• Charles Baudouin - Suggestion et autosuggestion (1919)Auteur : Charles Baudouin
    Titre : Suggestion et autosuggestion
    Éditions Neuchâtel-Paris, Delachaux & Niestlé, 1919

        Charles Baudouin, né à Nancy le 26 juillet 1893 et meurt à Saconnex-d'Arve (Genève), le 25 août 1963, est un psychanalyste et écrivain français. Il articule ses propres théorisations avec les apports de Sigmund Freud, de Carl Gustav Jung et de Alfred Adler.
        Après des études de lettres, Charles Baudouin se forme à la philosophie à la Sorbonne où il est marqué par les personnalités de Pierre Janet et Henri Bergson. En 1913, alors jeune licencié en philosophie, Baudouin s’intéresse aux travaux d'Émile Coué et contribue à le rendre célèbre. Il cofonde, la même année, avec Coué, l’École lorraine de psychologie appliquée.
        En 1915, Pierre Bovet et Édouard Claparède l'invitent à participer aux travaux de l'Institut Jean-Jacques Rousseau, future faculté de psychologie et des sciences de l'éducation de l'université de Genève, où il est nommé professeur. Sa présence en Suisse lui permet de se rapprocher de Romain Rolland dont le manifeste Au-dessus de la mêlée est pour lui une révélation.

        Dans Suggestion et autosuggestion, il cite Pierre Janet qui évoquait Antoine le Guérisseur.
        Il est également l'auteur de La Force en nous (1923), de La Discipline intérieure (avec Dr Laestchinski)(1924) qui évoque la Science chrétienne, de Culture de la force morale (1917) ou de Tolstoi éducateur (1921).


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  • Un précurseur (Gerard-Gailly in La Meuse, 2 août 1925)(belgicapress.be)UN PRÉCURSEUR

    La merveilleuse histoire du guérisseur Christophe Ozanne,
    à qui Louis XIV ne craignit pas d'avoir recours

    CHRONIQUE INEDITE

        Entre mille soucis fort graves, les journaux de ces derniers temps ont été occupés par l'aventure d'un guérisseur populaire nommé Béziat et condamné pour exercice illégal de la médecine. Quantité de gens qu'il avait guéris étaient venus l'assister à son procès et lui avaient apporté, dans le prétoire de Toulouse, quantité de fleurs.
        Le délit d'exercice illégal de la médecine ne réside pas dans le fait que l'on guérit sans diplôme, mais que l'on guérit en se faisant payer. Or, Béziat, qui avait longtemps pratiqué son art en apôtre désintéressé, avait été imposé par le fisc pour son métier de guérisseur. Comme les temps sont changes !) Il jugea donc normal et nécessaire de réclamer une redevance de ses malades. D'où le procès.
        La dévotion publique s'est toujours exercée à l'endroit de ces hommes bienfaisants. Et il est à peine besoin de rappeler ici la noble figure du père Antoine, de Jemeppe-sur-Meuse, si noble qu'elle est devenue le centre d'un culte véritable, ayant ses temples de Liège à Monaco, en passant par Paris, ayant son catéchisme et jusqu'à ses uniformes.

    ***

        Ces guérisseurs n'ont jamais manqué. Et le fisc n'empêchera point qu'on n'en voie de nouveaux. Mais combien dure leur vogue ? Combien durera le culte de Béziat ?
        Voici une figure, celle d'un homme simple et fervent, qui attira, au XVIIme siècle, les multitudes sur les collines de Mantes-la-Jolie. Il s'appelait Christophe Ozanne. Il ne savait ni lire ni écrire. Tout enfant, il vagabonda dans les forêts, il étudia le royaume des plantes ; il fut, de seize à vingt ans, berger d'une châtelaine qui aimait soigner et qui l'associa à ses bienfaisantes pratiques.
        Il devint ensuite « facteur de meules », dans la forêt d'Arthies. De tous les cantons voisins, on s'en venait lui montrer des plaies, et on l'appela « le médecin ». Après dix ans de ce séjour sylvestre, il rentra dans sa maison natale de Chaudray. Et, durant une trentaine d'années, il soigna les pauvres gens.
        Son renom atteignit Paris. Un duc, se moquant des moqueries, vint le voir et revint guéri. Après le duc, un financier millionnaire. Celui-ci lui envoya, en signe, de reconnaissance, cent écus, ce qui équivaudrait à 6.000 francs au moins de notre monnaie actuelle. Les cent écus furent renvoyés sans un mot au financier.
        Dès lors, un enthousiasme délirant souleva les Parisiens, qui voulurent que Christophe s'installât à Paris. Christophe refusa. Et ce fut Paris qui se rua vers Mantes et Chaudray. Ce fut, à la lettre, « un torrent ». Il fallut organiser un service spécial de diligences entre Paris et la cabane du paysan. Il fallut pourvoir au logement des malades. On organisa des jeux de paume. On appela des chanteurs de l'Opéra. Chaudray devint une sorte de Deauville.
        Jusqu'au fond de sa Hollande, Pierre Bayle, et jusqu'au fond de son Allemagne, Leibnitz, furent occupés par la prodigieuse réputation de Christophe. On fit des épigrammes, des chansons, des livres de trois cents pages, une comédie ! Un peintre se transporta à Chaudray pour fixer les traits de Christophe. On lança des « vues » de sa cabane.
        De hautes dames, religieuses dans les couvents aristocratiques, voulurent aller le voir. Bossuet fut mêlé à cette affaire. Il se fâcha. Il alla à Mantes. Mais il se calma, quand il eut appris la piété et la charité de Christophe. Il voulut prendre une consultation pour le compte de ses religieuses. Christophe refusa de le recevoir s'il ne venait pas pour lui-même. Et Bossuet dut accorder à ses « filles » l'autorisation de quitter leur « clôture », qu'il leur avait d'abord refusée.
        Mais il y eut mieux que le duc de Grammont, que le financier Turmenies, que Bossuet. Le roi Louis XIV enjoignit à Christophe Ozanne (l'ordre en est conservé aux archives nationales) de se transporter à l'abbaye de Maubuisson, pour y soigner, non plus une simple religieuse, mais l'abbesse elle-même, et quelle abbesse ! C'était la fille de Frédéric IV, roi de Bavière, et d'Elisabeth Stuart, donc la petite-fille du roi Jacques Ier d'Angleterre. Cette fois, Christophe dut quitter sa cabane.
        Ce « torrent » dura cinq ou six ans, malgré les médecins. Christophe recevait quotidiennement deux cents malades, dont le monôme enveloppait les clôtures de son maigre domaine, sans lui permettre d'en sortir de toute la journée.
        Mais tant de succès n'avait pu entamer la modestie de Christophe. Il gardait son même costume de droguet montrant la corde, et son chapeau noir à larges bords, tout difforme, dont il ne se départait jamais. Il avait une barbe blanche. Ses yeux étaient petits. Sa figure s'ornait de poireaux aux belles dimensions. Bref, une tête de patriarche, et de patriarche presque silencieux. On lui avait construit, comme au père Antoine, une manière de temple à côté de sa cabane. Il ne consentit jamais à y transporter ses bienfaisants miracles. Il voulait finir comme il avait commencé, au sein de la misère et parmi les seuls misérables. Et, quand le « torrent » se fut écoulé, il n'en fut pas plus marri qu'il ne s'était réjoui de le voir déferler sur sa colline. II était indifférent à sa mission qu'on l'eût d'abord raillé, puis encensé, et qu'on l'oubliât, du moins à Paris.
        Il mourut à quatre-vingts ans, en 1713. Son neveu prit sa succession. Puis d'autres Ozanne, ses collatéraux. Il y eut même, au cours du XVIIIme siècle, un « contrefacteur », grâce à une homonymie.
        A la Révolution de 1789, le culte Christophore mourut. Et, en 1796, le successeur du nom précieux devint, le plus simplement du monde, officier de santé.
        Je suis allé à Chaudray. J'ai interrogé. Mais la colline n'a gardé aucun souvenir de son enfant merveilleux, ni des foules bigarrées qui l'escaladèrent à l'époque du grand Roi.
                                                                                                   GERARD-GAILLY.

    La Meuse, 2 août 1925 (source : belgicapress.be)


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  • A.-C. Bégot - Science chrétienne et antoinisme : la question thérapeutique à l'épreuve du temps (2000)

    Auteur : Anne-Cécile Bégot
    Titre : Science chrétienne et antoinisme : la question thérapeutique à l'épreuve du temps (pp. 601-609)
    Éditions : T. 30, No. 4, Octobre-Décembre 2000, LES NOUVEAUX MOUVEMENTS: RELIGIEUX (Ethnologie française)
    Presses Universitaires de France
    https://www.jstor.org/stable/40991515


    Résumé :
        La science chrétienne et l'antoinisme ont, à leur création, fait de la guérison une pratique centrale de leur culte. Or, en dépit de la place importante accordée à la santé dans les sociétés contemporaines, ces groupes, qui font toujours partie du paysage religieux français, sont actuellement sur le déclin. Leur histoire interne, examinée sous l'angle du prophétisme, et leurs rapports à la société globale constituent les principaux éléments permettant de comprendre ce phénomène.


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  • Danielle Hemmert & Alex Roudène - L'étrange pouvoir des guérisseurs (1994)

    Auteurs : Danielle Hemmert et Alex Roudène
    Titre : L'étrange pouvoir des guérisseurs
    Éditions : Famot, Genève, 1980 (254 pages)

    4e de couverture :
        Le miracle de la guérison est aussi vieux que le monde. Mais c’est seulement à notre époque qu’il nous est donné d’approcher ses lois. Connaissez-vous votre « éthérique", avec ses lignes de force et son réseau d’énergie ? Connaissez-vous ces forces cosmiques qui circulent comme le sang dans les artères ? Par ces voies passent des guérisons incroyables défiant toute logique, mais seuls peu d’hommes sont capables de les manier. On les nomme les guérisseurs.

     

        On peut lire, aux pages p.164-166, sur l’antoinisme les lignes suivantes :

    Sous la barbe du Père Antoine...

        Il y avait jadis un enfant de douze ans, fils de pauvres mineurs. Il était né dans la province de Liège le 7 juin 1848. Et tous les jours, depuis ses douze ans, il descendait dans la mine avec son père et son frère. La misère le mena jusqu'en Allemagne, puis en Russie. Elle le ramena en Belgique, et, las de voyager, il se maria. Il s'installa aussitôt comme ouvrier métallurgiste à Jemeppe-sur-Meuse. Cet homme se nommait Antoine. C'était son nom de famille. Il était d'un naturel doux et charitable. Mais il était triste : une maladie de l'estomac l'épuisait. Un jour, on lui prête Le Livre des Esprits d'Allan Kardec, et, bien que sachant à peine lire et écrire, il en entreprend laborieusement la lecture : c'est l'illumination !
        Maintenant, Antoine, grâce à une petite table, s'entretient avec le docteur Carita, et, de l'Au-Delà, on lui enseigne que les maux physiques n'existent pas : il n'y a que le péché qui existe ! Aussitôt, Antoine, par la vertu de la prière et des fluides, efface ses péchés, et, miracle ! ses maux d'estomac disparaissent à jamais ! Ne pensant alors qu'à guérir les autres, sa renommée s'étend. On vient à lui de tous côtés. Il rend la vue aux aveugles, empêche les boiteux de boiter : c'est une pluie de miracles ! Les médecins s'agitent. On traîne Antoine devant les tribunaux pour exercice illégal de la médecine. Mais comme il ne prescrit aucun remède, il est acquitté. On ne va pas le chicaner pour une prière ! Et sitôt après le procès, il devient Antoine-le-Guérisseur.
        On l'appelle « le Père ». Sa femme devient « la Mère ».
        Puis, en 1912, le Père Antoine se « désincarne ». Mais la Mère prend la direction de ce nouveau spiritualisme, et les adeptes se multiplient. Un clergé se constitue : ce sont les « Frères habillés » et les « Sœurs habillées ». A leur tour, ils opèrent des guérisons.
        Au 34 de la rue Vergniaud, à Paris, on voit l'église antoiniste, et sa flèche dépourvue de croix. Mais ailleurs, 49 rue du Pré-Saint-Gervais, voici une église plus moderne, avec ses bancs de bois clair et sa tribune à mi-hauteur qui court tout le long de l'église. Le mur de face, devant les fidèles agenouillés, est couvert de cette inscription en lettres monumentales : « Culte antoiniste, tous les dimanches, à 10 heures. »
        L'enseignement du Père, c'est l'enseignement du Christ révélé à cette époque par la foi.

    L'auréole de la conscience

        « Un seul remède peut guérir l'humanité : la foi. C'est de la foi que naît l'amour : l'amour qui nous montre dans nos ennemis Dieu lui-même. Ne pas aimer ses ennemis, c'est ne pas aimer Dieu, car c'est l'amour que nous avons pour nos ennemis qui nous rend digne de le servir. C'est le seul amour qui nous a fait vraiment aimer, parce qu'il est pur et de vérité. »
        Une table élevée remplace l'autel. Derrière, une très haute chaire avec escalier. Faisant retable, un triptyque : au milieu, le Père, un vieillard avec la barbe en fleuve, vêtu d'une soutanelle noire, les yeux fermés, la main droite en avant, comme pour l'imposition. C'est le Père « faisant l'opération ». A gauche, la Mère, une femme âgée, simple. A droite, un arbre : c'est l'Arbre de la science de la vue du mal. Un Frère, en soutanelle noire, boutonnée jusque sous le menton, prie à haute voix, et chacun s'associe à sa prière. Ensuite, il lit un chapitre de l'enseignement du Père.
        Les fidèles trouvent dans sa doctrine un réconfort profond.
        « Le Père a changé ma vie ! » entend-on fréquemment.
        Dans chaque temple, le Père « fait l'opération », à dix heures précises, les cinq premiers jours de la semaine. Cette ponctualité a un sens : il faut que dans tous les temples du monde les Frères fassent la prière à la même heure, pendant que le Père agit dans l'autre vie. Car le pouvoir de guérir les maux physiques et moraux appartient au Père seul. Les Frères ne sont que ses intermédiaires.
        Mais tous les temples sont ouverts aux personnes souffrantes pour des opérations particulières. Un Frère ou une Sœur de service chasse alors gratuitement le mal. Sur la table du vestibule du temple du Pré-Saint-Gervais, il y a des numéros d'ordre qui seront distribués aux malades. Le Frère ou la Sœur de service les reçoit successivement dans une petite salle sous le portrait du Père.
        Où avez-vous mal ? demande le Frère.
        La réponse donnée, il lève les mains vers le Père et prie. Les mains, comme par de grandes passes magnétiques, chassent le mal.
        Père, guéris cet homme de son mal !...
        Et le malade, soudain guéri, demeure ahuri. Des dizaines et des dizaines de milliers de gens sont passés là. Tous ont été guéris. J'en ai eu de multiples preuves...


