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Michel Meeus - Naissance et croissance du spiritisme et de l’antoinisme dans le Diocèse de Liège (2010)

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Michel Meeus - Naissance et croissance du spiritisme et de l’antoinisme dans le Diocèse de Liège (2010)

Auteur : Michel Meeus
Titre : Naissance et croissance du spiritisme et de l’antoinisme dans le Diocèse de Liège
in Leodium - Publication périodique de la Société d’Art et d’Histoire du Diocèse de Liège, Tome 95 (Janvier-Juin 2010), pp. 19-44. 

    Source citée par Marijke De Sadeleer. Impossible malheureusement d'avoir un aperçu de cette publication.

    Après avoir rappelé la condamnation de l'Église catholique contre les doctrines spirites, ainsi que leurs "contradictions", l'auteur indique qu'"il se scindera en différentes tendances, dont une religieuse et une socialisante".
    L'auteur référence ensuite les différentes apparitions de faits spirites puis antoinistes (mais aussi la déchristianisation) dans la région liégeoise en s'appuyant sur le retour des prêtres.
    Quand il évoque Louis Antoine et l'Antoinisme, on nage en plein délire : "En 1906, il rompt avec les spirites pour organiser une nouvelle religion tournée vers un enseignement moral et un nouveau spiritisme, une mission de guérisseur et de révélateur, consacrés dans des écrits de 1909-1910 avec un baptême sous forme d'imposition des mains et d'invocations, un mariage, des images du Christ, des statues de certains saints, les dix commandements."
    Ce qui est intéressant dans cette publication est le recensement des spirites et antoinistes effectué notamment en 1917 par l'Évêché.
    On lit par exemple, p.7 : C'étaient en général des « gens assez bêtes » à Liège Saint-Remacle, des chrétiens de moralité très douteuse ou non-pratiquants selon les curés de Jupille et de Poucet, un ancien sacristain révoqué à Loncin. Le doyen de Waremme les considérait comme des ignorants qui recherchaient avant tout un intérêt matériel, c'est-à-dire la guérison des personnes et des animaux. À Poucet, plus d'un recourait en cachette à la protection du Père Antoine lorsqu'une personne ou un animal était malade. C'était la principale motivation des antoinistes. Une femme d'Alleur se rendait chez les malades. Des adeptes d'Antheit consultaient à propos de déboires, de maladies. Des personnes se rendaient par hasard au temple de Jupille pour une raison de santé. Un propagandiste de Poucet s'informait avec soin des peines et des maladies qui tourmentaient les hommes et les animaux, promettant à tous guérison et santé et pendant quelque temps le bruit de merveilles et miracles dus à l'antoinisme s'y répandit, succès de courte durée. Sans être antoinistes, certaines personnes venaient à Jemeppe afin d'obtenir une guérison. Un bon nombre de socialistes d'Antheit fréquentaient aussi accidentellement le temple de Huy ou la maison de Villers-le-Bouillet. La propagande antoiniste s'exerçait cependant également par la pratique de la charité et de l'aumône.

