• Père Dor (1862-1947)

    Père Dor, neveu

    Pierre Dor avec sa première épouse, Elisabeth Marie BOX (née le 16 mars 1865 à Liège
    et décédée le 23 juin 1896 rue du Bois-de-Mont à Jemeppe-sur-Meuse à l'âge de 31 ans). 

    Père Dor, neveu

    avec La Mère, dit l'intitulé de la carte, c'est-à-dire Josèphe (Joséphine) MONET
    (né le 6 janvier 1875 à Flémalle Grande et décède avant 1947), il s'agit de la sœur de frère Léopold Monet.

        Pierre Joseph DOR, fils de Pierre Joseph Napoléon DOR et de Marie Josèphe ANTOINE, naît le 15 mai 1862 à Mons-lez-Liège comme son oncle et décède le 5 mars 1947 à Uccle (commune de Bruxelles).

    ils auront ensemble deux fils :
    - Louis Léon, né rue des Tombales 1 au café à côté du temple antoiniste le 7 octobre 1897. Sans descendance connue, décédé à Uccle après 1958, et
    - Pierre Joseph Napoléon, né à Jemeppe sur Meuse le 25/3/1901. Employé, lui-même a eu un fils unique : Pierre Jean Louis, né à Etterbeek en 1926. En 1958, il habite à Ixelles, Avenue de la Forêt. Il a été Docteur en Médecine, chirurgien et cardiologue à l'Institut Bordet et professeur à l'ULB. Il meurt à Uccle en 2017 (quartier Coghen).

    [source geneanet et personnelle de dryedani].

     

        Dans l'Almanach de Bruxelles (1956), il est mentionné habitant alors à Uccle, comme homme de lettres. Ses écrits seraient en grande partie plagiés non seulement sur l'Enseignement de son oncle, le Père, mais aussi d'autres oeuvres théosophes et spiritualistes.
    Des plaintes sont déposées contre lui. Selon la presse, Dor fait payer ses consultations, contrairement à Antoine. Accusé d'attouchements, il se défend en affirmant que de nombreuses femmes étaient amoureuses de lui et l'avaient faussement accusé d'attentat à la pudeur parce qu'il avait refusé leurs avances. Il lui est aussi reproché d'avoir capté l'héritage. Le parquet de Charleroi diligente aussi une enquête sur la mort d'une jeune fille imputée à la doctrine doriste. Après sa condamnation, Dor déménage à Uccle et son mouvement disparaît peu après sa mort.

  • Ène munute di rèflècsion, come Pêre d'Or.

    Son nom serait à l'origine d'un proverbe en wallon de Charleroi :

        Ène munute di rèflècsion, come Pêre d'Or.

    Il avait l'habitude quand on allait le consulter, avant de répondre, de demander une minute de réflexion.

     

    source : Spots èt èsprèssions do payis d' Chârlèryè (par Pierre Faulx, proverbe n°3022)


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  • Visite de Mons-Crotteux (Gazette de Charleroi, 17 juillet 1914)(Belgicapress)

    ROUX

    Deux excursions. Pour le 15 août, s'organisent deux excursions pleines d'attraits.
        « Les Amis de la Maison du Peuple », conduits par leur président, M. Nicolas Souplit, se rendront en breack à Landelies et Aulnes. Départ à 6 heures du matin. Tenue, obligatoire, sarreau bleu et casquette de soie.
        « Les adeptes de l'Ecole Morale », pilotés par le Père Dor, prendront pour but Mons-Crotteux (Liége) où un train spécial les conduira.
        Le soir, à leur retour, les uns et les autres pourront continuer à se divertir, les fêtes communales leur réservant des attractions de choix.

    Gazette de Charleroi, 17 juillet 1914 (source : Belgicapress)


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  • Nécrologie Martin-Joseph Gaye (Le Messager, 1er mai 1905)

    Nécrologie

        Au moment de mettre sous presse, on nous annonce de Jemeppe-sur-Meuse, la mort d'un des anciens et fidèles abonnés du Messager, M. Martin-Joseph Gaye, veuf de Marie-Catherine Dor, décédé le 27 avril après une courte maladie dans la 72e année de son âge. L'enterrement spirite aura lieu dimanche 30 courant, à 3 heures, au cimetière de Jemeppe par les soins de la Société Les Vignerons du Seigneur de Jemeppe.
        Réunion à la maison mortuaire, rue du Pont, 14, à 2 3/4 heures.

    Le Messager, 1er mai 1905

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    Nécrologie Martin-Joseph Gaye (Le Messager, 1er mai er 15 juin 1905)

    Nécrologie

        Le dimanche 30 avril ont eu lieu à Jemeppe-sur-Meuse (près Liége) les funérailles spirites de M. Martin- Joseph Gaye, employé retraité de la Société Cockerill, rentré dans le monde spirituel à l'âge de 72 ans.
        Une foule nombreuse formait un cortège imposant qui témoignait combien le défunt jouissait de la sympathie de ses concitoyens. Dans l'assistance se trouvaient beaucoup de spirites venus de loin pour rendre à leur frère disparu le dernier hommage terrestre. Selon l'usage, les membres de la famille suivaient le char funèbre qui était précédé d'une musique et du drapeau vert de la Société spirite Antoine.
        Sur la tombe ainsi qu'à la levée du corps les prières et instructions spirites ont été lues au milieu du recueillement général. Nous envoyons nos meilleures pensées à l'esprit de ce vaillant défenseur de notre cause et nos sincères condoléances à sa nombreuse famille.

    Le Messager, 15 juin 1905


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  • Nécrologie Catherine Dor (Le Messager, 15 janvier 1901)

    Nécrologie

        Notre frère, M. Martin Gaye, de Jemeppe-sur-Meuse, vient d'être éprouvé par la mort corporelle de son épouse aimée, née M. Catherine Dor, décédée à l'âge de 68 ans.
        Ses funérailles civiles ont eu lieu le 10 décembre, à 3 heures, au milieu d'une affluence considérable. A la levée du corps la prière d'usage a été dite. L'assistance l'a écoutée avec un pieux recueillement. Précédé d'une excellente musique et du drapeau de la Société Spirite de Jemeppe, un long cortège s'est formé. Au cimetière, devant la tombe ouverte, Mlle D. a prononcé un beau discours empreint des meilleures pensées spirites à l'adresse de la défunte qui fut une croyante sincère, une tendre et dévouée épouse, une mère soucieuse de ses devoirs et qui sut toujours donner l'exemple de la sainte résignation dans les épreuves terrestres.
        Mme A. a prononcé aussi l'adieu terrestre à la défunte en disant les prières spirites sur la tombe, écoutées religieusement par la foule des assistants qui l'entouraient.

    Le Messager, 15 janvier 1901


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  • Bêtise humaine (L'Ami de l'Ordre, 3 mai 1916)(belgicapress.be)

    A Charleroi
    (De notre correspondant)

        BETISE HUMAINE. – Imitant le fameux Père Antoine, de Jemeppe-sur-Meuse, le non moins fameux Père Dor vint s'installer à Roux, il y a 6 ans. Il y fonda une nouvelle doctrine et une école morale et donna à ses visiteurs des conseils gratuits, mais en même temps, il leur vendait des brochures abracadabrantes à très haut prix. Le parquet alla même lui rendre visite plusieurs fois. Survint la guerre, qui porta au Père Dor un coup décisif. Dans les premiers jours de 1915, le Père Dor annonça la fin de la guerre pour le 1er mai 1915, d'une façon si absolue qu'il voulait, disait-il, qu'on ne l'appelât plus par son nom si sa prophétie ne se réalisait pas. Hélas sa prophétie ne se réalisa pas : les affaires périclitèrent et actuellement le Père Dor, met en vente les bâtiments de son école morale et va habiter à Uccle, dans une coquette villa.

    L'Ami de l'Ordre, 3 mai 1916 (source : belgicapress.be)


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  • Avis aux disciples de Pierre d'or et Cie (Le Journal de Charleroi, 22 janvier 1911)(Belgicapress)

    Avis aux disciples
               de Pierre d'or et Cie

        La conférence humoristique que nous donnera aujourd'hui à 3 heures, dans la salle de l'Hôtel de l'Espérance, en face de la station, M. le docteur Crouzé, oculiste à Bruxelles, comporte pour les habitants de notre commune, fief des « Antoine le guérisseur », « Pierre d'or » et « Papa » de tout acabit, un intérêt tout particulier.
        Le sympathique conférencier a choisi comme sujet « La Médecine et le Public » : erreurs, préjugés et drôleries.
        Il est à supposer que plus d'un auditeur se sentira piqué par les exemples que ne manquera de prendre l'érudit causeur et qui sait... si au nombre des disciples présents, il ne s'en trouvera pas un pour défendre les rebouteux ! Admettons qu'une conférence populaire n'est pas contradictoire.
        Espérons dans tous les cas qu'un public nombreux sera présent, marquant ainsi sa sympathie pour ceux qui luttent pour affranchir les cerveaux des erreurs et des préjugés.
        La causerie sera précédée d'un charmant concert donné par un septuor à cordes, avec le concours de la gracieuse artiste Mlle Léona Wéry.

