aux siens, à son jeune Raoul, à sa petite Andrée et il aimait ainsi par-dessus tout sa tâche dans laquelle se profilaient sans cesse les êtres qu'il affectionnait.
    Les cloches du destin ont sonné beaucoup trop tôt pour eux comme pour nous. Son cœur a cessé de battre comme une machine qui se brise en plein effort, comme un roc brusquement abattu. Sa vaste pensée s'est éteinte et c'est maintenant que la place qu'il occupait nous apparaît dans son vide immense.
    Sa mort creuse un abîme qu'on ne pourra combler. Il était comme ces grands chênes de la forêt : quand l'un deux est abattu, il faut attendre des années avant qu'un autre ait poussé et rempli sa place. Et notre deuil ne peut, hélas, se consoler que de nos propres larmes et de l'exemple impressionnant et beau de sa trop courte vie.
    Il aima le Peuple, le Peuple le pleurera !

                             DISCOURS DE MERLOT
    Le citoyen MERLOT, échevin des finances, prit à son tour la parole.
    Je m'excuse bien sincèrement, dit-il, de ne pouvoir laisser les membres du conseil sous l'impression que nous a causée à tous la magnifique oraison funèbre que vient de prononcer le citoyen Delvigne. Mais la loi a des exigences auxquelles nous devons nous soumettre. Le collège a pris d'urgence des résolutions que nous devons soumettre au conseil pour que celui-ci les ratifie. Le collège a décidé d'envoyer à la mortuaire une gerbe de fleurs pour être déposée sur le corps de notre regretté secrétaire ; il a décidé d'arborer le drapeau à la façade de l'hôtel de ville. En signe de deuil, il a donné congé à tous les services communaux qui chômeront demain jeudi. Nous vous demandons de ratifier ces décisions.
    Approuvé.
    Le citoyen DUBART s'exprima comme suit :
    Il serait difficile d'exprimer mieux que l'a fait le compagnon Delvigne, les sentiments que nous éprouvons tous en ce moment. Je désire cependant faire une proposition. Puisque la famille a décidé que les obsèques auront lieu dans l'intimité, je demande à tous mes collègues de nous rendre, ce soir, en corps à la mortuaire, pour rendre une dernière visite à celui que nous pleurons. (Adhésion unanime.)
    M. LE PRESIDENT. – En signe de deuil, je lève la séance.
    La séance fut levée à 19 h. 45.

Le Peuple, 22 août 1913

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Salle des fanfares et son casino

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Jemeppe-sur-Meuse - Le Casino de la Fanfare

    Louis Antoine a appris un temps de la trompette, peut-être sous la direction de Gustave Baivy :

    La dénomination retenue par l'autorité communale en 1876 évoque l'existence du corps de musique dit à l'époque ''Les fanfares de Jemeppe' 'qui avait fixé son local dans cette rue. Cette société à été fondée par M. Gustave Baivy qui avait entrepris, dès 1865, de réunir un groupe d'ouvrier des laminoirs de Lexhy dans la tourelle (aujourd'hui disparue) du château de Courtejoie (rue de Lexhy) pour leur enseigner l'art musical.
    Pendant la fin du 19è siècle et le début du 20è siècle, la fanfare de Jemeppe a porté le renom artistique de notre région tant à l'étranger qu'en Belgique !
source : Jean-Marie Rouveroy sur le groupe FaceBook Jemeppe-sur-Meuse d'hier à aujourd'hui

Jemeppe-sur-Meuse - Le Jardin du Casino de la Fanfare

Jemeppe - Salle des fanfares

Le bâtiment en bas à gauche est l'ancienne salle des fanfares.
Il est maintenant le local de la société Confiserie à l'ancienne.

Jemeppe - La salle des fanfares (FB Jemeppe-sur-Meuse d'hier à aujourd'hui)

La salle des fanfares (FB Jemeppe-sur-Meuse d'hier à aujourd'hui).

Salle des fanfares et son casino

    Dans une salle, une conférence contradictoire sera organisé par le journal de Gustave Gony, Le Flambeau, sur l'Antoinisme, après une polémique ardente avec le pasteur évangéliste de Lize-Seraing. Des conférences spirites y avaient également lieu (en 1892 notamment par Félix Paulsen).

    Appelé aussi la Royale Fanfare de Jemeppe, des Bals d'été y étaient organisés, avec le jardin illuminé ou encore des Bals de réveillon, mais aussi des expositions (colombophiles, canines...). Le casino change de propriétaire en 1939 et devient un temps le Casino Guy, puis et revendu en 1942.

    Elle deviendra l'école de musique intercommunale de Jemeppe.

 

 

 

 

 

 

La Meuse, 21 mai 1938

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Mort de Gustave Gony (Le Peuple, 20 août 1913)(Belgicapress)

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Mort de Gustave Gony (Le Peuple, 20 août 1913)(Belgicapress)