    L'auteur semble percevoir (p.42-44) une baisse de nombre d'antoinistes dès les années d'après la Deuxième Guerre mondiale :
    La guerre de 1940-1945 a-t-elle réduit le nombre d'antoinistes ? Si 11 des 12 paroisses du doyenné de Liège Saint-Nicolas en comptaient, ils ne représentaient que 1 pour 1000 à Bois-de-Breux et à Robermont, 2 pour 1000 à Jupille, 3 pour 1000 à Angleur et à Grivegnée Notre-Dame, presque 1 % à Kinkempois de 1941 à 1946, mais 3 % en 1948-1949. Les paroisses de Grivegnée Notre-Dame, Jupille, Kinkempois, Liège Saint-Nicolas et Liège Saint-Pholien possédaient un temple. En outre, une maison particulière à Jupille accueillait les sympathisants. Des étrangers venaient à Kinkempois et aussi à Jupille qui comptait peu d'adeptes paroissiens et beaucoup de consultants.
    Si 13 des 27 paroisses du doyenné de Waremme signalaient la présence d'antoinistes, la guerre semble là aussi avoir causé des abandons. Il n'y en avait plus à Boëlhe, ni même à Berloz (« on n'en parle plus, c'est la guerre ») et à Pousset (« nulla diffusio propter bellum »). La fin des hostilités a pu provoquer une légère reprise. En 1940, ils étaient 1% à Donceel, Grandville et Hodeige ; 0,5 % à Grandville et Lantremange l'année suivante ; 2 pour 1000 à Grandville en 1942 ; 1,5 pour 1000 à Grandville, Lantremange et Remicourt en 1943 ; 0,5 % à Berloz, Bleret, Grandville et Hodeige en 1945 ; 0,75 % à Berloz, Donceel, Hodeige et Lantremange en 1946 ; 0,5 % à Bleret et Limont en 1947. Le temple de Waremme est encore mentionné dans un rapport du doyen du 27 février 1951. Signalons que la famille de Boëlhe qui avait abandonné l'antoinisme ne revenait quand même plus à l'église.
    À la fin de la guerre de 1940-1945, les antoinistes semblaient avoir disparu à Comblain-au-Pont, alors qu'ils avaient obtenu une audience certaine dans la vallée de l'Ourthe. Quelques-uns étaient signalés en 1950 à Sprimont où un culte était organisé et également quelques autres à Aywaille l'année suivante.
    Des antoinistes résidaient en 1946 dans 5 paroisses du doyenné de Soumagne, notamment au chef-lieu, et il n'y en avait aucune trace dans 10 autres. Ils ne représentaient qu'1,5 pour 1000 des habitants de Saive et de Soumagne, mais 3,5 % à Bellaire. Une maison de Retinne servait de lieu de culte. Le temple de la paroisse de Saint-Antoine à Liège était assez fréquenté en 1953 et le spiritisme relativement répandu à Fonds-de-Forêt en 1954. Quant au doyen de Spa, il mentionna en octobre 1955 une pratique originale, celle d'une famille de spirites de son doyenné dont les enfants avaient été baptisés à l'aide de vin.
    Le conflit 1940-1945 a fait perdre, provisoirement ou pas, quelques disciples chez les antoinistes. Il demeura cependant toujours aussi répandu, mais néanmoins très faiblement représenté. Mesurer son impact réel après la guerre devient toutefois malaisé, les autorités de l'Église catholique s'intéressant de moins en moins aux autres cultes. Le dernier renseignement date de 1955.
    L'attitude des spirites et des antoinistes à l'égard de l'Église catholique a-t-elle connu une évolution ? Jusqu'à la fin de la Grande Guerre de 1914-1918, des antoinistes lui restèrent fidèles dans 27 % des cas où leur attitude est mentionnée. À partir de 1919, cette proportion est tombée à 11 %, mais même ceux qui n'abandonnèrent pas leur religion ancestrale la pratiquaient-ils avec suffisamment de conviction ?
    La Belgique comptait 22 temples antoinistes en 1934, 31 vers 2000 et 150.000 membres en 1970, principalement en Belgique. Actuellement l'antoinisme, qualifié de mouvement guérisseur, essaie d'aider les personnes souffrantes par la prière, et non plus par l'imposition des mains. Il est présent en Belgique, en France, aux Pays-Bas, en Suisse, en Italie, au Brésil, aux Etats-Unis, au Grand-duché de Luxembourg, à Monaco et dans l'ex-Congo belge.
    Selon L. de Saint-Moulin, l'antoinisme n'eut guère part au mouvement de déchristianisation. Sans vouloir porter un jugement sur le spiritisme et plus spécialement l'antoinisme, une comparaison s'impose entre ces courants et l'épidémie de choléra de 1866 : tous deux sévirent principalement dans les villes et les localités industrielles. La Hesbaye où l'antoinisme s'est bien propagé, constitue l'exception, probablement parce que la mentalité y était égoïste et matérialiste (1). Trop d'habitants y cherchaient un remède médical.
    L'antoinisme fut un mouvement marginal, car même dans le doyenné de Waremme où il fut répandu dans presque les deux tiers des paroisses avant la guerre de 1940-1945, s'il est tenu compte des localités où il ne parvint pas à s'implanter, il n'atteignit que 8 pour 1000 des habitants. Il est parvenu à un certain succès en raison de la grande ignorance religieuse, d'un peu de scientisme qu'il présentait, d'une grande tolérance, surtout à l'égard de la morale et du mal, sans parler du fondateur dont se dégagea un prestige d'homme simple et désintéressé. Pratique spectaculaire par ses idées, il n'a guère pu déforcer le culte de l'Église catholique.

Note 1 (de l'auteur) : Des rapports de 26 curés des doyennés de Villers-l'Evêque et de Waremme relatant les événements de la guerre de 1914-1918 ne mentionnent que 26 volontaires de guerre et 12 hommes ayant franchi ou tenté de franchir la frontière des Pays-Bas pour un ensemble d'environ 24.100 habitants. Personne ne se présenta dans 15 paroisses. Le curé de Bettincourt ajouta : « Pas un seul engagé volontaire. La Hesbaye n'a certes pas brillé de ce côté-là ». Et celui de Hollogne-sur-Geer : « Aucun engagement volontaire dans la commune, aucun sentiment patriotique. Très indifférents et très intéressés » : A.Év.L., Fonds Rutten.

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Leclercq et Camus - Les Antoinistes (Gil Blas 28 juillet 1912)

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Leclercq et Camus - Les Antoinistes (Gil Blas 28 juillet 1912).

Nouvelles judiciaires

Les Antoinistes

    M. Kastler a interrogé hier en présence de Mes Henry Bigeard et Pierre Turpaud, Jules Leclercq et sa maitresse, la veuve Sautet, accusés d'avoir laissé mourir, le 21 juillet, par privations de soins, leur fillette de quatre mois, la petite Antoinette.
    Jules Leclercq a exposé au juge le culte Antoiniste d'après les déclarations d'Antoine le Généreux et le bulletin l' « Unitif » que reçoivent tous les adeptes. D'après lui, ses préceptes religieux lui interdisaient d'appeler un médecin ou de prendre des remèdes. Il lui suffisait de croire au père Antoine et de prier Dieu. C'est ce traitement qu'il a voulu appliquer à sa fille nommé Antoinette, en souvenir de l'apôtre.
    Leclercq est devenu Antoiniste au mois de février dernier ; il a suivi, affirme-t-il, ces préceptes de la sœur Marie Camus, qui représente ce culte officiellement en France. Au moment de son arrestation, il avait écrit au procureur de la République pour porter plainte contre la sœur Marie Camus qu'il accusait d'avoir provoqué la mort de sa fille, en lui persuadant de ne pas consulter un médecin, mais hier, il a renoncé à cette plainte. « Ma fille est morte, a-t-il dit, c'est la volonté de Dieu ! et il a lu au juge une prière qu'il a composée pour la maladie de sa fille.
    M. Kastler a ensuite interrogé la veuve Sautet : « Je ne suis pas Antoiniste, a-t-elle déclaré, et si je n'ai appelé immédiatement un médecin, c'est afin de ne pas contrarier mon amant. Ma fillette a pris froid le 15 juillet, elle est tombée malade le 19. Je l'ai soignée de mon mieux, tout en la croyant peu gravement atteinte. Deux heures avant sa mort, des voisines ont parlé de prévenir un médecin, mon amant s'y est opposé, j'ai fait signe que j'irais le chercher aussitôt après son départ, mais ma fillette est morte quelques instants plus tard. »