    Le Journal de Charleroi, 22 janvier 1911 (source : Belgicapress)


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  •     Après son procès et son installation à Uccle, le Père Dor cherche une nouvelle activité. Alors qu'il se dit homme de lettres dans le recensement de l'Almanach de Bruxelles en 1923 et 1930, on retrouve la publication de petites annonces dans divers journaux :

    Petite annonce de Pierre Dor (La Gazette de Charleroi,, 15 et 18 août 1929)(Belgicapress)

    La Gazette de Charleroi, 15 et 18 août 1929 (source : Belgicapress)

    Petite Annonce de Pierre Dor (La Dernière Heure, 17 & 18 août 1929)(Belgicapress)

    La Dernière Heure, 17 et 18 août 1929 (source : Belgicapress)


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  • Un Pèlerinage doriste (Gazette de Charleroi, 4 novembre 1913)(Belgicapress)

        Un Pèlerinage.  – Dimanche, par train spécial, quatre à cinq cents adeptes de l'« Ecole de morale », conduite par le Père Dor, se sont rendus à Jemeppe-sur-Meuse, capitale de l'Antoinisme.
        Grand succès de curiosité, pour cet imposant cortège matinal.

    Gazette de Charleroi, 4 novembre 1913 (source : Belgicapress)


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  • Dorisme (Journal de Charleroi, 11 juillet 1914)(Belgicapress)Dorisme.
        Ce n'est pas une nouvelle école de peinture. C'est un nouveau culte. C'est un nouvel aspect de l'Antoinisme.
        Antoine, qui fut le Père, étant mort, sa veuve prit sa place, et les fidèles communient à présent au nom de la Mère. Mais à Roux, la religion nouvelle a comme grand-prêtre et thaumaturge un autre parent d'Antoine, apôtre abondamment chevelu et barbu, qui répond au nom de Dor – en wallon, on prononce Dour. Et ainsi, dans cette commune, après le culte du Père et après celui de la Mère, on pratique de culte du Neveu.
        Or, le Neveu fait une concurrence assez marquée à la Mère. Ses préceptes ne diffèrent guère des siens, il est vrai ; ils ont été puisés à la parole inspirée du Père et ils sont : confiance, foi entière, pureté, sagesse, modestie et simplicité. Mais la Mère n'en impose pas ; c'est une bonne vieille femme sans aucune éloquence et sans prestige, qui se borne à un rôle de figuration. Elle paraît, s'assied et ne dit mot. L'ombre auguste du Père plane sur elle : cela suffit.
        Dor, lui, se dépense. Il a le verbe dominateur et abondant, la voix puissante, la geste onctueux, et à travers l'épaisse broussaille de poils qui lui mange le visage jusqu'aux yeux, son regard éclatant impressionne et subjugue. Dor fait des miracles de thérapeutique. Autour de l'église qu'il a bâtie à Roux, les cabarets accueillants poussent comme des champignons. Les fidèles y accourent des quatre coins de la province. Enfin, plus d'une mère de famille abandonna mari et enfants pour rejoindre le prophète – qui recommande avec éloquence une marque connue de beurre végétal.

    Journal de Charleroi, 11 juillet 1914 (source : Belgicapress)


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  • In Henegauwen - Dor, de... mirakelman (Vooruit, 1 Juni 1916)(Belgicapress)IN HENEGOUWEN
    Dor, de... mirakelman

        De vermaarde Jemeppesche kwakzalver Antoine, die zooveel van zich heeft doen spreken dat de verstandige mensch er stom op staat, heeft nu nog een even veel geruchtmakenden opvolger bekomen!
        Men gelooft te droomen als men het volgende leest, dat hieromtrent uit Charleroi wordt gemeld :

        Men hoort hier nu over niets anders meer spreken van over den wonderman Dor, vader Dor, den gewezen werkman Pierre Dor, die beveert een bloedverwant te zijn van den even vermaalden vader Antoine, dien hij moet opvolgen en ter eere van den welke hij den bond van 't «dorisme» heeft gesticht, die de voortzetting moet zijn van het werk van het «antoinisme», dat gesticht werd door den apostel van Jemeppe.
        Vader Dor is nu door het burgerlijk gerecht vervolgd wegens onwettige uitvoering van het ambt van geneesheer en hij is reeds een paar maal voor den onderzoeksrechter moeten verschijnen, wat telkens aanleiding gaf tot groote samenscholingen, die verboden zijn.
        Als vader Dor gister weer het Justice paleis van Charleroi wilde verlaten, was hij andermaal ondervraagd was geweest, stond er eene overgroote massa van voll voor het gebouw dat hem eene luidruchtige huldemanifestatie bracht, die tevens geweldige protestatie was tegen het gerecht dat hem ter verantwoording dierf op roepen.
        Vooral de talrijk aanwezige vrouwen gaven blijken van groote opgewondenheden terwijl zij allerhande kreten lieten hooren legden zij kransen en bloemen voor voeten van den vervolgden martelaar, die in zalige vervoering de oogen ten hem gericht hield en scheen te bidden.
        Het kwam ons onbegrijpelijk voor dat zoo een man een zoo grooten invloed kan uit oefenen op het gemoed onzer verstandiger bevolking, op het gemoed der nog verstandiger burgerij, die een zonderling […] moeten hebben voor de spirieten en de andere kwakzalvers die hen zulke blauwe bloemekens op de mouw weten te speten.
        Hoe groot de invloed van zoo een vader Dor moet zijn, dat wordt bewezen door het volgend, eergister vastgesteld en ook met alleenstaand feit:
        Dezer dagen heeft de policie van Gosselies naar Marchienne eene vrouw opgebracht die te midden van den nacht op de Grand’ Place aangetroffen was op den oogenblik dat zij geknield zat te huilen voor een groot portret van vader Dor, van wien zij do genezing hater dochter wilde bekomen.
        Als men zulke zwendelaars kortenben achter de grendels zette zouden […].

    Vooruit, 1 Juni 1916 (source : Belgicapress)

     

    Traduction :

    DANS LE HAINAUT
    Dor, l’homme… miracle

        Le célèbre charlatan de Jemeppe Antoine, qui s'est fait un tel nom que les gens sensés en sont abasourdis, a maintenant un successeur tout aussi notoire !
        On croit rêver quand on lit ce qui suit, rapporté à ce sujet de Charleroi :

        On n'y entend parler que du thaumaturge Dor, du père Dor, de l'ancien ouvrier Pierre Dor, qui prétend être un parent de sang du père Antoine, tout aussi diligent, auquel il doit succéder et en l'honneur duquel il a fondé l'union du "Dorisme", qui doit être la continuation de l'œuvre de l'"Antoinisme", fondée par l'apôtre de Jemeppe.
        Le père Dor est maintenant poursuivi par les tribunaux civils pour exercice illégal de la fonction de médecin et il a déjà dû comparaître plusieurs fois devant le juge d'instruction, ce qui a toujours donné lieu à de grands rassemblements interdits.
        Lorsque le père Dor a voulu quitter à nouveau le palais de justice de Charleroi hier, après un nouvel interrogatoire, une foule nombreuse s'est placée devant le bâtiment et lui a rendu un bruyant hommage, qui était aussi une grande protestation contre le tribunal qui s'apprêtait à lui demander des comptes.
        En particulier, les nombreuses femmes présentes ont montré une grande excitation en poussant toutes sortes de cris et en déposant des couronnes et des fleurs aux pieds du martyr persécuté, qui, dans un ravissement béat, gardait les yeux fixés sur lui et semblait prier.
        Il nous paraissait incompréhensible qu'un tel homme puisse exercer une si grande influence sur l'esprit de nos citoyens les plus sages, qui doivent avoir une étrange [...] pour les esprits et autres charlatans qui savent les maquiller avec de telles enseignes à fleurs bleues.
        Combien grande doit être l'influence d'un tel père Dor, est prouvée par ce qui suit, établi avant-hier et aussi par un fait isolé :
        L'autre jour, la police de Gosselies a amené à Marchienne une femme qui avait été trouvée agenouillée devant un grand portrait du père Dor, dont elle cherchait à guérir sa fille, sur la Grand Place, en pleine nuit.
        Si de tels escrocs devaient être mis derrière les barreaux pour une courte période, [...].