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  • La foi qui guérit (Le Soir, 15 octobre 1903)(Belgicapress)

    La foi qui guérit #2 (Le Soir, 15 octobre 1903)(Belgicapress)

    Encyclopédie du SOIR – 15 octobre 1903

    LA FOI QUI GUÉRIT

    Antoine le guérisseur. – Sceptiques et spirites. –  Miracles anciens et miracles modernes. – Narcose et suggestion. – Le périsprit. – Miracles scientifiques.

        La Justice instrumente, paraît-il, contre Antoine le guérisseur. Louis Antoine est un Belge dont la demeure, à Jemeppe-sur-Meuse, est devenue un lieu de pèlerinage, Découragés, désespérés, abandonnés « de tous » vont lui demander le salut.
        Louis Antoine procède par l'imposition des mains. Jamais il n'ordonne de remèdes ; et il opère gratuitement – si cela peut s'appeler opérer.
        Nous parlons d'après la légende, bien entendu.
        La Justice s'est demandé si soulager son prochain par la méthode d'Antoine ne tombe pas sous les coups de la Loi ?
        La fôôôôrme avant tout !
        les choses se passent à Jemeppe comme on les raconte, nous espérons un non-lieu ; non pour Antoine, à qui un peu de « persécution » ne déplairait point, sans doute, mais pour la justice belge.
        Le contraire advenant, la logique exigerait des poursuites contre les sanctuaires miraculeux et contre les médecins hypnotiseurs.
        Peut-être même contre les avocats – et les procureurs du Roi, qui s'emploient à obtenir condamnation ou acquittement par suggestion.
        La suggestion à l'état de veille est sans grand danger, mais procureurs et avocats n'opèrent pas toujours sur des magistrats à l'état de veille !

    *
    *     *

        Qu'est-ce que cet Antoine ?
        Un charlatan ou un toqué, disent les uns.
        Un être doué de merveilleux pouvoirs psychiques, un de « ces très privilégiés qu'une force très active du monde spirituel – supérieure à toute autre – protège... »
        Il est probable qu'Antoine n'est rien de tout cela, et qu'il ne mérite ni cet excès d'outrages, ni cet excès d'éloges. Son histoire nous apparaît toute simple.
        Vivant dans une région atteinte par l'épidémie spirite, ayant lu que les thaumaturges et les magnétiseurs guérissaient par l'imposition des mains et par la suggestion, Antoine a essayé. Il aura trouvé des sujets ayant la foi, donc guérissables. Et il a réussi. Les premières guérisons – il n'y a que les premières qui coûtent dans cette voie-là – ont augmenté sa foi en sa vocation, et la foi des souffrants dans son pouvoir.
        D'où la réputation et la vogue du guérisseur.
        D'où la joie des adeptes du spiritisme, et les sarcasmes, d'une certaine classe de sceptiques.
        Faut-il le dire ? La joie des disciples d'Allan Kardec est aussi peu fondée que les critiques de prétendus positivistes.
        Le Journal de Liége s'est contenté de railler.

        « Tous les témoignages recueillis jusqu'ici, imprime-t-il, démontrent plutôt que la clientèle du sieur Antoine se compose généralement de gens faibles d'esprit.
        » Un ouvrier d'usine souffrait d'un dérangement d'estomac, Il alla donc trouver Antoine, et dut faire le pied de grue pendant plus de deux heures. Notez donc, il avait le n° 220 ! Le médium plaça la main sur la tête du patient, ne-lui prescrivit aucun remède, aucun régime, et lui recommanda seulement de dire des prières.
        » Et le brave ouvrier est parti avec la conviction qu'il allait guérir, si bien qu'aujourd'hui il affirme avoir une telle confiance en cet homme que, s'il se trouvait encore malade, il n'hésiterait pas à aller encore le voir. »

        Le Laboureur, lui, s'est mis franchement en colère, et, sous le titre : Le spirite guérisseur et la bêtise humaine, il écrit :

        « L'Humanité, ignorante et souffrante, aura donc toujours les mêmes croyances ridicules et superstitieuses ! Actuellement, à Waremme, il y a un engouement insensé en faveur d'un soi-disant guérisseur de tous les maux, spirite de sa religion et omniscient. Des pauvresses et de bons bourgeois, des dames très cagotes et des indifférents s'en vont vers le Rivage (1) consulter l'homme tout-puissant.
        »... Que des gens, catholiques croyants, aillent déclarer croire sincèrement au spiritisme, religion tout autre, ce n'est déjà pas mal. Les curés leur donneront-ils encore l'absolution ?
        » Que ces gens admettent ensuite que, par un simple attouchement, un peu de graisse frottée sur les tempes et quelques paroles de rebouteux, phtisie, gastrite, rhumatismes, bras cassés, épaules démises, etc., tout cela va disparaître comme par enchantement, c'est d'une bêtise incommensurable. Pauvre Humanité qui ne sait sortir d'une superstition que pour retomber dans une autre !...
        » D'où vient donc cette aberration de la raison humaine ?
        » De l'ignorance d'abord. Combien de gens connaissent le corps humain et le fonctionnement des organes ? Combien savent les règles les plus simples de l'hygiène publique ou privée ? Combien connaissent les lois physiques et chimiques élémentaires de notre vie animale ? Et qu'ont fait et que font les pouvoirs publics et les particuliers pour répandre la vérité !
        » De la misère ensuite ! qui laisse dans la crotte et la débauche et le vice, tant de gens irresponsables. Et encore une fois qu'a-t-on fait pour relever ces misérables. L'Eglise les abêtit, et le capitalisme les meurtrit.
        » Etudions donc, camarades ; lisons, répandons la vérité partout. »

        A cela le Messager (organe spirite de Liége) répond ceci :

        » Franchement, quand on fait état de l'ignorance prétendue du prochain, il faudrait, au moins, ne pas fournir la preuve évidente de la sienne propre, dans l'article même où l'on semble se donner un brevet de capacité.
        » Le moindre bon sens, à défaut d'étude théosophique même élémentaire, suffit à faire justice de certaines assertions de cet étrange philosophe, qui ne sait pas distinguer entre un don naturel incommunicable, une faculté innée attachée à la personne, et un remède ou une méthode de nature toute matérielle, aisément divulgable.
        » Par un long entrainement, on acquiert aussi certains pouvoirs psychiques ; mais, précisément parce qu'ils sont psychiques, tout autre ne pourra se les assimiler qu'en suivant la même voie.
        » En voilà assez. »

        On le voit, le Laboureur et le Messager se reprochent mutuellement leur manque de connaissances physio-chimiques et physio-psychiques.
        Et ils pourraient bien n'avoir tort ni l'un ni l'autre.
        L'un crie au miracle, et l'autre à l'imposture, là où il n'y a probablement que suggestion.

    *
    *     *

        La foi des clients d'Antoine est une foi superstitieuse, puisqu'ils supposent le guérisseur doué d'un pouvoir surhumain. Mais la foi d'Antoine, surajoutée à celle de ses clients, guérit.
        Le phénomène a été décrit, et bien décrit, par Charcot dans la Foi qui guérit.
        Foi fondée ou foi erronée, la foi intense sauve. La conviction profonde que le dieu ou l'homme à qui on s'adresse a le pouvoir de guérir est presque toujours opérante – lorsque le croyant est guérissable, ainsi que nous le verrons plus loin.
        On savait cela du temps des Grecs et des Egyptiens déjà.
        Les murs de l'Asclépiéion d'Athènes, fils direct des sanctuaires de l'ancienne Egypte, étaient couverts d'ex-voto : bras, jambes, cous, seins en matière plus ou moins précieuse, objets représentatifs de la partie du corps qui avait été guérie par intervention miraculeuse.
        Sérapis, Asclepiéion, Antoine, dieu ou homme, celui qui sait inspirer la foi guérit.
        Mais ce miracle, les médiums hypnotiseurs savent l'accomplir aussi. Et voici qui prouve bien que ce n'est point par le pouvoir du médium, mais par la foi du malade que le miracle advient.
        Il s'agit de la suggestion pendant la narcose.
        On sait que de tous les procédés, le sommeil provoqué par l'hypnotisation est celui qui permet la suggestion la plus efficace.

        « Malheureusement, écrit le docteur Farez dans la Revue de l'Hypnotisme, malheureusement, chez certains malades, c'est en vain qu'on s'acharne à vouloir produire l'hypnose ; trop concentrés ou trop distraits, ils sont mal ou peu impressionnés par les procédés psycho-physiologiques communément employés. Pour ces cas rebelles, on a proposé, comme ressource suprême, la chloroformisation.
        » Il est vrai que la thérapeutique morale a enregistré un certain nombre de guérisons survenues à la suite de suggestions faites pendant la narcose chloroformique. Mais le chloroforme est d'un maniement fort délicat ; il comporte, pour nos malades spéciaux, des complications et des inconvénients multiples, surtout au réveil. En somme, nous ne l'employons qu'exceptionnellement et après bien des hésitations.
        » Pour les malades justiciables de la psychothérapie et réfractaires à l'hypnotisation je propose de remplacer le chloroforme par quelques dérivés halogénés (2) de l'éthane et du méthane, en particulier par un mélange dont je me sers couramment dans ma pratique, depuis plusieurs mois, et qui est ainsi constitué : chlorure d'éthyle, 65 ; chlorure de méthyle, 30, et bromure d'éthyle, 5. »

        Ce mélange est inoffensif, et met promptement le malade dans un état favorable à la suggestion curative – surtout à la suggestion indirecte pratiquée avec succès par le docteur Farez.

        « De nombreux malades, rapporte le collaborateur de M. Bérillon, des neurasthéniques, par exemple, s'acharnent à réclamer de l'hypnotisme la guérison de leurs misères ; mais aucun médecin n'a pu les endormir à fond, et ils s'en plaignent amèrement ; ils sont persuadés en effet, que seule pourra les guérir la suggestion qui leur sera faite pendant qu'ils dormiront d'un sommeil profond, avec inconscience, et, au réveil, amnésie complète. Suggestionnés pendant l'hypernarcose, ils guérissent, non pas, bien entendu, par la vertu de la suggestion elle-même, mais en vertu de la « faith healing » ; ils ont foi en la puissance curative de la suggestion faite dans ces conditions : leur état d'esprit opère la guérison. »

        Le Laboureur a tort de nier les miracles de la foi, mais le Messager est loin d'avoir raison lorsqu'il les attribue à la médiumnité.

    *
    *     *

        Ces miracles sont de simples miracles, relevant de la « faith healing », dont le domaine est connu, limité. Pour produire ses effets, elle doit s'adresser à des cas dont la guérison n'exige aucune autre intervention que la puissance que possède l'esprit sur le corps.

        « Ses limites, dit Charcot, aucune intervention n'est susceptible de les lui faire franchir, car nous ne pouvons rien contre les lois naturelles. On n'a, par exemple, jamais noté, en compulsant les recueils consacrés aux guérisons dites miraculeuses, que la « faith healing » ait fait repousser un membre amputé. Par contre, c'est par centaines qu'on y trouve des guérisons de paralysies, mais je crois que celles-ci ont toujours été de la nature de celles que le professeur Russell Reynolds a qualifiées de terme général de paralysies dependent on idea. »

        Oui, mais les tumeurs, les ulcères ? Ne sont-ils pas guéris par la foi aussi ?
        Charcot est loin de le nier, mais il ajoute que, dans certains cas, le « faith healing » peut parfaitement faire disparaître, des ulcères et des tumeurs, mais des ulcères et des tumeurs, qui, en dépit de l'apparence, sont de la même essence que les paralysies dont parle Russell Reynolds :

        « La guérison plus ou moins soudaine des convulsions et des paralysies était autrefois considérée comme un miracle thérapeutique du meilleur aloi. La science ayant démontré que ces phénomènes étaient d'origine hystérique, c'est-à-dire non organiques, purement dynamiques, la guérison miraculeuse n'existerait plus en pareille matière. Pourquoi cela ? Et s'il était démontré encore que ces tumeurs et ces ulcères, autour desquels on mène tant de bruit, sont aussi de nature hystérique, justiciables, eux aussi, de la même « faith healing » que les convulsions et les paralysies, c'en serait donc fait du miracle. »

        Et Charcot conclut très logiquement qu'on a tort de jeter tant de défis à la face de la science, qui finit, en somme, par avoir le dernier mot en toutes choses.