Gil Blas, 28 juillet 1912

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Leclercq et sa compagne passeront en cour d'assises (Le Petit Parisien 21 juillet 1912)

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Leclercq et sa compagne passeront en cour d'assises (Le Petit Parisien 21 juillet 1912).jpg

LES « ANTOINISTES » DE LA RUE DE LA PARCHEMINERIE

Leclercq et sa compagne passeront en cour d'assises

    Leclercq et sa compagne, la veuve Sautet, adeptes du culte antoiniste, qui, le 21 juillet, 4, rue de la Parcheminerie, laissèrent mourir, faute de soins, leur fillette Antoinette, âgée de quatre ans, ont été interrogés, hier, par M. Kastler, juge d'instruction, en présence de MM. H. Bigeard et P. Turpaud.
    Leclercq, qui parait déséquilibré, a tenu, tout d'abord, à exposer au magistrat la doctrine antoiniste, d'après la révélation d'Antoine Le Généreux, et le bulletin l'Unitif, distribué aux adeptes.
    Suivant cette doctrine, si on veut guérir, il ne faut jamais appeler un médecin, ni prendre aucun remède, mais simplement croire au père Antoine et prier Dieu.
    C'est à la suite de la publication d'un article, dans un journal, il y a quelques mois, que Leclercq est devenu antoiniste. Il est allé trouver la personne indiquée par l'article comme l'apôtre français du culte. C'est elle qui a défendu à l'inculpé d'appeler jamais un médecin.
    Aussi Leclercq, au moment de son arrestation, avait-il déposé une plainte contre cette femme, l'accusant de l'avoir induit en erreur et d'être cause de la mort de son enfant. Hier, il a déclaré qu'il se désistait de cette plainte, le décès de sa fillette ayant été voulu par Dieu.
    La compagne de Leclercq n'est pas antoiniste. Elle a déclaré que la petite Antoinette ayant pris froid, le 15 juillet, au Sacré-Cœur, elle l'avait soignée aussitôt.
    Malheureusement, elle ne se doutait pas que l'enfant avait une broncho-pneumonie : elle crut, tout d'abord, à un mal de dent. Cependant, comme la fillette toussait, elle lui mit des cataplasmes. Dans la nuit du 20 au 21 juillet, voyant le mal empirer, elle voulut aller chercher un médecin. Leclercq s'y opposa. Mme Sautet ne voulut pas le contrarier et elle résolut d'attendre quatre heures du matin, heure à laquelle l'antoiniste se rendait aux Halles, à son travail. Elle comptait bien faire venir un médecin à ce moment. La mort n'attendit pas. Elle survint à deux heures, alors que Leclercq n'était pas encore parti.
    Mme Sautet a indiqué au juge que, le 19 juin dernier, elle avait déjà perdu un enfant. Comme celui-ci n'était pas de Leclercq et qu'il était baptisé l'antoiniste était allé cherché lui-même un médecin pour lui donner des soins. Il avait dit ensuite à sa compagne :
    – Tu vois, si nous nous étions conformés au culte d'Antoine le Généreux, ton enfant vivrait peut-être encore !
    Ajoutons qu'en présence de M. Kastler, Leclercq a demandé à Mme Sautet si elle voulait régulariser sa situation par le mariage : celle-ci a nettement refusé.
    Le magistrat les a inculpes fous deux, en vertu de l'article 312 du code pénal, qui punit des travaux forcés les parents qui, par privation volontaire de soins, ont causé la mort de leur enfant.

Le Petit Parisien, 21 juillet 1912

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Leclercq et sa compagne passeront en cour d'assises (Le Petit Parisien 21 juillet 1912)

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Leclercq et sa compagne passeront en cour d'assises (Le Petit Parisien 21 juillet 1912).jpg