    Vooruit, 1er juin 1916 (source : Belgicapress)


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  • Epoux Stassart, adeptes du Père Dor (La Région de Charleroi, 13 janvier 1917)(Belgicapress)    On fait la connaissance des époux Stassart d'abord par la parution de cet article :

        Oubli. – Une dame Stassart Valentine, demeurant rue Carpet, en ville, a oublié avant hier dans le tram allant de Charleroi (Ville Haute) à Gilly (Quatre Bras), une sacoche en cheviotte noire, contenant un porte-monnaie, avec une somme minime, sa clef, sa carte d'identité et une brochure..... du Père Dor !
    La Région de Charleroi, 13 janvier 1917 (source : Belgicapress)

        Ayant éveillé certainement l'attention de journalistes malintentionnés, on lit quelques jours plus tard cet article :

    Epoux Stassart, adeptes du Père Dor (La Région de Charleroi, 25 janvier 1917)(Belgicapress)    Une noce Doriste. – Avant hier, vers 11 h. du matin, la police du Nord fut requise rue Carpet, où la rentrée d'un mariage Doriste avait attiré une foule de curieux composée de plus de 200 personnes qui empêchaient la circulation.
        L'agent envoyé sur les lieux dut intervenir énergiquement à plusieurs reprises et même employer la force, les badauds ne voulant pas circuler.
        Vers 11 h. 1/2, un groupe de Doristes apporta des fleurs aux jeunes époux.
        Une contre manifestation s'organisa aussitôt, voulant empêcher les arrivants de remettre leurs gerbes et bouquets, qui furent arrachés et piétinés au milieu de huées et de cris de toutes sortes.
        La police de revenir une seconde fois sur les lieux. Ce n'est que vers 4 heures que le tumulte pris fin.
        Bref, un succès à rebours pour les jeunes époux, disciples du père Dor.
    La Région de Charleroi, 25 janvier 1917 (source : Belgicapress)


        Cet article sera l'objet d'un droit de réponse que voici :

    Epoux Stassart, adeptes du Père Dor (La Région de Charleroi, 1917)(Belgicapress)

    Une Noce Doriste

        Nous recevons le droit de réponse suivant que nous insérons sans commentaires, laissant nos lecteurs libres de leur jugement et réflexions :

                               Monsieur le Directeur,
        Je lis dans le n° 566 de votre journal, un article intitulé : Une noce Doriste.
        Il y est écrit qu'à la rentrée de notre mariage, la police fut requise et dut intervenir deux fois pour disperser deux cents badauds, qui arrachèrent des mains des manifestants les gerbes de fleurs et les piétinèrent, etc. Est-il permis de mentir de cette façon ?
        Car notre mariage s'est fait sans aucune cérémonie et dans le calme absolu.
        Est-ce dans le but de faire rire les badauds que vous faites l'enfant, ou est-ce pour nous détourner du Père, c.-à-d. de Celui avec lequel nous sommes actuellement au nombre de 15.000, pour crier à qui veut l'entendre qu'il est le plus honnête, le plus juste, le plus sincère, le plus désintéressé de tous les hommes qui aient paru sur la terre ?
        Si c'est pour ceci, détrompez-vous ; car, à nos yeux, quoi qu'on dise du Père Dor, Il grandit chaque jour. Notez que nous ne faisons pas ces louanges du Père par fanatisme, ni par parti-pris, mais bien avec raison, avec justice.
        Vous insérerez, je vous prie, ce droit de réponse dans le plus bref délai.
        En attendant, veuillez agréer, Monsieur le Directeur, mes salutations distinguées.
                                       EDOUARD ROMAIN STASSART.
                                       Rue Carpet, 8, Charleroi-Nord.
    La Région de Charleroi, 15 février 1917 (source : Belgicapress)


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  • Alceste - Quotidiennes sur Pierre Dor (La Gazette de Charleroi, 2 janvier 1911)(Belgicapress)Quotidiennes

        La Palestine, vers le temps où naquit Jésus, était la terre classique des messies, des prophètes et des thaumaturges.
        Est-ce que la Belgique va devenir la Palestine du XXe siècle ! Notre petit pays, que nous plaçons nous-mêmes, avec un légitime orgueil, au tout premier rangs des nations civilisées, va-t-elle ajouter à ses autres glorieux records celui du plus grand nombre d'inspirés du Seigneur
        Si le bon Dieu de Ressaix n'a eu qu'une carrière évangélique trop courte du gré de ses disciples, Antoine-le-Guérisseur obtient un succès tel qu'il commence à porter ombrage aux membres du clergé catholique.
        Il en est d'autres, beaucoup d'autres, injustement ignorés, dont la renommée ne dépasse point la frontière des régions où ils exercent. Certaines communes en possèdent plusieurs, ce qui autorise à conjecturer que le métier est assez lucratif.
        Un lecteur me communique le catéchisme que vient de publier un de ces rebouteux favorisés de lumières surnaturelles : « Le catéchisme de la restauration de l'âme, par Pierre Dor, surnommé le docteur sans médicament ». Ce Pierre Dor opère à Roux. Ecoutez « l'avant-propos » qu'il adresse à ses malades : « Beaucoup se plaignent du manque d'appétit et continuent quand même à manger. J'ai pour devoir le leur faire savoir qu'ils manquent par là de confiance à mes opérations. Je l'ai encore dit : un estomac embarrassé rend l'âme souffrante et l'empêche d'assimiler ses fluides aux miens... Je ne défends pas de manger, non mais pour ceci, il faut attendre que le cœur le demande. Donc, mes chers malades, ne forcez jamais votre estomac... » Le médecin de Molière confondait le foie et le cœur : le docteur sans médicament, lui, fait du cœur et de l'estomac un seul viscère : la science fluidique dédaigne la physiologie et l'anatomie.
        Ça n'empêche Pierre Dor d'avoir une riche clientèle. Ce qui est à l'honneur de notre humanité pensante, comme eut dit Pascal.                                            ALCESTE.

    La Gazette de Charleroi, 2 janvier 1911 (source : Belgicapress)


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  • Un nouveau prophète au Pays Noir (Le Soir, 8 janvier 1913)(Belgicapress)Un nouveau Prophète
    au Pays Noir
    Le Père Dor stimulateur des vertus. – L'Ecole morale. – Une opération générale du thaumaturge.
    (De notre envoyé spécial.)

        Antoine le Guérisseur est mort ! Vive Antoine ! Vive du moins un autre Antoine, une nouvelle incarnation du thaumaturge, du révélateur de religion nouvelle qui prétend guérir les maux physiques comme les peines morales par la seule vertu de sa parole. Chose curieuse, ce personnage opère surtout au pays noir, dans ces grandes régions industrielles de la Wallonie qui offrent une si puissante image de notre civilisation moderne. Il correspond au rebouteux, au berger magicien de la campagne, qui est légion...
        Toujours, en Wallonie, se sont développées, en marge des religions ancestrales, en marge du catholicisme et du protestantisme, de curieuses croyances qui se traduisent par de manifestations impressionnantes ou... baroques. Ce n'est ni le lieu, ni le moment de parler ici des associations spirites du pays de Charleroi, des darbistes du Borinage, ou de cette explosion de foi farouche qui précipite aux calvaires du pays de Mons, dans la nuit du Réveillon, des centaines de pauvres gens à des cérémonies au cours desquelles on « étrenne » le bon Dieu et d'où les prêtres sont rigouresement bannis. (La même coutume se retrouve sur le littoral). Mais l'étude qu'a faite magistralement Georges Eekhoud, pour la Flandre du passé, dans ses « Libertins d'Anvers », que l'on a faite aussi pour les stévenistes de l'ouest brabançon, mériterait d'être tentée à propos de certaines croyances et superstitions du pays noir.
        Qu'il nous suffise aujourd'hui de rappeler brièvement le règne éphémère de Jules Buisseret, dit Baguette, le bon Dieu de Ressaix, dont la divinité se compromit lamentablement dans les aventures amoureuses et les ennuis de la correctionnelle ; Antoine le Guérisseur, le Père Antoine, de Jemeppe-sur-Meuse, créateur d'une religion, d'un culte organisés, et dont la presse a parlé dans la monde entier. L'antoinisme n'est pas mort avec son créateur : l'influence de celui-ci persiste, sa réelle autorité morale, son incontestable puissance de suggestion agissent encore. Mais son enseignement que professent encore la mère Antoine et quelques lieutenants fidèles est fortement concurrencé par celui du père Dor, qui opère à Roux, et dont Piccolo parlait philosophiquement dans sa dernière « Semaine ».

    * * *

        Nous avons voulu voir, de nos propres yeux, voir, l'opération générale suivie d'instruction à laquelle se livre chaque dimanche ce nouveau thaumaturge du pays de Charleroi.
        Auparavant, nous avons lu avec beaucoup d'intérêt son journal mensuel : « Le Messager de l'Amour-Dieu », « directeur de la fraternité universelle », dont neuf numéros ont paru déjà.
        A parier franc, il y a Ià-dedans un peu beaucoup de charabia, des expressions fort divertissantes qu'expliquent une pensée confuse et une méconnaissance remarquable de la langue française. Mais avec un peu de bonne volonté, on parvient à formuler la doctrine – pour autant qu'on puisse employer ce grand mot – du père Dor.
        C'est un mélange de tolstoïsme et de spiritisme, la croyance à la loi d'amour total, la charité chrétienne poussée au suprême degré et aux fluides.
        Les idées actuelles du nouveau prophète de Roux ont mis du temps à se préciser. Au début, dans les premiers numéros du « Messager », il est souvent question de l'enseignement du Christ, on cite des passages de l’Evangile. Aujourd'hui, il n'est plus question de cela. On trouve même dans les instructions du Père des opinions qui témoignent de l'influence qu'a exercée la propagande rationaliste au pays de Charleroi. Le Père Dor ne croit pas à un Dieu créateur. Dieu, pour lui, c'est un mot, une entité morale : « J'ai déjà dit et je répète que Dieu n'est qu'un mot. Je ne veux pas par là détruire la loi qui conduit à Lui. Mais au lieu de dire Dieu je dis : Amour, Charité, Désintéressement ».
        Et ailleurs : « De tout ceci tâchez de vous convaincre que Dieu n'est qu'un mot et non le créateur de toutes choses. Ce problème est à résoudre, mais la solution ne se trouve que dans son amélioration. S'il ne dépendait que de Dieu pour notre bonheur, nous aurions le droit de le traiter de cruel, de laisser ainsi ses rejetons dans la souffrance malgré le grand désir qu'ils ont de ne plus souffrir.Un nouveau prophète au Pays Noir (Le Soir, 8 janvier 1913)(Belgicapress)
        « On ne comprend pas le pourquoi de cette vie, parce qu'on ignore qu'une seule chose est nécessaire pour être sauvé : l'Amour du Bien, sentiment de Justice et de Progrès de l'être pensant ».
        Le Père Dor croit aux « fluides », bons et mauvais. Il fait agir les bons pour guérir les maux et les peines morales. Dans son esprit, fluide est parfois synonyme « d'âme ». Et il croit non pas à l'immortalité, mais, comme les colinsiens, à l'éternité de l'âme. « J'ai déjà pu dire que l'homme existe depuis toujours et qu'il existera toujours. Quand je dis homme, comprenez-moi bien, je veux dire âme ou plutôt fluide-homme ».
        Cela c'est ce qu'on lit dans les instructions du Père Dor, reproduites dans le « Messager », et l'on avouera qu'il a a là-dedans une certains élévation de pensée.
        Mais il y a ce qu'on voit, ce que j'ai vu à Roux dimanche après-midi. Et cela est moins reluisant...
        (La fin à demain.)                                                      FRAM.

