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Liège - Temples antoiniste et protestant
En 1660, un commissaire de la Cité, Honlet, dont la fille avait pris le voile chez les Ursulines, en finança largement la construction. Le bâtiment était situé juste au coin de la Montagne de Bueren et Hors-Château. La chapelle sera cédée en 1819 au consistoire du culte protestant et démolie en 1937.
La Commission royale a fait connaître à M.M. les Ministres de la Justice et des Sciences et des Arts que l'Administration communale de Liège a l'intention de faire démolir l'ancienne chapelle des Ursulines, servant actuellement au culte protestant, sise rue Hors-Château, afin de permettre l'agrandissement de la Caserne des Pompiers et faciliter la sortie des pompes et dévidoirs.
RAPPORTS DE M. JASPAR.
26° Temple évangèlique protestant, en Hors-Château à Liège.
M . Jaspar a transmis à notre Président, M. le Gouverneur, le rapport suivant qu'il faut bien publier entièrement : « Je suis en possession de votre honorée du 13 mars écoulé, 2e division, n ° 22.942/142, relative au classement du Temple évangèlique protestant, rue Hors-Château, à Liège. Vous me demandez de « fournir courte notice et photo ». Je pense ne pouvoir mieux faire que de vous rappeler les rapports qui ont été dressés à ce sujet en 1926 par notre regretté collègue M. Lohest et moi-même, lesquels ont entraîné le classement du Temple. J'extrais de mon rapport du 15 décembre 1926 : « Lors d'une de nos récentes séances , il nous a été annoncé que l'Administration communale de Liège projetait la démolition du Temple protestant, ancienne église des Ursulines, rue Hors-Château, et cette nouvelle a soulevé la réprobation générale. » Nous avons visité l'église, bien connue des Ursulines. C'est un temple modeste d'aspect, à une seule nef voûtée en briques, avec nervures et arcs doubleaux. A l'intérieur, les murs sont divisés horizontalement en deux parties par une corniche très saillante. » Dans la région supérieure, de chaque côté, six grandes fenêtres à arc surbaissé. Comme ornementation dans les trumeaux de simples pilastres avec chapiteaux. Le temple est entièrement badigeonné en blanc, et dans le chœur se remarquent les restes d'un grand autel à retable Renaissance dans lequel on a intercalé la chaire à prêcher. » Ce temple est assez délabré, la voûte est percée d'humidité et lézardée le long du mur Nord ; nous n'y avons relevé aucune inscription, ni motif intéressant, sauf deux blasons se trouvant sur les colonnes du jubé. Le temple mesure une longueur de 21 m. 50, une largeur de 9 m. 50 et ses murailles ont une épaisseur de 1 m. 15. » Inutile d'insister sur l'extérieur, mieux connu encore que l'intérieur et dont la silhouette fait partie depuis 1661 de l'ensemble pittoresque de la rue Hors-Château ; avec cette réserve toutefois relative à l'église, que le pignon Ouest en briques à front de la rue de Bueren était autrefois masqué par le couvent lui-même qui se prolongeait en arveau au-dessus de cette rue de Bueren.
» Toute une transformation a donc été opérée de ce côté et correspond, pensons-nous, à l'enlèvement du clocheton renversé par la foudre en 1869, et non réédifié par économie !... [...]
» Nous vous proposons le classement de ces immeubles afin que notre Administration, éclairée par nos considérations modifie ses intentions et cherche une solution moins radicale et mieux en rapport avec le respect des décisions et des classements de la Commission royale des Monuments et des Sites.
» Si l'on invoquait en faveur des démolitions projetées la nécessité de faciliter la sortie des pompes et échelles de sauvetage, nous n'hésiterions pas à proposer, en échange, la démolition du Temple antoiniste, moins ancien, moins intéressant, moins solide que le Temple protestant et qui entrave la sortie normale des dits engins bien plus que les immeubles dont nous défendons le maintien. » Quant à la photo désirée, celles qui vous ont été fournies en mars 1927, ne sont-elles pas suffisantes ?
Je rappellerai donc que le site de Hors-Château et le Temple protestant sont classés, qu'ils ont fait l'objet d'une volumineuse correspondance depuis janvier 1917 jusqu'au 24 octobre 1930. Depuis plus rien, sauf les démolitions et reconstructions modernes (! ) d'immeubles qui enlaidissent tout le site.Ci-dessous copie de la lettre que m'adresse le 24 octobre 1930, le vénéré Président Chevalier Lagasse de Locht :
« Comme suite à votre lettre du 22 octobre dernier , nous avons l'honneur de vous faire connaître que la Commission royale, avant le vote par la Chambre des Représentants du projet de loi sur la protection des Monuments et des Sites, voté à l'unanimité par le Sénat ne possède d'autres moyens de faire respecter son avis que la persuation par l'appel au sens commun ».