    *
    *     *

        Ceux qui se targuent d'être des « gens de bon sens » ne le sont pas toujours.
        Nier le soulagement par l'imposition des mains est ridicule.
        D'autre part, les spirites prennent volontiers leurs désirs pour la réalité. Il existe, sans nul doute, des forces inconnues, des sens en formation, mais c'est assurément se hasarder beaucoup de conclure de cela à un monde de désincarnés, intervenant plus ou moins directement dans les affaires des incarnés.
        Le périsprit existe peut-être, mais il nous faut d'autres preuves que des affirmations pour l'admettre comme une vérité mathématique.
        M. Léon Denis (3), penseur bien intentionné s'il en fût, nous en fait cette description, d'après M. Gabriel Delanne :

                         L'esprit et sa forme  
        « En tout homme , vit un esprit.
        » Par esprit, il faut entendre l'âme revêtue de son enveloppe fluidique ; celle-ci a la forme du corps mortel, et participe de l'immortalité de l'âme, dont elle est inséparable.
        » De l'essence de l'âme nous ne savons qu'une chose : c'est qu'étant indivisible, elle est impérissable. L'âme se révèle par ses pensées et aussi par ses actes, mais pour qu'elle puisse agir et frapper nos sens physiques, il lui faut un intermédiaire semi matériel, sans quoi son action nous paraîtrait, incompréhensible. C'est le périsprit, nom donné à son enveloppe fluidique, invisible, impondérable. Il faut chercher dans son action le secret des phénomènes spirites.
        » Le corps fluidique, que chaque homme possède en lui, est le transmetteur, de nos impressions, de nos sensations, de nos souvenirs. Antérieur à la vie actuelle, survivant à la mort, c'est l'instrument admirable que l'âme se construit, se façonne elle-même à travers le temps ; c'est le résultat de son long passé. En lui se conservent les instincts, s'accumulent les forces, se groupent les acquisitions de nos multiples existences, les fruits de notre lente et pénible évolution.
        » La substance du périsprit, est extrêmement subtile ; c'est la matière à son état le plus quintessencié ; elle est plus raréfiée que l'éther ; ses vibrations, ses mouvements dépassent en rapidité et en pénétration ceux des substances les plus actives. De là la facilité des esprits à traverser les corps opaques, les obstacles matériels, et à franchir des distances considérables avec la rapidité de la pensée. »

        Le concept est consolant à certain point de vue, mais il témoigne, chez son auteur, de plus d'imagination que de méthode scientifique.
        La moindre preuve ferait mieux notre affaire.
        Oh ! nous connaissons les arguments des spirites. Ils ne sont pas sans valeur, hâtons-nous d'en convenir.
        Il est ridicule de demander des apparitions ou des phénomènes d'apport ou de lévitation à heure fixe.
        Il y a des nageurs adroits ; jetez-le plus habile d'entre eux dans l'eau glacée ou dans l'eau bouillante : il se noiera. Cela permet-il d'affirmer que notre homme ne savait pas nager ?
        Prenez deux individus, l'un parlant uniquement l'anglais et l'autre ne connaissant que le russe ; placez-les aux deux bouts d'une ligne téléphonique. Ils ne parviendront pas à s'entendre. Cela signifie-t-il que le téléphone n'existe pas ?
        La production de tel ou tel phénomène exige telles ou telles conditions. Il faut probablement, pour produire des phénomènes de lévitation, des conditions d'ambiance que nous ignorons, qui ne se rencontrent fortuitement qu'à de rares moments.
        Doit-on pour cela, comme le font les hommes de bon sens crier à l'impossible et à la tromperie ?
        Non point, répondons-nous.
        Mais si le plus sage est de ne rien nier, ne serait-il pas au moins tout aussi sage de ne pas donner pour miraculeux des phénomènes dont nous ignorons les causes ?
        On ignorait les procédés permettant la cristallisation de la glycérine. Un jour un baril e glycérine se cristallisa en cours de route, entre Paris et Vienne. Personne ne s'est avisé de prononcer le mot miracle à ce propos.
        La guérison opérée en dehors des moyens dont la médecine curative semble disposer d'ordinaire est un fait acquis, incontestable.
        Mais que démontre-t-il, ce fait ?
        Le miracle ?
        Soit.
        Mais ce miracle, la science l'opère.
        Et cela prouve évidemment l'influence de l'esprit sur la matière, mais cela n'établit pas l'existence d'esprits et de périsprits.
        Avec un seul mot on peut faire rire ou pleurer son semblable, c'est-à-dire lui donner peine ou joie.
        Où est le miracle ?
        Mais encore, objectera-t-on, l'homme connait si peu de choses.
        On s'en aperçoit bien en lisant ce qui s'écrit !
        Il faut toujours être en garde contre le vieux levain misonéiste qui fermente en nous, mais il faut aussi se méfier de l'imagination – la folle du logis.
        L'inconnu n'est pas nécessairement l'inconnaissable.
        L'inconnu n'implique nullement le miracle.

        « Tout d'abord, a dit Lodge, les choses paraissent mystérieuses. Une comète, la foudre, l'aurore, la pluie sont autant de phénomènes mystérieux pour qui les voit la première fois. Mais vienne le flambeau de la science, et leurs relations avec d'autres phénomènes mieux connus apparaissent ; ils cessent d'être des anomalies, et si un certain mystère plane encore sur eux, c'est le mystère qui enveloppe les objets les plus familiers de la vie de chaque jour. »

        Les mystères d'aujourd'hui deviennent thème d'enfant demain.
        Le phonographe, la télégraphie sans fil, la suggestion auraient été catalogués comme authentiques miracles il y a cent ans.
        De ces miracles, on en a fait des numéros de foire. Combien d'autres auront le même sort !

                                                                                                     D’ARSAC.

    (1)  Jemeppe-sur-Meuse et les rives industrielles du fleuve.
    (2) On appelle halogènes Les métalloïdes qui se combinent directement avec les métaux pour former, des sels ; les produits, qui, en résultent sont, dits : dérivés halogènes ; tels sont les chlorures, bromures, etc.
    (3) L’invisible. Spiritisme et Médiumnité. Les fantômes des vivants et des morts.

    Le Soir, 15 octobre 1903 (source : Belgicapress)

        Le Messager publiera une réponse de la part de Victor Horion dans son édition du 1er novembre 1903.


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  • Dr. Pierre Schuind - Guérisseur (La Meuse, 20 mai 1910)(Belgicapress)

    GUERISSEUR !

    Chronique inédite (1)

        Nous pouvons nous réjouir : des milliers de personnes déclarent avoir été guéries du cancer, de la tuberculose et d'autres maladies graves. Le remède est très simple : il consiste à soigner et guérir l'âme des malades. Sitôt l'âme guérie, le corps se débarrasse de ses maux.
        Nous savions déjà que la suggestion jouait un rôle important dans le traitement de toutes les maladies, qu'elle les guérissait parfois, mais jamais nous n'aurions eu la prétention de guérir, par cette méthode, le cancer ou la tuberculose. Tout au plus parvenions-nous, en l'employant, à diminuer les douleurs ou la dyspnée, à rendre au malade la confiance en l'avenir.
        Les lecteurs connaissent tous un guérisseur mystique dont les adeptes nombreux vont partout, jusque dans la grande presse, chanter la gloire et la puissance. C'est peut-être une personnalité intéressante, comme beaucoup pourraient l'être s'ils avaient la naïveté de croire à leur supériorité.
        C'est, dit-on, un très honnête homme.
        Je le crois volontiers.
        Mais ce que je ne puis admettre, c'est l'heureuse influence de son enseignement sur les maladies terribles contre lesquelles l'humanité se débat depuis des siècles. Une question se présente d'elle-même à l'esprit de tout homme cultivé :
        – Quel contrôle a-t-on établi de ces guérisons miraculeuses ? En existe-t-il un ?
        On demande aux gens qui se prétendent guéris autre chose que leur affirmation. A l'ouvrier qui viendra me dire :
        – Je souffrais de phtisie, le guérisseur m'a sauvé.
        Je répondrai :
        – Où sont vos certificats médicaux ?
        Je les demanderai aussi à celui qui prétendra lui devoir la disparition d'un cancer.
        Le public est naturellement porté à exagérer l'importance de son mal. Quand un malade se relève d'une pneumonie simple quatre-vingt dix-neuf fois sur cent il déclare en racontant les péripéties de sa maladie :
        – J'ai souffert d'une double pneumonie.
         Comme s'il y avait déshonneur à n'avoir qu'un seul poumon atteint !
        L'ulcère de l'estomac devient dans la bouche des gens peu instruits des choses médicales le terrible cancer.
        La désinence est la même, la confusion explique. Le premier se guérit très souvent. Le second est mortel. Le malade désespéré s'en va porteur de son pseudo-cancer consulter l'homme qui guérit. Dans son temple où des centaines de croyants unissent leurs pensées vers un être qu'ils croient tout-puissant, celui-ci apparaît différent des autres, impressionnant dans son calme, incompréhensible dans son discours. Rien que sa vue suggestionne, les cœurs naïfs se sentent dominés et l'on voit alors les paralytiques marcher, les aveugles trouver leur chemin. Ceux qui souffrent éprouvent aussitôt un bien-être parfait. Malheureusement, ces améliorations ne sont que passagères.
        Suggestion que tout cela, ni plus ni moins que l'influence produite par la salle d'attente du dentiste.
        Les paralytiques qui marchent tout à coup, est-ce donc une chose si neuve ? Les aveugles qui retrouvent la vue, les muets qui se mettent à parler, mais c'est vieux comme le monde !
        Ce qui surprendrait vraiment serait de voir allonger la jambe d'un boiteux, disparaître la convexité d'un œil myope, renaître un œil atrophié.
        Les thaumaturges n'en sont pas encore là, c'est pourquoi leurs miracles ne seront jamais admis par les gens instruits.
        On a suffisamment discuté les guérisons de Lourdes. La plupart des médecins admettent l'heureuse influence des grands pèlerinages à la grotte célèbre dans certaine maladie. C'est un moyen thérapeutique souvent recommandé. Produit-il des miracles ? Cela dépend du sens que l'on donne à ce mot. Le croyant répond oui, le sceptique non.
        Toujours est-il que l'on a établi à Lourdes un service médical de vérification. Les cures ne s'y font plus dans l'intimité, mais sous le contrôle des médecins du monde entier, quelles que soient leurs convictions philosophiques. C'est là une façon d'agir très correcte, il faut le reconnaître. Le contrôle médical est une sauvegarde pour le malade.
        Lorsque ce contrôle n'existe pas, l'œuvre des guérisseurs ne peut être prise au sérieux. Comment savoir au juste l'affection dont souffraient les adeptes guéris ? On ne peut admettre comme exact le diagnostic qu'ils posèrent eux-mêmes. Il nous faut plus que les affirmations d'un pauvre ignorant, qui se figure avoir retrouvé la santé, pour crier à la cure merveilleuse.
        La bonne foi des intéressés n'est pas une garantie suffisante. Le vulgaire confond trop aisément des choses toutes différentes, l'ulcère et le cancer, l'anémie et la tuberculose. Je me demande comment il est possible d'accorder la moindre créance à ses affirmations.
        Il est vrai que l'homme simple est attiré par le surnaturel, le merveilleux. Les figures qu'il voit tous les jours ne lui font nul effet, les visages ascétiques l'impressionnent. Les vérités scientifiques le laissent indifférent, les divagations mystiques et dépourvues de tout sens le séduisent. Pour lui, les admirables découvertes des maîtres de la médecine ne sont rien en regard des doctrines d'un mineur ou d'un zouave retiré des affaires.
        Le peuple se méfie des savants, il leur préfère ceux des siens, qui, au mépris des données scientifiques bien établies, veulent tout expliquer et tout rénover. Les âmes simples vont tout de suite à la solution. Elles n'ont pas le temps de parcourir les étapes, comme ceux auxquels la fortune a permis de poursuivre de sérieuses études.
        Autant l'homme de science, malgré son désir de connaître, est méfiant et réservé dans le choix de sa religion, autant l'ouvrier frustre, la femme peu cultivée sont enthousiastes lorsque se présente à leur esprit curieux une explication des mystères de la vie, qui les satisfasse.
        Ils l'admettent sans réserve, ils ne pensent même pas à présenter des objections, en un mot ils ont la foi. L'homme instruit reconnaît qu'il ne sait pas grand'chose, l'ignorant se figure volontiers tout connaître.
        On a vu des médecins peu scrupuleux renoncer à leur titre, transformer leur nom, se livrer ensuite à des pratiques insensées, et devenir aussitôt des guérisseurs renommés. On a vu des domestiques de médecins, illettrés, mais malicieux, faire à leur maître une concurrence désastreuse. La foule ne demande qu'à trouver des dieux à adorer. Elle réserve ses faveurs à ceux qui l'illusionnent.
        Pendant que les savants ignorés travaillent loin d'elle à l'avancement des sciences, arrivant parfois à des découvertes sensationnelles, des illuminés apparaissent prêchant des doctrines incohérentes, que rien n'explique, et recueillent les suffrages de milliers d'individus.
        Il est vrai que l'homme de science prend souvent sa revanche. Lorsque les gens crédules ont en vain confié leur guérison à des empiriques plus ou moins sincères, ils reviennent au médecin.
        Et ce sont aussi des milliers de désillusionnés que nous voyons, malheureusement alors, avec des maladies aggravées.
        Après tout, l'homme est libre de confier son corps à qui lui plaît, comme de se faire vêtir par un charpentier et meubler par un boucher. Ceux-ci refuseront certainement. En médecine, ce n'est pas la même chose : celui qui n'y connaît rien, qui ne sait ni lire ni écrire, se croit autorisé à soigner ses semblables. Son outrecuidance n'a d'égale que la bêtise humaine. Mais combien les médecins ont tort de poursuivre ces gens-là ! Mieux vaut les ignorer.

                                                                              Dr Pierre SCHUIND.

    (1) Reproduction interdite sans citer la source et l'auteur.