    Le Soir, 8 janvier 1913 (source : Belgicapress)

     

     

     

    et Journal de Charleroi, 9 janvier 1913 (Belgicapress)


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  • Un nouveau prophète au Pays Noir (Le Soir, 9 janvier 1913)(Belgicapress)Un nouveau Prophète
    au Pays Noir
    (De notre envoyé spécial.)
    Le Père Dor stimulateur des vertus. – L'Ecole morale. – Une opération générale du thaumaturge.
    (Suite et fin.)

        C'est à Roux, au seuil du pays noir... Du moins c'est là que le voyageur venant de Bruxelles, après avoir vu l'une des verreries de Courcelles, aperçut les premiers terrils de charbonnage. L'un d'eux, ou une haute « belle-fleur » semble plantée, est au sommet d'une colline qui commande tout le village. Celui-ci est noir et triste : de petites maisons enfumées, bordant des rues tortueuses composent l'agglomération où vivent un peu plus de 10,000 personnes...
        On connaît Roux comme le siège d'une des plus anciennes associations spirites de notre pays. C'est là aussi que se déroula l'un de plus douloureux épisodes de 1886.
        Le temple actuel au Père Dor, inauguré le 1er novembre dernier, se trouve rue du Calvaire à côté de la gendarmerie. C'est une vaste construction en briques neuves, de 30 mètres de long sur près de 20 de large, couverte d'un toit rose, au milieu duquel s'ouvre un large lanterneau et que domine une inscription en hautes lettres émaillé blanc : « L'Ecole morale ».
        A distance on croit que ces lettres annoncent une usine. Pas d'ouverture, ni porte, ni fenêtre, au flanc de ce bâtiment. Sans doute, dont se sert le Père Dor, de s'échapper. Mais ce souci a contrecarré les règles hygiéniques les plus élémentaires...
        Attenant au nouveau temple se trouve un café, le Café des Pèlerins du Père Dor où l'on se livre à un commerce fort important de boissons et de victuailles, de souvenirs et de cartes postales illustrées.
        Derrière le bâtiment se trouvent l'ancien temple, de dimensions assez restreintes, et la maison du Père.
        Toute la semaine, du dimanche au vendredi, les fidèles affluent vers l'école morale, vers le temple du « stimulateur des vertus », du « docteur sans médicament » : pauvres paysans de l'Entre-Sambre et Meuse et même du Nord de la France, vieux ouvriers du Centre et du pays de Charleroi rongés par la tuberculose, femmes de mineurs atteintes de maladies nerveuses. Tous viennent voir le Père dans l'espoir de trouver la guérison que n'ont pu leur donner les médecins.
        Le Père Dor a beau dire « qu'il est bien plus le médecin de l'âme que du corps ». Ah ouiche ! les bonnes femmes se soucient bien moins de leur paix morale que de leur dérangement d'estomac.
        D'ailleurs, le Père Dor dit lui-même dans son « Catéchisme de la Restauration de l'âme » :
        « Certains viennent se prosterner devant moi me demandant grâce pour que je guérisse soit leur femme, leur mari, leur enfant, leurs parents. Voyant leur foi, leur désir de voir revivre leur malade qui, d'après la science, n’avait plus qu’un instant ou quelques jours à vivre, je leur dis, après avoir opéré : « Allez, cela ira bien ». Seulement ce bien que je sens, on ne le comprend pas toujours, mais pour moi qui ne vise que le côté moral j'entrevois un bien. Par mon intervention, ce moribond qui n'avait plus que quelques jours ou quelques heures à vivre, par son grand désir de vouloir rester parmi les siens : mari, femme, enfant, etc. reprend vigueur, se relève, reprend des forces et se sent renaître à une vie nouvelle. Alors, tous sont dans la joie, on crie au miracle et le « Père Dor est proclamé Dieu ». On doit savoir qu'à tous ceux qui me consultent j'ai pour devoir de leur dire, s'ils veulent que mon fluide les guérisse, qu'ils ont un devoir à remplir. Ce devoir consiste à pardonner du fond du cœur, ne s'exalter pour rien que ce soit, et sur tout à n'accepter aucun conseil d'une personne qui serait hostile à l'Amour du bien. »
        Tous les jours, de 7 à 1 heure, sauf le samedi, le Père Dor reçoit les malades et les « opère ». Le dimanche, à 2h. 30, a lieu le grand office au début duquel le Père procède à une opération générale, fait agir le fluide, puis à une consultation, au cours de laquelle il répond à toutes les questions qu'on lui pose.
        Les malheureux malades qui viennent à lui, suggestionnés, ayant mis en lui leur dernier espoir, peuvent être impressionnés par les longs cheveux bouclés, les yeux baissés, l'air de profond recueillement du Père. Mais pour que la « foi guérisse », une fois de plus, de grâce qu'ils n'écoutent pas, les malheureux, qu'ils bouchent leurs oreilles ! Car rien n'est plus lamentable, plus baroque, plus incohérent que les discours et les réponses du stimulateur des vertus.