LES « ANTOINISTES » DE LA RUE DE LA PARCHEMINERIE

Leclercq et sa compagne passeront en cour d'assises

    Leclercq et sa compagne, la veuve Sautet, adeptes du culte antoiniste, qui, le 21 juillet, 4, rue de la Parcheminerie, laissèrent mourir, faute de soins, leur fillette Antoinette, âgée de quatre ans, ont été interrogés, hier, par M. Kastler, juge d'instruction, en présence de MM. H. Bigeard et P. Turpaud.
    Leclercq, qui parait déséquilibré, a tenu, tout d'abord, à exposer au magistrat la doctrine antoiniste, d'après la révélation d'Antoine Le Généreux, et le bulletin l'Unitif, distribué aux adeptes.
    Suivant cette doctrine, si on veut guérir, il ne faut jamais appeler un médecin, ni prendre aucun remède, mais simplement croire au père Antoine et prier Dieu.
    C'est à la suite de la publication d'un article, dans un journal, il y a quelques mois, que Leclercq est devenu antoiniste. Il est allé trouver la personne indiquée par l'article comme l'apôtre français du culte. C'est elle qui a défendu à l'inculpé d'appeler jamais un médecin.
    Aussi Leclercq, au moment de son arrestation, avait-il déposé une plainte contre cette femme, l'accusant de l'avoir induit en erreur et d'être cause de la mort de son enfant. Hier, il a déclaré qu'il se désistait de cette plainte, le décès de sa fillette ayant été voulu par Dieu.
    La compagne de Leclercq n'est pas antoiniste. Elle a déclaré que la petite Antoinette ayant pris froid, le 15 juillet, au Sacré-Cœur, elle l'avait soignée aussitôt.
    Malheureusement, elle ne se doutait pas que l'enfant avait une broncho-pneumonie : elle crut, tout d'abord, à un mal de dent. Cependant, comme la fillette toussait, elle lui mit des cataplasmes. Dans la nuit du 20 au 21 juillet, voyant le mal empirer, elle voulut aller chercher un médecin. Leclercq s'y opposa. Mme Sautet ne voulut pas le contrarier et elle résolut d'attendre quatre heures du matin, heure à laquelle l'antoiniste se rendait aux Halles, à son travail. Elle comptait bien faire venir un médecin à ce moment. La mort n'attendit pas. Elle survint à deux heures, alors que Leclercq n'était pas encore parti.
    Mme Sautet a indiqué au juge que, le 19 juin dernier, elle avait déjà perdu un enfant. Comme celui-ci n'était pas de Leclercq et qu'il était baptisé l'antoiniste était allé cherché lui-même un médecin pour lui donner des soins. Il avait dit ensuite à sa compagne :
    – Tu vois, si nous nous étions conformés au culte d'Antoine le Généreux, ton enfant vivrait peut-être encore !
    Ajoutons qu'en présence de M. Kastler, Leclercq a demandé à Mme Sautet si elle voulait régulariser sa situation par le mariage : celle-ci a nettement refusé.
    Le magistrat les a inculpes fous deux, en vertu de l'article 312 du code pénal, qui punit des travaux forcés les parents qui, par privation volontaire de soins, ont causé la mort de leur enfant.

Le Petit Parisien, 21 juillet 1912

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Jean Delay - Homme sans nom (1948)

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Jean Delay - Homme sans nom (1948)

Auteur : Jean Delay
Titre : L'écarté de la grille
in Hommes sans nom, nouvelles,
Éditions : Gallimard, Paris, 1948

    Docteur en médecine, Jean Delay devint médecin des hôpitaux de Paris en 1938. Agrégé en 1939, il obtint le statut de professeur de clinique des maladies mentales et de l’encéphale en 1946. Son observation de la Salpêtrière, à la fois dans Hommes sans nom et Les Reposantes, rejoint celle d'André Baillon qui écrivit aussi sur l'univers de la Pépète dans Un homme si simple et Chalet 1.

    Cette nouvelle, dont le nom vient du jeu de cartes que les pensionnaires de la Salpêtrière jouaient prêt de la grille, évoque les Antoinistes de Paris aux pages 169-170 et 174.

    Recension :
Jean Delay, L'écarté de la Grille,
   Gallimard, 1988, 132 p.
    Publié en 1948 sous le pseudonyme de Jean Faure. L'écarté de la Grille faisait partie du livre intitulé Les hommes sans nom. Jean Delay médecin des hôpitaux psychiatriques retrace ici l'expérience qui sans doute fut la sienne au contact des « grands fous » de la Salpêtrière. Ce récit dédié à André Gide fait la part belle à l'imaginaire fantasque de l'abbé-a-la-jambe-de-bois dit l'abbé John. En cet après-midi du 14 juillet, derrière la Grille du quartier des hommes, les joueurs de cartes Loustan, Lalouette et Monsieur Jules assistent fascinés, abasourdis, rieurs comme ces enfants qu'enchantent le vol des papillons et les cris effarouchés des nourrices haletantes, aux paraboles métaphysiques, évangéliques et loufoques de l'abbé John, l'homme dont les recherches en bibliothèque et le physique trivial de bassesse les déconcertaient. Les impressionnaient aussi l'« expression bestiale du visage, le teint basané d'un mulâtre, le front démesuré dont les cheveux étaient mal plantés, des oreilles décollées et velues, des joues et des bajoues enluminées et chargées de graisse, des lèvres molles et épaisses, un menton fuyant, entourant un nez énorme largement épaté, de couleur aubergine ». Evidemment, ils avaient beaucoup de peine à l'imaginer disant la messe ou administrant les derniers sacrements. Et pourtant, leur curiosité est si grande, leur faim de savoir tellement tenace, leur appétit de vivre si farouche qu'ils interrompent leur partie d'écarté — où l'on écarte les cartes — pour l'écouter disserter sur les vastes étendues des terres africaines qui bourdonneront autour de ses oreilles de faune, ou se laisser aller à quelques confidences sur le désarroi qui le saisit, si justement, au moment où il s'apprêtait à se consacrer avec son grand-papa aux lépreux du monastère de Pernambuco. Le sacrifice fut fatal à l'abbé John : condamné au silence, « les épiscopes (lui) arrachaient sa raison de vivre. Adieu, flots mugissants qui emportaient les digues, adieu, fleurs capiteuses et rhéteuses de (ses) fécondes insomnies, adieu, ô (sa) sœur Hyperbole » !
    Né pour les soins de l'âme, l'abbé John dont la nature ardente ne trouvait plus d'exutoire dans l'éloquence évangélique succomba avec assiduité aux charmes de la Créature. « Aux charmes immanents de la Vénus carioque. » Il devint chamel de charité en charité.
    A sa virilité jaillissante, à l'incandescence de sa jeunesse, l'abbé-à-la-jambe-de-bois joint une exubérance volubile, un goût prononcé pour les citations érudites mais dépareillées. Il entraîne ses acolytes de la Grille « hors de la commune réalité » de leurs maux, « vers les plages fabuleuses où le vrai n'est peut-être pas le réel » ; où la parole libérée des contingences admises communément accède par-delà la misère à une fonction rare : celle de permettre à ceux qui l'écoutent de rêver à leur tour, non plus dans les limites obscures de leur nuit, mais au grand jour, là, au creux d'eux-mêmes où la fiction la plus audacieuse ressemble à s'y méprendre à la vérité. Phantasmes et fantaisie.
                                Shoshana Rappaport
Inaperçus, Lignes 1988/2 n°3, page 201, Éditions Hazan
https://www.cairn.info/revue-lignes0-1988-2-page-195.htm

