• la ville de Spa vers 1830

    SPA, bourg, commune et chef-lieu du canton de ce nom ; bornée au N. par Theux, E. par Sart, S. par La Gleize et Stoumont, O. par La Reid.

    A 1 1/4 l. de Sart, 1 1/8 de La Reid, 1 3/4 de Theux, 2 de La Gleize, 2 3/4 S. de Verviers, et 7 S.E. de Liège.

    Le territoire de cette commune offre une surface fortement inclinée au N., à l'E. et au S., et coupée par une multitude de collines arides ou boisées. Il y a 4 ruisseaux ; l'un nommé Weay, prend naissance près du hameau de ce nom, à 1 lieue E. du bourg de Spa qu'il traverse, et va se jeter dans la Hoëgne au pied des ruines du vieux château de Franchimont ; le 2e appelé Picherotte, a sa source au S. de Spa, dans la forêt communale, et son embouchure dans le Weay en arrivant par l'E. dans le bourg ; le 3e nommé dit Vieux-Spa, prend sa source au S.S.O. du bourg, et se jette dans le Weay à Spa même ; le 4e nommé l'Eau-Rouge, prend naissance au S.O. de Spa, et se rend dans le Weay, au hameau du Marteau, en traversant la limite de la commune, du côté de l'O. Il y a plusieurs fontaines d'eau douce et cinq sources principales d'eaux minérales, dont il sera parlé ci-après. Le terrain de transition de formation quartzo-schisteuse, forme le fond du sol. Les roches qui lui sont subordonnées sont le schiste ardoise, le schiste alumineux, le phyllade pailleté. On y remarque des rochers schisteux d'un noir bleuâtre, à filons quartzeux, des schistes et quartz irisés, du jaspe schisteux, du schiste noir graphique de l'alumine sulfatée, du poudingue rouge ou verdâtre, du fer oxidé brun fibreux. Une argile plus ou moins compacte recouvre le terrain ardoisier, et forme une couche végétale de 15 à 20 centim. de profondeur.

    Spa est un très-gros bourg, ou plutôt une jolie petite ville ouverte, entourée de montagnes ou plutôt d'une seule montagne, assez haute, qui s'étend en ellipse, sur trois points principaux, en montrant ça et là son front rocailleux et aride, et ne laissant qu'une ouverture à l'O. pour la petite rivière de Weay. On a pratiqué dans la pente plus ou moins raide, du côté de la montagne qui borne le bourg, des rampes douces et agréables, qui présentent les promenades les plus pittoresques qu'il soit possible d'imaginer ; ces promenades taillées en zigzags dans le roc, transportent insensiblement les promeneurs sur le plateau cultivé, d'où ils découvrent les nombreuses montagnes, les forêts épaisses, les bruyères stériles qui, alternativement, forment l'horizon. Indépendamment de ces promenades régulières, il y a encore celle que l'on désigne sous le nom de promenade de Sept Heures ; ce nom lui vient de ce qu'avant l'établissement de la salle de la Redoute, chaque jour, lorsque le temps le permettait, la société se réunissait à 4 et à 7 heures, dans deux prairies différentes où l'on donnait des fêtes et des bals. En 1757, la dernière de ces prairies fut convertie en esplanade qui devint une promenade très-agréable.

    La Commune comprend 608 maisons, dont 451 sont situées au bourg de Spa ; 70 à Creppe, à 1/2 l. ; 24 à Winamplanche, à 3/4 de l. ; 36 à Nivezé, à 1/2 l. ; 21 à Prefayhay, à 1/4 de l., et 6 au Marteau, à 1/2 l. Environ la moitié des habitations sont construites en pierres et en briques, et couvertes en ardoises, quelques-unes en tuiles ; les autres, dans lesquelles sont comprises presque toutes celles des hameaux, sont construites en bois et argile, et couvertes en paille. Outre plusieurs beaux hôtels, Spa possède un superbe Vaux-Hall, une redoute, une salle de spectacle, et un nouvel hôtel des bains, érigé en 1828. Ces édifices font un effet extraordinaire, surtout dans un endroit où les chaumières seraient plus analogues à son site pittoresque, à la stérilité du sol, et au défaut de moyens de ne se procurer qu'à grands frais les objets de consommations qui sont très-considérables, pour entretenir un luxe tel que l'on voit à Spa dans la belle saison. — L'intérieur du bourg est pavé. — 1 église primaire, dédiée à St.-Remacle ; elle a été érigée en paroisse en 1573 ; avant cette époque, il n'y avait qu'une petite chapelle où l'on venait dire la messe tous les jours de fêtes pour la commodité des habitans qui faisaient partie de la communauté et de la paroisse du Sart. Cette église a été rebâtie en 1719. Il y a 2 chapelles, celle de St.-Joseph et celle de St.-André.

    Les habitans s'occupent de la fabrication d'ouvrages en bois habilement travaillés et vernis. Il se fait un grand débit des eaux de Spa, qui se transportent dans les contrées les plus éloignées. Il y a 3 moulins à farine mus par eau. — Ses eaux minérales y attirent une foule d'étrangers de toutes les contrées de l'Europe, surtout de l'Angleterre ; mais ce n'est pas particulièrement pour faire usage de ses eaux qu'ils y viennent, car on s'y occupe beaucoup plus d'amusemens que de santé. — Il y a 1 bureau d'enregistrement ; 1 direction des postes aux lettres.