    * * *

        Une large salle blanchie à la chaux, éclairée par un lanterneau sous lequel on remarque l'armature de fer de la toiture, chauffé à l'excès par deux énormes calorifères. Sur les vastes murs nus quelques inscriptions soulignés de bleu, encadrés de chêne clair, dans ce goût-ci : « Le Père Dor donne à ses enfants du bon, du beau, du soulagement. » Il y a là, assises sur les bancs jaunes plus de 600 personnes. L'atmosphère est étouffante. Il monte de cette foule une odeur de corps malades et en sueur, de vêtements mouillés.
        A un bout de la salle, à trois mètres au-dessus du sol, une vaste caisse peinte en blanc et bordée de noir et que surplombe un abat-son, tient lieu de chaire. Le Père Dor y discourt, le torse cerné dans une veste boutonnée jusqu'au cou et qui rappelle celle du « général » Gustave Hervé. Ses longs cheveux bouclés encadrent un visage au teint de cire où l'on voit des yeux tantôt pleins de recueillement., tantôt pétillant de finesse et comme de malice.
        Au pied de la chaire, un pupitre où une jeune fille, qui disparaît sous un vaste chapeau, sténographie les propos du Père Dor.
        Après que celui-ci a terminé son opération générale, les fidèles lui posent des questions, le plus souvent saugrenues, sur les sujets les inattendus, les plus extraordinaires. Les réponses sont l'avenant. Le Père, qui connaît à peine le français, se recueille longuement après chaque question, baisse les yeux, se frotta la bouche avec un grand mouchoir à carreaux blancs et bleus, puis répond lentement, très lentement. Il a quelques clichés qu'il sort constamment : « Le mal est en nous. Il faut s'améliorer. L'amour total ». Dès qu'il sort de là, ses propos deviennent plutôt incohérents. Quand il a fini sa réponse, un lourd silence plane que trouble parfois le vagissement d'un enfant, triste, triste infiniment.
        Et puis, le silence se brise. Là-bas, au fond de la salle, à côté du calorifère, se lève un jeune homme à mine souffreteuse :
        – Père, quand on a des punaises, faut-il les détruire ?
        Le Père Dor répète, comme toujours, la question : « Ce fils me demande si quand on a des punaises il faut les détruire ? Ce n'est pas un mal chez certaines personnes. Il en est de même des escargots, des limaçons et autres bêtes de jardin... »
        Puis une paysanne – une tête à la Breughel comiquement chevauchée par un chapeau impossible – se lève à son tour et d'une voix mal assurée demande : « N'est-ce pas encore un doute que tenir chez soi des chats, puisque les chats mangent les souris ? »
        Réponse : « Si ! Il en est de même pour les chiens. Ces animaux dégagent trop de mauvais fluide. »
        Ici se place une question tout à fait émouvante. Une pauvre jeune femme, d'une voix tremblante, dit au Père Dor, comme si elle s'adressait à Jéhovah lui-même :
        « Récemment, par pitié, par bon cœur, j'ai recueilli chez moi un petit chat égaré. Ai-je mal fait ? »
        On croit rêver... Quand le « docteur sans médicament » répond, de vieilles femmes, dans l'assistance, secouent la tête de bas en haut, approbativement.
        Près de la chaire, prostrée sur sa chaise, est une pauvre femme en deuil. Quelle détresse ce corps ployé en deux, cette face ravagée traduisent-ils ?
        A un moment donné, un homme qui, visiblement, s'intéresse au spiritisme, pose une question au Père Dor touchant les « désincarnés. La réponse est confuse. « C'est une des choses qu'on ne peut comprendre, qu'il ne faut pas savoir », dit notamment le Père.
        Alors, près de moi une vieille femme se penche à l'oreille de sa voisine et j'entends qu'elle murmure : « C'est tout à fait comme I'curé. »
        Une femme de Chapelle-lez-Herlaimont raconte ensuite que sa sœur étant malade, elle lui a déconseillé d'appeler encore le médecin. La douleur aurait cessé alors. « C'est l'Amour qui a opéré », dit le Père Dor.Un nouveau prophète au Pays Noir (Le Soir, 9 janvier 1913)(Belgicapress)
        Puis une question drôlatique ; c'est la seule que nous voulons rapporter encore : « Pratiquant la loi morale dit un homme, je me demande si je puis encore exercer mon devoir d'électeur ? » Le Père Dor a compris « directeur » au lieu d'électeur (le fluide n'a pas agi sans doute) et il fait une réponse tout à fait à côté.
        Mais l'électeur insiste, veut savoir s'il doit voter. « Cela est contraire à la loi morale, la loi d'amour, dit enfin le Père Dor, parce que donner son suffrage à un candidat c'est désapprouver l'autre. »
        Voilà quelques moments de la consultation à laquelle j'ai assisté. La sortie s'opère lentement. Le Père Dor assiste avec, semble-t-il, un petit air, finaud. A la sortie, sa femme, derrière un grand comptoir, vend des brochures, des journaux, des photographies et le petit commerce, ma foi ! marche très bien.
        J'ai un moment d'entretien dans la rue avec quelques fidèles. Une bonne femme qui comme moi, s'en fut naguère à Jemeppe-sur Meuse, chez Antoine le Guérisseur, me dit combien c'est mieux chez le Père Dor : « vous comprenez, me dit-elle, le fluide est plus gros ici. Mais aujourd'hui cela n'a pas bien marché. Mauvaise réunion ! Nous, les médiums, nous avons senti combien c'était dur. »
        J'ai sollicité Ie grâce d'être reçu en tête à tête par le prophète. Cela n'est pas très facile à obtenir. Le dimanche il ne reçoit personne en particulier, à moins qu'il ne s'agisse d'un cas très urgent. J'insiste et finalement réussis à voir le Dieu face à face. Il veut bien m'appeler son cher fils. Je le laisse entendre que je ne demande qu'à être initié. Et j'apprends en quelques mots l'histoire du Père Dor, âgé de quelque quarante ans. Il est originaire de Mons-Crotteux, près de Liége, se dit le neveu d'Antoine le guérisseur, a exercé plusieurs métiers, dont celui de terrassiers, a séjourné trois fois en Russie où les guérisseurs de son genre pullulent, a bâti il y a quatre ans, à Roux, avec ses économies, le premier temple puis le vaste temple inauguré à la Toussaint. On vient le voir de partout. Il travaille même par correspondance. Non seulement me dit-il, je guéris les hommes, mais aussi les bêtes : cochons, vaches, chevaux. »
        Nos frères inférieurs, sans avoir la foi, sont touchés par le fluide.
        Dès à présent, il existe des succursales de l'Ecole morale de Roux à Gilly, a Chapelle-lez-Herlaimont, à Marchienne, à Souvret, à Lavaqueresse, dans l'Aine, à Bruxelles et jusqu'à Porto Felice, au Brésil !... Tous les dimanches, en gare de Roux, les trains déversent de nombreux pèlerins.
        Nous fûmes là-bas sans préventions, plutôt bien disposé par la lecture du « Messager de l'Amour-Dieu ». Nous voulions voir.
        Maintenant que nous avons vu nous déclarons en toute sincérité que ce nouvel avatar du mysticisme est une chose navrante, infiniment navrante.
                                                                                 FRAM.

    Le Soir, 9 janvier 1913 (source : Belgicapress)

     

     

    et Journal de Charleroi, 11 janvier 1913 (Belgicapress)

     


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  • A propos du dorisme (Gazette de Charleroi, 17 juillet 1914)(Belgicapress)A PROPOS DU
                    “DORISME„

        Il est curieux, a écrit Diderot, d'observer combien les sectateurs d'une religion sont clairvoyants, pour celle des autres.
        La Wallonie, la sceptique et légère Wallonie est devenue, – qui l'eût pensé, – le berceau de religions nouvelles. Depuis quelques années, elle a fourni plusieurs thaumaturges, dont deux sont parvenus à conquérir une célébrité universelle. L'un, le « Père Antoine », s'est « désincarné » il y a deux ans environ, et c'est sa femme, la « Mère Antoine », qui continue à diriger son Eglise. Celle-ci s'est répandue en Europe et jusqu'en Amérique. Elle a un temple à Paris. Elle en possède à Jemeppe-sur-Meuse, à Courcelles, à Ecaussinnes, etc. Elle en a inauguré un, dimanche, à Verviers, et l'on dit qu'il est presque somptueux. L'antoinisme n'a pas encore d'organisation ecclésiastique. Mais il est à supposer que celle-ci se créera peu à peu, par la logique des choses : les religions commencent généralement sans hiérarchie sacerdotale, et ce sont les anciens qui tiennent lieu de prêtres.
        De l'antoinisme est né le dorisme. Le « P. Dor », neveu de celui qu'il appelle courtoisement M. Antoine, ne professe pas la doctrine de celui-ci. Il en a fondé une qu'il enseigne à Roux et répand dans ses brochures. Le P. Antoine, c'est le saint Jean-Baptiste de la religion doriste. Au moins est-ce l'impression qu'on éprouve à lire les évangiles du P. Dor, lequel ne dit pas nettement qu'il est le Christ réincarné, mais qui le laisse entendre avec cette insinuante habileté qui n'appartient qu'aux mystiques.
        Sa doctrine est un peu confuse. En cela elle ne diffère point des autres, qui sont toujours un peu sibyllines et permettent d'y trouver plus tard tout ce qu'on veut. Tel Dieu qui a prescrit : « Tu ne tueras point » est qualifié par ailleurs de « Dieu des armées ». Ces obscurités, que les disciples et les commentateurs ont coutume d'aggraver encore sous prétexte de les expliquer, sont d'un précieux secours pour justifier tous les actes de la vie. Il s'y trouve un verset pour applaudir à ceci, et un autre pour approuver cela, qui en est exactement le contraire.
        Le P. Dor n'a qu'une culture plus que pauvre. Il n'a pas fait d'études et l'on s'en aperçoit. Ce n'est ni un savant, ni un philosophe. Au reste, les savants et les philosophes n'ont jamais fondé de religions. Tous les créateurs de sectes furent des ignorants et des simples : Mahomet n'était qu'un chamelier arabe, et il a parlé dans son Coran de Jésus de Nazareth, fils de charpentier, dans lequel il ne voulait voir qu'un saint prophète comme Abraham et Elie.
        C'est évidemment à cette simplicité et à cette ignorance qu'ils ont dû leur succès. Le peuple ne comprend pas les savants, qui sont précis et rationnels. Il lui faut une littérature naïve, imagée, avec des histoires qui satisfont son goût du mystère et son désir de connaître l'inconnu. Car il a besoin de certitudes en même temps que de surnaturel.
        Le P. Dor ajoute à sa « doctrine » les démonstrations sans lesquelles elle risquerait de ne recueillir aucun adepte : il accomplit des guérisons miraculeuses. Par la simple imposition des mains, il effectue des cures extraordinaires : « Ayez confiance en moi, dit-il, mangez des légumes et de la margarine ». Comme on voit, c'est une thérapeutique assez sommaire. Il est possible qu'elle réussisse en certains cas, – par exemple d'affections d'estomac résultant d'excès de nourriture. Mais les sceptiques préfèreront, tout de même, les soins d'un médecin, voire de deux ou trois dans les cas graves. Et encore, se diront-ils que la Faculté n'est pas infaillible, et qu'il faut s'abandonner philosophiquement au destin et aux docteurs.
        En définitive, la religion du P. Dor en vaut une autre. Elle n'est ni meilleure, ni pire. Elle est ingénue encore, n'ayant pas jusqu'ici suscité de théologiens. Sa morale s'enchevêtre dans les pratiques d'un mysticisme tout neuf. Elle ne serait dangereuse que le jour où, ayant vaincu les vieux cultes, elle aspirerait à dominer la terre au nom de son absolue vérité et des pouvoirs reçus de son créateur transformé en Dieu tout-puissant. Ces temps ne viendront sans doute pas. Le P. Dor ne court aucun danger d'être mis au supplice, et ses disciples ne serviront pas au dîner des bêtes féroces. Or, il est excellent, pour une religion, qu'elle ait des débuts sanglants et difficiles ; ceux-ci exaltent l'imagination des foules et aident à leur conversion. La douceur de nos mœurs sociales actuelles sont néfastes au développement indéfini d'une Eglise.
        Mais où donc le P. Dor trouve-t-il ses sectateurs ? Parmi les simples que le catholicisme ne satisfait plus. Celui-ci est une religion établie depuis des siècles, et par conséquent un peu matérialisée. Il se prête peu aux explosions du mysticisme. Il les craint et les condamne, car il y flaire, avec raison, un danger d'hérésie. Il a quelque chose de figé. Son personnel sacerdotal, qui exagère ses prétentions à dominer la société entière, remplit son office religieux avec la conviction apaisée de fonctionnaires que des excès de zèle, sous ce rapport, signaleraient vite à l'inquiète méfiance de leurs supérieurs.
        Les « doristes » sont des catholiques l'hier, des croyants qui fréquentent même parfois et le temple du « Père » et les églises du culte traditionnel.
        C'est pourquoi nous concevons que les Journaux catholiques mènent contre le « dorisme », une campagne passionnés : la concurrence devient sérieuse, et il s'agit de la combattre au risque de lui faire une publicité profitable.
        Le « Rappel » se distingue dans cette campagne. Ses articles prouvent combien Diderot avait raison lorsqu'il notait la clairvoyance des sectateurs d'une religion au sujet de la religion des autres. Il traite les doristes de gogos. Il raille leurs superstitions. Il parle de la déchéance physique de ces végétariens qui deviennent maigres comme des perches à haricots. Il qualifie de farces ridicules les pseudo-guérisons du thaumaturge de Roux.
        Examinons ces quelques accusations. Pour quoi les « doristes » sont-ils des gogos, plus que les adhérents à telle ou telle autre religion qui n'a pas coutume de prodiguer gratuitement ses services ?
        Pourquoi les doristes n'auraient-ils pas le droit de devenir des ascètes comme les anciens moines du désert, dont le chef saint Antoine est une des gloires de l'Eglise ?
        Et pourquoi les miracles du P. Dor seraient-il plus faux que ceux de Lourdes ou de la Mecque ? Les doristes vous disent, si vous les interrogez, qu'ils ont été témoins de cures merveilleuses. L'un d'eux nous a écrit, l'autre mois, à la suite d'un article de douce ironie publié en ces colonnes, que le P. Dor l'avait guéri d'une phtisie au troisième degré, alors que tous les médecins l'avaient abandonné. Est-ce qu'on fait mieux à la grotte ?
        Le « Rappel » affirmera que seuls les miracles catholiques sont vrais. Les doristes riposteront en réclamant pour les leurs le monopole de cette vérité. Les mahométans traiteront d'imposteurs catholiques et doristes en s'écriant : « Il n'y a que les nôtres qui vaillent ! » A quoi les fakyrs indiens répondront : « Pardon, c'est nous qui sommes les détenteurs exclusifs du surnaturel ! »
        Lesquels croire ? Il y a des sincères et des malins chez les uns et chez les autres. Tous s'appuient sur des témoignages qu'ils estiment indiscutables.
        Nous laissons à chacun le soin de se retrouver dans cette querelle, et nous gardons notre scepticisme vis-à-vis de tous les disputeurs. Nous nous abstenons de choisir et de croire, pour une foule de motifs non dépourvus de valeur à nos yeux.
        Le « Rappel », qui attaque le dorisme avec tant de fougue, n'a-t-il pas songé qu'en lisant certains de ses arguments, plus d'un de ses lecteurs pourrait être tenté de réfléchir et de conclure : « Eh ! mais tout ça ne s'applique pas au dorisme seulement !
        L'organe clérical, dans une chronique de Couillet, rappelle qu'autrefois on « brûlait les sorciers ». Oui, en effet. La sainte Eglise rôtissait en grande pompe de malheureux déments et des vieilles à qui l'âge avait brouillé la cervelle. Voudrait-il, par hasard, appliquer ce sort aux doristes ? ? Ou bien voudrait-il conseiller à la foule de leur infliger des brimades, à défaut de pouvoir les envoyer au bûcher ? ?
        Confrère, votre zèle vous entraîne. Vous oubliez que la Constitution, – cette charretée d'ordures ! – garantit la liberté des cultes et des croyances. Que diriez-vous si des malembouchés s'avisaient de troubler vos processions et vos messes ? Vous réclameriez les gendarmes et, dans ce cas-là, nous vous approuverions !
        Et puis, savez-vous que la violence, à votre point de vue, serait une gaffe ? Les doristes persécutés grandiraient en nombre, et qui sait si leur religion, stimulée par le « martyre », ne ferait pas la conquête de l'univers ? C'est pour avoir attaqué les chrétiens en dehors des bornes d'une concurrence permise que les prêtres du paganisme ont ruiné leur cause.
        Souvenez-vous de ce précédent, confrère ! Et soyez convaincu qu'un seul principe est capable d'arracher l'homme aux superstitions et aux thaumaturges : c'est le rationalisme.