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Antoinistes à Chantenay (L'Ouest-Éclair 3 mars 1930)

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Antoinistes à Chantenay (L'Ouest-Éclair 3 mars 1930)

                  L'AFFAIRE EYNARD (1)

                 Les guérisseurs nantais

    Il y a, dans Nantes, 218 médecins et 232 guérisseurs. Chacun de ces derniers faisant, comme M. Eynard, des guérisons à jet continu, on se demande par quel miracle il peut encore rester des malades pour les pauvres médecins.
    Si les résultats obtenus par les guérisseurs sont identiques et s'ils guérissent tous la méningite, les hernies, l'appendicite, les paralysies, etc..., les procédés qu'ils emploient sont variés. Les uns magnétisent avec ou sans diplôme, les autres soufflent, d'autres font des croix sur la partie malade avec leur pouce mouillé de salive. Une guérisseuse, installée rue de Carcouët, obtient de grands succès en rouant ses malades de coups et une vieille pêcheresse, repentie depuis peu de temps, s'est mise à guérir par des prières.
    N'oublions pas la « Dame aux Fleurs » qui fait apparaitre des violettes et des roses à volonté et qui, jusqu'à ces derniers temps, a exercé rue de Rennes.
                 Mam'zelle Vallée, magnétiseuse
    Les premiers jours de mon installation dans l'hôtel que j'habite, je fus très intrigué par ce qui se passait en face, au no 112 de la rue des Hauts-Pavés.
    Matin et soir, c'était un défilé continuel de gens qui portaient tous à la main paniers, sacs ou cabas, desquels, souvent, un goulot de bouteille sortait.
    La plupart du temps, c'étaient des paysans et des bonnes femmes à pignon, qui entraient le plus naturellement du monde ; mais parfois aussi, c'était une dame élégante qui jetait, avant de pousser la porte, des regards inquiets à droite et gauche, comme si elle allait à un rendez-vous galant et craignait d'être surprise. Je m'informai. C'étaient des malades qui se rendaient chez Mm'zelle Vallée, magnétiseuse. Elle n'était pas diplômée, mais tenait son pouvoir de guérison de sa mère, qui avait exercé toute sa vie rue Saint-Similien où elle était en même temps matelassière.
    J'eus bientôt des échos de ce qui se passait chez elle. Comme M. Eynard, elle ajoutait au magnétisme d'autres moyens thérapeutiques inconnus de la Faculté. C'est ainsi qu'une femme lui amena un jour son fils, qui avait été mordu par un chien. Le fluide ne suffisant pas, Mam'zelle Vallée se mit à tourner autour du petit malade en secouant ses cotillons. Comme elle n'est pas aussi jolie ni élégante que l'était Loïe Füller, le résultat de cette originale médication fut de donner à l'enfant une nuit d'insomnie coupée de cauchemars. C'est pourquoi la mère jugea préférable de le confier à un médecin qui fit cicatriser rapidement la morsure avec une pommade au baume du Pérou.
    Craignant – elle avait bien tort, – que je ne gênasse sa fructueuse industrie, Mam'zelle Vallée se fit construire, avec l'argent qu'elle a gagné en magnétisant – car le métier rapporte, n'est pas M. Eynard ? — une maison, route de Rennes, qu'elle habite actuellement. Elle a fait apposer, dans l'embrasure de sa porte, une belle plaque de cuivre, comme en ont les médecins, où sont indiqués sus heures de consultation. Elle aurait bien tort de se gêner, puisque personne ne lui dit rien.
                 La mère Poisson
    Celle-là exerçait « en Chantenay » le quartier le plus pittoresque de Nantes, où l'on trouve des Antoinistes, des Hiéromoines, des églises de toutes les hétérodoxies et mon excellent et spirituel ami Chapiet.
    La mère guérissait en soufflant sur les parties malades. Le fluide ne lui sortait pas des doigts, mais de la bouche, c'est pourquoi, souvent, elle sentait l'ail. Sa clientèle était aussi nombreuse.
    Mais la mère Poisson vint à mourir, accident fâcheux qui arrive à tout le monde, même aux guérisseurs. Des malades de la campagne, qui ignoraient son décès, continuèrent à venir demander la mère Poisson. Un quiproquo se produisit parfois et plusieurs furent envoyés chez une marchande de poissons. Celle-ci protesta d'abord qu'elle n'était point guérisseuse ; mais voyant les clients si nombreux, elle s'avisa sagement qu'il y avait là une source de profits qu'elle serait bien sotte de laisser perdre et elle se mit à souffler à son tour. Elle souffle maintenant comme feu la mère Poisson elle-même et a une grande réputation pour la cure des... hémorrhoïdes.
    Je pourrais continuer cette revue des guérisseurs nantais et en emplir tout un numéro de ce journal, mais la place m'étant limitée, je n'accorderai plus qu'une brève mention au
                 Père Bouillon-Blanc
    C'était un vieux paysan, illettré et sale à souhait, qui venait de la campagne et descendait dans un petit cofé de la place du Bouffay, où il consultait dans l'arrière-boutique. Il soignait par les plantes qu'il avait ramassées le long de la route et avait naturellement une grosse clientèle, tant ses guérisons étaient nombreuses et extraordinaires.
    Mais un jour néfaste, deux clients se présentèrent en même temps, après avoir absorbé la chopine de muscadet obligatoire. Chez l'un il diagnostiqua aussitôt une maladie d'estomac, chez l'autre une maladie de foie. Il leur donna d'ailleurs les mêmes plantes. Le résultat fut extraordinaire : aussitôt les deux clients déclinèrent leur qualité d'inspecteurs de police et emmenèrent le père Bouillon-Blanc au commissariat. Il passa en correctionnelle et nul ne l'a plus revu.
    Je me demande pourquoi ce traitement de défaveur pour ce pauvre bonhomme, tandis que d'autres guérisseurs plus dangereux florissent dans tous les quartiers de notre bonne ville.
    Ce n'est pas seulement pour vous offrir une distraction dominicale que je vous ai compté tout cela, mais pour vous prouver que le fluide de M. Eynard n'est ni indispensable, ni même nécessaire pour obtenir les mêmes guérisons qu'il lui attribue. D'ailleurs ce fluide thérapeutique n'existe pas, ainsi que je vous l'ai déjà dit, et comme va vous le dire à son tour le plus célèbre magnétiseur des temps modernes :
                 Pickmann
    Qui ne l'a vu, celui-là ? Il était vraiment extraordinaire. Non seulement il donnait des représentations publiques, mais il se rendait à domicile et opérait des guérisons auprès desquelles celles de M. Eynard ne sont que du pros-plant. Il y gagna cinq millions. Sur la fin de sa vie il fit ses confidences à M. Paul Heuzé, le pourfendeur de fakirs – bien connu des lecteurs de l'Ouest-Eclair – qui les a publiées dans plusieurs numéros de Candide. Il les réunira prochainement en un volume où vous pourrez tous lire ceci :
    « Le fluide magnétique que l'on m'attribue n'existe pas, je n'en ai point, et les guérisons que j'ai faites ont été opérées par un mécanisme tout autre et bien connu de tous les médecins. »
    Car Pickmann, qui était fort intelligent, avait compris, par l'observation seule, ce à quoi étaient arrivés, de leur côté, les savants que je vous ai cités : Liébault, Bernheim, Grasset, Charcot et Babinski.
    Ce mécanisme de guérison, je pourrai vous l'expliquer quelque jour dans un autre article en faisant la critique scientifique et par conséquent impartiale, des guérisons de M. Eynard.

