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Louis Antoine, prophète
On peut lire dans Pierre Debouxhtay, chapitre IV, Guérisons et autres faits paranormaux, après l'évocation de la résurrection des morts, les lignes suivantes :
Guérisseur, Antoine était aussi prophète (1) : non seulement il a prédit des événements futurs mais dans la Révélation (p. 22) il recommande même à ses disciples de s'efforcer « d'acquérir cette sensibilité qui permet de pénétrer dans l'avenir ».
Y a-t-il beaucoup de prédictions d'Antoine qui se soient réalisées ? L'UNITIF (2) ne rapporte qu'un cas : c'est une adepte, E. Lagrave, 16, rue du Progrès, à Asnières, qui raconte qu'avant de venir consulter Antoine, elle avait pris les noms de douze personnes qui l'avaient priée de les recommander au Maître. « Il me dit ce qu'il adviendrait à chacune sauf pour une qui se désincarna quelques jours après. J'oubliais ces révélations, ce n'était qu'au fur et à mesure que les événements se déroulaient que je comprenais la grandeur et le savoir du Maître. »
D'après Kervyn (3), la clairvoyance d'Antoine était loin d'être infaillible. Cet auteur raconte l'histoire de la noyée.
« Le tribunal de Liége conserve les traces d'un des mécomptes d'Antoine. En 1907, un nommé Dangis jeta sa femme à la Meuse. Poussé par je ne sais quelle suggestion, il se présenta le lendemain chez Antoine. Il raconta la disparition de sa femme et désira savoir ce qu'elle était devenue. Le voyant ne fut pas déconcerté un instant. Avec son assurance habituelle, il répondit au mari : « Dans deux jours, votre femme vous écrira ». Voilà ce que Dangis rapporta aux juges. Les antoinistes furent très ennuyés de l'aventure qui était répétée par les journaux. »
En ce qui concerne les déclarations de Dengis, le récit de Kervyn est substantiellement exact (4), mais il omet de rapporter la déposition d'Antoine, interrogé par le juge d'instruction le 21 décembre 1906.
« Je suis consulté par un grand nombre de personnes sur ce qui pourra leur survenir. Je me rappelle qu'un homme dont j'ignore le nom est venu il y a quelques jours me dire que sa femme avait disparu. Je ne puis lire que dans les cœurs sincères, et j'ai cru rencontrer un obstacle qui m'empêchait de voir clair dans cette affaire. J'ai dit à cet homme de revenir me voir. Il est bien possible que je lui aie dit aussi qu'il aurait bientôt des nouvelles de sa femme ou qu'elle lui écrirait. Il arrive en effet que quand je ne puis lire dans l'avenir, je dise à ceux qui viennent me consulter l'une ou l'autre parole qui les encourage. J'ajoute que je ne me rappelle pas si j'ai dit cela à cet homme. Je l'ignore. Je fais cela généralement quand je vois que la personne qui me consulte est embarrassée ou peinée. Quand je parle à ceux qui me consultent c'est par inspiration. Je sais très bien que j'ai dit à cet homme qu'il allait avoir des nouvelles de sa femme et que c'est ce jour-là qu'on l'a retirée des eaux de la Meuse. Je remarque souvent ainsi après coup qu'il y a un fond de vérité, dans ces paroles que j'ai prononcées inconsciemment ou dans ces conseils que j'ai donnés. Vous parlant ici au nom de Dieu et de ma conscience, je dois vous dire que je sens que cet homme n'a pas toute sa raison. »
On le voit, Antoine se tire assez habilement d'affaire et même tâche de donner un bon tour à la réponse qu'il avait faite à Dengis.Après la clairvoyance, les apparitions. Mme P... avait consulté Antoine. « La nuit qui suivit ma visite, raconte-t-elle, M. Antoine m'a apparu et, suivant son regard, je l'ai vu éloigner une légion d'esprits mauvais. » (5)
Mme Lagrave, dont nous venons déjà de citer le témoignage au sujet des prédictions du Maître, raconte qu'avant de venir à Jemeppe elle avait vu Antoine : « Maître, je vous ai vu chez moi avant de venir, il y a trois jours. C'est possible, mon enfant, je suis à plusieurs endroits à la fois. » (6)