    La Meuse, 20 mai 1910 (source : Belgicapress)


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  • Dr. Pierre Schuind - Guérisseur (La Meuse, 3 juin 1910)(Belgicapress)

    GUERISSEUR

    Chronique inédite (1)

        Mon précédent article « Guérisseur » m'a valu des lettres, les unes grossières, les autres correctes, des conversations intéressantes et beaucoup d'encouragements. On m'a cité des faits, les uns en apparence favorables, d'autres défavorables à la méthode exposée par M. J. dans La Meuse.
        Je crois utile de reprendre ce sujet, intéressant pour beaucoup.
        J'ai écrit quelque part que je n'admettais pas pour les médecins le monopole des sciences médicales. Mais si tout le monde s'occupe de médecine, est-ce à dire que le médecin n'est pas celui qui la connaît et la pratique le mieux ? L'ergoteur, le paysan madré ne doit-il pas baisser pavillon devant la science juridique de l'avocat ?
        Les médecins et les hommes de droit sont les gens les plus critiqués, les plus ridiculisés qu'il existe. Leurs sciences sont imparfaites. Mais, tandis que les uns ont des lois qu'ils interprètent de façons différentes, il est vrai, mais d'après des textes bien nets, les autres se trouvent en présence de faits qu'ils connaissent admirablement et d'autres auxquels les cerveaux de millions d'hommes éclairés n'ont pas communiqué la moindre lueur.
        Parmi les phénomènes pathologiques inexplicables, il en est que l'humanité observe depuis toujours. Peu à peu, ils se précisent. Ce sont les névroses, c'est à dire les maladies du système nerveux, où nous ne pouvons dans l'état actuel de nos connaissances trouver les lésions des organes, cause du mal, le cerveau, les nerfs, mais où les affections des muscles, du cœur, des organes des sens, qui en résultent sont très apparentes. Nous ne connaissons pas les troubles survenus dans la constitution intime du système nerveux dans l'épilepsie, la chorée, l'hystérie. Ce que nous savons déjà c'est qu'elles ont toutes trois des origines connues.
        Ce qu'elles sont, un jour nous l'apprendrons.
        J'entends les incrédules me lancer un défi :
         – Quand donc le saura-t-on ?
        Je n'en sais rien. On le saura comme on a su par la découverte du bacille de Nicolaïeff que le tétanos, maladie terrible et longtemps inexpliquée, ne se caractérisant par aucune lésion du système nerveux, classée d'ailleurs parmi les névroses, était tout simplement de nature infectieuse et pouvait être jugulé comme tel.
        Je vous certifie que les guérisseurs eussent été fort marris de guérir le tétanos.
        Leur grand triomphe – mais n'est-il pas aussi celui de bien des médecins ? – est l'hystérie, l'hystérie aux cent formes, cette méduse pathologique dont les serpents aux morsures mystérieuses encore peuvent, chez l'homme, déterminer des contractures, des paralysies, lentes ou subites, de l'aphonie, du gonflement de la peau et des organes internes, de l'insensibilité, de la fièvre, des accidents simulant la méningite, l'entérite, la gangrène, etc., etc.
       Ces lésions, nous pourrions, la plupart, les obtenir par le sommeil hypnotique, et pas n'est besoin, dans ce cas, de recourir aux soins d'un guérisseur pour les faire disparaitre.
        L'illustre Delbœuf n'obtint-il pas un jour de véritables brûlures sur le bras d'un hypnotisée ?
        Nos hystériques ne sont-ils pas des héréditaires, en somme, des hypnotisés de longue date ?
        Ces malades se guérissent souvent par la persuasion, les conseils, l'intimidation, la menace.
        Que fait d'autre ce guérisseur qui monte en chaire et dit au malade : « Vous guérirez ! » que le persuader ?
        Il réussira parfois là où d'autres ont échoué.
        On cite le cas d'un ouvrier agricole du Nord de France (I), atteint depuis plus de dix ans d'une paralysie avec contracture des membres supérieurs. Il avait, sans profit, consulté près de trente médecins, ce qui démontre à l'évidence qu'il n'eut confiance en aucun. Un jour quelqu'un lui conseille de consulter un guérisseur de nos environs. Il arrive, voit celui en qui il place tout son espoir, s'en va certain de guérir et guérit. Est-ce là un miracle ?
        Pour les gens simples, oui, pour le médecin, pour l'homme cultivé, non. C'est la guérison d'un hystérique par la méthode ordinaire, ni plus ni moins. Le guérisseur, avec son cerveau d'homme simple, y voit, comme ses frères peu instruits, un signe de puissance surhumaine. Il s'exagère l'importance de son rôle, de sa puissance et en arrive à se croire capable de guérir tous les maux dont souffre l'humanité.
        On ne peut nier que certains plus que d'autres possèdent le don de la persuasion, de la suggestion. Je connais un avocat, suggestionneur émouvant, auquel les médecins d'une ville voisine ne manquent pas d'avoir recours en faveur de leurs malades névrosés. C'est un homme correct et intelligent qui n'outrepasse pas son rôle de collaborateur du médecin et ne prend pas sur lui de soigner les entérites infantiles, les lésions osseuses, les pneumonies, les cancers, par persuasion directe, épistolaire, ou par intermédiaire.
        Il est trop intelligent pour avoir trouvé le truc de l'épreuve. Notre guérisseur national, lorsque la maladie ne cède pas, déclare : C'est l'épreuve ! Est-ce moins une épreuve quand le médecin ne la guérit pas ?
        Nous serons bien reçus chez nos malades, même adeptes du thaumaturge, lorsque nous viendrons chez eux, qui hurlent de douleur, sans morphine, sans seringue, et que nous leur dirons :
        – C'est l'épreuve !
        On m'a cité un malade qui, après avoir subi l'épreuve durant quelques semaines, a dû se faire amputer des morceaux de membre gangrenés. C'était un ouvrier atteint au pied par une machine. Il écrivit aussitôt après l'accident au guérisseur, que je ne veux pas nommer. Il avait foi entière dans le pouvoir de cet homme extraordinaire. Celui-ci répondit par écrit : « Vous guérirez ! » Les jours passèrent, la guérison ne venait pas. C'était l'épreuve.
        L'épreuve dura si longtemps que le blessé, tout en remerciant sans doute le Très-haut de l'éprouver avec tant de persistance, finit par se souvenir qu'il existait de par le monde de vagues personnalités, qui font métier de soigner les pieds cassés, les plaies infectées avec des médicaments et des pansements. Il s'adressa à ces gens, qui le guérirent, ce qui était d'ailleurs prédit par le guérisseur.
        Mais, au lieu de retrouver la santé après quelques jours, il lui fallut des semaines avant de pouvoir reprendre son travail.
        Et pendant ce temps, si cet homme était marié et père de famille, si son patron refusait de lui payer une indemnité, que devenaient sa femme, ses enfants ? C'était pour eux la misère ! Et si, confiant jusqu'au bout dans la promesse de celui qui lui avait écrit : « Vous guérirez ! » il était mort de septicémie ou de pyohémie, le guérisseur aurait-il réparé son acte – que je ne veux pas qualifier – en entretenant la veuve et les enfants ?
        Mais arrivons à la conclusion. Que les guérisseurs, que les personnes jouissant d'un pouvoir de suggestion incontestable l'exercent pour le plus grand bien des hystériques de toutes sortes, rien n'est plus logique. Je suis le premier à reconnaître que le médecin peut avoir besoin d'eux, au même titre qu'il lui arrive, dans sa clientèle ordinaire, de recourir à l'aide d'une personne qui « a de l'autorité » sur son malade. Mais c'est une aberration pour ces gens de prétendre à l'omniscience, et c'est une aberration de la part des gens instruits qui les connaissent, de les entretenir dans leur erreur manifeste.

                                                                              Dr Pierre SCHUIND.

    (1) Reproduction interdite sans citer la source et l'auteur.

    La Meuse, 3 juin 1910 (source : Belgicapress)

     

    (I) Peut-il s’agir là de frère Florian Deregnaucourt ?


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  • H. Art - Guérisseurs (La Meuse, 20 octobre 1908)(Belgicapress)

    GUERISSEURS

    (Chronique inédite)

        Avez-vous déjà eu mal aux dents ? Si oui, vous avez sans doute reçu, dans ces moments pénibles et orageux, la visite, écrivons les visites de charitables voisines : « Ecoutez-moi bien, vous disait-on invariablement. Suivez un bon conseil. Je souffrais plus que vous. J'avais tout fait sans résultat. Un jour, une voisine qui avait souffert des dents, elle aussi, me dit (voir plus haut.) Eh bien ! savez-vous ce qui m'a guéri ? Tout simplement une infusion de corde de pendu dans un demi-litre d'huile épurée. Je le conseille à toutes mes connaissances. Vous me croirez si vous voulez, tout le monde s'en est bien trouvé. »
        C'est inouï ce qu'il y a de remèdes infaillibles contre les maux de dents. On se demande comment il y a encore des dents malades. Elles doivent y mettre de la mauvaise volonté.
        D'autres se sont guéris en s'introduisant dans chaque narine un cornet en papier brun. On y met le feu, – au cornet, bien entendu, – et on aspire la fumée à pleine bouche et plein nez. Essayez, vous m'en direz des nouvelles, si vous n'êtes pas mort suffoqué.
        D'autres emploient des talismans, des pierres magiques. Il y a, dans une commune une Clef qui favorise la dentition chez les nouveau-nés. Quel rapport peut-il y avoir entre une clef et des dents ? Je l'ignore. Mamans et nourrices y apportent de partout les nourrissons. La dentition ne s'en fait pas moins normalement, c'est-à-dire avec pleurs et grincements de gencives. Mais le bébé ne souffre pas toujours. C'est à la clef et non à la nature qu'on attribue ces accalmies.
        Certaines personnes, quand elles souffrent, crachent trois fois en l'air. D'autres, qui ne sont pas les plus sottes, ne font rien du tout et attendent que le mal s'en aille, disent-elles, comme il est venu. Et parfois, il s'en va, mais comme c'est pour une raison qui leur échappe, elles en trouvent une, qui est le moyen employé.
        Le remède familier a échoué vingt fois. Mais, enfin, une fois, une miraculeuse fois, il opère, ou, plus exactement, le mal cesse. Aussitôt, merveille ! On oublie les vingt échecs bien réels pour ne se souvenir que du succès apparent. On recommande le remède à ses voisins, à ses parents, proches et éloignés. On a soin de spécifier, par amour de la vérité, qu'il est tout à fait infaillible. On dit : « Ecoutez-moi bien. Suivez un bon conseil (voir la suite plus haut). » Il y a pas mal de vanité dans cet enthousiasme pour les conseils que l'on donne ; car on veut avoir l'air de ne donner que des remèdes infaillibles. On veut apparaître, chez le voisin malade, comme une providence, intelligente dispensatrice des biens, comme une espèce de grand Manitou. Et comme il n'y a rien de démoralisé à l'égal d'un homme, et surtout d'une femme (oh ! mon Dieu !) gui a une rage de dents, le voisin, même Intelligent, même incrédule, essaie le remède. Si celui-ci ne réussit pas, le voisin en essayera un autre, tout aussi infaillible.
        Il s'en trouve parfois bien. Mais, si le mal s'obstine, au lieu d'aller chez le dentiste qui demeure dans sa rue, il court, il vole chez le guérisseur. Du temps de La Fontaine, la devineresse et le rebouteux habitaient un galetas. C'était une nécessité du métier. Sans galetas, sans balai infernal et sans marmite aux clous, devineresse ne pouvait deviner l'avenir, rebouteux ne pouvait guérir. Aujourd'hui, le guérisseur n'a qu'une condition à remplir : il doit être spirite.
        Le guérisseur guérit parfois, comme la corde de pendu, et pour les mêmes raisons. Il guérit aussi par la confiance qu'il inspire. N'est-il pas l'homme qui tient en son pouvoir les esprits bons et mauvais ? La foi produit des miracles, elle influe sur les maladies nerveuses et peut, par là, influer parfois sur d'autres fonctions organiques.
        Un voyageur anglais écrivait :

        « On ne comprend rien aux religions de l'Orient, si l'on ne se rend pas compte de la facilité avec laquelle une tête orientale sait loger des contradictions. C'est I'A B C de l'histoire religieuse dans ces pays. »

        L'Anglais a eu tort de faire honneur de ces contradictions aux seuls Orientaux. Sans doute, il y a encore, en Turquie, des gens très instruits et même intelligents qui croient que Mahomet a mis la moitié de la lune dans sa manche. Ils savent bien pourtant que la lune est plus grande qu'une assiette.
        Mais, en Belgique, nous en faisons autant.
        Une femme logeait au-dessus de la chambre d'un guérisseur célèbre, auquel elle avait jusque-là confié le soin de sa précieuse santé. Un jour, elle s'alita pour accoucher. On appela, comme d'habitude, le guérisseur. Celui-ci vint, mais il conseilla le médecin. Les purs esprits n'entendaient rien aux accouchements. Eh bien ! parions que c'est le guérisseur qui aura été chargé de faire venir les dents à l'enfant.
        On sait qu'autrefois, comme aujourd'hui, il y avait des guérisseurs : Dans la Grèce ancienne, bien avant notre ère, c'étaient les prêtres du dieu Esculape, demi-médecins et demi-thaumaturges. En remerciement, le guéri consacrait au dieu, comme ex-voto, l'image de la partie malade. Les temples d'Esculape devenaient ainsi de petits Musées pathologiques. Les prêtres tenaient la chronique des guérisons.
        On gravait sur des colonnes de marbre le récit miraculeux propre à exciter la foi du pèlerin et à accroître la réputation du sanctuaire. Les fouilles ont mis à jour, non seulement des ex-voto, mais certaines des inscriptions relatant les guérisons. Il y a des aveugles qui voient, des boiteux qui marchent, des chauves dont les cheveux repoussent, des muets qui parlent. Voici la traduction de quelques passages d'une inscription trouvée en Grèce, à Epidaure, où se trouvait un lieu de pèlerinage célèbre :

        « Ambrosia d'Athènes était borgne. Elle vint supplier le dieu de la guérir. Or, en se promenant dans l'enceinte du sanctuaire, elle se moqua de quelques-unes des guérisons, car, prétendait-elle, il était invraisemblable, impossible, que des boiteux marchassent et que des aveugles vissent simplement pour avoir eu un songe. Mais pendant qu'elle dormait, elle eut une vision. Il lui sembla que le dieu lui apparaissait et lui disait : « Je te guérirai, mais j'exige de toi, à titre de salaire, que tu places dans le temple un cochon d'argent, souvenir de la stupidité dont tu as fait preuve. » Alors, le dieu entr'ouvrit l'œil malade et y versa un remède. Quand le jour parut, elle sortit guérie. »

        Voici pour les chauves qui ont tout tenté :

        « Héraius de Mitylène n'avait pas de cheveux sur la tête, mais il en avait beaucoup sur les joues. Honteux des railleries dont on de couvrait à ce propos, il s'endormit dans le dortoir du temple : le dieu lui frotta la tête avec un onguent et les cheveux repoussèrent. »

        Par exemple, mes cheveux repousseraient ? J'y cours !