                                                   Dr Gilbert CHARETTE.

(1) Voir les numéros de l'Ouest-Eclair des 12, 21 et 24 février 1930.

L'Ouest-Éclair, 3 mars 1930

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Le Progrès Civique N° 416 du 06-08-1927

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Le Progrès Civique N° 416 du 06-08-1927

Auteur : Dr. Marcel Réja
Titre : Le Progrès Civique N° 416 Du 06/08/1927
Les guérisseurs mystique - Le Culte Antoiniste par Réja

    L'auteur est également à l'origine du livre Au Pays des Miracles.

AU PAYS DES MIRACLES

Les guérisseurs mystiques : LE CULTE ANTOINISTE

par MARCEL REJA

Atteint d'une « maladie d'estomac » pour laquelle il avait été « condamné par la science », le Père Antoine, simple ouvrier métallurgiste, se vit guérir, par la simple vertu de la foi qu'il avait en Dieu.
    Echauffé par cet événement, il se mit à écrire les Révélations que Dieu lui dicta, et s'étant aperçu que comme jadis le Christ, il pouvait par sa parole et ses prières guérir les malades, il se livra sans réserve à cet apostolat.
    Ainsi fonda-t-il une manière de religion qui se réfère à un mysticisme plus ou moins chrétien avec mépris total de l'intelligence cause de tous nos maux, et considérations plus ou moins lumineuses sur la métaphysique et la psychologie. Mais le don de guérir fait passer sur toutes les divagations ! Le Père, comme ils disent, a laissé une école vivante surtout en France et en Belgique.
    Les Antoinistes sont des gens modestes et doux, ennemis de toute pompe et de toute vanité. Ils pratiquent les vertus de la primitive Eglise et leurs diacres qu'ils dénomment des adeptes refusent toute rétribution des fidèles, directe ou indirecte.
    Comme feu saint Paul, ils se font un point d'honneur de gagner leur pain quotidien par l'exercice d'un métier séculier, l'apostolat devant rester un exercice tout gracieux.
    D'ailleurs, les manifestations cultuelles sont réduites à un strict minimum. En Antoinisme, tout prosélytisme est sévèrement interdit comme attentatoire à la liberté individuelle. Le chant d'un cantique, le débit d'une homélie ? autant de manifestations théâtrales indignes d'un véritable esprit mystique.
    La demi-heure qui est vouée quotidiennement à l'exercice du culte est exclusivement consacrée à lire les Saintes Ecritures... antoinistes. Celles-ci consistent en deux petits livres que Dieu lui-même a dictés au Père Antoine et dont la distillation constitue la nourriture spirituelle et exclusive des ouailles.
     « Un seul remède, déclare le manifeste du Père Antoine, peut guérir l'Humanité : la Foi. C'est de la foi que naît l'amour : l'amour qui nous montre dans nos ennemis Dieu lui-même ; ne pas aimer ses ennemis, c'est ne pas aimer Dieu ; car c'est l'amour que nous avons pour nos ennemis qui nous rend digne de le servir ; c'est le seul amour qui nous fait véritablement aimer, parce qu'il est pur et de vérité. »
    Voilà le tréfonds de la doctrine du Père Antoine.
    Le Christ, son confrère, son prédécesseur, n'avait apporté au monde qu'une morale relativement imparfaite. Aimez-vous les uns les autres !... C'est très joli, mais c'est un peu sec. Poussant à fond la surenchère mystique, notre prophète s'écrie : « Aimez vos ennemis plus que tout au monde !... » et il étaie ce précepte de toutes les démonstrations et de tous les commentaires qu'il peut imaginer.

