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RONCQ - Les Antoinistes pendant la Guerre de 40
Illustrations : Monique Delmotte et son beau-frère Jean-Luc Jéret nous font partager leur histoire familiale.
RONCQ
Mai 40 : l'histoire d'un petit carnet
Publié le dimanche 22 août 2010 à 06h00
C'est un petit journal que tenait son père entre le 17 mai et le 20 août 1940. Un trésor familial que Monique Delmotte a retrouvé il y a quelques années et qu'elle nous fait partager.
C'est un petit carnet beige. À vue de nez quatre centimètres sur huit que Monique Delmotte a retrouvé il y a cinq ou six ans dans la maison de ses parents, rue Jules Watteeuw. « J'ai pleuré quand je l'ai retrouvé. C'était très émouvant » , raconte la dame aujourd'hui âgée de 78 ans. Ce carnet, c'est un agenda, un petit journal que son père Marcel a tenu, au jour le jour, du 17 mai au 20 août de l'année 1940. Un trésor d'histoire familiale, marquée par la seconde guerre mondiale. Des souvenirs que Monique Delmotte nous fait partager.
Elle n'avait que sept ans en 1940, son petit frère André un an. « Au début de la guerre, mon père était soldat au contrôle postal à Lille » . Au service du contre-espionnage, il était chargé d'ouvrir les courriers, la nuit. « Il avait pris l'habitude de fumer pour se tenir éveillé », se souvient-elle. Et puis, disait-on à l'époque, la fumée de tabac désinfectait le papier, susceptible d'être contaminé par la tuberculose. À l'invasion allemande, Marcel prend la route en camion avec son régiment vers Rennes. « Mon père a eu la bonne idée de prendre son vélo ». Un vélo avec lequel il faisait déjà les allers et retour entre Roncq et Lille, pour retrouver sa famille quand il avait des permissions.
« Adieu ou au revoir »
« Adieu ou revoir ? À ma femme et mes chers petits enfants Monique et André ». D'une écriture fine en italique, à la date du 17 mai 1940, Marcel Delmotte s'interroge. Ce n'est que le 19 mai que le régiment prend le départ. Haubourdin, Aire-sur-la-Lys, Montreuil, Maronne, Moulineaux... Marcel Delmotte arrive une semaine plus tard à Rennes. « Déjeuner et dîner à Cesson, le soir départ pour Rennes. Lettre à Marguerite », écrit -il à la date du 24 mai.
« Lettre à Marguerite », une annotation qui revient toujours au fur et à mesure des pages. Mais les lettres ne parviennent jamais à son épouse restée à Roncq. « Ma mère envisageait d'évacuer avec mon frère et moi, comme tout le monde, se souvient Monique Delmotte, c'est mon oncle Jules Renaerd qui l'a découragée de ne pas partir, seule sur les routes avec deux enfants ». Finalement, la famille Delmotte restera à Roncq. « Heureusement. Beaucoup de gens partaient, les commerçants aussi. Mais il y a un boulanger du Blanc Four qui n'est pas parti, il disait "si je pars, les gens n'auront plus de pain" ».
« Je ne vois que la route, la route, la route »
De son côté à Rennes, Marcel Delmotte et le régiment ont ordre de rejoindre Villeneuve-sur-Lot... mais par leurs propres moyens. « Heureusement que mon père avait pris la précaution de prendre son vélo ». Il part le 6 juin. Et au fur et à mesure des jours, les lettres se succèdent pour Marguerite, qui, elle, ne les recoit toujours pas. « On n'avait aucune nouvelle de lui. Alors ma mère est allée consulter les Antoinistes. La mère lui a dit qu'il fallait penser très fort à Dieu le père. Puis elle a prié pour chercher mon père parmi les morts, il ne s'y trouvait pas. Parmi les noyés, il ne s'y trouvait pas, parmi les prisonniers non plus. "Je ne vois que la route, la route, la route", disait-elle ».
Après la démobilisation du 3 août, Marcel Delmotte est effectivement sur la route. Le 5, il part de Villeneuve-sur-Lot, pour un périple - semblable au tour de France - qui le ramènera jusque Roncq. « Langon » (en Gironde) : c'est la dernière annotation de Marcel Delmotte à la date du 20 août.
Monique ne saurait plus dire la date précise : « C'était un samedi en fin d'après-midi. il est enfin rentré. Maman avait conservé une bouteille de Malaga pour l'ouvrir à son retour. La bouteille a donc été ouverte ».
Le 21 juillet 1946, Marguerite et Marcel Delmotte ont leur troisième enfant, Claudine.
Nord-Eclair, le dimanche 22 août 2010
source : http://www.nordeclair.fr/Locales/Tourcoing/Environs/2010/08/22/mai-40-l-histoire-d-un-petit-carnet.shtml
Tags : Lille, croix, tourcoing, Hellemmes
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