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Henri Pirenne - La liberté de l'ouvrier
Toute la question sociale se réduisait au jeu de l'offre et de la demande. Toute intervention serait un trouble. L'harmonie ne résultait-elle pas de la concurrence ? Les crises même n'étaient-elles pas des cataclysmes aussi fatals que ceux de la nature ? Si le prolétariat grandissait sans cesse et si la misère des travailleurs était trop évidente pour qu'on pût la nier, c'était là un mal aussi inévitable dans l'organisme industriel que la maladie dans l'organisme physique. La liberté ne fournissait-elle pas d'ailleurs à l'ouvrier tous les moyens d'améliorer sa condition ? On lui avait donné des écoles ; en sa faveur on avait supprimé les octrois ; des caisses d'épargne étaient ouvertes ; s'il ne profitait pas de ces avantages, les seuls qu'on pût lui offrir sans le dégrader, à qui pourrait-il s'en prendre, sinon à lui-même ? [...] Par ignorance, mais surtout par piété, il se résignait à son sort. La propagande socialiste qui, avant 1848, n'avait pu mordre sur lui, avait cessé, et l'Église en lui faisant accepter sa misère, l'empêchait de protester.
Henri Pirenne, Histoire de Belgique,
volume 7. De la Révolution de 1830 à la guerre de 1914, p.281
source : archive.org
Tags : solidarité
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