• Au Pays du Spiritisme - Antoine-le-Guérisseur (Gazette de Charleroi, 20 décembre 1908)(Belgicapress)

    Au Pays du Spiritisme - Antoine-le-Guérisseur (Gazette de Charleroi, 20 décembre 1908)(Belgicapress)Au Pays du Spiritisme
    ANTOINE-LE-GUERISSEUR

        C'est à Jemeppe-sur-Meuse que le spirite fameux, et surnommé Antoine-le-Guérisseur habite.
        Mérite-t-il le nom qui lui a été donné ? C'est ce dont nous avons tenu à nous rendre compte de visu, et c'est le résultat de notre visite chez lui que nous voulons exposer à nos lecteurs.
        Grâce au bienheureux Antoine, le petit village de Jemeppe-sur-Meuse est connu aux quatre coins du pays, et il est devenu de centre d'une nouvelle religion qui déjà a son temple...
        Pour me rendre chez le nouveau Messie, je n'avais guère eu besoin de me renseigner beaucoup. Une bonne femme à qui je demandai l'adresse d'Antoine parut surprise de mon ignorance.
        – Suivez ces gens, me dit-elle, ils vont sûrement chez lui...
        Et je suivis une multitude, dont le passage m'avait frappé et que j'attribuais à la célébration des funérailles d'un notable de la localité. Mais c'était le cortège habituel et journalier des visiteurs d'Antoine-le-Guérisseur.
        Sa maison est modeste, mais elle est flanquée d'un vaste bâtiment ayant tout-à-fait l'aspect d'une chapelle. A l'intérieur, tout le rez-de-chaussée est garni de bancs. Une galerie fait le tour du hall, et de chaire de vérité est adossés au fond, face à l'entrée. Les murs sont garnis d'inscriptions en grandes lettres. L'une nous fait savoir immédiatement dans quel lieu nous nous trouvons. Elle porta : Ecole professionnelle de philosophie et de morale, et elle est accompagnés d'autres inscriptions.
        J'en citerai quelques-unes : Un seul remède peut guérir l'humanité : La Foi. – C'est de la Foi que naît l'amour : l'amour qui nous montre dans nos ennemis, Dieu lui-même. Ne pas Aimer ses ennemis, c'est ne pas Aimer Dieu. Car c'est l'Amour que nous avons pour nos ennemis qui nous rend dignes de le servir. – C'est le seul amour qui nous fait vraiment aimer, parce qu'il est pur et de vérité.
        Ces maximes en valent d'autres, et développer chez son prochain l'amour du semblable n'a rien de méchant. C'est la religion d'Antoine. Donne-t-elle de bons résultats ?
        Nous sommes bien une centaine de personnes qui attendons. Quoi ? Mon voisin m'explique. A tour de rôle nous serons reçus par le Guérisseur, et il suffit pour l'approcher de se présenter à un guichet que l'on m'indique, et où un disciple d'Antoine me remet une plaque de plomb, avec un numéro. La mienne porte le numéro 410, et cela veut dire que, ce matin je suis le 410e qui s'est présenté pour voir le Guérisseur... Et je ne suis pas le dernier, à ce que je vois par les nouveaux arrivés qui viennent s'asseoir derrière moi.
        La guichetier appelle les visiteurs par le numéro qu'ils portent. On en est au 250e. Il y a du bon, j'ai le temps de bavarder.
        Mon aimable voisin m'explique que toutes ces personnes viennent pour elles-mêmes ou pour des parents malades. Lui vient pour sa fillette, qui souffre sans se plaindre. Mélancolie ou neurasthénie, il ne sait, mais on lui a dit qu'Antoine la guérirait, et il est venu.
        Une autre personne, une dame d'un certain âge, me dit qu'elle vient de Maubeuge. C'est la troisième visite qu'elle fait à Antoine : sa fille était malade, on la soignait sans arriver à un mieux. Et maintenant ? Elle est en bonne voie de guérison...
        Et que prend-elle ? Rien. Antoine prie pour elle, et il suffit qu'elle pense à lui, qu'elle espère...
        Sapristi, cela devient sérieux. Qu'est-ce que je vais bien raconter à ce saint homme ? Vais-je me déclarer malade ou journaliste ? Je prends le premier de ces deux partis, car en cherchant bien je n'ai pas difficile à me découvrir un malaise, un bobo, là...
        Le guichetier arrive à mon numéro. Je tends mon plomb, une porte s'ouvre et je me trouve en présence d'Antoine-le-Guérisseur. L'impression est bonne. Antoine a une figure de brave homme aux cheveux et à la barbe grisonnants.
        – Que désirez-vous, mon ami ? C'est pour vous que vous venez ? Qu'avez-vous ? me demande-t-il.
        Et moi de lui répondre, de bonne foi, je souffre de ceci, de cela. A bien chercher, je me suis découvert toute une collection de malaises...
        Antoine-le-Guérisseur lève les yeux au Ciel, puis il les abaisse sur moi et il me dit :
        – Espérez, je prierai pour vous. Cela ira mieux,
        – Mais, objectai-je, et mes drogues ?
        – Abandonnez-les, contentez-vous de penser à moi, cela suffira, me répond-il.
        – Et combien vous dois-je ? demandai-je pour terminer l'entretien.
        – Rien, Monsieur, dit Antoine de sa voix douce.
        Comme je n'ai pas suivi le « traitement » d'Antoine, et pour cause, je ne sais quelle peut être son efficacité.
        Mais il paraît que certains s'en trouvent bien. On cite des cas de guérison surprenante. Est-ce vrai ? Pourquoi pas, en somme, pour les malheureux qui ont la « foi », la grande, celle qui soulève les montagnes. Le zouave Jacob, dont il fut tant parlé il y a une vingtaine d'années, n'arrivait-il pas à guérir lui aussi...
        Et Lourdes, de nos jours ?...
        En tout cas, à Jemeppe-sur-Meuse, c'est un pèlerinage incessant. Antoine reçoit tous les jours de 7 heures du matin à midi, sauf le samedi et le dimanche. Ce jour, Antoine-le-Guérisseur monte en chaire pour enseigner le « Nouveau Spiritualisme »...
        Mais il se tient à la disposition du public, tous les jours et à toute heure pour les cas urgents !
        Ses « offices » sont suivis par une foule considérable, et parmi les visiteurs qui viennent à ses « consultations », on en voit de tous les coins du pays et même de l'étranger. Dame, on ne paye rien, et à ce prix on en redemande...
        Le seul bénéfice, et je ne sais si cela peut en constituer un, – il est minime en tous cas – consiste dans la publication d'une revue mensuelle, « L'Auréole de la Conscience », dont l'abonnement annuel coute deux francs. Et encore, les visiteurs ne sont pas sollicités...
        Dans cette revue, et sous forme d'entretiens, Antoine-le-Guérisseur préconise la charité, l'amour du prochain, la tolérance pour toutes les opinions, parce que, dit le Messie de Jemeppe : « La liberté et l'égalité sont inséparables de la foi ».
        Ce n'est pas si mal et surtout, cela pourrait être médité avec avantage par beaucoup.                           NEMO.

    Gazette de Charleroi, 20 décembre 1908 (source : Belgicapress)


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