L'UNITIF rapporte encore deux autres cas semblables. « Avant de recevoir la lettre [du Père], je Le vis alors que je n'avais jamais été en sa présence, à côté de moi et me montrant du doigt avec son grand amour le livre d'Enseignement que je lisais et lorsque je fus à Jemeppe, le 15 août 1911, je reconnu que c'était bien Lui qui m'était apparu. » (7)
Une adepte, A. Doucet, raconte : « Huit jours avant sa désincarnation j'étais dans une cuisante épreuve et vers trois heures au milieu de mes larmes, je vis le Père devant moi, m'entourant du fluide éthéré et comme auparavant en sa présence je ressentis soudainement une joie profonde que nulle langue humaine ne saurait exprimer et que pourraient seuls comprendre ceux qui l'ont éprouvée. « Ma fille, me dit-II, puise en moi, donne en mon nom, mon amour est inépuisable. » – Mais Père, m'écriai-je, Vous êtes le Christ alors. – Il me répondit : « Lui-même » et Il disparut. » (8)
Signalons encore la vision dont fut favorisé un disciple pendant son sommeil (9), et l'apparition d'Antoine, le lendemain de sa mort : « Dans son travail sur le premier Interprète du Père, notre sœur a signalé que lors de la désincarnation de notre Sauveur des personnes l'avaient vu se confondre avec Mère. Nous joignons notre témoignage au leur. Le lendemain des obsèques solennelles nous assistions à l'opération, le lundi, nous étions aux galeries bien en face de Mère et au moment du profond recueillement nous avons vu (je dis nous parce que nous étions trois adeptes ensemble dans le même cas) nous avons vu le Père se fondre avec Mère et ne faire plus qu'un, nous avons gardé le silence sur cette vision attendant que des personnes autres que des adeptes en parlent pour qu'on ne croit pas que c'était le résultat de notre désir, une illusion, qui nous donnait le bonheur de contempler notre Sauveur, présent parmi nous partout et toujours. – Poncey, 23, boulevard de Picpus, Paris. » (10)
Citons pour terminer un fait qui présente certaine analogie avec les visions rapportées dans ce chapitre.
En novembre 1930, Rosine Pirsoul, âgée de 14 ans, habitant rue d'Angleur, 31, à Montegnée, était disparue. On la cherchait en vain.
« L'affaire se corse. La famille Pirsoul pratique le culte antoiniste, et après avoir invoqué la mémoire du Père Antoine, M. Pirsoul, du moins l'affirme-t-il à M. Hans, commissaire [de police], entrevit en une vision sa fillette noyée au fonds du puits » (11). L'enfant fut retrouvée dans le puits.
Nous énumérons ces apparitions, sans rechercher si elles sont réelles ou illusoires (12). Antoine lui-même s'est abstenu de se prononcer sur la réalité de ces phénomènes. A un adepte qui lui faisait une question précise, il répondit longuement mais à côté (13).(1) « Il semblait que le voile des siècles se fut dissipe pour Lui, que le passé, le présent, l'avenir ne fissent qu'un devant la pénétration de son regard intérieur. » (Le Père Antoine et son œuvre, p. II.)
(2) L'UNITIF, II, 7, p. 6.
(3) Page 14.
(4) Dengis était allé chez Antoine sur le conseil de sa belle-sœur. Dengis dit au guérisseur qu'il pensait que sa femme était allée rejoindre un amant. Antoine répondit : « Vous pouvez aller, elle vous écrira tantôt, vous saurez bien où elle est. » (D'après le dossier du procès.)
(5) Enseignement, p. 13.
(6) L'UNITIF, II, 7, p. 6.
(7) II, 9, p. 6.
(8) III, 5, p. 13.
(9) L'UNITIF, III, 1, p. 8.
(10) L'UNITIF, II, 9, p. 3.
(11) L'EXPRESS, 25-11-1930. N'omettons pas de rappeler que tout récemment des enfants d'antoinistes auraient vu la Sainte Vierge, à Chaineux-lez-Verviers. (GAZETTE DE LIÉGE, 12 octobre 1933 ; PARIS-SOIR, 18 Octobre 1933.)
(12) Les métapsychistes diraient que les apparitions « sont de simples hallucinations en état subconscient léger » ; les cas de clairvoyance s'expliqueraient « par transmission psychique entre subconscients »). (REVUE MÉTAPSYCHIQUE, 1933, p. 106.) Pour l'explication spirite des apparitions, voir A. KARDEC, Le livre des médiums, ch. VI et VII.
(13) L'UNITIF, I. 4, p. 7-8.Pierre Debouxhtay, Louis Antoine et l’Antoinisme, p. 176-180.
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