Mort de Gustave Gony

    Une bien triste nouvelle nous est téléphonée de Seraing : notre ami Gustave Gony, secrétaire communal de la cité rouge, n'est plus !
    Notre pauvre camarade succombe en pleine jeunesse, en pleine ardeur de travail.
    Il tombe à 43 ans, au moment où il se consacrait tout entier à la chose publique et aux progrès du mouvement coopératif.
    Le parti ouvrier sérésien perd en Gony un des plus vaillants et des plus sincères de ses soldats.
    Né à la Neuville, en Condroz, il vint à Jemeppe, à l'âge de 14 ans.
    Des que sa jeune intelligence se fut éveillée, il s'intéressa au mouvement philosophique et social de son époque.
    Jeune ouvrier menuisier, assoiffé de connaissances, il suivit, durant trois années, les cours de l'école industrielle de Seraing et y puisa le goût des lectures sérieuses.
    Il entra alors dans le mouvement spirite et fonda le journal le « Flambeau » dans lequel il fit, tout au moins, autant de propagande socialiste que de prosélytisme spiritualiste.
    Mais bientôt, la lutte politique et économique le réclame. Devenu l'alter ego de notre regretté Alfred Smets, il bataille, avec lui, chaque jour, contre toutes les forces sociales acharnées, en ces temps héroïques, à réduire par la faim les champions du socialisme.
    Gony possédait un petit pécule, toute sa richesse.
    Sans hésiter, avec l'impétuosité et l'enthousiasme de la jeunesse, il le place dans une imprimerie destinée à servir la cause du Parti ouvrier. Il perdit tout.
    Ce fut, alors, pour le jeune propagandiste, la période d'extrême dénuement.

Mort de Gustave Gony (Le Peuple, 20 août 1913)(Belgicapress)

    Sans travail, lui et son ami Alfred Smeets, les deux militants unirent leur misère. Non seulement, ces hommes, résolus jusqu'à l'héroïsme, vécurent ensemble, mais ils en furent réduits à mettre en commun leur maigre garde-robe, afin de pouvoir, tour à tour, paraître décemment dans les assemblées.
    En 1890, Gony est à Seraing et aux côtés de Smeets il mène avec la bonne humeur et la confiance qui ne le quittaient jamais, la grande grève des mineurs si féconde en incidents.
    Mais le vote de la revision, la transformation du régime électoral ouvre des voies nouvelles aux propagandistes.
    L'inoubliable campagne électorale de 1894 se déroule au pays de Liége.
    Le jeune parti ouvrier poursuit la guerre : contre les vieux partis avec une ardeur et un enthousiasme sans précédent dans l'histoire du pays. C'est, partout, l'assaut le plus emballé, le plus audacieux.
    Gustave Gony est au premier rang des orateurs de meeting. Dans les réunions publiques, convoquées par les libéraux qui se croyaient les maîtres encore des communes ou leur prestige avait été souverain jusque là, le jeune socialiste paraissait à la tribune, tenant tête, avec une vigueur, une science, une éloquence surprenantes à des politiciens de l'envergure d'un Dupont et d'un Greiner.
    Elu conseiller communal en 1893, il est porté à l'échevinat de l'instruction publique et se consacre, tout entier, à ses nouvelles fonctions.
    Un jour, le bourgmestre doctrinaire, furieux contre son échevin dont la vigilance ne se démentait pas un seul instant, le fit expulser d'une école « manu militari ».
    Gustave Gony ne répondit qu'en riant à ce geste de violence, et fit voter un nouveau barème au profit du personnel enseignant, barème dans lequel se trouvait consacrée, pour la première fois en Belgique peut-être, l'égalité des sexes devant le traitement.
    Un incident de cette partie de la trop courte vie de notre regretté camarade, caractérise bien les généreuses tendances de son caractère. Ayant été condamné, après une polémique de presse, à 3,000 francs d'amende ou deux mois de prison subsidiaire, Gustave Gony préféra aller en prison, bien qu'une souscription importante eut été ouverte. Gony versa le produit de la souscription dans une caisse de propagande.
    Mais ses ennemis ne lâchaient point prise et le pauvre échevin socialiste, n'ayant pas d'autres ressources pour subsister, vit saisir le cinquième de son traitement annuel de 800 francs !
    Les camarades de Saint-Georges, commune socialiste, mû par un sentiment de vive sympathie, offrirent à Gony l'emploi de secrétaire communal. Ils exigèrent seulement du nouveau fonctionnaire qu'il établisse sa résidence à Saint-Georges.
    Gustave Gony, sachant que la majorité socialiste sérésienne n'était que d'une voix, n'hésita pas ; il refusa l'emploi et maintint la majorité au parti.
    Enfin, le terme de l'ère des privations et des souffrances physiques approchait.
    Nos camarades du collège de Seraing, ayant à lutter contre le mauvais vouloir, systématique des bureaux, composés de créatures doctrinaires, désignèrent Gony au poste de directeur des services administratifs.
    Elu conseiller provincial, on lui confie, en 1900, la vice-présidence de cette assemblée, et il s'acquitta de cette fonction avec un zèle et un tact, auquel tous ses collègues rendirent hommage.
    Entre-temps, au sein de la coopérative socialiste locale, il accepte de guider le navire dans les eaux dangereuses dans lesquelles il naviguait. Malgré cela, Gustave Gony préconise l'abonnement obligatoire au « Peuple » et grâce à la diffusion de la presse socialiste, rend la force et la stabilité à la coopérative ouvrière.
    Gustave Gony fut un cœur généreux, une âme hantée d'idéalité, le type de l'homme franc, loyal et honnête, d'un commerce agréable dans le public et dans le privé.
    S'il eut des démêlés avec Alfred Smets, ces discussions n'eurent que des motifs d'ordre administratif. Et si des camarades eurent des préventions envers l'un ou l'autre de ces deux hommes, si bien faits pour s'entendre et pour s'estimer, il ne reste, aujourd'hui, que le souvenir pâli de ces déchirements passagers. Tous, en apprenant le terrible malheur qui frappe le parti sérésien, baisseront le front avec respect devant la mort impitoyable et uniront, dans un même et douloureux regret, les noms respectés d'Alfred Smets et Gustave Gony.
    Le « Peuple », douloureusement ému, salue avec respect la mémoire du vaillant lutteur qui vient de disparaitre.

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    Les funérailles civiles auront lieu jeudi, dans la plus stricte intimité.

Le Peuple, 20 août 1913 (source : Belgicapress)

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