    Gazette de Charleroi, 17 juillet 1914 (source : Belgicapress)


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  • Le Père Dor en correctionnelle (La Région de Charleroi (17-11-1916), belgicapress.be)

    issu de l'article de La Région de Charleroi du 17 novembre 1916 (belgicapress.be)


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  • Un enterrement doriste (Gazette de Charleroi, 8 juillet 1914)(Belgicapress)La religion nouvelle !
    Un enterrement doriste...

        On commence à s'alarmer sérieusement des théories dangereuses de l'Antoinisme et de ses succédanés. Des gens se laissent mourir de faim, des malades reçoivent des prières pour tous soins. Il semble qu'un vent de folie souffle sur toute la région...
        L'Antoinisme était déjà très fort, mais il y a mieux, il y a plus cocasse que lui, c'est la doctrine du « Père Dor »...
        On prie beaucoup selon cette nouvelle religion, mais on réduit tout ce qu'on peut à la plus grande simplicité.
        La mort, pour les Doristes, n'est qu'un détail auquel il ne faut attacher aucune importance...
        C'est ainsi que la femme d'un officier de police de Couillet, converti au « dorisme » était morte, dimanche, personne n'en fut avisé, à part le bureau de l'Etat-civil.
        Le mari continua son service comme à l'ordinaire, et on ne connut la nouvelle de la mort que hier matin en voyant un corbillard arriver devant chez lui.
        Le corbillard « chargea » une caisse rectangulaire servant de cercueil et fila seul, vers le cimetière, sans aucun accompagnement.
        Le mari était resté chez lui. La maison était ouverte, les volets n'étaient pas clos.
        Sa femme était morte, mais le « dorisme » enseigne qu'il ne faut pas pleurer les morts...

    Gazette de Charleroi, 8 juillet 1914 (source : Belgicapress)


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  • Père Dor - voyage aux États-Unis

    carte postale envoyée par Jean Dor à sa soeur (Joséphine Dor) et son frère (Pierre Dor, le neveu de Louis Antoine).
    Merci à Henri Paulissen  (petit-fils de Joséphine Dor et Pierre Paulissen) pour avoir partagé ce document.

        On sait d'un fascicule rédigé par le Frère Céleste LOBET que l'américaine Soeur Guillaume et sa fille Cécile Litienne auraient fait la connaissance du Père par l'intermédiaire de Pierre Dor, en 1903. Le mari de Mme Guillaume, en faisant la traversée du Havre à New-York, parla avec le neveu de Père Antoine.
        À Jemeppe pour se faire guérir par le Père, la fille Cécile raconte : "Nous avons pris une chambre chez Jean Dor qui tenait commerce au coin. Au bout de quelques semaines, Maman allait très bien ; elle marchait partout où elle voulait, aller même monter la grande côte avenue Smeets." (L'avenue Smeets désigne la rue Rousseau qui monte vers le quartier Bois-de-Mont). Les recherches de Henri Paulissen n'ont cependant pas pu confirmer une traversée de Pierre Dor vers les Amériques. Et en 1903, Jean devait être aux États-Unis. Les souvenirs de la famille de soeur Guillaume sont certainement flous : la fille aurait inversée dans son récit les noms des frères Dor.

        Par le site du C.A.H.P.M. (Cercle Archéohistorique des Pays de Meuse) et les renseignements données par le petit-fils de Joséphine Dor, Henri Paulissen, on apprend que ce Jean Joseph Dor, le cadet de Marie Josèphe Antoine (épouse de Pierre Joseph Napoléon Dor et soeur de Louis Antoine), partit pour le Mexique. Embarquant au Havre avec le paquebot "La Savoie" le 2 novembre 1901, il est arrivé à New-York le 9 novembre 1901. Il a envoyé une carte postale à son arrivée à New-York, puis n'a plus donné de ses nouvelles. Il serait parti en Basse Californie du Sud vers Santa Rosalia.
    source : http://kiminvati.com/paysdemeuse/Pages/ZDIV7CPh12e.php

        Affecté sur la ligne de l'Atlantique Nord, "La Savoie" prend son service avec un premier départ du port du Havre le 31 août 1901, il arrive à New York après 6 jours et 11 heures de traversée. Le voyage de retour au Havre s'effectue en 6 jours 13 heures et 2 minutes.