                                                                                                                                     H. ART.

    La Meuse, 20 octobre 1908 (source : Belgicapress)


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  • Maurice des Ombiaux - Rebouteurs (La Meuse, 11 février 1910)(Belgicapress)

    REBOUTEURS

    (Chronique inédite)

        On s'étonne de ce que dans notre siècle vingtième il se trouve encore au fond des campagnes des gens qui, lorsqu'ils sont malades, s'adressent au rebouteur, tandis qu'ils sont remplis de méfiance envers le médecin.
        Les sermons et les raisonnements n'y font rien : le médecin reste dépourvu de mystère, tandis que le charlatan paraît toujours investi d'un pouvoir surnaturel ; c'est pourquoi le paysan reste fidèle à ses superstitions plusieurs fois séculaires.
        Ne rions pas trop du rustre. Si nous ne croyons plus à la thérapeutique du barbier, au savoir du guérisseur populaire, ni aux remèdes de bonnes femmes, nous sommes toujours une proie facile pour le charlatan muni d'un diplôme ; au nom de la science, il nous fait souvent avaler toutes les couleuvres qu'il lui plaît. Les pilules et les drogues annoncées à grand renfort de certificats et de brevets à la quatrième page des journaux par des médicastres pourvus de beaucoup de titres, n'ont pas de vertus spécifiques plus grandes que la poudre de perlimpinpin et les recettes cabalistiques. Plus la bourde aura de dimensions, plus nous serons disposés à l'avaler. Combien d'entre nous, tourmentés par un mal, conservent le bon sens de se dire que le médecin ne peut donner plus que la plus belle fille du monde ? Nous n'admettons chez le médecin ni doute ni hésitation ; il faut qu'il caractérise aussitôt l'affection dont nous souffrons et qu'il nous donne la certitude que nous serons bientôt guéris. Dans la plupart des cas, notre guérison dépend presque uniquement de cette certitude. Dès que nous avons perdu la confiance en l'esculape qui nous soigne, il nous faut nous adresser ailleurs ou nous restons malades comme par plaisir. Au fond, c'est nous-mêmes qui réclamons sans cesse le charlatan et qui le créons lorsqu'il n'existe pas.
        Il y avait, il y a encore dans chaque village, un homme ou une femme qui possèdent les remèdes contre toutes les maladies. Ils les tiennent de vieux guérisseurs un peu sorciers qui, en mourant, leur ont légué leurs secrets. Les ingrédients qu'ils prescrivent vont, en général, aucun rapport avec la maladie en cause. N'en est-il pas de même pour les drogues auxquelles nous croyons, parce qu'elles sont recommandées par une vaste publicité ? C'est la manière d'administrer ces remèdes qui opère plus que leur qualité intrinsèque. Il faut les prendre après avoir, par exemple, fait trois ou sept fois le signe de la croix et récité une prière souvent fort drôle.
        Je me rappelle d'un remède contre le mal de ventre qu'un cul-de-jatte vendait à des pèlerinages du pays wallon. La prière était d'une bêtise fort commune, mais la recette en elle-même vaut d'être citée : « Après avoir dit cette prière trois fois et s'être dévotement signé, il faut se frotter le ventre avec une peau de taupe séchée ou avec de la confiture de groseilles. Le mal s'en ira si on a la foi. »
        J'ignore l'effet que peut avoir en de telles conjonctures la confiture de groseilles et je ne me chargerai pas de renseigner les lecteurs à ce sujet.
        On se trouve peut-être en présence de ce que les savants appellent une interpolation, c'est-à-dire une ajoute due à la fantaisie de quelque scribe facétieux ou malhonnête. La peau de taupe étonne moins, non que l'on soit renseigné sur ses bienfaits, mais elle est réputée comme un des plus puissants agents thérapeutiques de la médecine populaire.
        Les recueils de traditions populaires nous apprennent qu'elle est fréquemment employée contre le mal de dents. Le mal disparaîtra si vous coupez les pattes d'une taupe de sexe masculin et si vous vous les appliquez sur la tête. Une seule patte suffit à la rigueur, mais laquelle ? Nous n'en savons rien.
        Pour être sûr d'avoir la bonne, il vaut mieux se les coller toutes sur l'occiput. Le doigt qui a passé entre la peau et la chair d'une taupe guérit le mal de dents par simple contact. La bête est encore utilisée contre les convulsions et les maux de tête des enfants.
        En Normandie, la taupe disputait aux rois de France sacrés à Reims par l'attouchement de la sainte Ampoule, le privilège de guérir les écrouelles. On prend trois taupes vivantes ; on les tue, on les fait sécher au four dans un pot ferme, puis on les réduit en poussière.
        On mélange la poudre avec de la graisse d'oison que l'on applique sur les scrofules. On guérit si l'on a la foi.
        La foi, tout est là, dans la médecine des médecins comme dans celle des rebouteurs ; seulement, on l'appelle du nom plus moderne de suggestion, ce qui lui a donné un aspect scientifique que nous jugeons tout à fait acceptable.
        Je n'irai toutefois pas jusqu'à prétendre que nos superstitions nouvelles soient d'un calibre aussi fort que celles des paysans inspirés par les rebouteurs, car il y a des degrés dans la crédulité. Mais si l'on nous trompe avec des apparences de logique, nous sommes tout de même trompés en fin de compte. Certes, l'incantation à l'entorse, en usage dans certaines contrées françaises, nous fait sourire :

        « Entorse, entorse, entorse, si tu es dans le sang, saute dans la moelle ; si tu es dans la moelle, saute dans l'os ; si tu es dans l'os, saute dans la chair ; si tu es dans la chair, saute dans la peau ; si tu es dans la peau, saute dans le poil, et si tu es dans le poil, saute dans le vent. »

       On y ajoute des invocations aux saints et à la Vierge, ainsi que des signes de croix. Mais il y a parfois des rebouteurs qui ajoutent aux paroles et aux gestes rituels un massage habile, grâce auquel l'entorse est rapidement réduite.
        Je ne crois pas que celle qu'on appelait, il y a trente ou quarante ans, la sorcière de Tellin, récitait une formule aussi baroque, mais il est certain qu'elle guérissait les entorses mieux que n'importe quel médecin de son temps.
        Selon la théorie populaire, la maladie est un principe qui peut passer d'un objet dans un autre, du malade dans une matière reconnue propre à l'absorption.
        Ainsi, l'on fait passer la méningite de la tête du patient dans le corps d'un pigeon mâle fendu vivant en deux et appliqué tout chaud sur le crâne du malade. Le bec du pigeon doit être tourné vers le front.
        Sur un cancer, on met une tranche de viande fraîche. Le cancer mange son bifteck et, ainsi rassasié, laisse tranquille sa victime. Le guérisseur populaire n'opère pas toujours au hasard. Souvent, il a sa doctrine et il base sa thérapeutique sur l'idée qu'il se fait du corps humain. Cette idée est parfois cocasse. Pour certains, le tronc de l'homme contient deux sortes d'organes ; il y a les foies qui sont dans l'abdomen, et l'estomac qui est dans le thorax. Au travers du tout, les nerfs circulent et s'avisent quelquefois d'être plus forts que le sang, ou de se « ramousseler » gros comme le poing, ou de s'enchevêtrer.
        D'autres parlent d'une grande veine qui se trouve un peu partout et qui a souvent besoin d'être remise. D'autres encore parlent du crochet de l'estomac qui s'est déplacé ; il s'agit de lui faire reprendre sa place pour que disparaissent les mauvaises digestions et les douleurs épigastriques.
        Mais nos derniers thaumaturges opèrent plutôt par la persuasion. Antoine le Guérisseur et le bon Dieu de Ressaix dit Baguete n'usaient que de leur magnétisme personnel. Ils disaient au paralytique : « Levez-vous et marchez ! », et le paralytique, pour peu qu'il eût la foi, abandonnait ses béquilles.
        La justice n'est pas tendre pour les illuminés, les rebouteurs, produits de la crédulité populaire, qui ne demande qu'à être exploitée ; je ne dis pas qu'elle a tort, mais ce qui étonne, c'est qu'elle donne carte blanche à n'importe quel charlatan dès l'instant qu'il est pourvu d'un diplôme.

                                                                       Maurice DES OMBIAUX.

    La Meuse, 11 février 1910 (source : Belgicapress)


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  • G. Lenotre - Guérisseurs (Le Monde illustré, 2 janvier 1909)

     Pages d’autrefois

    GUÉRISSEURS

        Aux environs de Maubeuge, en une partie du Nord où les gens ne sont point crédules, exerce en ce moment un guérisseur qui, d'un geste, moins encore, d'un mot, d'un simple regard, délivre de leurs maux les impotents qui viennent le consulter.
        Il y a foule. La porte de l'homme aux miracles est assiégée par tous les malades de la région. Il les reçoit, un par un, les laisse s'approcher de lui, leur demande de quoi ils souffrent, et, d'un ton de conviction et de recueillement profonds, il leur dit : « Allez, vous êtes guéri ! » Ils s'en vont et il faut croire qu'ils sont guéris, en effet, puisque le défilé ne cesse point et que la réputation de ce bienfaiteur de l'humanité s'étend maintenant, paraît-il, dans toute la contrée.
        Certains sceptiques, qui se prétendent éclairés, riront de cette fantasmagorie : les sages seront plus réservés. A la vérité, on ne sait pas ; on ne sait rien. Qui pourrait affirmer qu'il n'y a pas là un cas d'hypnotisme, quelque phénomène magnétique, quelque miracle de la volonté ? Qui oserait dire, après les étranges découvertes faites par la science, depuis vingt ans, que cet homme n'est pas un précurseur ? Son cas, à la vérité, n'est point nouveau : qu'on se rappelle la vogue extraordinaire du zouave Jacob, qui, au temps du second Empire, n'employait pas d'autre remède : le fameux trombone de la garde, – je crois bien me rappeler que le zouave Jacob était trombone, – fut, durant plusieurs mois, une des célébrités de Paris, et je ne sais même si l'Académie de Médecine ne fut pas invitée à examiner ses procédés. Il vit peut être encore : riche ? pauvre ? toujours en possession de son étrange pouvoir ? Je l'ignore. Ce serait là une curieuse figure de disparu à ressusciter.
        Le rédacteur des Souvenirs de la marquise de Créquy a consigné dans son livre charmant que, à l'époque de Louis XVI, tous les cochers, les palefreniers, les marmitons, les garçons de cuisine et surtout les laquais, furent en grand émoi : on n'en pouvait garder aucun à l'antichambre ; quand on les envoyait quelque part, ils n'en revenaient pas : les maîtres d'hôtel en perdaient la tête ; et comme la même chose arrivait dans presque toutes les maisons, on avait fini par en parler dans le monde et personne ne savait à quoi cela pouvait tenir.
        Or, il était arrivé d'Alsace un prodigieux médecin qui guérissait toute espèce de maladie par la simple imposition d'une de ses mains. Il ne recevait pas d'argent ; mais il était convenu que les personnes qui pouvaient payer donnaient quelque chose en s'en allant, et suivant leurs moyens, à une grosse fille qui se tenait derrière la porte. Ce médecin était allé s'établir dans une maison de la rue des Moineaux, sur la butte Saint-Roch, et c'était là que toute la livrée de Paris tenait ses assises. La foi des clients était telle qu'ils eussent mis en lambeaux toute personne qui se serait permis d'émettre un doute sur la guérison radicale des miraculés : une bonne femme avait amené au thaumaturge sa fille, boiteuse de naissance. Il lui toucha les hanches et lui ordonna de marcher sans béquilles. La boiteuse obéit et tomba de tout son long ; mais la mère s'écria que sa fille était une entêtée, qu'elle faisait exprès : et toutes les commères qui se pressaient dans la rue, voyant la malade s'en aller, comme elle était venue, cahotant sur ses béquilles, la huèrent, lui reprochèrent son obstination, et peu s'en fallut qu'on ne l'écharpât pour la punir de « sa mauvaise volonté ».
        Le fait est éloquent : il prouve de la part des bonnes gens qui ont recours à ces sortes de charlatans, une confiance si absolue, une foi si robuste, que c'est déjà là une sorte de prodige. Le rédacteur des piquants Souvenirs de la marquise de Créquy était un homme extrêmement spirituel, le soi-disant marquis de Courchamps. Il rit beaucoup, il s'indigne presque, de la naïveté des dupes que faisait le médecin fantaisiste de la rue des Moineaux. Il ne se doutait pas qu'un cas d'auto-suggestion bien autrement singulier le guettait lui-même. Quand il eut terminé d'écrire les sept volumes d'anecdotes qu'il attribuait à la vieille douairière, il s'imagina être devenu la douairière en personne. Il sortait vêtu d'une robe et d'un bonnet à la Fanchon ; son logement ressemblait à un boudoir de marquise : tentures de lampas, rocailles merveilleuses, lit à baldaquin et à bouquets de plumes. Assis sur ce lit majestueux, il se coiffait d'un bonnet attaché sous le menton par un ruban de nuance tendre ; une camisole de femme couvrait sa poitrine ; un vieux tartan était jeté sur ses épaules : on eût juré être en présence d'une vieille de soixante-dix ans, surtout lorsqu'il chantait de sa voix tremblante et nasillarde les refrains légers du XVIIIe siècle. On raconte qu'un jour M. de Durfort, venant pour lui parler et ne l'ayant jamais vu, lui dit en le saluant :
        – Madame, pourriez-vous m'apprendre où est M. de Courchamps ?
        Si un écrivain d'esprit – et Courchamps en avait beaucoup – parvient à s'hypnotiser au point de changer de sexe, faut-il s'étonner de l'empire qu'un homme de forte volonté peut exercer sur des âmes naïves ? Et d'ailleurs, qui peut se targuer d'être réfractaire à l'inexplicable et mystérieuse influence de l'imagination ? Existe-t-il un incrédule qui n'ait son petit coin de superstition ? A l'époque même où les gens du monde prenaient en pitié leurs laquais courant au guérisseur de la rue des Moineaux, eux-mêmes étaient engoués du baquet de Mesmer et payaient des sommes énormes pour être admis à pénétrer chez l'inventeur du fluide éthéré, auquel ils attribuaient toutes les vertus curatives. Ce fameux baquet était une sorte de cuve en métal, remplie de bouteilles cassées, et recouvert d'une toile verte d'où sortaient des tringles de fer recourbées : les Mesméristes se rangeaient autour de ce meuble bizarre et chacun tenait le bout d'une des tringles qu'il s'appliquait sur les yeux, dans l'oreille, aux reins, contre la poitrine, au creux de l'estomac, à la gorge, suivant le mal à guérir. L'effet miraculeux du baquet ne se faisait pas attendre : l'un des malades était pris de frisson ; l'autre se voyait inondé de sueur ; celui-ci tombait en convulsion ; un quatrième entrait en contemplation séraphique. Ici le patient riait à gorge déployée ; son voisin bâillait en pleurant, tandis que dans un coin de la salle, le docteur Mesmer s'occupait à toucher de l'harmonica.
        Son élève et son successeur, le docteur Deslon, supprima l'harmonica dont il ne savait pas jouer, mais il ajouta au baquet magique l'intervention d'une somnambule : c'était la première qui se produisait à Paris et elle inspira autant de terreur que d'admiration.
        Cette personne extra-lucide était une paysanne de Chatou, âgée de trente-quatre ans, qui, jusque-là, n'était jamais sortie de sa basse-cour. Quand elle était dans son état naturel, on ne pouvait pas en tirer une seule parole correctement prononcée ; mais, une fois sur le trépied, elle rendait des oracles en termes scientifiques et sibyllins. Tous les adeptes du magnétisme avaient en la somnambule du docteur Deslon une foi aveugle : les plus grands seigneurs, les plus nobles dames la consultaient et déclaraient s'en trouver à merveille : certains médecins même attestaient que la composition des tisanes qu'elle ordonnait étaient des chefs-d'œuvre de combinaison médicale. Le pouvoir surnaturel de cette fille ne rencontrait qu'un seul incrédule... et c'était le docteur Deslon lui-même. Ah ! comme il en fut sévèrement puni !
        Il faut dire que Deslon, qui n'avait pas plus de quarante ans et qui était d'une santé très robuste, supportait à lui tout seul, depuis la retraite de Mesmer, toutes les fatigues des opérations magnétiques. Un jour qu'il était en train d'endormir sa somnambule, il l'interrogea sur une petite douleur qu'il se sentait au creux de l'estomac. La pythonisse répondit qu'elle y voyait une cause de mort certaine et prochaine : que c'était un point noir, exubérant et putrescent ; que la grande quantité de fluide magnétique absorbée par le docteur avait l'inconvénient de lui corroder le système nerveux, de lui allumer la bile et de lui décomposer le sang, d'où venait qu'elle lui donnait le conseil de se baigner souvent et de ne magnétiser personne avant le retour du printemps, ni surtout pendant la canicule où l'on allait entrer. Cette fille ajouta que le docteur ne vivrait pas deux mois s'il ne suivait son avis.
        On l'a vu, Deslon ne croyait pas à la double vue de sa collaboratrice : ou, du moins, il y croyait suffisamment quand il s'agissait des autres ; mais quand sa propre santé était en question, il préférait des avis moins hasardés : il ne tint aucun compte du diagnostic porté par la somnambule et mourut dans le délai qu'elle avait fixé.
        Des commentaires et réflexions dont le pseudo-marquis de Courchamps agrémentait le récit de cette aventure, on ne doit retenir que cette formule qui devrait servir de règle à tous les savants et de leçon à tous les sceptiques : « Il faut savoir ignorer : il faut s'y résigner humblement, avec un sentiment de résolution soumise : il faut savoir dire à l'intelligence humaine, ainsi que l'Eternel à l'Océan révolté : Tu n'iras point au delà de ces remparts de roches où j'ai marqué ta limite : ici tu briseras l'orgueil de tes flots. »