Elle laissait espérer la protection par la loi votée le 7 aoû t 1931.
Sans demander la démolition du Temple protestant, l'Administration communale nous l'annonce...
Si la nécessité de maintenir et de développer la caserne des pompiers à l'emplacement actuel est admis, on pourrait, à nouveau, suggérer la démolition du temple antoiniste qui dépare le site et répondrait au x « raison s techniques » invoquées mais qu'on ne peut combattre puisqu'on les laisse ignorer ...
C'est vraisemblablement la sortie difficile des camions et échelles et à ces difficultés la disparition du Temple antoiniste mettrait fin tout en maintenant et même en améliorant le site.
D'un point de vue plus général, ne pourrait-on proposer le transport en un autre lieu de la dite caserne ? Car c'est l'emplacement qui est défectueux, sans que l'on puisse admirer l'installation, dans un ancien couvent, d'une caserne de pompiers... La sortie des engins n'est pas seulement défectueuse au pied de la Montagne de Bueren, mais aussi dans tous les parcours qui touchent à Hors-Château : toutes les artères sont trop étroites et les tournants dangereux.
Oserais-je proposer le terrain de la Verrerie d'Avroy, dont la grande profondeur permettrait de masquer la caserne nouvelle qu'on pourrait ériger dans le fond de la parcelle (seconde zone) tout en réservant à la bâtisse les terrains et front de rue (première zone) ?
D'autres emplacements pourraient être réservés dans les terrains laissés libres par les démolitions du quartier de la Batte. L'un et l'autre emplacement permettrait l'arrivée des engins susdits sur de grandes artères telles que le boulevard d'Avroy ou le quai de la Batte. On pourrait aussi envisager l'emplacement des écoles place Xavier Neujean donnant deux issues : l'une place Xavier Neujean, l'autre boulevard de la Sauvenière. Démolir, c'est détruire une richesse ; bâtir c'est créer !...
Transformer ?... Rappelez-vous le couteau de Jeannot...
Ayant ainsi répondu au premier des attendus de l'extrait du registre des délibérations du Conseil communal que vous m'avez transmis, savoir :
« 1° Il entre dans nos intentions de démolir cet édifice pour permettre l'agrandissement de la caserne des pompiers » ;
je constate que la modification annoncée au
« 2° La façade postérieure du temple a été modifiée en 1929/1930 »
n'en est pas une : C'est l'adjonction d'un étage construit contre le temple, mais sans dégâts apparents et sans grands frais, donc sous le bénéfice dit au
« 3° Le classement proposé nous ferait perdre le bénéfice des travaux exécutés à ce jour »
j'ai répondu au
« 4° Pour des raisons techniques , il n'est pas possible d'envisager l'agrandissement prévu dans une autre direction que celle de la rue Hors-Château »
reste le
« 5° La nouvelle façade à front de rue s'inspirerait du caractère de l'endroit et serait en harmonie avec les immeubles environnants »
qui vaut un long poème.
Quelle confiance pouvous-nous avoir dans le fonctionnaire qui estime « au surplus que l'immeuble en question ne possède pas un caractère architectural justifiant son classement » et qui ose promettre de mettre son nouveau bâtiment « en harmonie avec les immeubles environnants » ?...
C'est le coup de la Goffe... ou de la Gaffe, comme l'a dit la presse. De plus méchants feraient allusion à un autre coup...
En conclusion, et avec l'appui que vous voudrez bien me donner, j'émets, à nouveau, l'avis de classer le « Temple évangélique protestant sis en Hors-Château à Liège » afin d'en empêcher la destruction.Je vous adresse, M. le Gouverneur, avec mes remerciements, etc.. . » .
BULLETIN DES COMMISSIONS ROYALES D'ART & D'ARCHÉOLOGIE
LXXIVe ANNÉE. — 1935 (JUILLET-DÉCEMBRE)— Assemblée générale et réglementaire du 26 novembre 1935, tenue en la Salle de Marbre du Palais des Académies, à Bruxelles. Présidence de M. le Chevalier Lagasse de Locht, Rapports de classement, p366
source : http://www.ialg.be/ebibliotheque/crmsf/BCRAA_1935_2/BCRAA_1935_2.pdf
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