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  • Le Dorisme à son déclin (Le Messager de Bruxelles (28-11-1916) warpress.cegesoma.be)

    Le Dorisme à son déclin

        Nos lecteurs ont suivi avec un intérêt croissant parfaitement compréhensible en ces temps où les diversions aux sombres préoccupations qui nous alarment sont avidement saisies, les débats trop suggestifs, hélas !! d'un procès curieux intenté à Dor, l'homme impénétrable, qui se fait appeler le Messie du XXe siècle, le Christ réincarné, etc.
        Ces débats nous ont révélé la triste mentalité des foules à l'égard d'un adroit farceur, d'un illuminé, qu'il soit sincère ou non. Mais, en réalité, peu de personnes se rendent compte de ce qu'est le Dorisme qui, aux dires des adeptes du Père Dor, est appelé à devenir la religion de demain !
        De Socrate à Spencer, les philosophes de toutes les époques et de toutes les nations se sont ingéniés à élaborer des systèmes de morale dont l'application des principes à la vie humaine doit assurer à l'homme un bonheur parfait, une félicité absolue. En sondant ce qu'il prétendait être son ignorance, le savant Socrate fit cette découverte qui donne la clef des différentes variétés de morale : « Il y a des lois non écrites supérieures aux lois écrites et qu'il faut toujours observer. » Au nombre des lois non écrites figure l'éternelle et immuable loi Morale. Si l'on considère qu'une loi écrite reçoit autant d'interprétations qu'il se présente d'interprétateurs, à plus forte raison une loi non écrite, et qui laisse ainsi le champ libre aux imaginations fantaisistes, est-elle l'objet de divergences de compréhension lorsqu'il s'agit de la traduire en langage clair. Il est généralement admis que toute morale doit être l'expression du Souverain Bien. C'est à partir d'ici que les philosophes s'abandonnent à leur inspiration personnelle. De leurs travaux ont surgi différentes écoles morales, écoles classiques connues sous les appelations : morale formelle, morale du plaisir, morale sentimentale, utilitarisme. eudomonisme, esthéticisme, égoïsme, altruisme, etc. Dans les etc., il faut comprendre non seulement la morale positiviste, la morale évolutionniste, d'autres encore, minutieusement cataloguées, mais aussi quantité de systèmes que l'on a pu étiqueter qu'en faisant dériver leur terminologie du nom même de leur auteur, tels l'Hobbisme, l'Hégélianisme. Ceci suffit à justifier la qualification de Dorisme appliquée à l'ensemble des principes de morale d'après la conception d'un particulier, d'un citoyen du nom de Dor. Le Dorisme est lui-même issu de l'Antoinisme, duquel il se diffère que par des points de détail, le fond des deux doctrines étant le même : recherche du bonheur par l'amélioration spirituelle. Mais ce bonheur idéal n'est pas ce que le vulgaire profane s'imagine. Plaisir, douleur n'ont plus la signification attribuée jusqu'ici à ces vocabules, car c'est dans la douleur qu'il faut chercher le plaisir, tandis que c'est sous le manteau du plaisir que se cache la douleur.
        Les philosophes des siècles passés avaient accoutumé l'humanité à discerner le Bien et le Mal. Nos prophètes contemporains ne connaissent plus le Mal, celui-ci n'étant qu'une nuance d'un Bien Universel. Tous les mots usuels seront de la sorte l'objet d'un renversement. Ainsi, d'après la nouvelle Ecole, vivre c'est mourir ; mourir, c'est renaître à la vie. De telles modifications apportées à la valeur des mots doivent fatalement avoir pour conséquence le bouleversement des concepts.
        Au temps où Antoine « révéla » sa morale, on ne manqua pas de le traiter de fumiste et d'illuminé. Il n'en recruta pas moins un nombre considérable de disciples, et l'Antoinisme pris une ampleur telle qu'à certain moment le gouvernement belge fut sollicité par une requête couvet de 130,000 signatures, d'accorder la reconnaissance officielle de la religion nouvelle. Le Dorisme et né de l'Antoinisme : affaire d'imitation d'abord, de concurrence ensuite.
        Neveu d'Antoine, Dor était un fervent disciple de son oncle, lorsqu'un jour le démon « Evolution », petit-cousin du tentateur « Progrès », s'infiltra en l'âme du néophyte, du disciple fit un Maitre, et le Fils à son tour devint Père. En se posant en rival d'Antoine, le nouveau Père Guérisseur et moraliste, n'entendait pas ajouter une religion aux 900 et plus existant déjà, ni donner naissance à une secte particulière, pas même fonder une société quelconque : il ne manifestait d'autre ambition que d'ériger un temple à la vertu. Mais c'est là simple question de mots ; qu'on le veuille ou non, dès l'instant ou plusieurs personnes se réunissent dans un but commun, ils forment société ou secte. Et de secte à religion, il n'y a que l'épaisseur d'une brique. La brique a multiplié et le monument connu sous le nom d'Ecole Morale (Jeu de Massacre a dit M. Bonnehill) est la plus flagrante contradiction des affirmations doristes.
        – La thérapeutique doriste repose sur l'observance de la Loi Morale ; soyez dans la loi, et vous jouirez d'une excellente santé. Force est donc aux malades désireux de guérir, de s'initier à cette loi et de s'y conformer. Le Souverain Bien consistera en l'amélioration de soi-même, ou mieux, en l'épuration de l'âme, non au cours d'une seule vie, mais à travers un cycle d'existences d'autant plus nombreuses que l'âme sera lente à se désintoxiquer. Il y a donc à admettre avant tout le principe de la réincarnation, basée sur la loi du Progrès, clame le Père Dor.
        La morale doriste adopte comme formule : Etre sans rancune. Pour se trouver dans cet état d'âme, il faut pratiquer la Tolérance. Encore un mot à la valeur élastique, car chacun comprend à sa façon et voit les choses de même. Etre tolérant, par exemple, ce sera battre en brèche toutes les cérémonies du culte catholique !
        Les premières « instructions » doristes ont paru en 1909 en une brochure ayant pour titre « le Devoir ». Dans cet opuscule sont exposés les principes d'une morale bourgeoisement sage et qui ne froisse les opinions philosophiques de personne.
         Il y est question de Dieu, « source de vie », en qui il faut croire, car cette croyance, c'est la consolation, l'espérance de ceux qui souffrent, le suprême refuge des affligés, des abandonnés. C'est du Dorisme de la première heure et rien dans ce « premier livre » ne laisse percer les sentiments révolutionnaires, on si l'on veut une expression atténuée, les projets rénovateurs du Père. Certains malades guérissent, d'autres sont soulagés. Pour un grand nombre, c'est le statu-quo. A ceci, il y a une cause, et cette cause n'est rien autre que l'état de trop grande imperfection de l'âme. La maladie, en ce cas, est une « épreuve » qu'il faute supporter avec résignation, cette épreuve étant une condition « sine qua non » d'amélioration future. La mort, ou « désincarnation » qui s'ensuit doit être considérée comme une grâce accordée à l'âme, une libération si l'on veut, un « salaire » qui lui permettra, pour son « avancement », d'aspirer à une prompte et propice réincarnation. Il fallait faire accepter ce principe de réincarnation par ceux-là même qui appartenaient à une religion considérant comme blasphématoires les théories de la métempsychose. La réincarnation ne se prouve pas scientifiquement, mais s'explique, et cette explication est plus facilement acceptée qu'elle émane d'une source inspirant confiance ! L'argument décisif sera l'interprétation donnée par Dor aux paroles de Jésus-Christ conversant avec Nicodème : « En vérité, en vérité, je vous le dis, personne ne peut voir le royaume de Dieu s'il ne naît à nouveau », paroles d'évangile... apocryphe. Cette citation de source divine, texte authentique ou non, ces paroles du Fils de Dieu convainquirent les... Enfants du Père Dor, et, actuellement, nombreux sont les chrétiens qui ont versé dans le Dorisme, en conservant cette idée qu'ils continuent à vivre en Jésus-Christ, tout en suivant les enseignements doristes. Jésus devient ainsi l'allié, le protecteur de Dor. L'idée germe même dans les esprits que l'on pourrait bien être la réincarnation de l'autre, car Jésus a dit aussi : « Je reviendrai parmi vous pour vous entraîner, par l'exemple de mes vertus, vers des mondes supérieurs à celui-ci. » Dor n'est-il pas Celui qui doit venir ? La question est posée, comme par hasard, lors d'une instruction. Le Père, qui « a surmonté » tout orgueil, toute vanité, sur qui l'envie et l'ambition n'ont pas, n'ont plus de prise (c'est lui qui le déclare du moins) n'a garde de répondre à cette question discrète autant qu'indiscrète. Il indique simplement le moyen d'être fixé sur ce point délicat : « C'est par la pratique des instructions de ce livre précieux, qui s'appelle Charité, que vous connaîtrez la réponse à la demande que nous m'adressez. Ce livre qui s'appelle Charité, est le volume in-8° de 220 pages, paru sous le titre : « Christ parle à nouveau » (dont de nombreuses citations ont été faites au Tribunal tour à tour par les défenseurs du prévenu et de la partie civile), révision et amplification des brochures antérieures. Le conseil est bon, les adeptes en font leur profit, et un certain jour, en réunion publique, l'un d'entre eux apporte la conviction qu'il s'est formée après avoir lu et relu l'ouvrage signalé à l'attention des curieux. Il dit : Vous voulez nous cacher votre essence surnaturelle, c'est-à-dire qui vous êtes, mais vos enfants vous ont reconnu, et vous le crient bien haut : Vous êtes le Christ, vous êtes le Conducteur du Monde, vous êtes le Messie du XXe siècle ». (Page 27, brochure bleue, discours de la Toussaint).
        Lors de l'audition des témoins, le Tribunal a connu aussi pareilles émotions !
        La loi Morale est un précieux atout en mains du malade qui cherche la guérison. Le maître a tout, l'as, un brelan d'as même, se trouve dans le jeu du guérisseur, c'est-à-dire dans le travail personnel du Père, que nous analyserons ci-après :
        Les lacunes de la pharmacopée, l'efficacité inopérante de maints médicaments ont de tout temps inquiété et les malades et les médecins. Molière ne manqua pas de noter le fait et de commenter à sa façon en imaginant les pilules de « matrimonium » que Sganarelle, « médecin malgré lui » administrait avec succès dans certain cas d'affection... cordiale compliquée d'aphonie simulée. Un siècle plus tard. Mesmer, médecin authentique, s'inspirant de Molière et reprenant la « théorie des fluides » émise par Paracelse au début du XVIe siècle, inventa un baquet magique dans lequel se trouvaient concentrés les fluides guérisseurs captés par des procédés occultes, ou tout au moins procédés tenus soigneusement secrets. Depuis ce temps, la théorie des fluides, le magnétisme, l'hypnotisme, la suggestion ont fait du chemin. Pendant que les facultés de Paris et de Nancy s'occupaient de ces questions au point de vue scientifique, l'Amérique les étudiait plus pratiquement du point de vue commercial. C'est l'Amérique qui lança les institutions connues sous les noms de « Christian » et « Mental Scientists », « Magnetic » et « Thelepatic Healers », dont Antoinisme et Dorisme sont des décalques, des adaptations nationales, des contrefaçons belges.
        Toutefois, le Dorisme se défend d'une telle filiation, et le Père nous dit : « Sachez que je suis le guérisseur, et non pas un médecin, ni un thaumaturge, ni un magnétiseur ». Il ajoute : « Suggestion, mot des hommes sceptiques, c'est-à-dire doutant du vrai comme du faux ». Lui, le Père, travaille non avec le « mot », mais avec la « chose », essence même du mot, la chose... « le fluide Amour aux effluves bienfaisantes et régénératrices ». Soyons conciliant, acceptons l'hypothèse du fluide, cause essentielle, mais ne rejetons pas la suggestion, cause officiente sans laquelle le fluide le plus radiant reste en stagnation. Fluide et suggestion, le contenu et le contenant se complètent donc l'un et l'autre, mais chose curieuse, si le fluide ne peut agir sans qu'il y ait suggestion, la suggestion opère parfaitement sans le concours du fluide qu'elle est censée recéler.
        Les suggestions doristes agissent selon le degré de suggestibilité des malades ou patiente. Tel sujet sera déjà vivement frappé à la seule que du monument « Ecole Morale » ; tel autre sera ébranlé jusque dans ses fondements par la gravité de ce lieu ; un troisième se sentira frôlé par le fluide au simple contact de la médaille-numéro de réception qui lui sera remise à l'entrée du temple ; tous éprouveront des picotements à la plante des pieds en franchissant le seuil du cabinet de consultations, la plupart se sentiront comme anesthésiés à l'apparition spectrale du Père ; beaucoup se verront dans l'impossibilité d'articuler une syllabe : c'est le fluide paralysant qui agit. En cet état semi-cataleptique, bien que parfaitement éveillé, le malade oublie son affection, il ne sent plus rien, ses douleurs ont disparu, est guéri instantanément et comme par « enchantement ». Le Père, lui, n'a rien dit encore, le voici qui parle : « Allez, tout ira bien, pensez à moi », ces paroles ponctuées d'un geste bénisseur. C'est là le traitement applicable aux cas bénins : mal de dent, torticolis, « resticlage ». Les affections réellement sérieuses, les maladies graves, nécessitent un traitement de longue haleine, comportant l'emploi de suggestions verbales savamment appropriées. Le Père alors questionne, s'enquiert des antécédents moraux, du régime alimentaire, des habitudes sociales. La petite enquête terminée, il découvre sans plus tarder la cause du malaise : imperfection de l'âme, cause d'ordre moral invariablement doublée d'un autre d'ordre physique.
        De temps en temps, en présence de cas épineux, le Père, prudent, se déclare incompétent et envoie le malade à un médecin : Commencement de la fin du Dorisme. Emoi des adeptes, série de questions s'enchainant dans un ordre logique. Le Père, malin comme pas un, répond : « J'envoie au médecin pour des raisons que je ne puis dire parce qu'il est en cette vie des choses qu'on ne peut divulguer... » En termes moins fluidiques : Ceci ne vous regarde pas. Et le secret professionnel donc !
        Que prend le Dorisme ? « La restauration » de l'âme par la culture exclusive et intensifiée d'une unique faculté, l'amplification à outrance du sens moral, ce qui engendrerait une monstruosité psychique sans nom.
        Figurons-nous un corps humain sans bras ni jambes, et nous obtiendrons le pendant matériel de l'âme « dépouillée de ses imperfections » ; jolie perspective de l'amélioration de notre personnalité.
        Quel est donc le véritable auteur du méfait imputé au Dorisme ? « Cherchons » et nous découvrirons « la cause » dans le Dorisme n'est qu'un « effet », cause à laquelle son caractère d'abstraction évite le désagrément d'une comparution à la barre : l'ignorance des masses, mère de la crédulité de foules.
        « Etudions » ! et quand l'Ignorance aura cédé le pas au Savoir, les Aliborinismes présents et à venir auront vécu.
        Et enfin « observons » ! Observons l'évolution du Dorisme, sa naissance, son développement, son désagrégement, et nous devrons convenir que le système incriminé n'est qu'un infime incident de la vie universelle. Observons et nous n'aurons pas besoin d'être devin ou prophète pour nous apercevoir que l'incident va se clore de lui-même et que le spectacle touche à sa fin. Le denier acte commence : Le Dorisme déménage, on vend le temple que nul ne s'empresse d'acquérir ; le Père cherche dans une retraite « aux environs d'une forêt et d'une vaste campagne » un milieu favorable au rétablissement de sa santé physique qu'il sent « s'affaiblir d'une façon rapide ». Sans préjuger de l'épilogue qui va se dérouler après le délibéré que prononcera vraisemblablement M. le Président du Tribunal Correctionnel de Charleroi et qui clôturera les « opérations multiples » du Père, nous pouvons cependant affirmer sans trop craindre de nous tromper, que d'autres illuminés, succédant à Antoine et à Dor, réapparaîtrons sur la scène, afin d'exploiter comme leurs devanciers la crédulité des foules.
        Un grand penseur n'a-t-il pas dit :  « la bêtise humaine est incommensurable ! Stulto rum numerus est infinitus !