    G. LENOTRE.

    Le Monde illustré, 2 janvier 1909


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  • G. Lenotre - Guérisseurs (Le Monde illustré, 6 juillet 1912)

     Pages d’autrefois

    GUÉRISSEURS

        Le métier de bienfaiteur de l'humanité comporte, bien assurément, certaines satisfactions intimes ; mais il ne va pas sans inconvénients et ceux qui l'exercent doivent s'attendre à nombre d'avanies. La disparition récente d'Antoine le Guérisseur, qui opérait dans le Hainaut belge et français, suscite cette constatation peu engageante. Antoine était certainement un brave homme, il ne donnait aux gens que de bons conseils : prier, avoir la foi, espérer avec confiance. Il arriva que certains malades se trouvèrent bien de ses avis et recouvrèrent, en les suivant, la santé, ce qui n'a rien de très étonnant par ces temps de neurasthénie générale. On eût dû encourager ce placide et inoffensif prophète et l'aide dans sa charitable mission. Mais sa popularité était grande ; quand il passait dans un village, l'auberge où il descendait était aussitôt assiégée d'une foule anxieuse, avide de l'approcher, d'écouter sa parole... et ceci passait, aux yeux de l'autorité, pour un désordre social. Comment ! un homme sans diplôme, sans titre, se permettait de prêcher aux malheureux la foi en Dieu et l'énergie morale ! C'était là, manifestement, une infraction à l'ordre établi, et l'autorité s'en inquiétait, autant sinon plus que de l'audace des apaches. Et le guérisseur fut surveillé, traqué, molesté et réprimandé comme s'il eût commis des crimes.
        Pareil mécompte advint jadis au zouave Jacob. Les gens d'un certain âge n'ont pas oublié l'enthousiasme étonné de Paris, de la France entière, quand, dans les dernières années du second Empire, le bruit se répandit que ce militaire, simple trombone dans un régiment de la garde impériale, opérait des miracles. Les paralytiques se présentaient chez lui en rangs serrés : il les recevait, leur touchait la main, leur ordonnait « de se lever et de marcher » ; et beaucoup, assurait-on, sous l'impression de cette voix autoritaire, redescendaient l'escalier sans aide et se déclaraient guéris. Mystère de la suggestion et de la volonté ; problème irrésolu de l'emploi des forces occultes, dont les savants reconnaissent l'existence, mais dont ils interdisent la mise en œuvre. Le zouave Jacob eut à s'en expliquer devant « qui de droit ». Était-il un thaumaturge inspiré ou un vulgaire charlatan ? Peu importe ! il suffisait qu'un seul de ses adeptes eût obtenu quelque soulagement, pour qu'on dût, semble-t-il, stimuler le zèle du trombone-sorcier. Non pas ; il est interdit en France de soulager ses concitoyens, si l'on n'a, au préalable, obtenu la permission du commissaire de police. De tout temps il en fut ainsi, et il y aurait une bien curieuse histoire à écrire des guérisseurs non patentes, qui, depuis le moyen âge jusqu'à nos jours, ont essayé d'exercer, en dépit des persécutions et des railleries, leur mystérieux apostolat.
        Mme de Saint-Amour, dont M. Louis Villat nous révèle les aventures en une très curieuse étude récemment publiée, tiendrait, dans cette galerie de magiciens, une place honorable : son histoire est quasi merveilleuse et ressemble à un conte de fées. Née de parents français, en Hollande, le 11 novembre 1786, orpheline en bas âge, elle avait suivi, lors de la révolution, l'armée des émigrés, et vécu de l'existence errante des proscrits. Mariée en 1809 au capitaine Renaud de Saint-Amour, elle accompagna celui-ci dans sa vie de garnison, séjourna à Bayonne, à Arras, et se fixa enfin à Paris, en octobre 1826, pour surveiller l'éducation de son fils. Là elle rencontra un officier d'origine nantaise, Jacques Bernard, lequel avait étudié les théosophes, était quelque peu martiniste, et professait les doctrines de Swedenborg. Mme de Saint-Amour l'écouta avec extase : ils discutèrent ensemble de « la nouvelle Jérusalem » annoncée par l'Apocalypse et de bien autres choses encore. Toujours est-il que, lorsque Bernard mourut, en 1828, Mme de Saint-Amour, exaltée et purifiée par les entretiens qu'elle avait eus avec lui, manifesta une piété ardente : la prière et la contemplation absorbaient le meilleur de son temps, si bien que, à force d'avoir médité sur les livres saints, elle y découvrit que « Dieu accorde le don de guérir à ceux qui croient en lui ». Pleine de confiance, sûre de sa foi, elle en voulut tenter l'expérience, et s'aperçut, toute tremblante d'émotion et de reconnaissance, que, par la simple imposition des mains, elle avait ramené à la santé quelques enfants fiévreux. Très humble, elle reporta toute la gloire de ce miracle à l'ami disparu, à Bernard qui l'avait initiée à la vie dévote, et elle partit pour Nantes afin que profitassent, les premiers, de son don miraculeux, les compatriotes de son apôtre défunt.
        Elle avait alors quarante-deux ans ; c'était une petite femme très vive, très simple, très affable, toujours gaie et de bonne humeur, et qui n'avait rien d'une sorcière. L'ardeur de sa croyance, son originalité, l'attrait de sa conversation ont vite fait de grouper autour d'elle des amis très dévoués : son nom et sa réputation lui donnent accès dans les salons les plus fermés de la ville ; elle s'est installée rue du Bel-Air, non loin de l'église Saint-Émilien, et reçoit chez elle toutes les classes de la société. C'est, dans sa maison, un défilé ininterrompu de malades : « Les séances sont courtes, écrit M. Louis Villat, et dépourvues de tout appareil impressionnant. » Très simplement, Mme de Saint-Amour interroge, moins comme un médecin que comme un confesseur : « – Qu'avez-vous ? Telle infirmité. – Coyez-vous que Dieu, qui vous envoie le mal, puisse vous l'ôter ? – Oui. – Vous savez qu'il est dit dans l'Evangile : Demandez et il vous sera accordé ? – Oui. – Demandez donc avec moi, et dans ces sentiments, votre guérison... » Elle impose alors les mains et, dans le silence, transfigurée, elle prie avec ardeur. Chez le malade, d'abord inquiet, la confiance naît peu à peu, puis le calme, puis l'apaisement, et la guérisseuse le renvoie, disant : – « Allez, il vous est accordé suivant votre foi ou suivant la sincérité de votre prière. » (Mme de Saint-Amour, par Louis Villat. La Revue bleue du 24 août 1912.)
        Et les prodiges se multiplient : un paralytique laisse ses deux béquilles chez la thaumaturge et court se prosterner devant l'autel de l'église voisine ; un enfant, apporté dans les bras de sa bonne, retourne seul chez ses parents, escorté d'une foule admirative et tumultueuse. Les pèlerins arrivent de tous les points de Bretagne, du Maine et du Poitou : il en vient d'Angers, de Rennes, même de Tours, de Saumur et de Rochefort. Chacun est désireux de voir la sainte dame, de l'entendre, de toucher ses vêtements : l'administration municipale doit prendre des mesures pour assurer l'ordre aux alentours de sa maison ; deux gendarmes sont postés à demeure dans ses appartements, et, quand tombe la nuit, elle se met à son balcon, et elle étend les mains vers les malades qu'elle n'a pu admettre et qui s'agenouillent sur les pavés pour recevoir sa bénédiction bienfaisante. Quelques-uns même passent la nuit couchés sur le seuil de sa porte.
        C'est alors que se produisit le plus étonnant, le plus invraisemblable des revirements d'opinion. Cette femme, accueillie partout avec faveur, tant qu'elle se contentait de professer sa foi dans la puissance de la prière, fut reniée avec unanimité dès qu'elle mit en œuvre sa conviction. Obtenir des guérisons sans l'assistance d'un médecin, quelque ignare soit-il, n'est pas un acte de bon ton. Les salons aristocratiques se ferment devant Mme de Saint-Amour : les catholiques fervents s'inquiètent ; les « libéraux », les esprits forts, les « anticléricaux » de l'époque entreprennent une campagne acharnée contre ces jongleries. La Faculté entre en guerre contre les méfaits du mysticisme, du magnétisme et du spiritualisme et autres mystifications ; les petits journaux raillent la sorcière, la prophétesse, la pythonisse, qui se permet de soulager l'humanité souffrante : on la chansonne, on la met en vaudevilles, on la déchire de cent façons ; un mauvais plaisant pousse la facétie jusqu'à rédiger toute une biographie de Mme de Saint-Amour, biographie absolument mensongère où l'on révèle que, fille d'un horloger nantais, elle a épousé un bossu dont elle n'a jamais pu – miracle pourtant attendu – redresser la bosse ; et l'on chante
                        Cependant son taudis fourmille
                        De dos voûtés, de pieds tortus :
                        Le boîteux garde sa béquille,
                        Les bossus repartent bossus.
                         « Combien la sainte a de mérite ! »
                        Disent les borgnes d'alentour...
                        Allons, frères, allons bien vite
                        Voir la dame de Saint-Amour (bis).
        Seuls les pauvres qu'elle a réconfortés et consolés pourraient prendre sa défense ; mais le dénigrement est contagieux comme l'enthousiasme, et bientôt les racontars les plus absurdes, perfidement répandus, circulent, touchant ce cas étrange : « les uns parlent d'une bague électrique que la guérisseuse porte au doigt et dont la vertu soulage les malades ; d'autres affirment qu'elle répand sur les plaies une poudre propre à les cicatriser. Quelques-uns la traitent de cartomancienne : c'est une simple simulatrice ; si les muets ont parlé devant elle, c'est qu'elle est ventriloque !... »
        Comme jamais Mme de Saint-Amour n'avait consenti à recevoir d'aucun de ses visiteurs la moindre rétribution ; comme, au contraire, elle proclamait, à tout venant, que sa mission, toute de charité, n'attendait aucune rémunération temporelle, il était impossible de se débarrasser d'elle en l'incriminant d'exercice illégal de la médecine. Mais les quolibets et la calomnie suffisent à la besogne : maintenant, chaque fois qu'elle sort ou qu'elle paraît à son balcon, elle est saluée par les sifflets et les insultes ; la foule entonne la complainte historique sur la sorcière du vieux Bel-Air ; ceux qui ont bénéficié de ses prières et ont le courage difficile de ne point se montrer ingrats sont traités par les journaux d'atrabilaires, d'aliénés et d'idiots... Il fallut bien se résoudre à fuir devant l'ouragan : Mme de Saint-Amour quitta Nantes sous les huée  ; on ne sait où elle se réfugia, et, toujours comme dans les contes, jamais plus on n'entendit parler d'elle.
        Qu'était-elle ? Une aventurière ? Son biographe, en concluant, ne le pense pas. Une mystique, à coup sûr, sincère et désintéressée, ceci semble hors de doute ; ce qui la rend particulièrement intéressante, c'est qu'elle ne fut pas le phénomène unique : à toutes les époques et dans tous les pays, certains individus, jusqu'ici mal ou peu étudiés, se sont vantés de posséder le don de guérir : il serait curieux de savoir le lien qui les unit, en quoi ils différent, en quoi ils se ressemblent et d'arriver ainsi peut-être à percer le mystère de leur surnaturel pouvoir.