    Les productions agricoles consistent en froment, seigle, épeautre, avoine, orge. Fourrages suffisans pour la nourriture des bestiaux de la commune. Lègumes et fruits. Bois taillis, essence de chênes, bouleaux, hêtres, peu de futaie. — 160 chevaux, 120 bœufs, 600 vaches et génisses, 700 bêtes à laine. On y élève des abeilles. On pèche des truites, anguilles, etc. — Foires : les 5 mai, 26 juillet et 16 novembre. — Une grande route traverse Spa, communiquant avec les villes de Liège, Verviers et Stavelot.

    Population : 3617 habitans.

    Superficie : 3590 h. 76 a. 83 c.

    Ci-devant : pays de Liège ; marquisat de Franchimont.

    Histoire : Une question difficile à résoudre est, si la fontaine célèbre dont Pline fait mention, a été à Tongres, ou si on doit la placer à Spa. L'abbé du Bos et le P. Wastelain observent que dans les auteurs anciens, tel que Pline, le mot tintas désigne toujours une contrée, un pays, et jamais une ville ; et que ce n'est qu'au déclin de l'empire, et du temps qu'Ammien-Marcellin écrivait, qu'on l'a pris dans le dernier sens ; que par conséquent, il paraît qu'il a voulu dire, que dans le pays des Tongriens, il y avait une fontaine célèbre, avec la vertu et les propriétés qu'il décrit, et qu'on retrouve encore dans les eaux de Spa.

    Spa, dans ses commencemens, n'était qu'un petit hameau, où il n'y avait que quelques cabanes dressées par-ci, par-là, entre des rochers où l'on forgeait le fer. Ce lieu, aujourd'hui si renommé, serait sans doute demeuré enseveli dans l'obscurité sans la découverte qui a été faite de ses eaux minérales. Les dévastations dont le pays fut si souvent le théâtre, l'incendie général du marquisat de Franchimont qui fut ordonné en 1468, par le duc de Bourgogne, Charles-le-Téméraire, pour punir la révolte des Liégeois contre leur souverain, ont détruit et consumé les archives du pays. Parmi quelques documens échappés a la destruction, on distingue le Grand-Recort de l'année 1326, dans lequel on lit qu'à cette époque , Colin-Leloup, de Bréda, venait à Spa, prendre les eaux, regardées depuis long-temps comme salutaires dans un grand nombre de maladies ; le soulagement qu'il en éprouva le détermina à fixer sa résidence près de la source ; il y fit construire une demeure, et insensiblement il établit dans le voisinage des forges et des fourneaux à fondre le fer, pour lesquels il acheta d'Adolphe de la Marck , prince-évêque de Liège, douze bonniers de bois, dont deux furent défrichés et se couvrirent bientôt de bâtimens qui furent les premières maisons de ce que l'on appelle encore aujourd'hui le nouveau Spa. L'affluence des personnes de distinction qui vinrent prendre les eaux de Spa depuis l'an 1575, contribua successivement à l'embellissement de ce bourg. En 1643, les Pères capucins s'établirent à Spa ; Waltère de Liverlo, bourgmestre de Liège, fit construire le couvent. Pierre-le-Grand ordonna en 1717 qu'un monument serait élevé au-dessus de la source du Pouhon. La première salle de redoute que l'on eût instituée, fut terminée en 1764. Le Vaux-Hall, sur le chemin qui conduit du bourg à la Géronstère, fut commencé en 1771. La construction de la nouvelle salle du Pouhon, monument dédié à la mémoire du czar Pierre-le-Grand, fut commencé en 1820. La communication que les habitans de Spa entretinrent avec les étrangers qui y ont afflué dans tous les temps, leur a inspiré le goût des arts ; et la facilité de leur débiter leurs ouvrages, a stimulé leur activité. C'est à la fin du 17e siècle et au commencement du 18e que les arts y étaient cultivés avec le plus d'honneur, et ce bourg; a donné le jour à plusieurs artistes distingués. C'est la patrie de Dagly , qui imitait avec un goût exquis les fruits et les fleurs de la Chine et du Japon, soit en plat, soit en relief. Il est inventeur de ce beau vernis à l'épreuve de l'eau et du feu, qui a la propriété de s'employer sur des matières ployables, telles que les étoffes, la toile et le cuir. C'est ce qu'on appelle le vernis des Gobelins, qui fut employé dans cette fameuse manufacture depuis l'an 1713. Spa est aussi la patrie de Remacle Le Loup, qui s'est distingué dans les paysages et les perspectives, et a dessiné et gravé les vues des villes et des châteaux insérés dans les Délices du pays de Liège, 1743 ; de Lambert Xhrouet ou Chrouet, qui a éminemment brillé dans l'art de tourner ; de Joseph Xhrouet, qui s'est distingué dans la gravure, et dont on a le plan du grand marché de Liège et de l'hôtel-de-ville, inséré dans les Délices du pays de Liège ; du docteur Xhrouet, auteur d'un traité sur les eaux d'Aix-la-Chapelle et de Spa, imprimé en 1714, etc.


    Dictionnaire géographique et statistique de la province de Liège
    (Henri Joseph Barthélemi Del Vaux) - 1835


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