-
Dr Maurice Igert - Le Problème des guérisseurs (1931)
Auteur : Docteur Maurice Igert
Titre : Le Problème des guérisseurs
Éditions : Vigot Frères, Éditeurs, Paris, 1931Cf. le propos du jour publié dans Le Concours médical. Cet ouvrage semble approfondir la thèse de l'auteur publiée en 1928.
Extrait qui évoque Louis Antoine :
LES GUÉRISSEURS INTELLIGENTS
Nous avons cité le « cas-limite » de Germaine de Rouen. Nous n'ajouterons rien au chapitre qui la concerne. Germaine, par sa constitution mentale, par la variabilité des signes psychosiques qu'elle a présentés, par ses convictions, est certainement beaucoup plus voisine des guérisseurs précédents, que d'un thaumaturge comme J. Béziat. Seule une renommée à peu près semblable les a confondus.
L'étude de la mentalité et de la vocation de Béziat révèle quelques particularités qui méritent de retenir notre attention. Le guérisseur a présenté toute sa vie une orientation mystique de la pensée et de l'activité. Imposée par les circonstances, l'interruption de l'activité mystique (il disait « métapsychiste ») entraîne une crise de dépression, suivie bientôt de la révélation d'un don curatif.
La sincérité de Béziat n'étant pas douteuse, la conviction présente par elle-même un caractère anormal et elle s'est imposée à lui suivant un mécanisme psychologique très spécial.
Peut-on attribuer sa vocation à la suggestion ?
Certes, son caractère est très influençable, son imagination exagérée, son émotivité en surface. Mais, sa tendance mystique a imprimé à toute sa vie une direction à peu près constante. Son évolution mentale est faite de stabilité et d'instabilité.
Suivant le facteur auquel on accorde une prédominance, il est possible de le classer parmi les passionnés ou parmi les suggestibles.
En réalité, il serait artificiel de le ranger dans l'un ou l'autre groupe ; il représente un cas mixte.
Du mystique passionné il a la foi et l'orientation expansive. Et cependant il subordonne son don de guérir à des fins égoïstes et il reste tolérant.
Le mystique est surtout un créateur de système et un apôtre, il est le prosélyte de sa doctrine et lui soumet toutes choses. Ses actions, parfois dangereuses, n'ont de valeur, à ses yeux, que dans la mesure où elles augmentent le prestige des conceptions.
Béziat est surtout un praticien. Il ne fait pas la propagande de ses croyances, auxquelles il n'est peut-être pas très profondément attaché. « Je n'ai jamais cherché à imposer mes convictions, l'avons-nous entendu dire. L'essentiel, n'est-ce pas, c'est que je guéris. »
Il guérit et s'efforce passionnément de faire accepter « ce fait ».
Au lieu d'une conception métapsychique, c'est un pouvoir personnel qu'il affirme.
Il y a dans sa mentalité, un curieux mélange de disposition expansive et de tendance égocentrique.
Tantôt il est sollicité dans un sens, tantôt dans l'autre. Ces oscillations perpétuelles entravent aussi bien les réalisations complètes de son altruisme, que de son égoïsme.
Idéaliste passionné, il aurait pu édifier une religion nouvelle, comme un Swedenborg ou un Antoine, et conquérir la croyance populaire par des cures miraculeuses.
Pragmatique, l'exploitation de son pouvoir lui aurait assuré d'importants bénéfices, s'il avait eu le génie de « monter une affaire ».
Il ne s'est libéré, ni de l'intérêt, ni du mysticisme.Dr Maurice Igert, Le Problème des guérisseurs, 1931 (p.153-154)
-
Commentaires