    G. LENOTRE.

    Le Monde illustré, 6 juillet 1912


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    Auteur : Alphonse Saltzmann
    Titre : La Médecine spirituelle
    Édition : Paris, Chez Alph. Saltzmann, 1924

        L'auteur participa au Fraterniste. Un site lui est consacré : https://alphonse-saltzmann.jimdofree.com/, ainsi qu'un blog http://alphonsesaltzmann.blogspot.com/
        Il apparaît également dans un numéro de Touche à tout de novembre 1913, consacré aux guérisseurs parisiens et qui évoque Jousselin qui fut élève du Père pendant un temps.

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  • A.-C. Bégot - Guérison spirituelle et médecine (1998)

    Auteur : Anne-Cécile Bégot
    Titre : Guérison spirituelle et médecine au tournant des XIXe et XXe siècles
    Éditions : Recherches sociologiques 1998/2 (A.-C. Bégot : pp. 65-80)

        La Science Chrétienne et l'Antoinisme sont deux groupes religieux minoritaires qui ont placé la "guérison" au coeur de leurs pratiques. Nés à la fin du XIxe siècle (Science Chrétienne) et au début du XXe siècle (Antoinisme), ces groupes s'inscrivent dans un contexte particulier, celui de l'avènement de la médecine scientifique. Les croyances et pratiques de ces groupes allaient à l'encontre des intérêts de la profession médicale et posaient alors le problème d'une délimitation des "champs" religieux et médical. Après une période conflictuelle, les rapports entre l'institution médicale et ces groupes se sont pacifiés: la première obtint le monopole de l'exercice de la médecine, et les pratiques des groupes, réduites à la prière de guérison, furent tolérées.

    Sommaire :
    I. La maladie comme expérience inaugurale
    II. La légitimité médicale : entre savoir et pouvoir
        A. Le cas belge
        B. Le cas américain
    III. Significations de la guérison spirituelle et relations groupes religieux/institution médicale
        A. Les significations de la guérison spirituelle
        B. Les relations groupes religieux et institution médicale : du conflit à la coexistence
            1. Le cas de la Science Chrétienne
            2. Le cas de l'Antoinisme
    Conclusions
    RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

    source : uclouvain.be
    À lire en ligne : https://sharepoint.uclouvain.be/sites/rsa/Articles/1998-XXIX-2_07.pdf


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  • Auteurs : Sous la direction de Raymond MASSÉ et Jean BENOIST, A.-C. Bégot
    Titre : Convocations thérapeutiques du sacré,
    “Formes organisationnelles et pratiques thérapeutiques : comparaison de deux groupes religieux minoritaires (Science chrétienne et antoinisme).” [p.61-80], in 1re partie : Églises de guérison, miracles et Conversion, Chapitre III
    Éditions : KARTHALA (Collection : “Médecines du monde”), 2002

    Sommaire:
    Introduction
        Extrait : L'étude des formes organisationnelles de deux groupes religieux, la Science chrétienne et l'antoinisme, permet d'envisager le rôle joué et la place occupée par ces organisations religieuses dans la gestion des pratiques thérapeutiques. L'intérêt de ces groupes réside dans le fait qu'ils ont accordé une place centrale à la « guérison » - alors que la médecine commence à faire ses preuves en termes d'efficacité thérapeutique (fin XIXe-début XXe siècle) - et d'être séculaires. Après avoir envisagé leurs rapports avec la société globale, on s'intéressera à l'économie du croire puis aux formes de domination.
    Les rapports à la société globale
    L'économie du croire
    Les formes de domination
    Conclusion


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  • Pierre Vachet - La Pensée qui guérit (1926)

    Auteur : Pierre Vachet (1892-198?)
    Titre : La Pensée qui guérit (L'Euphorisme, un nouvel art de vivre)
    Éditions : Grasset, Paris, 1924 (276 pages)
        Plus que les microbes, c'est notre imagination qui fait de nous des malades. Mais s'il y a une imagination qui tue, le Docteur Vachet nous apprend à former notre pensée pour en faire un instrument de guérison. – Voici peut-être le secret de la santé.

    Pierre Vachet - La Pensée qui guérit (1926)
        Docteur en médecine (Paris, 1915), il fut psychologue et directeur de l'École de psychologie et de la Revue de psychologie appliquée.
        Il s'intéressa à la guérison par la pensée, notamment dans la Science chrétienne, et chez les guérisseurs. Excellent praticien et maître de la vulgarisation, ses thèses se fondent largement sur des observations issues de ses riches expériences. Il est l'auteur (chez Grasset principalement) de Lourdes et ses mystères (1920, réédité sous le titre Le Mystère de Lourdes), Pensée qui guérit (1926 et réédité avec le titre complément L'Euphorisme, un nouvel art de vivre en 1960), Remède à la vie moderne (1928), La Santé du corps et de l'esprit (1929), Sur le chemin de l'optimisme et du bonheur (1959), Portez-vous bien (1980)...


        On le voit sur une carte postale avec Jean Béziat à Avignonnet.

    Quatrième de couverture :
        AUJOURD'HUI plus que jamais, dans l'époque d'agitation et d'inquiétude où nous vivons, le besoin se fait impérieusement sentir d'une règle de conduite qui, éliminant la nervosité et l'angoisse, nous permette de recouvrer l'équilibre et d'entrevoir de réelles possibilités d'être heureux.
        Depuis longtemps, le docteur Pierre Vachet s'est fait l'apôtre de la Pensée qui guérit. Dans ce livre, il nous montre comment nous pouvons utiliser les forces merveilleuses que nous portons en nous et comment, dans toutes les maladies, même organiques, cette force, véritable « sérum moral », est capable de provoquer la guérison.
        Mais le docteur Pierre Vachet va plus loin. Il conclut à la nécessité urgente d'un nouvel art de vivre, à une philosophie faite de sérénité qui nous aide à surmonter les épreuves de la vie moderne.
        Aux systèmes de négation, d'abandon, il oppose un système constructif, de confiance en soi et en l'avenir, associant dans une étroite communion l'hygiène de l'esprit et celle du corps, qu'il met à la portée de chacun de nous.
        Cette philosophie, étayée par quarante années de recherches et d'expériences, le docteur Pierre Vachet l'a appelée : Euphorisme. Son aboutissement est, en effet, de réaliser en nous un état d'équilibre intellectuel, physique, nerveux et moral qui est proprement un état d'euphorie.
        Ce livre simple et direct, agréable à lire parce qu'il n'a rien de doctrinal ni de sévère, nous donne les moyens pratiques de lutter contre ce nervosisme moderne dont nous sommes, tous, plus ou moins atteints, trop souvent à notre insu.

        Recension dans La Lanterne, du 16 octobre 1927 :
    Le Dr Pierre Vachet et la morale moderne
        Parmi les hommes qui sont venus à la vie publique depuis la fin de la guerre, le docteur Pierre Vachet tient une place de premier plan.
        Ce jeune médecin, travailleur consciencieux doublé d'une intelligence supérieure, esprit ouvert aux idées neuves, homme de la génération en un mot, s'est résolument débarrassé de tout le fatras des conceptions anciennes. Depuis trois ans, fruits de ses travaux, il a enrichi le domaine de la science de trois livres qui chacun marquent une étape sur la voie de la médecine nouvelle : Lourdes et ses mystères, la Pensée qui guérit, l'Inquiétude sexuelle.
        Ses deux premiers livres sont trop connus pour y revenir. Je me limiterai à rappeler seulement que la Pensée qui guérit, ouvrage de science mis à la portée de toutes les cultures, est venu réconforter une foule innombrables de malades qui désespéraient, et qu'il est aussi le bréviaire de santé de l'homme sain décidé à lutter contre le mal toujours probable, avec le seul et précieux remède de son énergie éduquée. Moins simpliste que les ouvrages du brave docteur Coué, ce livre ouvre des horizons qu'on n'entrevoyait jusqu'ici qu'avec timidité. A l'instar de Satan, archange déchu auquel France faisait dire dans La Révolte des Anges : « Nous portons Dieu en nous-même », la Pensée qui guérit démontre aux malades et aux autres qu'ils portent leur guérison en eux, et qu'il ne tient qu'à eux de la faire triompher.
        Mais le docteur Pierre Vachet a produit un livre plus récent qui s'attaque cette fois aux problèmes des sexes et à toutes les questions qui en dépendent. Avec un beau courage, et sans choquer personne, l'auteur a traité dans ce livre destiné au grand public de ce que l'on n'osait jusqu'ici évoquer que dans les cercles fermés des praticiens.

        Lucien Roure en écrira une recension très critique dans les Études (publiées par des Pères de la Compagnie de Jésus) du 1er janvier 1926.

        Il participe à des débats sur le sujet au Club du Faubourg :

    Pierre Vachet - La Pensée qui guérit (1926)

     

    Pierre Vachet - Guérisons et guérisseurs (L'Œuvre, 13 mars 1928)


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  • Frédéric Boutet - Des guérisons mystérieuses (Cyrano, satirique hebdomadaire, 18 mars 1928) 1Frédéric Boutet - Des guérisons mystérieuses (Cyrano, satirique hebdomadaire, 18 mars 1928) 2


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  • André Bronté, Serge Saÿn - S.O.S. guérisseurs (1976)

    Auteurs : André Bronte & Serge Saÿn
    Titre : S.O.S. guérisseurs
    Éditions : Presses de la Cité, Paris, 1976, 281 pages

          Évoque la guérison obtenue par le guérisseur Michel Bontemps sur un guérisseur antoiniste :

         Avant de nous quitter, au terme de cette enquête sur son travail, Michel Bontemps nous proposa d'étudier le cas de M. Lucien Monnier, 51, rue du Pré-Saint-Gervais à Paris.
        « Ce cas, nous dit-il, est l'un des plus curieux que j'aie eus à traiter car ce malade était un confrère, si l'on peut dire.
        Il est peu courant de voir un guérisseur demander l'aide d'un autre guérisseur.
        C'est au mois de décembre dernier que je vis entrer dans mon cabinet, M. Monnier qui m'avait demandé rendez-vous sans me faire connaître ni son mal ni ses activités.
        A ma première question : « Alors, M. Monnier, qu'est-ce qui vous arrive ? », d'emblée, il me posa son problème.
        « Avant tout, je dois vous dire que je fais comme vous. Je suis guérisseur. Il ne s'agit pas d'un métier mais d'une vocation, un sacerdoce en quelque sorte.
        Je suis antoiniste, disciple du Père Antoine. Le Père Antoine était un prêtre guérisseur célèbre qui a formé des élèves qui ont perpétué sa méthode.
        Je suis un de ses élèves, guérisseur bénévole. Depuis plusieurs années, chaque week-end, je reçois des personnes souffrantes et je les guéris. »
        « Je lui demandai, dit Michel Bontemps :
        – Vous venez voir mes résultats pour découvrir mes méthodes ?
        – Non, je viens parce que ça ne va plus. Je suis malade et je ne peux plus exercer la mission qui m'a été confiée... »
        M. Monnier raconta alors à Michel Bontemps ses malheurs. Depuis plusieurs mois, certains symptômes avaient commencé à l'inquiéter : perte de poids, manque d'entrain, fatigue, irritabilité, etc.
        Malgré sa prévention contre la médecine officielle, lui dont la vocation était de soigner par des méthodes « parallèles » il se décida à consulter un médecin qui lui fit faire des analyses. Celles-ci devaient révéler une intoxication due à une mauvaise élimination générale, et en particulier, un taux de cholestérol trop élevé.
        « Ce médecin, à l'évidence très pressé, me garda quelques minutes dans son cabinet lors de ma seconde visite. Mais, nous raconte M. Monnier, juste le temps d'inscrire sur son bloc-notes une liste de médicaments d'une page et demie, puis il ajouta : « Prenez ça et revenez me voir dans un mois... »
        Cette visite, loin de me rassurer, ne fit qu'aggraver mes craintes. Rentré chez moi, j'ai lu et relu la liste de médicaments avec une impression de malaise. J'avais tellement vu, depuis dix ans, des personnes que les médicaments non seulement n'avaient pas guéries, mais au contraire avaient complètement détraquées, que je pensais, instinctivement, que ce n'était pas la bonne voie.
        Finalement, j'ai renoncé à faire réaliser l'ordonnance chez un pharmacien, tout en craignant de ne pas pouvoir tenir le coup très longtemps. C'était moins ma « petite santé » qui me préoccupait que l'idée de devoir renoncer de guérir mes amis.
        C'est un collègue de travail, à qui je parlais de ma fatigue permanente qui me donna l'adresse de Michel Bontemps.
        – Il a réussi à guérir ma femme de ses migraines, me dit-il. Cela fait quinze ans qu'elle en souffrait presque tous les jours. Va le voir... il guérit comme toi avec les mains, mais il donne aussi des plantes...
        Voilà comment je me suis retrouvé dans le cabinet de Michel Bontemps.
        Je pensais y trouver un guérisseur qui m'examinerait avec un pendule, ou qui m'imposerait les mains.
        Aussi, je fus très étonné quand il commença à examiner mon cil avec un « iriscope », cet appareil formé d'une loupe et d'une lampe.
        Le guérisseur m'expliqua que grâce à cette méthode il pouvait découvrir dans l'iris du malade presque tous les symptômes des maladies organiques.
        L'iris étant une zone particulièrement sensible, un véritable écran où s'inscrivent, pour celui qui sait le déchiffrer presque tous les dérèglements.
        Michel Bontemps me confirma le diagnostic des médecins.
        J'étais intoxiqué, mais il me précisa qu'il s'agissait également, dans mon cas, de troubles du système sympathique, de fonctionnement déficient des intestins et de problèmes circulatoires...
        Il me conseilla deux préparations à base de plantes, à prendre à raison de deux tasses par jour, et de suivre certaines directives en matière d'hydrothérapie (deux bains de pieds par semaine, au romarin ainsi que des douches spécifiques).
        En plus chaque semaine, pendant plus de quinze minutes il m’imposait des séances de magnétisme, en vue de me permettre de retrouver mon énergie et ma vitalité. »
        Quand nous avons rencontré M. Monnier, à la fin novembre, il avait repris cinq kilos, son taux de cholestérol était considérablement réduit et sa mine disait assez qu'il se sentait en pleine forme.
        « Pourtant, au bout de trois semaines de traitement, il n'y avait guère d'amélioration, nous a-t-il confié. Après les séances de magnétisme, je me sentais bien pendant quelques jours, puis, de nouveau, j'étais épuisé.
        Michel Bontemps insista alors pour que je n'aille pas à la réunion hebdomadaire du Temple Antoiniste, il m'expliqua que la force magnétique qu'il m'insufflait se trouvait dispersée dès que j'essayais de soigner des malades.
        A contrecœur, j'ai obtempéré et c'est à partir de ce moment que j'ai commencé à me sentir revivre.
        Dès lors les résultats ont même été spectaculaires.
        Début novembre j'avais repris du poids. En même temps les analyses de sang attestaient une baisse importante du taux de cholestérol.
        Bien mieux, avant la fin de l'année, avec l'accord de Michel Bontemps, j'ai pu reprendre mes activités de guérisseur, auprès de mes amis antoinistes.
        Je ne ressens plus aucune fatigue.
        Aujourd'hui, à part une préparation à base de plantes et des conseils de diététique que je continue à suivre, j'ai cessé tout traitement.
        Je suis persuadé que je reviens de loin.
        Pour ne pas inquiéter mon entourage, je cachais à quel point j'étais à bout de forces.
        Même pendant ma captivité en Allemagne je n'avais pas été aussi épuisé.
        Le plus terrible, c'est que j'étais tellement tendu que je ne parvenais plus à dormir.
        Ni médicaments ni calmants n'avaient prise sur moi.
        Aujourd'hui, je peux mesurer l'efficacité de Michel Bontemps car c'est vraiment lui qui m'a tiré d'affaire... »