                                                                     R. M.

    Le Messager de Bruxelles, 28 novembre 1916
    Source : warpress.cegesoma.be


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  • Roux-Wilbeauroux (Carte industrielle du bassin houiller de Charleroi par Félix Jottrand)(gallica)
    extrait de la Carte industrielle du bassin houiller de Charleroi par Félix Jottrand

        Le Père Dor s'installe à Roux-Wilbeauroux en août 1909. Père Dor qui s'identifiant avec le Christ, considérait son oncle comme son saint Jean-Baptiste. Ayant laissé pousser barbe et cheveux, et s’étant revêtu d’une robe noire, il va dispenser son enseignement spirituel et recevoir les malades.
        On connaît de lui notamment une photo bénissant un malade comme le Christ guérisseur. Un petit fascicule, Catéchisme de la restauration de l'âme, est de couleur verte, et indique Un seul remède peut guérir l'humanité : l'amour du bien (c'est-à-dire désintéressement). Oh ! Amour du bien fluide béni et consolant : Heureux ceux qui te connaisse. Pour eux, la voie est éclairée, car tout le long de leur route, ils peuvent lire les moyens d'arriver au but. Cet amour résume tous les devoirs de l'homme et le mène sûrement à Dieu, c'est-à-dire à la charité pure.
        Lorsqu'il a fait construire le temple de l'Ecole morale, « le Temple de la vertu. Culte de la miséricorde » en 1912, pouvant accueillir cinq à six cent personnes, les visiteurs (pour la majorités de la classe bourgeoise : des commerçants, des adjoints de police, des chefs de fabrication, etc. dont certains ont été spirites et/ou théosophes, plusieurs ont connu son oncle, le Père Antoine) reçoivent une carte avec un numéro d'ordre. Il donnait 300 à 400 consultations quotidiennement. Pour guérir, il faut avoir foi en lui. On le consulte tous les jours ordinaires, excepté le Samedi, de 7 heures du matin à midi. Tous les Dimanches à 2 h. 30, il y a opération générale suivie d'une instruction morale. Un éclairage particulier de la grande salle de l’Ecole morale le fait baigner de clarté quand il arrive à la chaire. Les offices de la Toussaint ont une grande importance dans le culte doriste.
        Il ne demande pas d'argent mais vend 2 fr. 50 un livre de prières et sur sa doctrine, ainsi qu'un journal hebdomadaire, et des troncs récoltent les dons (les troncs sont remplaçaient ensuite par un plateau parcourant la salle à vue de tout le monde). On vend à Roux un portrait le montrant bénissant un enfant dans les bras de mère agenouillée. On appose sur un paquet de margarine une vignette : „Margarine du Père Dor”.
        On sait par un témoignage à son procès qu'au moins une fois un pèlerinage à sa maison natale, à Mons-Crotteux-lez-Liége, le 15 août 1914 (Dor empocha le prix de plusieurs coupons destinés à payer le voyage). Une adepte porte dans un médaillon le portrait du Père Dor.


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