*
*   *

    La chapelle qui, à Paris, abrite les dévotions des frères en Antoinisme ne brille pas par son charme temporel. Quatre murs nus, une chaire à deux étages, des bancs pour les assistants : c'est tout. J'oubliais la pendule au mur et le portrait d'un derviche barbu qui représente le maître de céans. On peut bien dire que le plus dénudé des temples protestants, est un palais en comparaison de cette chapelle. Mais elle est le centre d'une vie mystique intense et le but de pèlerinage de nombreux malades qui, désespérant de la science humaine, viennent en appeler à l'Amour Suprême, à la Suprême Autorité.
    Mon premier contact avec l'Antoinisme fut assez pénible.
    Ayant un soir, à l'heure annoncée pour le service quotidien, gagné la petite chapelle qui s'adorne de l'écriteau « Culte antoiniste », je vis quelques ombres furtives se glisser par la porte entr'ouverte.
    Un vestibule minuscule, un écriteau recommandant au fidèle la plus rigoureuse simplicité pour ses obsèques (les Antoinistes ne meurent pas, mais ils se désincarnent), puis c'est la chapelle elle-même. Une atmosphère de pôle, une chape de glace qui vous étreint brusquement. Clairsemés sur les bancs, les fidèles attendent dans une gravité recueillie.
    Dans ce public où les femmes dominent, il y a des négociants qui n'ont pas l'air trop bien dans leurs affaires... des visages jaunis, des figures où flotte un relent d'anxiété. Quelques béquilles sonnent sur la dalle, quelques « uhms ! » trahissent des bronches inquiètes...
    Mais l'aiguille ayant atteint la demie, le cortège sacré fait son entrée... oh ! très simple : une femme tout de noir vêtue et qui semble une diaconesse, un adepte dont le costume rappelle celui d'un pasteur. Tous deux tête nue, la marche lente, l'allure compassée... Et les voilà qui s'installent face au public dans la chaire à deux étages lui surplombant, elle surplombée... Se sont-ils aperçus que nous sommes là ? Les voici qui se plongent au plus profond de la méditation (ou de la prière).
    Le silence rituel plane soudain. Il n'y a plus ni toux ni béquille, ni seulement respiration. La diaconesse figée tout à coup dresse vers le plafond son visage de matrone inspirée, tandis qu'à l'étage au-dessus, son compère, surpris au moment où il tournait la tête et sa barbiche tout de guinguois, offre l'image d'un fâcheux et définitif torticolis.
    Dans la salle, même effet de momification sur les assistants. Et les mains pieusement emboîtées l'une dans l'autre, avec des airs penchés, complètent pour chacun la silhouette du recueillement le plus édifiant.
    C'est le Musée Grévin qui vient d'envahir la chapelle tout à coup. C'est la minute de silence chère à tous les cercles mystiques. D'autres disent « Je demande un silence ! » ou bien : « Unissons-nous dans le silence ! » Les Antoinistes, soucieux de simplification, se contentent de s'immobiliser sans crier gare.
    Quoi qu'il en soit, cette momification est purement provisoire. Bientôt, la chaire s'anime à nouveau, si l'on peut dire. La diaconesse ouvre un livre relié de noir et commence à lire. Lentement, gravement, d'une voix neutre, monotone d'écolière qui ne comprend pas un mot de ce qu'elle récite, d'une voix entièrement désabusée de toutes les vanités terrestres, d'une voix nostalgique, mécanique, elle poursuit sa lecture.

*
*   *

    Cependant une sueur d'angoisse envahit mon front ; J'écarquille des yeux effarés... et je me demande si, par l'effet de quelque terrible indisposition, je ne suis pas devenu tout à coup stupide... J'entends distinctement chacun des mots distillés par la lectrice : ce n'est ni du latin, ni de l'hébreu, ni de l'anglais, ni du moldovalaque... c'est du français ! du français moderne !... et je n'arrive pas à comprendre un traitre mot !... Et ce qui m'inquiète le plus, c'est de voir qu'autour de moi mes frères inconnus conservent une parfaite sérénité. Il ne semble pas que cette prose les bouleverse. Ils écoutent ça comme ils écouteraient autre chose, avec un petit air convaincu.
    La lecture toutefois continue avec moins de régularité, la lectrice s'arrête un instant, jette sur la pendule un regard dénué de toute discrétion, lit encore quelques phrases, et tout à coup s'arrête, ferme le livre, se lève.
    Tout est consommé !
    Alors le surplombant se lève aussi, et sur son geste ordonnateur, le silence à nouveau plane. Le Musée Grévin sévit encore quelques minutes. Puis la voix de l'adepte s'élève :
    – Mes frères, au nom du Père, merci.
    C'est bien fini. Suivons le flot. Je sors complètement abasourdi. Pourtant, une des diaconesses qui veillent à la porte m'a chuchoté au passage d'un air mystérieux :
    – Demain, dix heures... La Grande Opération !
    Et je m'en vais, regrettant qu'une obligation de famille me prive précisément de ma liberté à cette heure-là.
    Cependant le regret de manquer une occasion pareille ne cesse de me lanciner. Et, le lendemain, au moment de prendre le train, je me décide tout à coup. Tant pis pour la famille ! Un taxi. J'arrive à temps à la petite chapelle... pardon, au petit temple. Et le cérémonial simpliste se déroule à nouveau. Mais, cette fois, la lectrice nous lit le texte des « dix principes de Dieu » tels qu'ils furent révélés par le Père :