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  • Robert Tocquet - Les Pouvoirs du surnaturel (1974)Robert Tocquet - Les Pouvoirs du surnaturel (1974)

    Auteur : Robert Tocquet (cf. l'article wikipedia)
    Titre : Les Pouvoirs du surnaturel
    Éditions : Pierre Belfond, Collection : Sciences secrètes, 1974

        Dans le chapitre I Guérisons miraculeuses et médications psychologiques, et plus particulièrement consacré au traitements métaphysiques et moraux, l'auteur évoque l'antoinisme en ces termes :
        Le « Père » Antoine, qui a fondé l'Antoinisme, n'appartenait pas à l'Eglise alors que l'on croit souvent, à cause de cette appellation de « Père », qu'il faisait partie d'une communauté religieuse. Né en 1846 à Mons-Crotteux, dans la province de Liège, il descendit tout enfant à la mine, avec son père et l'un de ses frères, pour aider ses parents à nourrir ses dix frères et sœurs. La misère le mena en Allemagne puis en Russie, ensuite le ramena avec quelques économies en Belgique où il se maria. Il s'installa alors définitivement à Jemeppe-sur-Meuse pour exercer, aux Forges et Tôleries Liégeoises, de modestes fonctions de concierge. Rien ne le prédisposait par conséquent à devenir le fondateur d'une sorte de religion guérisseuse qui compte actuellement plusieurs centaines de milliers d'adeptes.
        Mais le Destin veillait et l'extraordinaire aventure de l'obscur employé commença le jour où un ami lui prêta Le Livre des Esprits d'Allan Kardec. Bien que sachant à peine lire et écrire, Antoine dévore l'ouvrage spirite dont le contenu est pour lui une véritable révélation. Il fait tourner les tables, installe en sa demeure une « chambre à invocations » et se prend à prêcher les « vérités » dictées par les esprits. C'est un étrange mélange de catholicisme, de spiritisme et de théosophie", de sorte que le tout constitue un ensemble assez déconcertant, bien peu homogène et souvent obscur. En 1893, Antoine perd son fils unique, et, dès lors, son activité se tourne vers le problème de la guérison. Deux esprits, le docteur Demeure et le docteur Caritas, lui enseignent, de l'au-delà, que les maux n'existent pas par eux-mêmes et qu'il n'est de réel et de malfaisant que le péché. En même temps, ils lui accordent des fluides guérisseurs. Atteint d'une maladie d'estomac qui l'épuisait lentement et contre laquelle la « science officielle » était demeurée impuissante, il applique sur lui-même les conseils de ses guides, et, sur le coup, ses douleurs gastriques disparaissent. Après s'être guéri, il a l'idée de guérir les autres. Il impose les mains, distribue des morceaux de tissu « magnétisé », puis, à la suite de quelques ennuis avec le Syndicat des Médecins, change de méthode et n'emploie plus que la prière comme agent thérapeutique. Sa renommée s'étend. On vient à lui de toute la Belgique, puis des pays environnants. Il rend l'ouïe aux sourds, la vue aux aveugles, le mouvement aux paralytiques, apaise des milliers de souffrances. Ses disciples se groupent. On l'appelle Père et sa femme la Mère. Une sorte de religion se constitue : l'Antoinisme. En quelques jours, dans une partie de la Wallonie belge, cent cinquante mille signatures sont recueillies tendant à faire reconnaître officiellement le culte en Belgique. Des temples s'élèvent.
        A la mort du Père, ou plutôt à sa « désincarnation », survenue le 25 juin 1912, on pensait, et, dans les milieux catholiques qui voyaient d'un mauvais œil la secte se développer dangereusement, l'on espérait que l'Antoinisme allait disparaître. Il n'en fut rien. La Mère releva le flambeau, et, jusqu'à sa mort, en 1942, continua le culte. Il subsiste toujours, très solidement implanté en divers pays. En Belgique, l'Antoinisme possède actuellement vingt-neuf temples dont deux à Bruxelles. En France, on trouve des centres dans quelques grandes villes : Paris, Lyon, Tours, Aix-les-Bains, etc. Ils rassemblent approximativement dix mille adeptes et l'on évalue, dans le monde, le nombre total des fidèles à un million environ. Ce sont surtout des ouvriers et particulièrement des métallurgistes et des mineurs.
        Dans chaque temple, le principal culte ou Opération générale a lieu, en principe, chacun des quatre premiers jours de la semaine, à dix heures du matin très précises, car l'un des caractères spécifiques de l'Antoinisme c'est de combiner l'heure des prières émanées des différents centres de façon que toutes fassent bloc. De plus, on admet que, dans l'autre vie, le Père participe à l'opération, d'où la nécessité (?) de cette rigoureuse ponctualité. Cependant, il faut ajouter que les antoinistes français effectuent aussi des « opérations particulières », de sorte que les temples sont ouverts, du matin au soir, aux personnes souffrantes. Il y a toujours un Frère ou une Sœur (car tel est le nom des ministres antoinistes) qui se tient à la disposition des malades pour chasser le mal, sur l'heure, en invoquant le Père.
        Les chapelles antoinistes sont très simples. Ce sont généralement des salles aux murs nus avec une chaire à deux étages et des bancs pour les assistants. Sur les murs figurent les « Dix Principes » de l'Antoinisme. Pénétrons dans l'une de ces chapelles à l'heure du service. Le ministre du temple, en soutanelle noire boutonnée jusqu'au menton, monte à la chaire supérieure cependant que le desservant occupe la chaire inférieure. L'officiant lève les bras vers le ciel et toute l'assistance médite pendant quelques minutes. Puis le desservant lit les « Dix Principes » dont voici le premier :
              Si vous m'aimez
              Vous ne l'enseignerez à personne
              Puisque vous savez que je ne réside
              Qu'au sein de l'homme
              Vous ne pouvez témoigner qu'il existe
              Une suprême bonté
              Alors que du prochain vous m'isolez.
        Les autres principes sont aussi abscons mais cela est sans importance car les fidèles y trouvent la paix de l'âme et la guérison de leurs maux. C'est parce que le Père récitait ces dix principes qu'il obtenait des cures merveilleuses, et c'est parce que ses successeurs ont conservé cette tradition que les malades accourent encore vers eux de toute l'ardeur de leur foi.
        Enfin, la cérémonie, qui n'a duré qu'une demi-heure, se termine par ces paroles rituelles : « Mes frères, au nom du Père, merci. » Et le temple se vide.
        En principe, les « opérations » individuelles, telles qu'elles sont pratiquées à Paris, se font sans témoin. Cependant, Pierre Geyraud a assisté à l'une d'elles, avec la permission du Frère guérisseur et du malade.
        « J'ai trouvé, écrit-il dans son ouvrage : Les Petites Eglises de Paris, un malade accommodant. C'est un commerçant du quartier. Nous sommes tous trois debout, dans la petite salle, tournés vers le portrait du Père : « Où avez-vous mal ? » demande le Frère. « Au foie. Je souffre de lourdeurs et même parfois j'éprouve de véritables douleurs. Ainsi, en ce moment... » – « Depuis longtemps ? » – « Depuis l'âge de quatorze ou quinze ans. » – « Ah ! je vois : c'est un fluide mauvais. » Je questionne : « Un fluide mauvais ? Le péché, n'est-ce pas ? » – « C'est cela », me répond le Frère. Je regarde le commerçant en état de péché. Il a l'air perplexe, et paraît interroger ses souvenirs. Mais le Frère a déjà levé les mains vers le portrait du Père. Ses yeux se révulsent ; on n'en voit que le blanc, sous les paupières tremblotantes. Les lèvres, de temps à autre, sont agitées par la prière silencieuse. « Je vois que le mal s'en va lentement ; vous vous sentez déjà mieux, n'est-ce pas ? » demande le Frère, les yeux toujours révulsés, et les mains élevées. » — « Heu... oui ; ça va mieux. » La prière continue ; les mains expulsent obstinément le mal. « C'est fini : je vois que vous êtes guéri. » Les prunelles reprennent leur place ; les mains s'abaissent. « C'est merveilleux », dit le commerçant abasourdi, en portant la main à son foie. « Ah ! ça, par exemple ! Zut, alors ! » Il cherche son porte-monnaie dans sa poche. « Oh non ! » dit vivement le Frère ; et il lui montre une pancarte interdisant toute rémunération. Le commerçant est tout titubant de surprise et de trac. Il prend son chapeau, dit au revoir au Frère, me lance un : « Merci bien, monsieur ! » comme si j'étais le Père guérisseur, et dit, en refermant la porte sur lui : « Ah ! zut, alors ! » Je reste seul avec le Frère et je demande : « Qu'avez-vous vu tout à l'heure ? Vous disiez : je vois que le mal s'en va... » — « On ne voit pas avec les yeux... C'est avec d'autres sens. » — « Mais, avec ces autres sens, qu'est-ce que vous avez vu ? » – « Une masse noire, la masse fluide du péché. » — « Et pourquoi faisiez-vous ce geste avec la main ?... Vous frictionniez le foie du malade ? » – « Non, je poussais la masse au loin. » – « Et quand elle est partie, que reste-t-il ? » – « Du blanc. » – « Votre prière, en quoi consiste-telle ? » – « Il n'y a pas de prière fixée d'avance. Nous prions selon l'inspiration du jour. Par exemple, tout à l'heure, je disais : Père, guéris cet homme de son mal... Père, guéris-le de son mal. » – « Vous recevez beaucoup de malades, comme cela ? » – « Pour ma part, il m'en est passé plus de deux cent mille entre les mains. » – « Beaucoup de guérisons ? » – « Des dizaines et des dizaines de milliers. La puissance du Père est merveilleuse. »

        La chapitre se termine sur cette considération psychanalytique :
        Il faut cependant noter que les fondateurs de ces « religions » guérisseuses, qu'il s'agisse de Mrs. Eddy, du Père Antoine, de Georges Roux et des autres « messies » de ce genre, sont, autant que les fondateurs des religions orthodoxes, animés d'une conviction profonde qu'ils transmettent bientôt à leurs adeptes lesquels deviennent à leur tour d'ardents prosélytes. Ils croient en leur propre mission ce qui les conduit à persévérer dans leur action malgré les sarcasmes, les déboires, les ennuis de toutes sortes qui les assaillent continuellement au cours de leur « sacerdoce ». Quant à la solidité et à la vraisemblance du message qu'ils répandent, cela n'importe guère. Il se trouve toujours, en effet, un certain nombre de personnes pour qui telle ou telle doctrine convient, quelle que soit sa consistance, tant est profond et multiforme, chez l'homme, le besoin de croire au merveilleux, de chercher un appui, un refuge au-delà de lui-même, en dehors de sa propre volonté. En outre, pour les adeptes, le chef de l’une ou l'autre de ces sectes guérisseuses est le « maître », le « grand homme » tel que le définissait Freud, c'est-à-dire, en fait, celui qui incarne le « père » auquel chacun de nous, enfant, rêva de s'identifier. Le suivre et répandre son enseignement, c'est donc, dans une certaine mesure, réaliser un rêve de jeunesse.


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  • Pierre Scize - Au pays des guérisseurs (Marianne, 25 juillet et 15 août 1934)Pierre Scize - Au pays des guérisseurs (Marianne, 25 juillet et 15 août 1934)Concernant l'Antoinisme :
        Quelles rigueurs exercer contre ce doux petit vieillard, pratiquant du culte antoiniste, qui m'a demandé avec de vraies larmes dans les yeux de ne point citer son nom, et qui opère, dans un faubourg où on le tient pour un saint, des cures extraordinaires ?
        L'Antoinisme, comme la Christian-Science, sur quoi un de mes lecteurs lyonnais m'envoie de curieux détails, échappe trop à une telle enquête, en ce sens que la guérison des maladies n'est chez lui qu'une infime partie de la doctrine. Il faudra bien un jour mener cette enquête des petites religions, si prometteuses, si pleines d'humanité. Mais je peux indiquer, en passant, que les desservants de ces cultes mineurs (en France) pratiquent avec un désintéressement rare « leur mission ».

    Concernant l'Institut des forces psychosiques :
        A Sin-le-Noble, près de Douai, il y a un « Institut des forces psychologiques », dont le directeur, Henri Lormier, est un élève et le continuateur du célèbre guérisseur d'Avignonnet, Jean Béziat, mort depuis quelques années.
        Il accomplit, par simple suggestion, des cures qui lui amènent des malades de tout le Nord. Lui aussi se défend de faire des miracles. Il ne promet ni la guérison du cancer, ni celle de la tuberculose. Mais, chaque fois que le mental peut influer sur le physique, sa thérapeutique fait merveille. Personne, que je sache, ne s'est avilsé de l'inquiéter. Le ferait-on qu'il y aurait, au pays des « ch'ti mi » de véritables soulèvements populaires.


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