• Mort d'Antoine le Guérisseur (La Meuse, 25 juin 1912)(Belgicapress)

    Mort d'Antoine le Guérisseur (La Meuse, 25 juin 1912)(Belgicapress)

     MORT D'ANTOINE LE GUERISSEUR

        Comme nous l'avions fait prévoir hier soir, M. Louis Antoine, surnommé Antoine le Guérisseur, est mort ce matin dans son temple.
        Depuis le mois de février, son état de santé était devenu très précaire. Toutefois, contrairement à notre information d'hier, ce n'est pas à une attaque d'apoplexie que l'on doit attribuer sa mort, mais uniquement à la fatigue et à l'épuisement résultant de l'excès du travail. Immédiatement après sa mort. M. Delcroix, professeur à l'Athénée de Liége, prit la parole devant la foule accourue de toutes parts pour venir saluer la dépouille mortelle de celui dont la réputation était devenue mondiale.
        Dans son allocution, qui a fait grande impression, le distingué professeur a annoncé à la foule recueillie que M. Antoine n'avait fait aucun testament et qu'il avait transmis ses pouvoirs à sa femme, qui continuera l'enseignement de son culte et de sa doctrine.
        Le corps du fondateur du culte antoiniste repose au milieu du temple. Ni bougies, ni fleurs, si ce n'est quelques lauriers placés en cercle. Le vénéré défunt porte l'habit de son culte. Ses traits sont calmes.
        A l'entrée du temple, des adeptes en tenue antoiniste distribuent cet avis.

                                           Frère,
        Le Conseil d'administration du Culte antoiniste porte à votre connaissance que le Père vient de se désincarner aujourd'hui, mardi matin, 26 juin. Avant de quitter son corps, Il a tenu à revoir une dernière fois ses adeptes pour leur dire que Mère Le remplacera dans sa mission, qu'Elle suivra toujours son exemple. Il n'y a donc rien de changé, le Père sera toujours avec nous, Mère montera à la tribute pour les opérations générales les quatre premiers jours de la semaine, à 10 heures.
        L'enterrement du Père aura lieu dimanche prochain, 20 juin, à 3 heures.
                                                                      Le Conseil d'administration.

        Voici quelques notes biographiques :
        Louis Antoine était un ouvrier, né à Mons-Crotteux (province de Liége) en 1856, de parents pauvres, simples et foncièrement honnêtes. Il était le cadet de sa famille qui comptait onze enfants. Il débuta à 12 ans dans la mine, accompagnant son père et un frère qui étaient également mineurs. Ne voulant plus descendre dans la fosse, il devint ouvrier métallurgiste. A 24 ans, il quitta la Belgique pour aller travailler en Allemagne, où il séjourna pendant 5 ans. Deux ans plus tard, il alla à Pragua, près de Varsovie (Pologne Russe) et y accomplit un nouveau terme de 5 années, puis il s'installa définitivement en Belgique, à Jemeppe-sur-Meuse. Dans l'intervalle de son séjour en Allemagne, il revint au pays, épouser une femme, dont il avait fait la connaissance avant son départ. De leur union, naquit un enfant, un garçon que la mort leur ravit à l'âge de 20 ans. Leur séjour à l'étranger leur avait permis d'amasser une petite fortune. Ils la sacrifièrent pour venir en aide aux malheureux, éprouvant plus de bonheur à la dispenser à tous qu'ils n'en avaient trouvé en l'acquérant par leur labeur.
        Antoine le Guérisseur vécut très simplement et très sobrement. Ce fut un végétarien total. Il ne mangeait ni viande, ni œufs, ni beurre, ni lait, en un mot rien qui provint de l'animal ; il s'appliqua à rester en tout dans le naturel, fit lui-même tous les menus travaux que nécessita son entretien. Son travail du jour et de la nuit pour ceux qui firent appel à son concours, exigeait un recueillement constant. C'est pourquoi il vécut absolument retiré. Sa femme, une brave épouse, simple et modeste, qui va lui succéder, adopta deux orphelines, qu'ils ont élevées. En plusieurs circonstances, Mme Antoine remplaça son époux en opérant en son nom. Le défunt professa la religion catholique jusqu'à l'âge de 42 ans, puis il s'appliqua à la pratique du spiritisme, sans s'attarder toutefois dans le domaine expérimental pour lequel il n'avait aucune aptitude et qui ne le tentait nullement. Sachant à peine lire et écrire, il se trouvait incompétent pour résoudre ce problème scientifique : il lui préféra la morale et s'y adonna de tout cœur. Il continua jusqu'en 1906, date à laquelle il a créé le Nouveau Spiritualisme : c'est là que commença sa mission.
        Antoine le Guérisseur n'était pas instruit ; et, le peu de connaissance qu'il possédait il les avait acquises en dehors de l'école par son travail personnel. Mais au point de vue de la morale, il fut de tout temps supérieur à son milieu et à son époque, car il s'appliqua sans cesse à son amélioration. Sa mère était une femme pieuse et charitable. C'est dire que le fils fit ses premiers pas dans la voie de la charité qu'il a toujours suivie par la suite.
        Au contact incessant de la quantité innombrable de personnes qui le consultèrent chaque jour depuis plus de 21 ans, Antoine le Guérisseur n'a cessé d'être bienveillant, accueillant et très aimable.

    *  *  *

        A Jemeppe, comme partout d'ailleurs, Louis Antoine était entouré d'une profonde vénération.
        C'est une figure noble, étrange et troublante qui disparait avec Antoine le Guérisseur, fondateur de religion et thaumaturge.
        Antoine exerçait dans tout le pays de Jemeppe une influence salutaire. C'était un homme animé de généreux sentiments humanitaires et d'une grande foi mystique. A notre époque il apparaissait un peu comme un personnage anachronique et mystérieux de légende. Il sera très vivement regretté.
        On se souvient qu'Antoine fut, à deux reprises, poursuivi pour exercice illégal de l'Art de Guérir. Il fut, une première fois, condamné à 36 francs d'amende et la seconde il fut acquitté.
        Antoine avait fait de nombreux adeptes partout : en France, en Allemagne et en Belgique. Il avait fondé, dans la région de Jemeppe, un Cercle qui comprend un nombre considérable de membres.
        Le temple de Jemeppe possède son imprimerie d'où sortent des publications hebdomadaires dont le tirage s'élève, paraît-il, à vingt mille exemplaires.
        Depuis ce matin c'est un va et vient continuel. De tous les pays, de toutes les villes arrivent à la mortuaire des télégrammes de condoléances. Devant le temple, une foule compacte se presse et il faut attendre son tour pour pouvoir aller saluer la dépouille mortelle.
        A proximité du temple quelques marchands de cartes illustrées offrent, pour 10 centimes, le portrait du défunt.
        Sur toutes les figures des adeptes du culte antoiniste se lit la plus profonde consternation.
        On peut s'attendre pour dimanche à d'imposantes funérailles.

    La Meuse, 25 juin 1912 (source : Belgicapress)


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