                       PREMIER PRINCIPE
               Si vous m'aimez
Vous ne l'enseignerez à personne,
Puisque vous savez que je na réside
               Qu’au sein de l'homme.
Vous ne pouvez témoigner qu'il existe
               Une suprême bonté
Alors que du prochain vous m'isolez.
                       DEUXIEME DRINCIPE
Ne croyez pas en celui qui vous parle de moi
Dont l'intention serait de vous convertir.
           Si vous respectes toute croyance
                        Et celui qui n'en a pas,
Vous savez, malgré votre ignorance,
Plus qu'il ne pourrait vous dire
, etc., etc.

    Il y en a dix comme ça. Et c'est là le grand secret ! Et pour récupérer la bonne santé, ces dix principes sont un moyen incomparable, et c'est parce que le Père récitait ces dix principes qu'il obtenait des cures sans nombre, et c'est parce que ses successeurs ont conservé cette tradition que les malades accourent encore vers eux, de toute l'ardeur de leur foi...
    – Mes frères, au nom du Père, merci !
    De nouveau c'est la sortie. Mais, mieux renseigné cette fois, j'observe que beaucoup de fidèles restent à leur place. Ce sont les consultants... Ils ont fait appel à l'intercession curative du Père : leurs noms enregistrés sur un grand livre ont été ou seront communiqués à Jemeppe-sur-Meuse afin que la « maison mère » puisse d'urgence faire des prières à leur intention. Et maintenant, l'un après l'autre on les appelle dans un petit cabinet où l'officiant leur délivre une consultation... purement spirituelle. De bonnes paroles, quelques conseils d'hygiène, et surtout des prières... des prières et encore des prières.
    Car, ainsi que le Père l'a révélé, les plaies du corps ne sont que la conséquence des plaies de l'âme. C'est donc celles-ci qu'il convient de soigner si vous voulez guérir celles-là ! Et tout cela est rigoureusement conforme à la conception générale des mystiques pour qui la maladie n'est que la rançon d'une faute commise par le patient ou par quelqu'un de ses proches... Non que le Père ait jamais nié que la médecine pût guérir ! Il a dit textuellement, un jour ou par hasard il avait oublié d'être obscur :
    – Dans le cas où un malade s'adresse au médecin, c'est sa foi en celui-ci qui le guérit... Le médicament n'est rien en lui-même, notre pensée seule nous le rend efficace...
    Et voilà pourquoi, au moment même où je vous parle, les malades continuent de se rendre au culte antoiniste et d'y recueillir des guérisons véritablement étourdissantes (comme on en voit à Lourdes ou à Lisieux, comme on en voyait au temple d'Epidaure), car la foi appelle le miracle et le miracle appelle la foi... et il n'y a vraiment aucune raison pour que ça finisse !

                                MARCEL REJA

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Orange (Journal officiel de la République française. Lois et décrets 22 oct 1943)

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Orange (Journal officiel de la République française. Lois et décrets 22 oct 1943)

1er octobre 1913. Déclaration à la préfecture d'Avignon. ASSOCIATION CULTUELLE ANTOINISTE D'ORANGE. Modifications aux articles 1er, 16 et 17 destinées à préciser les liens de subordination de la Cultuelle vis-à-vis de l'Union. Siège social : 3, rue de la Paix, Orange.

Journal officiel de la République française. Lois et décrets 22 octobre 1943

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Orange (Journal officiel de la République française. Lois et décrets 22 oct 1943)

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Orange (Journal officiel de la République française. Lois et décrets 22 oct 1943)

1er octobre 1913. Déclaration à la préfecture d'Avignon. ASSOCIATION CULTUELLE ANTOINISTE D'ORANGE. Modifications aux articles 1er, 16 et 17 destinées à préciser les liens de subordination de la Cultuelle vis-à-vis de l'Union. Siège social : 3, rue de la Paix, Orange.

Journal officiel de la République française. Lois et décrets 22 octobre 1943

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Orange - consécration du Temple (L'Intransigeant 19 sept 1926)

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Orange - consécration du Temple (L'Intransigeant 19 sept 1926)

* Vers six heures, hier soir, à la gare du Nord, arrivèrent en avant-garde quelques centaines d'hommes et de femmes vêtus de noir. Les hommes, en longue redingote et coiffés de chapeaux à bords plats. Les femmes étaient également de noir vêtues, mais sans crêpes ni voiles.
    C'étaient des « antoinistes » qui arrivaient de Liége pour se rendre à Orange où, dimanche matin, aura lieu la consécration d'un temple élevé par les disciples du culte d'Antoine de Jemeppe...
   Et parmi eux se trouvait la veuve vénérée du père Antoine, « Notre Mère Antoine », comme disent les disciples.

L'Intransigeant, 19 septembre 1926

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